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21/12/2021 | FRANCE | N°20MA02830

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 21 décembre 2021, 20MA02830


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision verbale supprimant son poste d'agent chargé du secrétariat du sous-préfet d'Aix-en-Provence et l'affectant sur un poste budgétaire, ainsi que la lettre du 3 octobre 2019 par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône lui a confirmé que son détachement au ministère de l'intérieur ne serait pas renouvelé au-delà du 17 décembre 2019.

Par une ordonnance n°2001007 du 8 juin 2020, la présidente de la quatrième chamb

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du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision verbale supprimant son poste d'agent chargé du secrétariat du sous-préfet d'Aix-en-Provence et l'affectant sur un poste budgétaire, ainsi que la lettre du 3 octobre 2019 par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône lui a confirmé que son détachement au ministère de l'intérieur ne serait pas renouvelé au-delà du 17 décembre 2019.

Par une ordonnance n°2001007 du 8 juin 2020, la présidente de la quatrième chambre

du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 7 août 2020, Mme A..., représentée par Mes Choley et Vidal, demande à la Cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du tribunal administratif de Marseille du 8 juin 2020 ;

2°) d'annuler la décision verbale par laquelle le sous-préfet d'Aix-en-Provence a supprimé son poste d'agent chargé du secrétariat et l'a affectée sur un poste budgétaire, ainsi que la décision en date du 3 octobre 2019 par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône lui a annoncé la fin de son détachement ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de la replacer en position de détachement sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter

de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'ordonnance attaquée est irrégulière, faute pour le premier juge d'avoir statué sur ses conclusions dirigées contre la décision mettant fin à son détachement ;

- c'est à tort que le premier juge a considéré comme irrecevables ses conclusions dirigées contre la décision l'affectant au poste budgétaire, dès lors que celle-ci doit s'analyser comme une sanction déguisée, compte tenu de l'intention répressive de son auteur et de ses effets sur sa situation professionnelle.

Par un mémoire en défense enregistré le 5 novembre 2021, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête, en soutenant que le premier juge a statué sur l'ensemble des prétentions dont il était saisi, que la mesure effectivement en litige ne fait pas grief et que la demande de première instance ne lui ayant pas été communiquée, aucun frais d'instance ne saurait être mis à la charge de l'Etat.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n°83-634 du 13 juillet 1983;

- la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n°85-986 du 16 septembre 1985 ; - le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Revert,

- les conclusions de M. Ury, rapporteur public, - et les observations de Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du ministre de l'intérieur daté du 17 décembre 2018, Mme B... A..., adjointe administrative du ministère de la justice, a été détachée et affectée en qualité d'adjointe administrative de l'intérieur et de l'outre-mer, auprès de la sous-préfecture d'Aix-enProvence, pour une durée d'un an. Par une ordonnance du 9 juin 2020, dont Mme A... relève appel, la présidente de la quatrième chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté comme irrecevable sa demande, vue comme tendant à l'annulation de la décision verbale par laquelle le sous-préfet d'Aix-en-Provence a supprimé son poste d'agent chargé du secrétariat et l'a affectée sur un poste budgétaire.

2. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : (...) / 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens ; (...) ".

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

3. Il ressort des termes mêmes de la demande présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Marseille, que l'intéressée recherchait l'annulation non seulement de la décision supprimant son poste d'agent chargé du secrétariat du sous-préfet d'Aix-en-Provence et l'affectant sur un poste budgétaire, mais encore de la lettre du 3 octobre 2019 par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône lui a confirmé que son détachement au ministère de l'intérieur ne serait pas renouvelé au-delà du 17 décembre 2019. En qualifiant le recours dont il était ainsi saisi comme contenant seulement les premières prétentions et en ne se prononçant pas sur les secondes, le premier juge a entaché d'une omission à statuer son ordonnance qui doit, en conséquence, être annulée dans cette mesure.

4. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu d'évoquer l'affaire et de statuer sur les conclusions de Mme A... tendant à l'annulation de la lettre du 3 octobre 2019.

5. Par une ordonnance n°2000602 du 5 février 2020, devenue définitive, la présidente de la quatrième chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté, sur le fondement des dispositions du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, le recours de Mme A..., enregistré au greffe du tribunal le 22 janvier 2020, tendant également à l'annulation de la lettre du préfet des Bouches-du-Rhône du 3 octobre 2019, par les mêmes moyens que ceux de la demande dont la Cour est saisie par l'évocation. Ainsi que le soutient le ministre de l'intérieur, l'autorité de chose jugée qui s'attachait à l'ordonnance du 5 février 2020 fait obstacle à l'admission de la demande de Mme A..., enregistrée le même jour au greffe du tribunal, et dirigée contre cette lettre du 3 octobre 2019. Cette demande était par conséquent entachée d'une irrecevabilité insusceptible d'être couverte en cours d'instance. Les conclusions de Mme A... dirigées contre cette lettre ne peuvent dès lors qu'être rejetées. Il doit en aller de même, par voie de conséquence, de ses conclusions, présentées pour la première fois en appel et tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de la rétablir dans la position de détachement.

Sur le bien-fondé du surplus de l'ordonnance attaquée :

6. Les mesures prises à l'égard d'agents publics qui, compte tenu de leurs effets, ne peuvent être regardées comme leur faisant grief, constituent de simples mesures d'ordre intérieur insusceptibles de recours. Il en va ainsi des mesures qui, tout en modifiant leur affectation ou les tâches qu'ils ont à accomplir, ne portent pas atteinte aux droits et prérogatives qu'ils tiennent de leur statut ou à l'exercice de leurs droits et libertés fondamentaux, ni n'emportent perte de responsabilités ou de rémunération ; que le recours contre de telles mesures, à moins qu'elles ne traduisent une discrimination ou revêtent le caractère de sanction disciplinaire, est irrecevable.

7. Par le surplus de l'ordonnance attaquée, le premier juge a considéré comme irrecevables les conclusions de Mme A... dirigées contre la décision par laquelle le sous-préfet d'Aix-en-Provence a supprimé son poste d'agent chargé du secrétariat et l'a affectée sur un poste budgétaire, au motif que cet acte constitue une mesure d'ordre intérieur, dès lors qu'il ne présente pas le caractère d'une sanction disciplinaire déguisée, qu'il ne traduit pas une discrimination, qu'il n'a entraîné pour Mme A... ni diminution de ses responsabilités ni perte de rémunération et qu'il est intervenu au sein de la même commune et sans qu'il soit porté atteinte aux droits statutaires ou aux droits et libertés fondamentaux de l'intéressée.

8. Pour contester ces motifs de l'ordonnance, Mme A... se borne à soutenir que son changement d'affectation constitue une sanction disciplinaire, sans remettre en cause les autres raisons retenues par le premier juge, pour lesquelles la mesure a été regardée comme ne lui faisant pas grief, ni critiquer la suppression du poste de secrétaire du sous-préfet d'Aix-enProvence. Or, d'une part, il ne résulte pas des pièces du dossier, et notamment pas du compte rendu d'un entretien avec le sous-préfet d'Aix-en-Provence et sa secrétaire générale, lequel résulte d'une restitution des propos alors tenus, par les soins de la seule requérante qui n'en livre aucun commencement de preuve, que la nouvelle affectation de l'intéressée, décidée d'ailleurs de manière non formalisée, résulterait d'une volonté de sanctionner son comportement. D'autre part, et en tout état de cause, si cette mesure modifie les tâches qui lui sont assignées mais qui demeurent au nombre de celles que peut statutairement accomplir un adjoint administratif, elle ne se traduit ni par une atteinte à l'un de ses droits et libertés fondamentaux, ni par une perte de responsabilités. Enfin dans la mesure où, par application de l'instruction du ministre de l'intérieur du 22 mai 2017 relatives aux modalités de gestion de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise (IFSE) pour les personnels du ministère, dont se prévaut le ministre en défense, le changement de poste vers un groupe de fonctions inférieur n'a aucune incidence, ni à la hausse ni à la baisse sur le montant de cette indemnité, Mme A..., qui n'a jamais regagné son nouveau poste et qui ne verse au dossier d'instance aucune pièce relative à sa rémunération, n'est pas fondée à soutenir que son changement d'affectation, qui la conduit à relever d'un groupe inférieur au titre de l'IFSE, emporterait une baisse de sa rémunération. Par suite, la décision assignant à Mme A... sa nouvelle affectation, qui ne revêt pas le caractère d'une sanction déguisée, ni ne traduit une discrimination, doit s'analyser comme une mesure d'ordre intérieur, insusceptible de recours. C'est donc à bon droit que par l'ordonnance attaquée, la présidente de la quatrième chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté pour ce motif la demande de Mme A... tendant à l'annulation de cette décision.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... est fondée à demander l'annulation de l'ordonnance du 8 juin 2020 seulement en tant qu'elle n'a pas statué sur ses conclusions contre la lettre du préfet des Bouches-du-Rhône du 3 octobre 2019, et que lesdites conclusions, ainsi que le surplus de sa requête d'appel doivent être rejetés, y compris ses conclusions à fin d'injonction et ses conclusions relatives aux frais d'instance.

D É C I D E :

Article 1er : L'ordonnance n°2001007 du 8 juin 2020 est annulée en tant qu'elle n'a pas statué sur les conclusions de Mme A... tendant à l'annulation de la lettre du 3 octobre 2019 par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône lui a confirmé que son détachement ne serait pas renouvelé à compter du 17 décembre 2019.

Article 2 : Lesdites conclusions ainsi que le surplus de la requête de Mme A... sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 7 décembre 2021, où siégeaient :

- M. Badie, président,

- M. Revert, président assesseur,

- Mme Renault, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 décembre 2021.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA02830
Date de la décision : 21/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-03-01 Fonctionnaires et agents publics. - Positions. - Détachement et mise hors cadre. - Détachement.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: M. Michaël REVERT
Rapporteur public ?: M. URY
Avocat(s) : VIDAL

Origine de la décision
Date de l'import : 11/01/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-12-21;20ma02830 ?
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