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22/02/2022 | FRANCE | N°21MA03658

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre, 22 février 2022, 21MA03658


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 25 janvier 2021 par lequel le préfet de l'Aude a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours en fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement.

Par jugement n° 2100917 du 25 mai 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée

le 25 août 2021, et un mémoire complémentaire enregistré le 28 septembre 2021, M. B..., représ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 25 janvier 2021 par lequel le préfet de l'Aude a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours en fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement.

Par jugement n° 2100917 du 25 mai 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 25 août 2021, et un mémoire complémentaire enregistré le 28 septembre 2021, M. B..., représenté par Me Sadek, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 25 mai 2021 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) d'annuler l'arrêté du 25 janvier 2021 du préfet de l'Aude.

3°) d'enjoindre au préfet de l'Aude de lui délivrer un titre de séjour d'un an portant la mention salarié sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur le refus de titre de séjour :

- la décision attaquée a été signée par une autorité incompétente ;

- la décision en litige est insuffisamment motivée ;

- il remplit les conditions posées par l'article L. 313-4-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour la délivrance d'une carte de séjour temporaire en qualité de salarié eu égard à sa qualité de titulaire d'une carte de résident de longue durée en Espagne ;

- l'administration s'est estimée à tort liée par l'avis de la DIRECCTE ;

- ses enfants sont scolarisés en France et la décision de refus de titre de séjour méconnaît l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision de refus de titre de séjour méconnaît l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas motivée.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 septembre 2021, le préfet du Gard conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 3 septembre 2021 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention internationale des droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la Cour a décidé, par décision du 24 août 2021, de désigner M. Portail, président assesseur, pour statuer dans les conditions prévues à l'article R. 222-1 du code de justice administrative.

Le rapport de M. Portail a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., de nationalité marocaine, a demandé le 3 novembre 2020 la délivrance d'un titre de séjour portant la mention salarié. Par l'arrêté en litige du 25 janvier 2021, le préfet de l'Aude a refusé de l'admettre au séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours. Le requérant relève appel du jugement du 25 mai 2021 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne la légalité externe :

2. En premier lieu, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 1 du jugement attaqué.

3. En deuxième lieu, d'une part, l'arrêté comporte les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui en constituent le fondement. D'autre part, il souligne que la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) a émis un avis défavorable à la délivrance d'un titre de séjour à l'intéressé en qualité de salarié, au motif que son employeur ne justifie pas de la recherche de candidats sur le marché du travail et propose une rémunération ne correspondant pas aux qualifications de l'emploi proposé. Il décrit la situation familiale du requérant et souligne que son épouse et deux de ses enfants sont titulaires d'un titre de résident longue-durée en Espagne et que sa fille cadette possède la nationalité espagnole. Il comporte ainsi l'indication des considérations de fait qui en constituent le fondement. Le moyen tiré de l'insuffisance de la décision de refus de titre de séjour doit être dès lors écarté.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors applicable : " La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. ". La décision portant refus de titre de séjour étant motivée, ainsi qu'il a été dit au point 3, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

En ce qui concerne la légalité interne :

5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable, " L'étranger titulaire de la carte de résident de longue durée-UE définie par les dispositions communautaires applicables en cette matière et accordée dans un autre Etat membre de l'Union européenne qui justifie de ressources stables et suffisantes pour subvenir à ses besoins et, le cas échéant, à ceux de sa famille ainsi que d'une assurance maladie obtient, sous réserve qu'il en fasse la demande dans les trois mois qui suivent son entrée en France et sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée : ...5° Une carte de séjour temporaire portant la mention de l'activité professionnelle pour laquelle il a obtenu l'autorisation préalable requise, dans les conditions définies, selon le cas, aux 1°, 2° ou 3° de l'article L. 313-10... " .

6. M. B..., qui déclare être entré sur le territoire français en 2016, et n'a pas présenté de demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées dans les trois mois de son entrée en France, ne remplit pas en tout état de cause les conditions prévues par cet article pour la délivrance d'un titre de séjour.

7. En deuxième lieu, Il ne ressort pas des pièces que le préfet se serait estimé lié par l'avis défavorable de la DIRECCTE pour refuser au requérant la délivrance d'un titre de séjour à titre exceptionnel.

8. En troisième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui... ". Aux termes des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Il appartient au préfet, saisi d'une demande de titre de séjour par un étranger en vue de régulariser sa situation, de vérifier que la décision de refus ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé. Par ailleurs, il lui appartient de vérifier que cette décision n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de cette personne.

9. M. B... n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, le Maroc. Certes, son épouse et ses trois enfants résident en France, et ses enfants sont scolarisés en France. Toutefois, rien ne s'oppose à ce que la cellule familiale se reconstitue au Maroc, ou en Espagne, pays dans lequel le requérant, son épouse et deux de ses enfants bénéficient d'un certificat de résidence de longue durée, sa fille cadette possédant la nationalité de ce pays. Dans les circonstances de l'espèce, le préfet de l'Aude n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit à mener une vie familiale en prenant les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français au regard des objectifs poursuivis.

10. En quatrième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

11. Ainsi qu'il a été dit aux point 9, la décision en litige n'a pas pour effet de séparer le requérant de ses enfants. A... plusieurs de ses enfants sont scolarisés, et si son fils ainé a été scolarisé en France depuis 2016 depuis la classe de sixième jusqu'en classe de préparation à un CAP, il ne ressort pas du dossier qu'ils ne pourraient pas poursuivre leur scolarité au Maroc ou en Espagne. L'arrêté attaqué ne méconnaît pas dans ces conditions les dispositions précitées de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

12. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Par suite ses conclusions accessoires aux fins d'injonctions et fondées sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., au ministre de l'intérieur et à Me Sadek.

Copie pour information sera adressée au préfet de l'Aude.

Délibéré après l'audience du 8 février 2022, où siégeaient :

- M. Portail, président par intérim, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Carassic, première conseillère.

- Mme Balaresque première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 février 2022.

2

N° 21MA03658


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA03658
Date de la décision : 22/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière. - Règles de procédure contentieuse spéciales.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: M. Philippe PORTAIL
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : SADEK

Origine de la décision
Date de l'import : 01/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-02-22;21ma03658 ?
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