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15/09/2022 | FRANCE | N°21MA03865

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 15 septembre 2022, 21MA03865


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme D... et C... A... ont demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision du 21 mars 2019 par laquelle le maire de la commune de Pignans a constaté la caducité du permis de construire qui leur avait été délivré le 6 juillet 1993 en vue de réaliser une maison d'habitation individuelle avec garage sur la parcelle cadastrée section A n° 271 sur le territoire communal, ensemble la décision implicite de rejet de leur recours gracieux du 24 avril 2019.

Par un jugement n° 19028

41 du 13 juillet 2021, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme D... et C... A... ont demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision du 21 mars 2019 par laquelle le maire de la commune de Pignans a constaté la caducité du permis de construire qui leur avait été délivré le 6 juillet 1993 en vue de réaliser une maison d'habitation individuelle avec garage sur la parcelle cadastrée section A n° 271 sur le territoire communal, ensemble la décision implicite de rejet de leur recours gracieux du 24 avril 2019.

Par un jugement n° 1902841 du 13 juillet 2021, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 10 septembre, 18 octobre, 19 novembre 2021 et 10 mai 2022, M. et Mme A..., représentés par la SCP Gatineau-Fattaccini-Rebeyrol, demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 13 juillet 2021 ;

2°) d'annuler, la décision du 21 mars 2019 du maire de la commune de Pignans ;

3°) à titre subsidiaire, d'ordonner une mesure de médiation en application des dispositions de l'article R. 213-7 du code de justice administrative ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Pignans le versement d'une somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la minute du jugement n'est pas signée ;

- les premiers juges ont omis de viser le moyen tiré de ce que la procédure contradictoire préalable avait été méconnue en ce que l'arrêté contesté a été pris au vu de plusieurs constats réalisés entre 2014 et 2019 qui n'ont jamais été portés à leur connaissance ;

- les premiers juges ont omis de répondre au moyen tiré de ce que les constats des 10 octobre 2014, 4 février 2019, 5 mars 2019 et 21 mars 2019 sur lesquels l'arrêté contesté est fondé n'avaient jamais été évoqués au stade de la procédure contradictoire, notamment dans le courrier de la commune du 21 février 2019 ;

- le jugement est entaché d'une erreur d'appréciation et d'une erreur de droit pour avoir considéré que la procédure contradictoire préalable avait été respectée alors qu'ils n'ont pas été mis à même de faire valoir leurs observations sur l'ensemble des motifs de la décision contestée dès lors qu'ils n'ont pas eu connaissance de tous les constats sur lesquelles celle-ci est fondée ;

- le jugement est entaché d'une erreur d'appréciation et d'une erreur de droit pour avoir considéré que la caducité du permis de construire délivré le 6 juillet 1993 était acquise en application des dispositions de l'article R. 424-17 du code de l'urbanisme ;

- contrairement à ce qu'ont jugé les premiers juges, c'est à l'administration de fournir des éléments suffisamment probants quant à la réalité de l'interruption des travaux alléguée, or, les constats produits par la commune, qui plus est sans photographie, ne sont pas probants ;

- les requérants ont au contraire produit tous les éléments permettant d'établir qu'aucune interruption de travaux n'était à déplorer, notamment de nombreuses factures, photographies, et devis.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 avril 2022, la commune de Pignans, représentée par Me Pistone, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. et Mme A... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme A... relèvent appel du jugement du 13 juillet 2021 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 21 mars 2019 par laquelle le maire de la commune de Pignans a constaté la caducité du permis de construire qui leur avait été délivré le 6 juillet 1993 en vue de réaliser une maison d'habitation individuelle avec garage sur la parcelle cadastrée section A n° 271 sur le territoire communal, ensemble la décision implicite de rejet de leur recours gracieux du 24 avril 2019.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ".

3. Il ressort de la minute du jugement attaqué qui a été transmise par le tribunal administratif de Toulon qu'elle comporte la signature du président de la formation de jugement, celle du rapporteur et celle de la greffière d'audience. Le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait irrégulier faute pour cette minute d'être revêtue des signatures requises par les dispositions précitées de l'article R. 741-7 du code de justice administrative manque ainsi en fait et doit dès lors être écarté.

4. En deuxième lieu, il résulte des motifs mêmes du jugement attaqué que le tribunal administratif de Toulon a expressément répondu aux moyens contenus dans les mémoires produits par les requérants. Si les premiers juges n'ont pas visé le moyen tiré de la méconnaissance de la procédure contradictoire prévue par l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration ainsi que le soutiennent les requérants, ils ont cependant répondu à ce moyen et l'ont écarté aux points 2 et 3 de leur jugement. Ainsi, le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, n'a pas omis de répondre au moyen précité. La circonstance qu'il n'a pas répondu à l'argument tiré de ce que la procédure contradictoire aurait été méconnue dès lors que plusieurs constats sur lesquels l'arrêté contesté est fondé n'avaient pas été évoqués au stade de la procédure contradictoire, notamment dans le courrier du 21 février 2019 de la commune, n'est pas de nature à faire regarder le jugement attaqué comme insuffisamment motivé. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Les décisions mentionnées à l'article L. 211-2 n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. L'administration n'est pas tenue de satisfaire les demandes d'audition abusives, notamment par leur nombre ou leur caractère répétitif ou systématique ". Et aux termes des dispositions de l'article L. 211-2 de ce même code : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police... ".

6. Il ressort des pièces du dossier que le maire de Pignans a informé M. et Mme A..., par un courrier du 21 février 2019, qu'il envisageait de constater la caducité du permis de construire qui leur avait été délivré le 6 juillet 1993 du fait de l'interruption des travaux pendant une durée supérieure à une année, en indiquant que les deux constats de police dressés le 20 mars 1997 et le 14 octobre 2013 établissaient que les travaux entre ces deux dates n'avaient pas évolué, et en leur demandant s'ils avaient des informations à formuler à ce titre. Il ressort également des pièces du dossier que M. et Mme A..., par courrier du 7 mars 2019, ont adressé au maire de la commune leurs observations sur la caducité du permis de construire, en faisant valoir notamment les travaux qu'ils avaient réalisés entre les deux dates des constats précités ainsi que les travaux réalisés postérieurement. Ainsi, M. et Mme A... ont eu communication des éléments sur lesquels le maire de Pignans s'est fondé pour édicter l'arrêté contesté, et ont disposé d'un délai suffisant pour présenter leurs observations. Les circonstances que les deux constats mentionnés n'ont pas été joints et étaient anciens, et que le maire a fondé la décision contestée en visant des constats de police supplémentaires des 10 octobre 2014, 4 février 2019, 4 et 21 mars 2019, non indiqués dans le courrier du 21 février 2019, sont sans incidence sur la régularité de la procédure contradictoire, dès lors que les requérants d'une part, ont fait valoir la nature des travaux réalisés et ceux en cours pour la période allant du 20 mars 1997 jusqu'au mois d'août 2019, et que d'autre part et en tout état de cause, pour prendre la décision contestée, le maire s'est fondé sur les deux constats visés par le courrier du 21 février 2019. Par suite, le caractère contradictoire de la procédure mise en œuvre par le maire de Pignans n'a pas été méconnu.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 424-17 du code de l'urbanisme : " Le permis de construire, d'aménager ou de démolir est périmé si les travaux ne sont pas entrepris dans le délai de trois ans à compter de la notification mentionnée à l'article R. 424-10 ou de la date à laquelle la décision tacite est intervenue. / Il en est de même si, passé ce délai, les travaux sont interrompus pendant un délai supérieur à une année (...) ".

8. Le maire de Pignans a considéré que les travaux avaient été interrompus pendant plus d'un an, entraînant ainsi la péremption du permis de construire délivré le 6 juillet 1993.

9. La commune produit notamment un constat dressé par un agent assermenté le 11 octobre 2013 qui mentionne que " (...) sur le terrain lui-même, la construction se trouve exactement dans l'état constaté le 20 mars 1997, à savoir le vide sanitaire s'élève d'une hauteur d'1,60 mètre avec la dalle de 9 mètres sur 9. Seule une pompe de relevage a été installée cette année sur la partie haute du terrain pour alimenter les lieux avec l'eau du forage (...) ". Le constat dressé le 14 octobre 2014 mentionne également que " le terrain se trouve ans le même état que lors du dernier constat effectué en ma présence par la police municipale le 11/10/2013(...) Tout comme lors des précédents constats les seules constructions édifiées en rapport avec le permis sont le vide sanitaire d'une hauteur de 1m60 surplombé d'une dalle de 9mx9m, ainsi qu'une pompe de relevage. (...) ". Les constats ultérieurs des 5 et 21 mars 2019 indiquent quant à eux la poursuite des travaux et en particulier la réalisation du coulage de la dalle du vide sanitaire.

10. Si les requérants soutiennent que le constat du 20 mars 1997 qui est visé dans le courrier préalable du 21 février 2019 et dans la décision contestée ne figure pas au dossier, il n'en demeure pas moins que le constat du 11 octobre 2013, qui fait foi jusqu'à preuve du contraire, établit le faible avancement des travaux entrepris alors que le permis de construire a été délivré vingt ans auparavant, et que la déclaration d'ouverture du chantier a été déposée environ dix-huit ans auparavant, le 13 avril 1995. Et le constat établi le 10 octobre 2014 par un agent assermenté de la commune de Pignan relève que le terrain se trouve dans le même état que lors du dernier constat effectué par la police municipale le 11 octobre 2013 et que comme lors des précédents constats, les seules constructions édifiées en rapport avec le permis de construire sont le vide sanitaire et une pompe de relevage.

11. Il ressort également des pièces du dossier, ainsi que les premiers juges l'ont exactement relevé, que les éléments produits par les requérants en réponse aux allégations de la commune consistent essentiellement en des factures dont il n'est pas établi pour nombre d'entre elles qu'elles se rattachent au chantier en cause et ne permettent pas d'établir que les travaux n'auraient pas été interrompus pendant plus d'une année.

12. Enfin, quant aux moyens que font valoir les requérants tenant à la possible détérioration de la dalle en raison des intempéries, au fait que le terrain est désormais classé en zone inconstructible, à leur bonne foi concernant leurs difficultés financières et au fait qu'ils ont dû eux-mêmes procéder à la réfection du chemin communal menant à leur parcelle, il y a lieu de les écarter par adoption des motifs précis et circonstanciés retenus par les premiers juges aux points 11 et 12 du jugement attaqué, les requérants ne faisant valoir en appel aucun élément distinct de ceux soumis à leur appréciation.

13. Ainsi, au vu de la réalisation du seul vide sanitaire et de l'installation d'une pompe de relevage en 2013, des constats dressés par la commune d'absence de travaux entre octobre 2013 et octobre 2014, du caractère non probant des factures produites par les requérants, et de l'absence de photographies permettant d'établir la non-interruption des travaux pendant plus d'un an, M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que le maire de la commune de Pignans aurait méconnu les dispositions de l'article R. 424-17 du code de l'urbanisme.

14. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande dirigée contre la décision du 21 mars 2019 du maire de la commune de Pignans.

Sur les conclusions aux fins de médiation :

15. Les requérants et la commune n'apportant aucun élément distinct de ceux qui avaient été soumis au tribunal, la demande des requérants tendant à ce qu'il soit ordonné une médiation dans le cadre du présent litige doit être rejetée par adoption des motifs suffisamment circonstanciés retenus par les premiers juges aux points 15 et 16 du jugement attaqué.

Sur les frais liés au litige :

16. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de laisser à chaque partie la charge des frais exposés sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Pignans fondées sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme D... et C... A... et à la commune de Pignans.

Délibéré après l'audience du 1er septembre 2022 où siégeaient :

- M. Portail, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- M. Quenette, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 septembre 2022.

N° 21MA038652

nb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21MA03865
Date de la décision : 15/09/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-04-01 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire. - Régime d'utilisation du permis. - Péremption.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: M. Philippe PORTAIL
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : SCP JEAN-JACQUES GATINEAU - CAROLE FATTACCINI

Origine de la décision
Date de l'import : 25/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-09-15;21ma03865 ?
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