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18/12/2003 | FRANCE | N°98NC02587

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3eme chambre - formation a 3, 18 décembre 2003, 98NC02587


Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 21 décembre 1998, sous le n° 98NC02587, présentée pour L'UNION DES CAISSES DE MALADIE DU LUXEMBOURG, prise en la personne de son représentant légal domicilié ..., BP 1023 L 1010 (Grand Duché du Luxembourg), par Me X..., avocat ;

L'UNION DES CAISSES DE MALADIE DU LUXEMBOURG demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Nancy du 20 octobre 1998 en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à condamner le centre hospitalier universitaire de Nancy à lui verser une somme correspondant à la

contre-valeur en francs français de la somme de 1 111 174 F luxembourgeois ...

Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 21 décembre 1998, sous le n° 98NC02587, présentée pour L'UNION DES CAISSES DE MALADIE DU LUXEMBOURG, prise en la personne de son représentant légal domicilié ..., BP 1023 L 1010 (Grand Duché du Luxembourg), par Me X..., avocat ;

L'UNION DES CAISSES DE MALADIE DU LUXEMBOURG demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Nancy du 20 octobre 1998 en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à condamner le centre hospitalier universitaire de Nancy à lui verser une somme correspondant à la contre-valeur en francs français de la somme de 1 111 174 F luxembourgeois en remboursement de ses débours entraînés par les conséquences dommageables des trois interventions chirurgicales pratiquées sur M. C... Z, ainsi qu'une somme de 10 000 F. au titre des frais irrépétibles ;

Code : C+

Plan de classement :68-02-01-01-01

18-04-02

18-04-02-04

2°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Nancy à lui verser la somme susvisée, avec intérêts au taux légal, ainsi qu'une somme de 10 000 F. au titre des frais irrépétibles ;

Elle soutient que c'est à tort que le tribunal administratif a admis le bien-fondé de l'exception de prescription quadriennale alors que, d'une part, la date de consolidation ne saurait être fixée au 16 mai 1983 et que, d'autre part, l'importance du préjudice de M. Z et les fautes du service n'ont pu être appréciées qu'à compter du dépôt du rapport de l'expert judiciaire en1997 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés les 10 décembre 1999 et 28 novembre 2003, présentés pour le centre hospitalier régional de Nancy, représenté par son directeur dûment autorisé par délibération du conseil d'administration du 9 octobre 1997, par Me Z... Le Prado, avocat ;

Le centre hospitalier régional de Nancy conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que c'est à bon droit que le tribunal administratif a opposé l'exception quadriennale à la demande d'indemnité présentée par M. Z et par les organismes de sécurité sociale, eu égard à la date de consolidation des dommages qui seraient liés aux interventions réalisées en 1982 ;

Vu le mémoire enregistré le 20 janvier 2000 présenté pour M.. Z , par Me X..., avocat ;

M. Z demande que la Cour fasse droit aux conclusions de la requête susvisée n° 98NC02587 de la requérante ; il se réfère aux moyens exposés dans ladite requête ;

Vu le mémoire, enregistré le 25 juillet 2001, présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie de Longwy, par Me Jean-Guy A..., avocat, qui demande le remboursement des débours consécutifs à l'hospitalisation de M. Z ;

II°/ Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 21 décembre 1998, sous le n° 99NC02600, complétée par mémoires enregistrés le 20 janvier 2000 et le 24 novembre 2003, présentée pour M. C... Z par Me X..., avocat ;

M.. Z demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 20 octobre 1998 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à déclarer le centre hospitalier régional de Nancy entièrement responsable des conséquences dommageables des trois interventions chirurgicales subies en 1982 et de sa contamination par le virus de l'hépatite B, à ordonner une contre-expertise en vue de déterminer le préjudice et enfin condamner celui-ci à lui verser une somme de 20 000 F au titre des frais irrépétibles ;

2°) de déclarer le centre hospitalier régional de Nancy entièrement responsable des conséquences dommageables des trois interventions chirurgicales subies en 1982 et de sa contamination par le virus de l'hépatite B, d'ordonner une contre-expertise en vue de déterminer ledit préjudice et enfin condamner l'intimé à lui verser une somme de 25 000 F au titre des frais irrépétibles ;

Il soutient que :

- c'est à tort que le tribunal administratif a opposé l'exception de prescription quadriennale en retenant la date de consolidation fixée par l'expert alors que, d'une part, l'intéressé continue de souffrir des séquelles persistantes de ces opérations, et que, d'autre part, ce n'est qu'après avoir obtenu son dossier médical en 1995 que le requérant a pu apprécier la nature et l'étendue de sa créance ;

- le requérant est en droit de bénéficier du nouveau délai de prescription de 10 ans institué par la loi du 4 mars 2002 ;

- le tribunal administratif s'est fondé sur une expertise comportant des inexactitudes et des contradictions ;

- sa contamination par le virus de l'hépatite B engage la responsabilité du service hospitalier sur le fondement de la présomption de faute et nécessite également que le juge ordonne une contre-expertise ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés les 10 décembre 1999 et 28 novembre 2003, présentés pour le centre hospitalier régional de Nancy, représenté par son directeur dûment autorisé par délibération du conseil d'administration du 9 octobre 1997, par Me Z... Le Prado, avocat ; le centre hospitalier régional de Nancy conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- c'est à bon droit que le tribunal administratif a opposé l'exception de prescription quadriennale à la demande d'indemnité présentée par M. Z ;

- la créance est également prescrite au regard des dispositions de la loi du 4 mars 2002 ;

- les conclusions en remboursement présentées par la caisse primaire d'assurance maladie de Longwy ne sauraient être qualifiées ni d'appel incident ni d'appel provoqué et doivent ainsi être rejetées comme tardives ;

- l'expert ayant écarté la possibilité d'une contamination hospitalière, et l'intéressé n'apportant aucun argument supplémentaire, la demande de contre-expertise sur l'origine de la contamination par le virus B doit être rejetée ;

Vu le mémoire, enregistré le 25 juillet 2001, présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie de Longwy, par Me A..., avocat, qui demande le remboursement de l'ensemble des débours consécutifs à l'hospitalisation de M. Z ainsi qu'à sa contamination et évalués à un montant de 116 563,29 F ;

Vu la lettre du président de chambre du 28 octobre 2003 informant les parties que la Cour est susceptible, le cas échéant, de relever d'office le moyen tiré de ce que la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé (article 98) est applicable aux instances en cours ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics ;

Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 décembre 2003 :

- le rapport de M. MARTINEZ, Premier Conseiller,

- les observations de Me Y... substituant Me LE PRADO, avocat du centre hospitalier régional de Nancy,

- et les conclusions de M. ADRIEN, Commissaire du Gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées n° 98NC02587 et n° 98NC02600 présentées respectivement par M. C... Z et l'UNION DES CAISSES DE MALADIE DU LUXEMBOURG sont dirigées contre un même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

En ce qui concerne les conclusions indemnitaires relatives aux modalités de réalisation des trois interventions chirurgicales subies par M. Z en 1982 :

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 31 décembre 1968 : Sont prescrites, au profit de l'État, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. Sont prescrites, dans le même délai et sous la même réserve, les créances sur les établissements publics dotés d'un comptable public.

Considérant qu'aux termes de l'article L. 1142-28 du code de la santé publique issu de l'article 98 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé : Les actions tendant à mettre en cause la responsabilité des professionnels de santé ou des établissements de santé publics ou privés à l'occasion d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins se prescrivent par dix ans à compter de la consolidation du dommage ;

Considérant qu'aux termes de l'alinéa 2 de l'article 101 de la même loi : Les dispositions de la section 6 du chapitre II du titre IV du livre Ier de la première partie du même code sont immédiatement applicables, en tant qu'elles sont favorables à la victime ou à ses ayants droit, aux actions en responsabilité, y compris aux instances en cours n'ayant pas donné lieu à une décision irrévocable ;

Considérant qu'il résulte des termes mêmes des dispositions de l'article L. 1142-28 du code de la santé publique que le législateur a entendu instituer une prescription décennale se substituant à la prescription quadriennale instaurée par la loi du 31 décembre 1968 pour ce qui est des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics en matière de responsabilité médicale ; qu'il s'ensuit que ces créances sont prescrites à l'issue d'un délai de dix ans à compter de la date de consolidation du dommage ; qu'en prévoyant à l'article 101 de la loi du 4 mars 2002 que les dispositions nouvelles de l'article L. 1142-28 du code de la santé publique relatives à la prescription décennale en matière de responsabilité médicale sont immédiatement applicables, en tant qu'elles sont favorables à la victime ou à ses ayants droit, aux actions en responsabilité, y compris aux instances en cours n'ayant pas donné lieu à une décision irrévocable, le législateur a entendu porter à dix ans le délai de prescription des créances en matière de responsabilité médicale, qui n'étaient pas déjà prescrites à la date d'entrée en vigueur de la loi et qui n'avaient pas donné lieu, dans le cas où une action en responsabilité avait été engagée, à une décision irrévocable ; que l'article 101 de cette loi n'a cependant pas eu pour effet, en l'absence de dispositions le prévoyant expressément, de relever de la prescription celles de ces créances qui étaient prescrites en application de la loi du 31 décembre 1968 à la date d'entrée en vigueur de la loi du 4 mars 2002 ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert commis par le Tribunal administratif de Nancy, que la date de consolidation des séquelles dont a été victime M. Z, laquelle fait courir le délai de prescription quadriennale visé à l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 précité, doit être fixée en l'espèce au 16 mai 1983 nonobstant la circonstance que l'état de M. Z aurait continué de nécessiter, après cette date, certains soins médicaux ; dans ces conditions, les requérants ne sauraient utilement faire valoir que l'importance du préjudice de M. Z et les fautes du service n'ont pu être appréciées qu'à compter du dépôt du rapport de l'expert judiciaire en 1997 ; que, dès lors, en application des dispositions précitées de l'article 1er de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 susvisée, le délai de prescription quadriennale doit être regardé comme venu à expiration le 31 décembre 1987, soit antérieurement à la date du 16 juillet 1997 à laquelle M. Z a déposé devant le Tribunal administratif de Nancy des conclusions tendant à la réparation du dommage dont il a été victime ; que l'intéressé n'établit pas avoir, antérieurement à cette date, présenté une demande ayant le même objet qui aurait été susceptible d'avoir eu pour effet, dans les conditions prévues par la loi du 31 décembre 1968 susvisée, d'interrompre le délai de la prescription ; que les demandes présentées aux mêmes fins par l'UNION DES CAISSES DE MALADIE DU LUXEMBOURG ainsi que celles présentées par la caisse primaire d'assurance maladie de Longwy dans le cadre de l'instance ouverte par le recours de M. Z ont également été enregistrées après l'expiration de ce délai de prescription ; que M. Z ne saurait pas davantage utilement invoquer l'application des dispositions de la loi du 4 mars 2003 précitée, lesquelles n'ont pas pour effet, ainsi qu'il a été dit plus haut, de relever de la prescription les créances qui, comme en l'espèce, étaient prescrites en application de la loi du 31 décembre 1968 à la date d'entrée en vigueur de la loi du 4 mars 2002 ; qu'il suit de là que c'est à bon droit que, pour rejeter les conclusions de M. Z tendant à la réparation du préjudice consécutif aux modalités de réalisation des trois interventions pratiquées sur lui en 1982, le Tribunal administratif de Nancy a considéré que la créance alléguée était atteinte par la prescription ;

En ce qui concerne les conclusions relatives à la contamination de M. Z par le virus de l'hépatite B :

Considérant qu'eu égard au délai qui s'est écoulé entre la réalisation des interventions litigieuses en 1982 et la détection du virus en1993, en l'absence de transfusion sanguine au cours de ces interventions, et compte tenu de la diversité des modes de transmission du virus, et alors que M.Z n'apporte aucun élément à l'appui de ses allégations qui ne sont étayées par aucune pièce du dossier, selon lesquelles ses hospitalisation en 1982 seraient à l'origine de son infection par la virus de l'hépatite B, c'est également à bon droit que le tribunal administratif a considéré que le lien de causalité ne pouvait être regardé comme établi en l'espèce ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les conclusions présentées par M. Z ainsi que les conclusions présentées par l'UNION DES CAISSES DE MALADIE DU LUXEMBOURG et par la caisse primaire d'assurance maladie de Longwy doivent être rejetées, sans qu'il soit besoin d'ordonner une nouvelle expertise ni de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le centre hospitalier universitaire de Nancy aux conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de Longwy ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par M. Z et par l'UNION DES CAISSES DE MALADIE DU LUXEMBOURG doivent dès lors être rejetées ;

D É C I D E :

Article 1er : Les conclusions présentées par M. Z ainsi que les conclusions présentées par l'UNION DES CAISSES DE MALADIE DU LUXEMBOURG et par la caisse primaire d'assurance maladie de Longwy sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B..., veuve Z, au Centre Hospitalier Régional de Nancy, à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Longwy et à l'UNION DES CAISSES DE MALADIE DU LUXEMBOURG.

7


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 98NC02587
Date de la décision : 18/12/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. KINTZ
Rapporteur ?: M. MARTINEZ
Rapporteur public ?: M. ADRIEN
Avocat(s) : MUNIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2003-12-18;98nc02587 ?
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