La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/02/2005 | FRANCE | N°02NC01301

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4eme chambre - formation a 3, 28 février 2005, 02NC01301


Vu la requête enregistrée le 9 décembre 2002, présentée pour le GROUPEMENT FORESTIER DE LA VAIVRE DE GRAY représentée par sa gérante, dont le siège est ..., par la SCP d'avocats UGCC et associés ; le GROUPEMENT FORESTIER DE LA VAIVRE DE GRAY demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 10 octobre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a annulé l'arrêté du 16 janvier 2002 du ministre de l'agriculture et de la pêche l'autorisant à défricher 39,73330 ha de bois sur le territoire de la commune de Esmoulins ;

2°) de rejeter la demande des

associations commission de protection des eaux de Franche-Comté et Saône et Do...

Vu la requête enregistrée le 9 décembre 2002, présentée pour le GROUPEMENT FORESTIER DE LA VAIVRE DE GRAY représentée par sa gérante, dont le siège est ..., par la SCP d'avocats UGCC et associés ; le GROUPEMENT FORESTIER DE LA VAIVRE DE GRAY demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 10 octobre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a annulé l'arrêté du 16 janvier 2002 du ministre de l'agriculture et de la pêche l'autorisant à défricher 39,73330 ha de bois sur le territoire de la commune de Esmoulins ;

2°) de rejeter la demande des associations commission de protection des eaux de Franche-Comté et Saône et Doubs vivants-Sundgau vivant-gestion ;

3°) de condamner les associations commission de protection des eaux de Franche-Comté et Saône et Doubs vivants-Sundgau vivant-gestion à lui verser la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a admis l'intérêt à agir des associations ; au surplus, la commission de protection des eaux de Franche-Comté n'avait pas qualité pour recevoir mandat de représentation de l'association Saône et Doubs vivants-Sundgau vivant-gestion ;

- le jugement est insuffisamment motivé ;

- le tribunal n'a pas fait une application correcte de l'article L. 311-3 du code forestier ; il a fait une fausse appréciation de la qualité du boisement et des conséquences devant en être tirées en ce qui concerne sa protection ; le raisonnement tenu par le tribunal est erroné en droit en ce qu'il attribue une valeur de principe aux classements ZNIEFF, ZICO et Natura 2000 ; il est également erroné en fait ;

- c'est à tort que le tribunal a estimé que les mesures compensatoires ne pouvaient assurer une prévention suffisante des inconvénients générés par l'exploitation ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 29 août 2003, présenté pour la commission de protection des eaux de Franche-Comté (CPE) et Saône et Doubs Vivants, par Me Y... ; les associations concluent :

- au rejet de la requête ;

- à la condamnation du GROUPEMENT FORESTIER DE LA VAIVRE DE GRAY à verser à chacune d'elles la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- d'ordonner la publication de l'arrêt en application de l'article L.911-1 du code de justice administrative, aux frais du groupement, dans le moniteur des travaux publics et dans l'est républicain, dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt ;

Elles soutiennent que :

- la protection des eaux figurant dans leur objet statutaire, elles justifient d'un intérêt à agir ; la qualité pour agir du collectif Saône et Doubs Vivants est établie ; l'appelant n'a, en revanche, versé aux débats aucun document attestant que son représentant a qualité pour engager l'action ;

- le jugement n'est entaché d'aucune irrégularité ;

- l'extension de la carrière contrarie directement la nécessaire protection des habitats d'intérêt communautaire au titre de la directive oiseaux de 1979 et de la directive habitats de 1992 ;

- les mesures compensatoires ne permettent nullement de prévenir les dangers et inconvénients graves inhérents à la carrière ; elles ont été présentées tardivement après l'enquête publique, ce qui a pour effet de vicier la procédure ;

- l'arrêté du ministre méconnaît l'article L. 311-3-8 du code forestier ainsi que le SDAGE Rhône-méditerranée ;

- l'existence d'espèces protégées dans l'aire de l'extension de la carrière fait directement obstacle à son autorisation ;

Vu, en date du 2 décembre 2004, l'ordonnance fixant au 12 janvier 2005, la clôture de l'instruction ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code forestier ;

Vu le décret n°77-1141 du 12 octobre 1977 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 janvier 2005 :

- le rapport de Mme Guichaoua, premier conseiller,

- les observations de Me X..., de la SCP UGGC et associés, avocat du GROUPEMENT FORESTIER DE LA VAIVRE DE GRAY,

- et les conclusions de M. Wallerich, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'en se bornant à faire valoir que les mesures destinées à compenser les effets du défrichement ne permettent pas de remédier utilement à la grave atteinte portée au milieu naturel du Bois de la Vaivre, le Tribunal administratif de Besançon a, eu égard à l'argumentation développée devant lui, insuffisamment motivé et, par suite, entaché d'irrégularité sa décision qui encourt, de ce fait, l'annulation ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les moyens et conclusions présentés par les associations commission de protection des eaux de Franche Comté et Saône et Doubs Vivants devant le Tribunal administratif de Besançon ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

Considérant que la commission de protection des eaux de Franche-Comté (CPE) qui bénéficie d'un agrément, délivré au titre de la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature, s'étendant au département de la Haute-Saône, a pour objet statutaire de susciter et de développer la protection du milieu naturel ; qu'il résulte des statuts de l'association Saône et Doubs Vivants que celle-ci a notamment en charge de représenter en justice le collectif Saône et Doubs, composé d'associations et d'organismes oeuvrant pour la protection des cours d'eau et des milieux humides des bassins versants du Rhône et du Rhin ; qu'eu égard à leur objet statutaire, lesdites associations justifient d'un intérêt leur donnant qualité pour agir contre l'arrêté du 16 janvier 2002 du ministre de l'agriculture et de la pêche autorisant le défrichement d'une forêt alluviale ; qu'en désignant, par ailleurs, comme mandataire le président de la CPE, le président de l'association Saône Doubs Vivants a seulement entendu se conformer aux dispositions de l'article R. 411-5 du code de justice administrative qui imposent, en cas de requête collective, la désignation d'un représentant unique ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 311-3 du code forestier : (...) Nul ne peut user du droit de défricher ses bois sans avoir préalablement obtenu une autorisation. (...) ; qu'aux termes de l'article R. 311-1 du même code, alors applicable : L'autorisation administrative prescrite par le premier alinéa de l'article L. 311-1 fait l'objet d'une demande indiquant la dénomination, la situation, l'étendue des terrains à défricher et leur destination après défrichement.(...) La demande d'autorisation (...) est accompagnée : (...) 3° selon les cas, de l'étude d'impact ou de la notice prévue par les articles 2 et 4 du décret n° 77-1141 du 12 octobre 1977 modifié pris pour l'application de l'article 2 de la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature (...) ; qu'aux termes de l'article 2 du décret n° 77-1141 du 12 octobre 1977 : Le contenu de l'étude d'impact doit être en relation avec l'importance des travaux et aménagements projetés et avec leurs incidences prévisibles sur l'environnement. L'étude d'impact présente successivement : (...)4. Les mesures envisagées par le maître de l'ouvrage ou le pétitionnaire pour supprimer, réduire et, si possible, compenser les conséquences dommageables du projet sur l'environnement, ainsi que l'estimation des dépenses correspondantes (...) ; qu'il résulte des dispositions combinées de l'article 3 du même décret, modifié par le décret n° 93-245 du 25 février 1993 relatif aux études d'impact que les défrichements soumis au code forestier d'une superficie inférieure à 25 ha sont dispensés de la procédure d'impact ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le GROUPEMENT FORESTIER DE LA VAIVRE DE GRAY a sollicité l'autorisation de défricher près de 40 ha de bois sur le territoire de la commune de Esmoulins en vue de permettre à la société GSM d'exploiter une carrière alluviale ; qu'il est constant que l'étude d'impact figurant au dossier, commune à la demande d'autorisation d'exploitation de la carrière, ne comportait aucune mesure destinée à compenser les effets dommageables du défrichement ; que les documents se rapportant à l'étude de telles mesures ont été élaborés et produits plus d'un an après le déroulement de l'enquête publique ; qu'ils ne sauraient, dès lors, avoir pour effet de remédier à la carence de l'étude d'impact initiale ; que compte tenu de l'importance du projet de défrichement, ladite étude ne satisfait pas aux exigences de l'article 2 modifié du décret susmentionné du 12 octobre 1977 pris pour l'application de la loi du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature ; qu'il en résulte que l'arrêté du 16 janvier 2002 par lequel le ministre de l'agriculture et de la pêche a autorisé le défrichement a été pris au terme d'une procédure irrégulière et doit, dès lors, être annulé ;

Sur les conclusions à fin de publication de l'arrêt de la Cour :

Considérant qu'il n'appartient pas aux juridictions administratives d'ordonner que les décisions qu'elles rendent fassent l'objet d'une publication dans la presse ; que les conclusions des associations CPE et Saône et Doubs Vivants tendant à ce que l'arrêt de la Cour soit publié dans le moniteur des travaux publics et dans l'usine nouvelle ne peuvent être que rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les associations CPE et Saône et Doubs Vivants, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, soient condamnées à payer au GROUPEMENT FORESTIER DE LA VAIVRE DE GRAY la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner le GROUPEMENT FORESTIER DE LA VAIVRE DE GRAY à payer à l'association CPE, d'une part, et à l'association Saône et Doubs Vivants, d'autre part, une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : Le jugement du 10 octobre du Tribunal administratif de Besançon annulant l'arrêté du 16 janvier 2002 du ministre de l'agriculture et de la pêche autorisant le GROUPEMENT FORESTIER DE LA VAIVRE DE GRAY est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 16 janvier 2002 du ministre de l'agriculture et de la pêche est annulé.

Article 3 : Le surplus des conclusions du GROUPEMENT FORESTIER DE LA VAIVRE DE GRAY est rejeté.

Article 4 : Les conclusions des associations commission de protection des eaux de Franche-Comté et Saône et Doubs Vivants tendant à la publication de l'arrêt de la Cour sont rejetées.

Article 5 : Le GROUPEMENT FORESTIER DE LA VAIVRE DE GRAY versera à l'association commission de protection des eaux de Franche-Comté, d'une part, et à l'association Saône et Doubs Vivants, d'autre part, la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié au GROUPEMENT FORESTIER DE LA VAIVRE DE GRAY, aux associations commission de protection des eaux de Franche-Comté et Saône et Doubs Vivants, à la société GSM et au ministre de l'écologie et du développement durable.

2

N° 02NC01301


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 02NC01301
Date de la décision : 28/02/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme FELMY
Rapporteur ?: Mme Marie GUICHAOUA
Rapporteur public ?: M. WALLERICH
Avocat(s) : SCP U.G.G.C. ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2005-02-28;02nc01301 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award