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17/12/2020 | FRANCE | N°19MA05104

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 17 décembre 2020, 19MA05104


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 4 septembre 2019, par lequel le préfet du Var lui a enjoint de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 1903565 du 12 novembre 2019, le magistrat désigné du tribunal administratif de Toulon a annulé cet arrêté.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 26 novembre 2019 et le 30 décembre 2019 le préfet du Var, demande à la Cou

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1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 12 novembre 2019 ;

2°) de re...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 4 septembre 2019, par lequel le préfet du Var lui a enjoint de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 1903565 du 12 novembre 2019, le magistrat désigné du tribunal administratif de Toulon a annulé cet arrêté.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 26 novembre 2019 et le 30 décembre 2019 le préfet du Var, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 12 novembre 2019 ;

2°) de rejeter la demande de première instance ;

3°) d'ordonner le remboursement de la somme de 1 200 euros versée à Me A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- sa requête d'appel est recevable ;

- il était tenu de rejeter la demande d'admission au séjour de Mme C... sur le fondement de l'asile après le rejet de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 19 mars 2019, confirmé par la Cour nationale du droit d'asile du 18 juillet 2019 ;

- c'est à tort que le magistrat désigné a annulé la mesure d'éloignement en se fondant sur l'article L. 316-1-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors que Mme C... a seulement demandé l'admission au séjour sur le fondement de l'asile ;

- l'annulation de la mesure d'éloignement ayant été prononcée à tort par le tribunal, c'est également à tort que le tribunal a condamné l'Etat à verser la somme de 1 200 euros à Me A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 septembre 2020, Mme C... conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à verser à son avocat, sous réserve qu'il renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle. Elle demande en outre son admission provisoire à l'aide juridictionnelle.

Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 août 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- et les observations de Me A... représentant Mme C....

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 4 septembre 2019, le préfet du Var a rejeté la demande de titre de séjour que lui avait présentée le 2 octobre 2018 Mme C..., ressortissante nigérianne, sur le fondement de l'asile et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Le préfet du Var relève appel du jugement du 12 novembre 2019 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Toulon a annulé cet arrêté, en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire.

Sur la demande d'admission à l'aide juridictionnelle provisoire :

2. La requérante ayant bénéficié de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 28 août 2020, ses conclusions tendant à l'admission à l'aide juridictionnelle provisoire sont donc devenues sans objet et il n'y a plus lieu d'y statuer.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA): " L'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé ou qui ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2 et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre doit quitter le territoire français, sous peine de faire l'objet d'une mesure d'éloignement prévue au titre Ier du livre V...". Il résulte de ces dispositions qu'il appartient au préfet, avant d'édicter la mesure d'éloignement, de s'assurer que l'étranger ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre que l'asile.

4. Toutefois en l'espèce, la requérante n'a pas contesté devant le premier juge le refus de titre de séjour au titre de l'asile dont elle a fait l'objet mais s'est bornée à diriger ses conclusions en annulation contre la mesure d'éloignement dont elle était assortie. Par suite, le préfet du Var ne peut utilement soutenir qu'il était en situation de compétence liée pour refuser de l'admettre au séjour, une telle circonstance demeurant sans incidence sur la mesure d'éloignement attaquée.

5. En second lieu, le magistrat désigné du tribunal administratif de Toulon a annulé la mesure d'éloignement édictée contre Mme C... pour défaut d'examen personnel de sa situation et erreur manifeste d'appréciation. Il a en effet relevé qu'il ressortait des pièces du dossier et qu'il n'était pas contesté par le préfet du Var que cette dernière bénéficiait d'un accompagnement, dans le cadre du " dispositif Aïda ", au sein de l'association accompagnement lieux d'accueil carrefour éducatif et social (ALC) depuis le 6 février 2019, soit antérieurement à l'édiction de l'arrêté préfectoral attaqué. Il a précisé que ce dispositif consistait en la prise en charge des personnes en situation de prostitution. Il a ensuite estimé que s'il ne ressortait pas des pièces du dossier que ces nouveaux éléments avaient été portés à la connaissance du représentant de l'Etat avant qu'il ne prenne son arrêté attaqué, ils révélaient néanmoins que la démarche engagée par la requérante pour se soustraire à la prostitution existait à la date d'édiction de cet arrêté et qu'il ne ressortait pas des mentions de cet acte que le préfet du Var aurait pris en compte cette démarche alors même qu'il ne pouvait l'ignorer dès lors qu'elle avait été en débat devant la Cour nationale du droit d'asile. Le tribunal ne s'est donc pas fondé pour annuler la mesure d'éloignement sur les dispositions de l'article L. 316-1-1 du CESEDA et le moyen du préfet du Var selon lequel le tribunal se serait fondé à tort sur ces dispositions ne peut par suite qu'être écarté, comme inopérant.

6. Il résulte de ce qui précède que le préfet du Var n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Toulon a annulé la mesure d'éloignement édictée contre Mme C... le 4 septembre 2019.

Sur les frais non-compris dans les dépens de première instance :

7. Ainsi qu'il a été dit au point 6, c'est à bon droit que le tribunal a annulé la mesure d'éloignement contestée. Par suite, les conclusions du préfet du Var tendant à annuler l'article 4 du jugement, qui condamne l'Etat à verser la somme de 1 200 euros à Me A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, par voie de conséquence de l'annulation du jugement au fond ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

8. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".

9. La requérante a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Ainsi, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me A... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros.

D É C I D E :

Article 1er : La requête du préfet du Var est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros à Me A..., en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve que Me A... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à Mme D... C... et à Me A....

Copie en sera adressée au préfet du Var.

Délibéré après l'audience du 3 décembre 2020, où siégeaient :

- M. Poujade, président de chambre,

- M. Portail, président assesseur,

- Mme B..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 décembre 2020.

2

N° 19MA05104

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19MA05104
Date de la décision : 17/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. POUJADE
Rapporteur ?: Mme Isabelle GOUGOT
Rapporteur public ?: Mme GIOCANTI
Avocat(s) : COLAS

Origine de la décision
Date de l'import : 08/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-12-17;19ma05104 ?
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