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28/09/2021 | FRANCE | N°19MA01079

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre, 28 septembre 2021, 19MA01079


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS Sodipi a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de la commune de Pézenas a refusé de retirer pour fraude le permis de construire délivré le 5 août 2003 à la société Nora et d'annuler ce permis de construire.

Par un jugement n° 1605492 du 24 janvier 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 4 mars 2019, et des mémoires compl

mentaires enregistrés les 21 février, 2 mai, 17 août 2020, la SAS Sodipi, représentée par Me Cou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS Sodipi a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de la commune de Pézenas a refusé de retirer pour fraude le permis de construire délivré le 5 août 2003 à la société Nora et d'annuler ce permis de construire.

Par un jugement n° 1605492 du 24 janvier 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 4 mars 2019, et des mémoires complémentaires enregistrés les 21 février, 2 mai, 17 août 2020, la SAS Sodipi, représentée par Me Courrech, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 24 janvier 2019 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) de faire droit à sa demande de première instance ;

3°) de mettre à la charge de la société Nora la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- Le permis de construire délivré le 5 août 2003 a été obtenu par fraude car la société Nora a sciemment exagéré le nombre de places de stationnement dont elle a la maîtrise pour contourner les règles de l'article 3 du règlement du plan d'occupation des sols, elle a déclaré disposer à tort de 73 places de stationnement ;

- la SAS Sodipi subit un préjudice considérable du fait de l'insuffisance de places de stationnement pour la clientèle du magasin Bricomarché.

Par des mémoires enregistrés les 7 mai 2019 et 23 mars 2020, la commune de Pézenas, représentée par Me Vernhet, conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- les moyens de la requête en sont pas fondés.

Par des mémoires enregistrés les 7 juin 2019, 16 avril et 19 juin 2020, la société Nora, représentée par Me Fournié et Me Rosier, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la SAS Sodipi de la somme de 7500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- M. A... ne justifie pas d'une qualité pour représenter en justice la SAS Sodipi ;

- le recours à la fois contre le permis de construire de 2003 et le refus de retirer cet arrêté est tardif en application des articles R. 490-7 et R. 603 du code de l'urbanisme car la déclaration d'achèvement des travaux est intervenue le 17 juillet 2006 ;

- la requérante ne produit pas l'acte attaqué ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Un mémoire a été enregistré le 13 septembre 2021 pour la requérante, parvenu au greffe de la Cour après la clôture de l'instruction et non communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné par décision du 24 aout 2021, M. Portail, président assesseur, pour statuer dans les conditions prévues à l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Portail,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de Me Germe, représentant la société Nora, et de Me Alzieu, représentant le SAS Sodipi.

Considérant ce qui suit :

1. La SAS Sodipi a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de la commune de Pézenas a refusé de retirer pour fraude le permis de construire délivré le 5 août 2003 à la société Nora et d'annuler ce permis de construire. Par un jugement du 24 janvier 2019, dont la SAS Sodipi relève appel, le tribunal a rejeté sa demande.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne les conclusions tendant à l'annulation du permis de construire délivré le 5 août 2003 à la société Nora :

2. La requérante ne conteste pas l'irrecevabilité opposée par le tribunal à sa demande tendant à l'annulation du permis de construire délivré le 5 août 2003 à la société Nora. Ses conclusions tendant à l'annulation de ce permis de construire ne peuvent dès lors qu'être rejetées.

En ce qui concerne la décision par laquelle le maire de Pézenas a rejeté la demande de la SAS Sodipi tendant au retrait du permis de construire délivré à le 5 août 2003 à la société Nora en raison d'une fraude :

3. Un tiers justifiant d'un intérêt à agir est recevable à demander, dans le délai du recours contentieux, l'annulation de la décision par laquelle l'autorité administrative a refusé de faire usage de son pouvoir d'abroger ou de retirer un acte administratif obtenu par fraude, quelle que soit la date à laquelle il l'a saisie d'une demande à cette fin. Dans un tel cas, il incombe au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, d'une part, de vérifier la réalité de la fraude alléguée et, d'autre part, de contrôler que l'appréciation de l'administration sur l'opportunité de procéder ou non à l'abrogation ou au retrait n'est pas entachée d'erreur manifeste, compte tenu notamment de la gravité de la fraude et des atteintes aux divers intérêts publics ou privés en présence susceptibles de résulter soit du maintien de l'acte litigieux soit de son abrogation ou de son retrait.

4. Le tribunal a retenu l'existence d'une fraude, en considérant que la société Nora avait sciemment déclaré en 2013 un nombre de places de stationnement dont elle n'avait en réalité pas la disposition pour tromper la commune de Pézenas et obtenir un permis de construire pour l'extension du magasin Bricomarché qu'elle exploite. Il a considéré en revanche que la commune n'avait pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en refusant de retirer le permis de construire, malgré l'existence d'une fraude, eu égard à la gêne, selon lui limitée, occasionnée à la SAS Sodipi par le maintien du permis de construire délivré le 5 août 2003.

5. Aux termes des dispositions du plan d'occupation des sols de Pézenas relatives au stationnement et applicables le 5 août 2003, s'agissant du secteur en litige : " Le stationnement des véhicules correspondant aux besoins des constructions et installations doit être assuré en dehors des voies publiques. (...) Réservation minimale : (...) Pour le personnel, il doit être aménagé une aire de stationnement pour deux emplois. Pour le fonctionnement de l'établissement, il doit être aménagé les surfaces pour le stationnement des véhicules de livraison, de transport et de service, pour celui des visiteurs. Cette surface devra être déterminée par une étude de fréquentation ".

6. Il ressort des pièces du dossier qu'après avoir refusé le 22 septembre 1995 le permis de construire pour l'extension du magasin Bricomarché exploité par la société Nora au motif que le nombre de 27 places de stationnement déclaré était insuffisant, le maire de Pézenas a accordé un permis de construire le 10 juillet 1997 avec le même nombre de places de stationnement déclaré. Le permis de construire délivré le 5 août 2003, pour lequel la société Nora déclare 73 places de stationnement, porte essentiellement sur l'extension des surfaces de plancher affectées aux réserves. Dans ces conditions, la circonstance que la société Nora a déclaré en 2003 disposer de 73 places de stationnement n'apparaît pas comme un élément déterminant qui a conditionné la délivrance de ce permis de construire. Par ailleurs, il ressort de la lettre cosignée par les représentants de la société Nora et de la société Sodipi, adressée au maire de Pézenas le 3 octobre 1995, que la société Nora disposait alors pour le moins d'une tolérance de la SAS Sodipi pour que les clients du magasin Bricomarché puissent utiliser les places de stationnement dont disposait le magasin Intermarché exploité par la requérante, même si un litige est survenu ultérieurement entre ces sociétés à ce sujet. Dans les circonstances de l'espèce, la société Nora ne peut être regardée comme ayant eu l'intention de tromper l'administration quant au nombre de places de stationnement dont elle avait la disposition en vue d'obtenir le permis de construire délivré le 5 août 2003. Celui-ci n'est dès lors pas entaché de fraude, et la demande de la SAS Sodipi tendant à l'annulation du refus du maire de Pézenas de retirer pour fraude ce permis de construire ne peut qu'être rejetée.

7. Il résulte de ce qui précède que la SAS Sodipi n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SAS Sodipi la somme de 2 000 euros à verser à la société Nora au titre des frais engagés et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu de rejeter les conclusions de la SAS Sodipi fondées sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SAS Sodipi est rejetée.

Article 2 : La SAS Sodipi versera la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à la société Nora.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Sodipi, à la société Nora et à la commune de Pézenas.

Délibéré après l'audience du 14 septembre 2021 où siégeaient :

M. Portail, président par interim, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Carassic, première conseillère,

- M. Point, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 septembre 2021.

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N°19MA01079


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA01079
Date de la décision : 28/09/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-04-05 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire. - Régime d'utilisation du permis. - Retrait du permis.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: M. Philippe PORTAIL
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : SELARL FRANÇOIS-REGIS VERNHET

Origine de la décision
Date de l'import : 05/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-09-28;19ma01079 ?
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