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17/09/2019 | FRANCE | N°18MA04784

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 17 septembre 2019, 18MA04784


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... D... a demandé au tribunal administratif de Montpellier son admission provisoire à l'aide juridictionnelle, la mise à disposition de son dossier par la préfecture, l'annulation des décisions du préfet des Pyrénées-Orientales du 15 février 2018 portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination, l'annulation de la décision du préfet des Pyrénées-Orientales du 15 février 2018 portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans,

et à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... D... a demandé au tribunal administratif de Montpellier son admission provisoire à l'aide juridictionnelle, la mise à disposition de son dossier par la préfecture, l'annulation des décisions du préfet des Pyrénées-Orientales du 15 février 2018 portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination, l'annulation de la décision du préfet des Pyrénées-Orientales du 15 février 2018 portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans, et à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser à son conseil au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1800703 du 7 juin 2018, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 9 novembre 2018, M. D..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 7 juin 2018 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Pyrénées-Orientales du 15 février 2018 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Pyrénées-Orientales de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

- le jugement est entaché d'erreurs d'appréciation ;

- la décision est entachée de défaut d'examen réel et complet de sa situation personnelle ;

- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences de l'éloignement sur sa situation personnelle et familiale ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale en conséquence de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- la suppression du délai de départ volontaire n'est pas justifié.

Sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

- la décision est illégale en conséquence de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 avril 2019, le préfet des Pyrénées-Orientales conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 septembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., ressortissant algérien a été interpellé par les services des douanes le 14 février 2018 et placé en garde à vue pour des faits d'importation en contrebande de marchandises illicites. Par un arrêté du 15 février 2018, le préfet des Pyrénées-Orientales a pris à l'encontre de M. D..., des décisions portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination et prononçant une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans. M. D... relève appel du jugement du 7 juin 2018 du tribunal administratif de Montpellier qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 février 2018 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales l'a obligé à quitter le territoire français, a fixé le pays de destination et portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Le moyen tiré d'erreurs d'appréciation a trait au bien-fondé du jugement. Il est donc sans influence sur la régularité du jugement.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation des décisions portant obligation de départ volontaire et fixant le pays de destination :

3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier et, en particulier, des mentions de la décision attaquée, que le préfet des Pyrénées-Orientales a procédé à l'examen particulier de la situation personnelle de M. D... avant de prendre la décision contestée.

4. En deuxième lieu, suivant les dispositions du 7° de l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet peut prononcer une décision d'éloignement à l'encontre d'un étranger, résidant en France depuis plus de trois mois dont la présence constitue une menace pour l'ordre public. Par ailleurs, aux termes de l'article L. 511-1 I du même code, une obligation de quitter le territoire français peut être prononcée : " 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ". La décision en litige, mentionne que l'intéressé " n'est pas en mesure d'établir son entrée régulière sur le territoire français ". Ainsi l'autorité compétente était, sur ce seul motif, fondée à rejeter la demande de M. D..., et cela alors même qu'il conteste l'existence matérielle des faits de contrebande qui lui sont reprochés. A supposer même que le préfet n'ait pu lui opposer les dispositions du 7° de l'article L. 511-1 I, M. D... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire serait irrégulière.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

6. M. D... n'établit pas que sa soeur et sa grand-mère résideraient régulièrement sur le territoire français en se bornant à produire la copie du titre de séjour de Mme A..., veuve D..., ainsi qu'un avis d'échéance d'un loyer situé à Valenciennes à ce nom. Son acte de naissance et l'extrait de l'acte de mariage de Mme A..., veuve D... ne permettent pas d'établir le lien de filiation qu'il allègue. A supposer que la grand-mère du requérant vive sur le territoire français, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il prendrait effectivement soin d'elle alors qu'elle réside à Valenciennes et qu'il a déclaré lors de sa retenue pour vérification du droit au séjour le 15 février 2018 qu'il habitait dans les environs de Toulouse, qu'il " vivotait " d'appartement en appartement, sans déclarer de résidence habituelle. M. D... déclare vouloir intégrer la légion étrangère et produit à cet effet un courriel envoyé quelques minutes avant la notification de la décision en litige. Cette circonstance n'est pas de nature à démontrer que la décision d'éloignement ou, en tout état de cause, la décision fixant le pays à destination duquel il est éloigné, porterait une atteinte à sa vie privée et familiale et serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

7. Compte tenu de ce qui a été dit au point 6, la décision fixant le pays de destination n'est pas illégale en conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision refusant d'octroyer un délai de départ volontaire :

8. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : 1° Si le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ". L'article L. 511-1 II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit qu'un départ sans délai peut être prononcé par l'autorité administrative : " 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 " ;

9. La décision en litige, vise ces dispositions et relève que l'intéressé " ne justifie d'aucune garantie de représentation effective en France compte tenu, notamment, du fait qu'il ne dispose d'aucun document de voyage ou d'identité en cours de validité, d'aucun domicile stable et d'aucune résidence effective et permanente ". Ainsi, la décision est légalement fondée sur le motif tiré du f) de l'article L. 511-1 II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il résulte de l'instruction que le préfet aurait pris la même décision s'il s'était fondé sur ce seul motif. M. D... ne peut ainsi utilement soutenir que la décision refusant de lui octroyer un délai de départ volontaire serait irrégulière au motif que son comportement ne constituerait pas une menace à l'ordre public.

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans :

10. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. ".

11. En premier lieu, compte tenu de ce qui a été dit au point 6, la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans n'est pas illégale en conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

12. En second lieu, eu égard à la durée et aux conditions de séjour en France du requérant qui est célibataire et sans enfant, et en conséquence de ce qui a été dit au point 6 du présent arrêt, M. D..., dès lors, ne démontre pas que la mesure prononcée à son encontre serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Par suite, doivent être rejetées ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... D..., à Me E... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Pyrénées-Orientales.

Délibéré après l'audience du 3 septembre 2019, où siégeaient :

- M. Antonetti, président,

- M. Barthez, président assesseur,

- M. B..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 septembre 2019.

4

N° 18MA04784

jm


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18MA04784
Date de la décision : 17/09/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-02 Étrangers. Séjour des étrangers. Autorisation de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. ANTONETTI
Rapporteur ?: M. André MAURY
Rapporteur public ?: Mme BOYER
Avocat(s) : MURAT

Origine de la décision
Date de l'import : 26/09/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-09-17;18ma04784 ?
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