La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/12/2018 | FRANCE | N°17MA03937

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 20 décembre 2018, 17MA03937


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'entreprise Roussel a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la délibération du 23 juillet 2015 par laquelle le conseil municipal d'Aix-en-Provence a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune et subsidiairement d'annuler cette décision en ce qu'elle a classé en secteur Ap, pour une superficie de 2,5 ha, les deux secteurs 1AU2-UD situés sur les planches A19 et A20 du projet de plan local d'urbanisme et en ce qu'elle a supprimé l'orientation d'aménagement et de programmation n° 17

Puyricard Touloubre figurant dans le cahier des orientations d'aménageme...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'entreprise Roussel a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la délibération du 23 juillet 2015 par laquelle le conseil municipal d'Aix-en-Provence a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune et subsidiairement d'annuler cette décision en ce qu'elle a classé en secteur Ap, pour une superficie de 2,5 ha, les deux secteurs 1AU2-UD situés sur les planches A19 et A20 du projet de plan local d'urbanisme et en ce qu'elle a supprimé l'orientation d'aménagement et de programmation n° 17 Puyricard Touloubre figurant dans le cahier des orientations d'aménagement et de programmation de secteurs ainsi que les prescriptions graphiques sur les planches A19 et A20 que sont le périmètre de l'orientation d'aménagement et de programmation n° 17, la prescription graphique de marge de recul de 10 à 42 mètres et les linéaires de gabarits de 10 mètres situés le long de l'avenue de la Touloubre et au sud de la rivière.

Par un jugement 1507548 du 20 juillet 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 19 septembre 2017, et des mémoires complémentaires enregistrés les 26 avril et 16 juillet 2018, l'entreprise Roussel, représentée par la SCP d'avocats Troegeler Gougot Bredeau-Troegeler, demande à la Cour :

- d'annuler le jugement du 20 juillet 2017 du tribunal administratif de Marseille ;

- de faire droit à sa demande de première instance ;

- de mettre à la charge de la commune d'Aix-en-Provence une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle justifie d'un intérêt à agir en sa qualité de titulaire d'une promesse de vente sous condition suspensive pour des parcelles situées sur le territoire de la commune d'Aix-en-Provence ;

- le tribunal a insuffisamment motivé sa réponse au moyen tiré de ce que les conseillers municipaux n'avaient pas été destinataires d'une note explicative de synthèse et qu'ils n'avaient pas disposé d'un délai de réflexion suffisant entre l'envoi de la convocation et la séance ;

- le tribunal a insuffisamment motivé sa réponse au moyen tiré de ce qu'il existait des anomalies importantes des signatures figurant au bas de la délibération attaquée ;

- les conseillers municipaux n'ont pas été destinataires d'une note explicative de synthèse et n'ont pas disposé d'un délai de réflexion suffisant entre l'envoi de la convocation et la séance ;

- il existe des anomalies particulièrement importantes des signatures figurant au bas de la délibération attaquée ;

- le classement en zone Ap du secteur concerné par l'orientation d'aménagement et de programmation (OAP) n° 17 est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- le classement en zone Ap du secteur concerné par l'OAP n° 17 n'est pas conforme au parti d'urbanisme retenu par la commune d'Aix-en-Provence, car le projet d'aménagement et de développement durables définit trois axes de développement majeurs concernant le secteur de Puyricard, dont notamment intensifier les espaces urbains afin d'offrir des possibilités d'urbanisation complémentaires au sein du village et en frange.

Par des mémoires enregistrés les 1er mars et 31 mai 2018, la commune d'Aix-en-Provence, représentée par le cabinet d'avocats Fidal, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la requérante de la somme de 3500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- la demande de première instance n'est pas recevable, car l'entreprise Roussel ne disposait que d'une promesse de vente, qui de surcroît est devenue caduque ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Portail,

- les conclusions de Mme Giocanti, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant la commune d'Aix-en-Provence et la métropole Aix-Marseille-Provence.

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement du 20 juillet 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de l'entreprise Roussel tendant à l'annulation de la délibération du 23 juillet 2015 par laquelle le conseil municipal d'Aix-en-Provence a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune et subsidiairement à l'annulation de cette délibération en ce qu'elle a classé en secteur Ap, pour une superficie de 2,5 ha, les deux secteurs 1AU2-UD situés sur les planches A19 et A20 du projet de plan local d'urbanisme et en ce qu'elle a supprimé l'orientation d'aménagement et de programmation n° 17 Puyricard Touloubre figurant dans le cahier des orientations d'aménagement et de programmation de secteurs ainsi que les prescriptions graphiques sur les planches A19 et A20 que sont le périmètre de l'orientation d'aménagement et de programmation n° 17, la prescription graphique de marge de recul de 10 à 42 mètres et les linéaires de gabarits de 10 mètres situés le long de l'avenue de la Touloubre et au sud de la rivière. La requérante relève appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement :

2. D'une part, si le tribunal ne s'est pas prononcé expressément sur l'allégation selon laquelle les conseillers municipaux n'auraient pas été destinataires d'une note de synthèse, il a rappelé que les conseillers municipaux doivent disposer d'une information suffisante pour l'accomplissement de leur mandat et a vérifié que tel avait été le cas. Il a ainsi insuffisamment motivé sa réponse au moyen tiré de ce que les conseillers municipaux n'avaient pas été destinataires d'une note explicative de synthèse et qu'ils n'avaient pas disposé d'un délai de réflexion suffisant entre l'envoi de la convocation et la séance du conseil municipal.

3. D'autre part, en rappelant que les dispositions de l'article L. 2121-23 du code général des collectivités territoriales, aux termes duquel : " Les délibérations sont inscrites par ordre de date. / Elles sont signées par tous les membres présents à la séance, ou mention est faite de la cause qui les a empêchés de signer. ", ne sont pas prescrites à peine de nullité de la délibération adoptée, le tribunal a suffisamment motivé sa réponse au moyen tiré de ce qu'il existait des anomalies importantes dans les signatures figurant au bas de la délibération attaquée.

Sur la légalité de la délibération du 23 juillet 2015 :

En ce qui concerne la légalité externe :

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales : " Dans les communes de 3.500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal. (...) Le délai de convocation est fixé à cinq jours francs. (...) ".

5. Il résulte de cet article L. 2121-12 que dans les communes de 3.500 habitants et plus, la convocation aux réunions du conseil municipal doit être accompagnée d'une note explicative de synthèse portant sur chacun des points de l'ordre du jour. Le défaut d'envoi de cette note ou son insuffisance entache d'irrégularité les délibérations prises, à moins que le maire n'ait fait parvenir aux membres du conseil municipal, en même temps que la convocation, les documents leur permettant de disposer d'une information adéquate pour exercer utilement leur mandat. Cette obligation, qui doit être adaptée à la nature et à l'importance des affaires, doit permettre aux intéressés d'appréhender le contexte ainsi que de comprendre les motifs de fait et de droit des mesures envisagées et de mesurer les implications de leurs décisions. Elle n'impose pas de joindre à la convocation adressée aux intéressés, à qui il est au demeurant loisible de solliciter des précisions ou explications conformément à l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales, une justification détaillée du bien-fondé des propositions qui leur sont soumises.

6. La commune d'Aix-en-Provence produit la convocation à la séance du 23 juillet 2015, adressée aux conseillers municipaux le 17 juillet 2015, qui mentionne qu'elle est accompagnée d'une clé USB comportant un rapport, qui décrit la chronologie de la procédure d'adoption du plan local d'urbanisme, et l'ensemble des pièces constitutives du plan local d'urbanisme destiné à être approuvé. Les conseillers municipaux ont ainsi disposé des documents leur permettant de disposer d'une information adéquate, dans un délai suffisant, pour exercer utilement leur mandat.

7. En deuxième lieu, ainsi qu'il a été dit au point 3, les dispositions de l'article L. 221-23 du code général des collectivités territoriales relatives à la signature des délibérations ne sont pas prescrites à peine de nullité.

En ce qui concerne la légalité interne :

8. En premier lieu, en vertu de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors en vigueur, " Le plan local d'urbanisme (...) comprend un rapport de présentation, un projet d'aménagement et de développement durables, des orientations d'aménagement et de programmation, un règlement et des annexes ". L'article L. 123-1-3 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur, dispose que : " Le projet d'aménagement et de développement durables définit les orientations générales des politiques d'aménagement, d'équipement, d'urbanisme, de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers, et de préservation ou de remise en bon état des continuités écologiques. / Le projet d'aménagement et de développement durables arrête les orientations générales concernant l'habitat, les transports et les déplacements, le développement des communications numériques, l'équipement commercial, le développement économique et les loisirs, retenues pour l'ensemble de l'établissement public de coopération intercommunale ou de la commune. / Il fixe des objectifs de modération de la consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain. ". L'article L. 123-1-5 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors en vigueur, dispose que : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés à l'article L. 121-1, qui peuvent notamment comporter l'interdiction de construire, délimitent les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger et définissent, en fonction des circonstances locales, les règles concernant l'implantation des constructions. (...) ".

9. Pour apprécier la cohérence ainsi exigée au sein du plan local d'urbanisme entre le règlement et le projet d'aménagement et de développement durables, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire couvert par le document d'urbanisme, si le règlement ne contrarie pas les orientations générales et objectifs que les auteurs du document ont définis dans le projet d'aménagement et de développement durables, compte tenu de leur degré de précision. Le plan local d'urbanisme approuvé comporte deux orientations d'aménagement et de programmation, Puyricard Palombe et Puyricard Rostolane, qui concourent à l'extension urbaine en linéarité du bourg de Puyricard au Nord ouest et à l'est. Le classement en zone Ap, où sont interdites les constructions nouvelles à destination d'habitation non nécessaires à une exploitation agricole, des parcelles en litige, situées dans un secteur naturel du quartier de Puyricard, à proximité de la Touloubre, n'est pas incohérent, à l'échelle du territoire couvert par le plan local d'urbanisme d'Aix-en-Provence avec les orientations générales et objectifs que ses auteurs ont défini dans ce document.

10. En deuxième lieu, il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Ils peuvent être amenés, à cet effet, à modifier le zonage ou les activités autorisées dans une zone déterminée. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

11. Aux termes de l'article R. 123-7 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction en vigueur à la date de la délibération en litige, aujourd'hui codifié à l'article R. 151-22 du même code : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles(...) ".

12. Ainsi que l'a souligné le préfet des Bouches-du-Rhône dans l'avis émis dans le cadre de l'élaboration du plan local d'urbanisme, les parcelles en cause, d'une superficie de plus de deux hectares, sont situées dans un espace protégé aux multiples enjeux, notamment agricoles. Pour les mêmes raisons, la commission d'enquête a recommandé que l'orientation d'aménagement et de programmation Puyricard Touloubre se limite à la mise en valeur des berges de la Touloubre, sans urbanisation supplémentaire. Ces parcelles se situent en retrait du secteur urbanisé de Puyricard et à l'état naturel. En les classant en zone Ap, et, en tout état de cause, en renonçant au projet d'orientation d'aménagement et de programmation n° 17, les auteurs du plan local d'urbanisme n'ont pas commis d'erreur manifeste d'appréciation au regard des caractéristiques de ce secteur et des orientations du projet d'aménagement et de développement durables.

13. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la commune d'Aix-en-Provence à la demande de première instance, que l'entreprise Roussel n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Aix-en-Provence, qui n'est pas la partie perdante au litige, la somme que demande l'entreprise Roussel sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'entreprise Roussel la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la métropole Aix-Marseille-Provence et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de l'entreprise Roussel est rejetée.

Article 2 : L'entreprise Roussel versera la somme de 1 500 euros à la métropole Aix-Marseille-Provence en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'entreprise Roussel, à la commune d'Aix-en-Provence, et à la métropole Aix-Marseille-Provence.

Délibéré après l'audience du 13 décembre 2018, où siégeaient :

- M. Poujade président,

- M. Portail, président assesseur,

- M. Silvy, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 décembre 2018.

6

N° 17MA3937

nb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA03937
Date de la décision : 20/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01-02-02-005 Urbanisme et aménagement du territoire. Plans d'aménagement et d'urbanisme. Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d'urbanisme (PLU). Application des règles fixées par les POS ou les PLU. Règles de fond. Zonage.


Composition du Tribunal
Président : M. POUJADE
Rapporteur ?: M. Philippe PORTAIL
Rapporteur public ?: Mme GIOCANTI
Avocat(s) : TROEGELER GOUGOT BREDEAU TROEGELER MONCHAUZOU

Origine de la décision
Date de l'import : 01/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-12-20;17ma03937 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award