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12/04/2019 | FRANCE | N°18MA01098

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 12 avril 2019, 18MA01098


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société immobilière groupe Casino a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône en date du 3 février 2015 portant approbation du plan de prévention des risques naturels prévisibles d'inondation sur la commune d'Arles.

Par un jugement n° 1503366 du 30 décembre 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 9 mars 2018, la so

ciété immobilière groupe Casino, représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce ju...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société immobilière groupe Casino a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône en date du 3 février 2015 portant approbation du plan de prévention des risques naturels prévisibles d'inondation sur la commune d'Arles.

Par un jugement n° 1503366 du 30 décembre 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 9 mars 2018, la société immobilière groupe Casino, représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 30 décembre 2017 ;

2°) d'annuler à titre principal l'arrêté du 3 février 2015 du préfet des Bouches-du- Rhône ;

3°) d'annuler à titre subsidiaire cet arrêté en tant seulement qu'il classe en zone rouge le secteur du Fourchon et qu'il prescrit aux propriétaires de ce secteur la réalisation de mesures de prévention et de protection ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté approuvant le plan de prévention est illégal faute de trouver un fondement dans l'arrêté le prescrivant qui était devenu caduc ;

- subsidiairement le décret du 28 juin 2011 qui fixe un délai de trois ans pour l'approbation du plan à compter de sa prescription méconnaît le principe d'égalité en tant qu'il n'étend pas ses dispositions aux plans prescrits avant son entrée en vigueur, circonstance justifiant qu'il soit fait en l'espèce application de cette règle ;

- celle-ci a été méconnu, le plan en litige ayant été approuvé plus de quatorze ans après sa prescription ;

- ce plan est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en tant qu'il classe la zone d'activité du Fourchon en zone rouge R2.

- les mesures de prévention et de protection exigées des propriétaires dans cette zone sont illégales par voie de conséquence de l'illégalité de son classement en zone rouge.

- le commissaire enquêteur a émis à la suite de l'enquête publique des réserves sur l'opportunité de ces mesures ;

- les mesures de protection imposées par le plan n'ont pas le caractère d'aménagements limités et ont un coût disproportionné.

Par ordonnance du 7 janvier 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 25 janvier 2019.

Un mémoire non communiqué présenté par le ministre de la transition écologique et solidaire a été enregistré le 14 mars 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le décret n° 95-1089 du 5 octobre 1995 relatif aux plans de prévention des risques naturels prévisibles ;

- le décret n° 2007-1467 du 12 octobre 2007 relatif au livre V de la partie réglementaire du code de l'environnement et modifiant certaines autres dispositions de ce code ;

- le décret n° 2011-765 du 28 juin 2011 relatif à la procédure d'élaboration, de révision et de modification des plans de prévention des risques naturels prévisibles ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guidal,

- et les conclusions de M. Chanon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 21 juin 2000, le préfet des Bouches-du-Rhône a prescrit l'élaboration d'un plan de prévention des risques d'inondation de la commune d'Arles (Bouches-du-Rhône). Par un arrêté du 3 février 2015, il a approuvé ce plan. La société immobilière groupe Casino relève appel du jugement du 30 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 février 2015.

Sur la procédure suivie devant la Cour :

2. Il ressort des pièces de la procédure que le ministre de la transition écologique et solidaire a transmis un mémoire en défense enregistré au greffe de la Cour le 14 mars 2019 après la mise à sa disposition de l'avis d'audience le 7 mars 2019 par le moyen de l'application Télérecours et après la clôture de l'instruction, fixée par une ordonnance du président de la formation de jugement au 25 janvier 2019. Ce mémoire ne contient l'exposé d'aucune circonstance de fait ni d'aucun élément de droit dont le ministre n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et qui serait susceptible d'exercer une influence sur le jugement de l'affaire. Par suite, ce mémoire doit être écarté des débats.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la légalité externe de l'arrêté en litige :

3. D'une part, aux termes de l'article 1er du décret du 5 octobre 1995 susvisé applicable à la date à laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône a prescrit l'élaboration du plan en litige, et dont les dispositions ont été ensuite codifiées par le décret susvisé du 12 octobre 2007 à l'article R 562-1 du code de l'environnement : " L'établissement des plans de prévention des risques naturels prévisibles (...) est prescrit par arrêté du préfet ". Selon l'article 2 du même décret dont les dispositions ont été codifiées à l'article R 562-2 du même code : " L'arrêté prescrivant l'établissement d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles détermine le périmètre mis à l'étude et la nature des risques pris en compte ; il désigne le service déconcentré de l'Etat qui sera chargé d'instruire le projet. L'arrêté est notifié aux maires des communes dont le territoire est inclus dans le périmètre ; il est publié au Recueil des actes administratifs de l'Etat dans le département ".

4. D'autre part, le 2° du I de l'article 1er du décret du 28 juin 2011 susvisé, lequel a été publié au Journal officiel de la République française du 30 juin 2011, a complété l'article R. 562-2 du code de l'environnement par un dernier alinéa ainsi rédigé : " (...) Le plan de prévention des risques naturels prévisibles est approuvé dans les trois ans qui suivent l'intervention de l'arrêté prescrivant son élaboration. Ce délai est prorogeable une fois, dans la limite de dix-huit mois, par arrêté motivé du préfet si les circonstances l'exigent, notamment pour prendre en compte la complexité du plan ou l'ampleur et la durée des consultations ". L'article 2 du même décret précise toutefois que ces dispositions ne sont applicables qu'" aux plans de prévention des risques naturels prévisibles dont l'établissement est prescrit par un arrêté pris postérieurement au dernier jour du premier mois suivant la publication du présent décret ", soit postérieurement au 31 juillet 2011.

5. Il résulte, d'une part, de ces dernières dispositions qu'à la date 21 juin 2000 à laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône a prescrit l'élaboration du plan en litige le dernier alinéa de l'article R. 562-2 du code de l'environnement, qui prévoit un délai de trois ans à compter de sa prescription pour approuver un plan de prévention des risques naturels prévisibles, n'était pas applicable. Seules étaient alors en vigueur les dispositions précitées du décret du 5 octobre 1995 qui ne prévoyaient aucun délai pour l'approbation d'un tel plan. D'autre part, la seule circonstance qu'un délai notable de plus de quatorze ans s'est écoulé entre l'arrêté prescrivant le plan et son approbation n'a pas eu pour effet, en l'absence de disposition légale ou règlementaire le prévoyant, de frapper de caducité l'arrêté du 21 juin 2000 du préfet des Bouches-du-Rhône. Ce délai est, dès lors, sans incidence sur la régularité de la procédure d'élaboration du plan de prévention des risques d'inondation de la commune d'Arles et par suite, sur la légalité de l'arrêté préfectoral en litige du 3 février 2015.

6. La requérante soutient en outre que les dispositions précitées de l'article 2 du décret du 28 juin 2011 méconnaissent le principe d'égalité en tant qu'elles excluent les plans de prévention en cours d'élaboration à la date de sa publication du respect de la même exigence de délai que ceux prescrits après le 31 juillet 2011. Toutefois, la différence de traitement qui résulte de la succession de deux régimes juridiques dans le temps n'est pas, en elle-même, contraire au principe d'égalité. Ainsi, la circonstance que, du fait de l'entrée en vigueur du décret du 28 juin 2011, l'élaboration des plans prescrits après le 31 juillet 2011 soit enfermée dans un délai de trois ans prorogeable dans la limite de dix-huit mois, à la différence de ceux prescrits avant cette date, n'a pas pour effet d'entacher d'illégalité ce décret. En tout état de cause, le plan en litige a été approuvé le 13 août 2015, soit avant l'expiration du délai maximal de trois ans augmenté de dix-huit mois courant à compter du 31 juillet 2011, tel que prévu par le décret du 28 juin 2011 pour les plans prescrits après cette date. Par suite, le moyen tiré de l'illégalité, par la voie de l'exception, du décret du 28 juin 2011 au motif de la méconnaissance du principe d'égalité, doit être écarté.

En ce qui concerne la légalité interne :

7. Aux termes de l'article L. 562-1 du code de l'environnement : " I. L'Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les inondations, les mouvements de terrain, les avalanches, les incendies de forêt, les séismes, les éruptions volcaniques, les tempêtes ou les cyclones. / II. - Ces plans ont pour objet, en tant que de besoin : 1° De délimiter les zones exposées aux risques, en tenant compte de la nature et de l'intensité du risque encouru, d'y interdire tout type de construction, d'ouvrage, d'aménagement ou d'exploitation agricole, forestière, artisanale, commerciale ou industrielle, notamment afin de ne pas aggraver le risque pour les vies humaines ou, dans le cas où des constructions, ouvrages, aménagements ou exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles, pourraient y être autorisés, prescrire les conditions dans lesquelles ils doivent être réalisés, utilisés ou exploités ; / 2° De délimiter les zones qui ne sont pas directement exposées aux risques mais où des constructions, des ouvrages, des aménagements ou des exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles pourraient aggraver des risques ou en provoquer de nouveaux et y prévoir des mesures d'interdiction ou des prescriptions telles que prévues au 1° ; / 3° De définir les mesures de prévention, de protection et de sauvegarde qui doivent être prises, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, par les collectivités publiques dans le cadre de leurs compétences, ainsi que celles qui peuvent incomber aux particuliers ; / 4° De définir, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, les mesures relatives à l'aménagement, l'utilisation ou l'exploitation des constructions, des ouvrages, des espaces mis en culture ou plantés existants à la date de l'approbation du plan qui doivent être prises par les propriétaires, exploitants ou utilisateurs... ".

S'agissant du classement en " zone rouge " R2 des terrains et constructions de la société immobilière groupe Casino :

8. Il ressort des pièces du dossier, que le plan de prévention contesté a entendu préserver le secteur de Fourchon en raison des risques d'inondations auxquels il est exposé. Le rapport de présentation de ce plan relève ainsi qu'il s'agit d'une zone d'activités particulièrement vulnérable aux inondations en zone d'aléa fort, le secteur constituant un couloir d'évacuation pour les eaux débordées venant du nord (en rive gauche du Rhône) vers le sud. Il résulte des études auxquelles se réfère ce rapport qu'il est menacé par trois scénarios de crues, le débordement du casier des marais, celui du Vigueirat et celui du canal de la vallée des Baux. Le rapport insiste plus particulièrement sur l'importance potentielle des hauteurs d'eau dans ce secteur, mentionnant que cette zone d'activités présente un danger particulier, prioritaire dans la hiérarchie des zones de danger pour les personnes et nécessitant une attention particulière dans les politiques de protection. A cette fin, les terrains situés dans ce secteur sont classés en " zone rouge " R2 du PPRI, définie par ce document comme " zone peu ou pas urbanisée et autres zones urbanisées soumises à un aléa fort (H 1 mètre) ". Selon le règlement du plan, en zone rouge R2, les constructions nouvelles sont interdites ainsi que les sous-sols, les extensions des constructions existantes à usage d'activité sont limitées, tandis qu'est prohibée toute augmentation du nombre de personnes exposées.

9. Le centre commercial propriété de la société immobilière groupe Casino est situé dans la zone d'activité de Fourchon, à la périphérie sud-est du centre-ville d'Arles. Si la société soutient que ce secteur n'a pas été touché lors de la crue du Rhône de 2003, il ressort de la carte des aléas que l'emplacement où est localisé le centre commercial se trouve sous une ligne d'eau située à la cote NGF moyenne de 6,15 mètres, correspondant à une hauteur d'eau d'environ 3,45 mètres du sol définie à partir de la crue de référence de 1856, plus forte crue connue, qui a été modélisée dans les conditions actuelles d'écoulement. La seule circonstance que les installations de la société n'ont pas été submergées lors de la crue de 2003, qui était d'un débit inférieur à celui la crue de référence de 1856, n'est pas de nature à établir que les travaux de modélisation qui ont été réalisés dans le cadre de l'élaboration du plan reposeraient sur une méthodologie inadaptée. Est à cet égard sans incidence l'appréciation portée par le juge des référés de la Cour dans une ordonnance du 2 novembre en 2011 rendue dans un litige distinct relatif à une autorisation de construire, alors, d'une part, que les études hydrauliques qui ont servi à l'élaboration du plan n'étaient pas toutes encore achevées et, que d'autre part, cette ordonnance est dépourvue de l'autorité de chose jugée en raison de son caractère provisoire. La circonstance que le conseil général de l'environnement et du développement durable a relevé dans un rapport de mars 2013 que la cartographie de l'aléa de référence utilisé en 2009 était dépassé au regard du nouveau modèle dit " 2 D " utilisé pour les études de danger ne suffit pas à remettre en cause les conclusions des études ayant servi à l'élaboration du plan, une marge d'incertitude s'attachant nécessairement aux prévisions quant aux inondations qui résulteraient d'un événement de même ampleur, eu égard en particulier aux changements de circonstances intervenus depuis1856. Ainsi aucun des éléments invoqués par la société immobilière groupe Casino ne permet d'exclure, en cas de nouvelle crue centennale, que son terrain ne serait pas exposé à un risque d'inondation.

10. Il résulte des dispositions du code de l'environnement citées au point 7 ci-dessus que le classement de terrains par un plan de prévention des risques d'inondation en application du 1° du II de l'article L. 561-2 du code a pour objet de déterminer, en fonction de la nature et de l'intensité du risque auquel ces terrains sont exposés, les interdictions et prescriptions nécessaires à titre préventif, notamment pour ne pas aggraver le risque pour les vies humaines. Lorsque les terrains sont situés derrière un ouvrage de protection, il appartient à l'autorité compétente de prendre en compte non seulement la protection qu'un tel ouvrage est susceptible d'apporter, eu égard notamment à ses caractéristiques et aux garanties données quant à son entretien, mais aussi le risque spécifique que la présence même de l'ouvrage est susceptible de créer, en cas de sinistre d'une ampleur supérieure à celle pour laquelle il a été dimensionné ou en cas de rupture, dans la mesure où la survenance de tels accidents n'est pas dénuée de toute probabilité.

11. Si la société requérante se prévaut de la création d'une digue de 2ème rang au nord d'Arles dont les travaux ont été réalisés au cours des années 2010 et 2011 ainsi que des mesures compensatoires associées à ces travaux, notamment la création d'un siphon de transfert des eaux de ressuyage de la plaine de Trébon sous le canal de Vigueirat et la création d'un ouvrage de régulation du Vigueirat pour en limiter le débit, le risque de rupture ou de surverse n'est pas dénué de toute probabilité en cas de sinistre d'une ampleur supérieure à celle pour laquelle ces ouvrages ont été dimensionnés et notamment en cas d'épisode d'intensité exceptionnelle, ainsi que le relève le rapport de présentation du plan. D'ailleurs, ce même rapport relève que toutes les crues importantes du Rhône en aval de Beaucaire se sont accompagnées de ruptures de digues imprévues et aléatoires. C'est également la défaillance des ouvrages de protection qui est à l'origine de l'inondation d'une grande partie du territoire de la commune en 2003. Il s'ensuit que la seule présence de cette digue et de ses ouvrages annexes n'est pas de nature à écarter les risques d'inondation des terrains, notamment ceux de la requérante situés derrière cet ouvrage de protection.

12. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que le classement en zone rouge R2 du terrain appartenant à la société immobilière groupe Casino serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.

S'agissant des mesures prescrites par le plan :

13. Aux termes du V de l'article L. 562-1 du code de l'environnement : " Les travaux de prévention imposés en application du 4° du II à des biens construits ou aménagés conformément aux dispositions du code de l'urbanisme avant l'approbation du plan et mis à la charge des propriétaires, exploitants ou utilisateurs ne peuvent porter que sur des aménagements limités ". Le VII du même article précise que " des décrets en Conseil d'Etat définissent en tant que de besoin (...) les règles générales d'interdiction, de limitation et d'encadrement des constructions, de prescription de travaux de réduction de la vulnérabilité (...) dans les zones exposées aux risques définies par les plans de prévention des risques naturels prévisibles ". L'article R. 562-5 du même code, qui a été pris à cette fin, dispose que : " I.- En application du 4° du II de l'article L. 562-1, pour les constructions, (...) existant à sa date d'approbation, le plan peut définir des mesures de prévention, de protection et de sauvegarde. (...) / II.-Les mesures prévues au I peuvent être rendues obligatoires dans un délai de cinq ans pouvant être réduit en cas d'urgence. / II.-En outre, les travaux de prévention imposés à des biens construits ou aménagés conformément aux dispositions du code de l'urbanisme avant l'approbation du plan et mis à la charge des propriétaires, exploitants ou utilisateurs ne peuvent porter que sur des aménagements limités dont le coût est inférieur à 10 % de la valeur vénale ou estimée du bien à la date d'approbation du plan ".

14. En application de ces dispositions, le paragraphe 4.1 du règlement du PPRI en litige dresse, par ordre de priorité décroissante, une liste de mesures rendues obligatoires dans les zones dites de danger, et notamment dans toutes les constructions existantes en zone R2, telles que l'aménagement d'une zone refuge de structure et dimension suffisante, l'installation d'un système d'obturation temporaire ou permanent des ouvertures dont tout ou partie se situe en dessous de la cote de référence en vue d'une utilisation en cas d'inondation, l'obligation de placer les gros équipements électriques et matériels sensibles à l'eau ainsi que les citernes et aires de stockage des produits polluants au minimum à 0,20 mètre au-dessus de la côte de référence si la configuration des bâtiments le rend possible, la création des orifices de décharge aux pieds des murs existants lorsqu'ils font obstacle aux écoulements.

15. L'obligation que le paragraphe 4.1 du règlement fait aux propriétaires des biens situés en zone inondable R2 de réaliser ces différents travaux de prévention trouve sa base légale dans les dispositions du 4° du II de l'article L. 562-1 et de l'article R. 562-5 du code de l'environnement. Les mesures mentionnées dans le règlement du plan de prévention sont au nombre de celles qui pouvaient être rendues obligatoires en vue de réduire la vulnérabilité des constructions. Par ailleurs, comme il a été dit au point 11, le classement en zone rouge R2 du terrain appartenant à la société immobilière groupe Casino n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que les différentes mesures prescrites par le règlement seraient dépourvues de fondement légal.

16. La circonstance que le commissaire-enquêteur ait émis dans son rapport une réserve sur le caractère obligatoire des travaux de prévention imposés aux propriétaires des biens construits en zone R2 n'entache pas la légalité de l'acte en litige dès lors que celui-ci résulte d'un arrêté préfectoral qui, en vertu de l'article R. 562-9 du code de l'environnement, peut être pris nonobstant l'avis défavorable du commissaire enquêteur.

17. La société immobilière groupe Casino, qui est seule en mesure de justifier de la valeur vénale de son bien, n'apporte aucun élément de nature à établir que le coût des travaux de prévention mis à sa charge excéderait le plafond de 10 % de cette valeur vénale tel que fixé à l'article R. 562-5 du code de l'environnement. Elle n'est, par suite, pas fondée à soutenir que les dispositions précitées du V de l'article L. 562-1 du code de l'environnement auraient été méconnues au motif que les travaux rendus obligatoires par le plan en litige ne constituaient pas des aménagements limités au sens et pour l'application de ces dispositions et auraient un coût disproportionné.

18. Il résulte de tout ce qui précède que la société immobilière groupe Casino n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 février 2015 du préfet des Bouches-du-Rhône.

Sur les frais liés au litige :

19. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la société immobilière groupe Casino demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la société immobilière groupe Casino est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société immobilière groupe Casino et au ministre de la transition écologique et solidaire.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône et à la commune d'Arles.

Délibéré après l'audience du 29 mars 2019, où siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- M. Guidal, président assesseur,

- Mme A..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 12 avril 2019.

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N° 18MA01098

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA01098
Date de la décision : 12/04/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

44-05-08 Nature et environnement. Divers régimes protecteurs de l`environnement. Prévention des crues, des risques majeurs et des risques sismiques.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: M. Georges GUIDAL
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : CABINET VEIL JOURDE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-04-12;18ma01098 ?
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