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29/06/2006 | FRANCE | N°03NC01207

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2eme chambre - formation a 3, 29 juin 2006, 03NC01207


Vu la requête, enregistrée le 3 décembre 2003, complétée par un mémoire enregistré le 6 janvier 2005, présentée pour la S.A.R.L. AGEBA DESIGN, dont le siège social est rue Werde Z.A. à Matzenheim-Heussern (67150), par Me Avitabile, avocat ;

La S.A.R.L. AGEBA DESIGN demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 99-04185, en date du 30 septembre 2003, par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et pénalités y afférentes qui lui ont été réclamés pour la période du

1er janvier 1994 au 31 décembre 1995 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) ...

Vu la requête, enregistrée le 3 décembre 2003, complétée par un mémoire enregistré le 6 janvier 2005, présentée pour la S.A.R.L. AGEBA DESIGN, dont le siège social est rue Werde Z.A. à Matzenheim-Heussern (67150), par Me Avitabile, avocat ;

La S.A.R.L. AGEBA DESIGN demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 99-04185, en date du 30 septembre 2003, par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et pénalités y afférentes qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 1994 au 31 décembre 1995 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à lui rembourser les sommes versées assorties des intérêts moratoires ;

4°) de condamner l'Etat aux frais et dépens ;

5°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 6 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Elle soutient que :

- le jugement est entaché d'erreur de droit en ce qu'il a considéré que l'obligation de débat oral et contradictoire avait été en l'espèce respectée ;

- ce jugement comporte une contradiction quant à la réponse au moyen relatif à l'absence de justification des pénalités de mauvaise foi ;

- la notification de redressement est insuffisamment motivée en ce qu'elle ne mentionne pas le fondement légal du redressement et ne comporte pas les explications nécessaires ;

- la procédure d'imposition est entachée d'irrégularité du fait de l'emport irrégulier de documents comptables par la vérificatrice ;

- les pièces emportées n'ont pas été entièrement restituées, ce qui rend impossible toute défense sur le fond ;

- les pénalités de mauvaise foi qui ont été appliquées ne peuvent être justifiées par la seule importance des rappels et leur caractère répétitif ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 20 avril 2004, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, tendant au rejet de la requête, par les motifs qu'elle est irrecevable pour défaut de moyen d'appel et qu'aucun des moyens présentés par la S.A.R.L. AGEBA DESIGN n'est fondé ;

Vu le mémoire, enregistré le 21 février 2005, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 juin 2006 :

- le rapport de M. Montsec, président,

- les observations de Me Jean-Louis Avitabile, avocat de la société AGEBA DESIGN ;

- et les conclusions de Mme Rousselle, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant qu'à supposer que la S.A.R.L. AGEBA DESIGN ait, en invoquant une « contradiction manifeste de jugement », entendu invoquer une irrégularité du jugement attaqué, celui-ci ne saurait en tout état de cause être entaché d'une telle irrégularité au motif qu'il ne serait pas conforme à un autre jugement du même tribunal, concernant un autre contribuable ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : « L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (…) » ;

Considérant que la notification de redressement qui a été adressée à la S.A.R.L. AGEBA DESIGN indique clairement la nature et les raisons des redressements envisagés, liés à des discordances inexpliquées observées entre le montant du chiffre d'affaires figurant au compte de résultats et celui reporté dans les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée ; que les éléments de calcul de ces discordances sont détaillés, pour chaque période concernée ; que cette notification de redressement, qui se réfère par ailleurs aux dispositions de l'article 269 du code général des impôts, relatif aux règles d'imputation de la taxe sur la valeur ajoutée, est ainsi suffisamment motivée, en droit et en fait, au regard des exigences des dispositions susmentionnées de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales et comportait des indications qui, en l'espèce, suffisaient à permettre à la société requérante d'engager une discussion contradictoire avec l'administration ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'ensemble des dispositions du code général des impôts relatives aux opérations de vérification que celles-ci doivent en principe se dérouler au siège de l'entreprise vérifiée ; que, toutefois, sur demande écrite du contribuable, le vérificateur peut emporter certains documents dans les bureaux de l'administration qui en devient dès lors dépositaire ; qu'en ce cas, le vérificateur doit remettre à l'intéressé un reçu détaillé des pièces qui lui sont remises ; qu'en outre, cette pratique ne doit pas avoir pour effet de priver le contribuable des garanties qu'il tient des articles L. 47 et L. 52 du livre des procédures fiscales et qui ont notamment pour objet de lui assurer sur place des possibilités de débat oral et contradictoire avec le vérificateur ; que si l'emport irrégulier de documents comptables est ainsi de nature à entacher d'irrégularité les opérations de vérification, il appartient toutefois au contribuable qui invoque ce vice de procédure d'en établir la matérialité ;

Considérant que la S.A.R.L. AGEBA DESIGN soutient que la vérificatrice aurait emporté, sans en faire la demande et sans demande du contribuable en ce sens, des documents comptables originaux, sous forme de listings du Grand livre des comptes généraux, et ne les auraient pas restitués en totalité, la privant ainsi de la possibilité de discuter utilement des redressements en litige ; qu'elle produit à cet effet la lettre en date du 8 décembre 1997 par laquelle le gérant de la société demandait la restitution des documents manquants et deux attestations de X... Nathalie X et Y... Gabrielle X, en leur qualité respectivement de comptable et secrétaire employées par la société, qui déclarent avoir vu la vérificatrice sortir les listings dont s'agit de sa serviette, lors d'une visite au siège de l'entreprise le 2 décembre 1997 ; que, toutefois, ni la lettre du 8 décembre 1997, ni les attestations, rédigées seulement le 16 août 2000, plus de deux ans et demi après les faits, par la fille et l'épouse du gérant, toutes deux associées de la société, ne permettent d'établir la réalité de cet emport irrégulier, alors la vérificatrice a réfuté ces affirmations, dans une lettre adressée à la société le 12 décembre 1997, en réponse au courrier susmentionné du gérant, en précisant que seules des copies de tableaux d'amortissements lui avaient été remises, dont les originaux étaient restés en la possession du gérant, et à nouveau dans la réponse qu'elle a faite le 22 janvier 1998 aux observations de la société contribuable ; que, dans ces conditions, la S.A.R.L. AGEBA DESIGN ne peut être regardée comme établissant que la vérificatrice s'est livrée à un emport irrégulier de documents comptables, de nature à vicier la procédure d'imposition ; que le jugement n'est ainsi entaché d'aucune erreur de droit en ce qu'il a écarté ce moyen de procédure ;

Sur le bien-fondé des redressements :

Considérant que la S.A.R.L. AGEBA DESIGN se borne à arguer de l'absence de restitution, par la vérificatrice qui l'aurait emportée, d'une partie de ses documents comptables, en faisant valoir que cette situation l'empêcherait de contester utilement le bien-fondé des redressements appliqués ; qu'alors qu'ainsi qu'il est dit ci-dessus, la réalité d'un tel emport irrégulier de documents n'est pas établie, elle n'apporte à l'instance aucun élément de nature à remettre en cause ce bien-fondé ;

Sur les pénalités de mauvaise foi :

Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : « 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 p. 100 si la mauvaise foi de l'intéressé est établie ou de 80 p. 100 s'il s'est rendu coupable de manoeuvres frauduleuses ou d'abus de droit au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales (…) » ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient en appel la société requérante, la circonstance que le contribuable ait persisté dans des irrégularités relevées au cours d'une précédente vérification ne constitue pas une condition nécessaire pour que la majoration de 40 % prévue par les dispositions précitées puisse être appliquée ; qu'eu égard en l'espèce tant à l'importance qu'au caractère systématique des minorations du chiffre d'affaires constatées pendant toute la période vérifiée, qui traduisent la volonté, de la part du contribuable, d'éluder une partie de l'impôt dû, l'administration fiscale doit être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe de la mauvaise foi de la société contribuable ; que la majoration de 80 % prévue à l'article 1729 du code général des impôts en cas de manoeuvre frauduleuse n'ayant pas été appliquée en l'espèce, la société ne peut utilement faire valoir qu'une intention de fraude ne serait pas établie ; que, dès lors, c'est à bon droit que l'administration a assorti le complément de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de la société de la majoration de 40 % prévue par les dispositions susmentionnées de l'article 1729 du code général des impôts ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la S.A.R.L. AGEBA DESIGN n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué en date du 30 septembre 2003, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant au versement des intérêts moratoires sur les sommes litigieuses :

Considérant qu'en l'absence de litige né et actuel avec le comptable sur ce point, les conclusions tendant au versement d'intérêts moratoires ne peuvent en tout état de cause qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par la S.A.R.L. AGEBA DESIGN au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la S.A.R.L. AGEBA DESIGN est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la S.A.R.L. AGEBA DESIGN et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

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N° 03NC01207


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 03NC01207
Date de la décision : 29/06/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : Mme FELMY
Rapporteur ?: M. Pierre MONTSEC
Rapporteur public ?: Mme ROUSSELLE
Avocat(s) : AVITABILE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2006-06-29;03nc01207 ?
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