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21/01/2021 | FRANCE | N°19MA02364

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 21 janvier 2021, 19MA02364


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Sud Foncier a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 18 septembre 2015 par lequel le maire de la commune de Vence s'est opposé à la déclaration préalable déposée le 31 août 2015 en vue de la création de lots à bâtir sur des parcelles cadastrées section BN n° 122, 125, 126 et 142, sises chemin de Vosgelades sur le territoire de la commune, et la décision implicite par laquelle a été rejeté son recours gracieux.

Par un jugement n° 1601017 du 28 mars 2019, le

tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par un...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Sud Foncier a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 18 septembre 2015 par lequel le maire de la commune de Vence s'est opposé à la déclaration préalable déposée le 31 août 2015 en vue de la création de lots à bâtir sur des parcelles cadastrées section BN n° 122, 125, 126 et 142, sises chemin de Vosgelades sur le territoire de la commune, et la décision implicite par laquelle a été rejeté son recours gracieux.

Par un jugement n° 1601017 du 28 mars 2019, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 25 mai 2019, la SARL Sud Foncier, représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 28 mars 2019 du tribunal administratif de Nice ;

2°) de faire droit à sa demande de première instance ;

3°) d'enjoindre à la commune de Vence de procéder à une nouvelle instruction de sa demande dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Vence une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- si les dispositions de l'article L. 421-9 du code de l'urbanisme ne sont pas applicables au lotissement ainsi que l'a jugé le tribunal, la commune ne pouvait opposer un refus au visa de ces dispositions ; la commune ne pouvait donc pas fonder son refus sur les constructions existantes, qui ne sont pas irrégulières ;

- le lotisseur n'était pas tenu de déposer une demande de permis d'aménager sur l'ensemble des éléments du lotissement ;

- en application de l'article L. 480-16 du code de l'urbanisme, la circonstance qu'un terrain est compris dans un lotissement non autorisé ne peut plus être invoquée au bout de dix ans suivant la publication de l'acte de droit privé ayant eu pour objet de diviser une unité foncière de façon à créer le lotissement en cause et le permis de construire valant division foncière portant lotissement a été autorisé depuis plus de dix ans ;

- à tout le moins, la commune aurait dû inviter la SARL Sud Foncier à déposer une demande sur l'ensemble du lotissement ;

- la commune de Vence a commis une erreur de droit en s'opposant à la déclaration préalable au regard des dispositions de l'article UD 11 du règlement du plan local d'urbanisme ;

- le tribunal a admis à tort la substitution de motifs tirée de la méconnaissance de l'article L. 442-1 du code de l'urbanisme ;

- la commune ne l'a jamais invitée à présenter une demande portant sur l'ensemble des parcelles ayant déjà donné lieu à la délivrance de permis de construire ;

- les constructions existantes ont été reconnues conformes puisqu'il a été déposé une déclaration d'achèvement de travaux en 1992, sans que la commune ne s'y oppose dans les délais requis ;

- le projet est dissociable des constructions préexistantes.

La procédure a été communiquée à la commune de Vence, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- et les conclusions de Mme Giocanti, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Sud Foncier a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 18 septembre 2015 par lequel le maire de la commune de Vence s'est opposé à une déclaration préalable à la division en deux lots à construire des parcelles cadastrées section BN n° 122, 125, 126 et 142, sises chemin de Vosgelades. Par un jugement du 28 mars 2019, dont la requérante relève appel, le tribunal a rejeté sa demande.

2. En premier lieu, l'arrêté en litige est motivé par le fait que " le projet présenté ne respecte pas l'article UD 11 du Plan Local d'Urbanisme en ce que les constructions doivent présenter un aspect compatible avec le caractère ou l'intérêt des lieux avoisinants, des sites, des paysages naturels (...) ".

3. L'article UD11 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Vence dispose : " Les constructions doivent présenter un aspect compatible avec le caractère ou l'intérêt des lieux avoisinants, des sites, des paysages naturels et avec la conservation des perspectives monumentales. ".

4. Il résulte des dispositions du code de l'urbanisme que les lotissements, qui constituent des opérations d'aménagement ayant pour but l'implantation de constructions, doivent respecter les règles tendant à la maîtrise de l'occupation des sols édictées par le code de l'urbanisme ou les documents locaux d'urbanisme, même s'ils n'ont pour objet ou pour effet, à un stade où il n'existe pas encore de projet concret de construction, que de permettre le détachement d'un lot d'une unité foncière. Il appartient, en conséquence, à l'autorité compétente de refuser le permis d'aménager sollicité ou de s'opposer à la déclaration préalable notamment lorsque, compte tenu de ses caractéristiques telles qu'elles ressortent des pièces du dossier qui lui est soumis, un projet de lotissement permet l'implantation de constructions dont la compatibilité avec les règles d'urbanisme ne pourra être ultérieurement assurée lors de la délivrance des autorisations d'urbanisme requises.

5. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la réalisation de constructions sur le tènement objet de la déclaration de division, qui se situe dans un quartier de la commune de Vence déjà bâti, ne présentant pas de particularités architecturales ou environnementales, soit de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, des sites, des paysages naturels ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. Le maire de la commune de Vence a ainsi méconnu les dispositions de l'article UD11 en s'opposant à la déclaration de division.

6. En deuxième lieu, l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative, il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué.

7. Aux termes de l'article L. 480-16 du code de l'urbanisme, issu de l'ordonnance n° 2005-1527 du 8 décembre 2005 et reprenant le troisième alinéa de l'article L. 315-1 du même code antérieurement en vigueur : " L'action en justice née de la violation de la réglementation applicable aux lotissements se prescrit par dix ans à compter de la publication des actes portant transfert de propriété à la publicité foncière. Passé ce délai, la non-observation de la réglementation applicable aux lotissements ne peut plus être opposée ". Il ressort des travaux préparatoires de la loi n° 85-729 du 18 juillet 1985 relative à la définition et à la mise en oeuvre de principes d'aménagements, à l'origine de cette disposition, que l'inopposabilité de la méconnaissance de la réglementation relative aux lotissements n'est pas limitée aux instances judiciaires, mais s'applique également dans le cadre des litiges portés devant le juge administratif. Elle fait ainsi notamment obstacle à ce que soit utilement invoquée, pour justifier une opposition à division foncière en vue de construire, la circonstance que le terrain objet de la déclaration de division est compris dans un lotissement non autorisé, dès lors qu'il s'est écoulé plus de dix ans depuis la publication de l'acte de droit privé ayant eu pour objet ou pour effet de diviser une unité foncière de façon à créer le lotissement en cause.

8. Si la commune de Vence a fait valoir en première instance que la division déclarée objet de l'arrêté d'opposition en litige entraîne la subdivision d'un lotissement précédemment constitué de fait en 1989, mais n'ayant jamais été régularisé, il résulte de ce qui a été dit au point 7 qu'elle n'est plus fondée à invoquer cette circonstance, eu égard au délai de dix ans écoulé entre la publication de l'acte de droit privé ayant eu pour objet ou pour effet de diviser l'unité foncière d'origine de façon à créer le lotissement en cause et la décision en litige.

9. Il résulte de ce qui précède que la SARL Sud Foncier est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande, et à demander l'annulation de ce jugement ainsi que de l'arrêté du 18 septembre 2015.

10. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'est susceptible, en l'état du dossier, de fonder l'annulation de la décision attaquée.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

11. Il y a lieu d'enjoindre à la commune de Vence de procéder à une nouvelle instruction de la déclaration de division déposée par la SARL Sud Foncier dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette injonction du prononcé d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

12. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Vence la somme de 2 000 euros à verser à la SARL Sud Foncier au titre des frais engagés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du 28 mars 2019 du tribunal administratif de Nice et l'arrêté du 18 septembre 2015 du maire de la commune de Vence, ainsi que la décision implicite par laquelle a été rejeté le recours gracieux formé contre cet arrêté, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint à la commune de Vence de procéder à une nouvelle instruction de la déclaration de division déposée par la SARL Sud Foncier dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : La commune de Vence versera à la SARL Sud Foncier la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SARL Sud Foncier est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Sud Foncier et à la commune de Vence.

Délibéré après l'audience du 7 janvier 2021, où siégeaient :

- M. Poujade, président,

- M. A..., président assesseur,

- Mme Gougot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 janvier 2021.

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N°19MA02364

hw


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19MA02364
Date de la décision : 21/01/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Procédure - Pouvoirs et devoirs du juge - Questions générales - Substitution de motifs.

Urbanisme et aménagement du territoire - Procédures d'intervention foncière - Lotissements - Autorisation de lotir - Procédure.


Composition du Tribunal
Président : M. POUJADE
Rapporteur ?: M. Philippe PORTAIL
Rapporteur public ?: Mme GIOCANTI
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS DEPLANO - MOSCHETTI - SALOMON - SIMIAN

Origine de la décision
Date de l'import : 30/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-01-21;19ma02364 ?
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