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19/10/2006 | FRANCE | N°05NC01472

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ere chambre, 19 octobre 2006, 05NC01472


Vu les requêtes enregistrées les 26 et 28 novembre 2005 complétées par mémoire enregistré le 21 juin 2006, présentées pour Mme Fatou Y épouse X, élisant domicile ..., par Me Marx, avocat au barreau de Strasbourg et par Me Dissler, avocat au barreau de Strasbourg ;

Mme X demande à la Cour :

1°) - d'annuler le jugement n° 0504470 en date du 21 octobre 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 10 octobre 2005 du préfet du Bas-Rhin ordonnant sa

reconduite à la frontière ;

2°) - d'annuler pour excès de pouvoir ladite décisio...

Vu les requêtes enregistrées les 26 et 28 novembre 2005 complétées par mémoire enregistré le 21 juin 2006, présentées pour Mme Fatou Y épouse X, élisant domicile ..., par Me Marx, avocat au barreau de Strasbourg et par Me Dissler, avocat au barreau de Strasbourg ;

Mme X demande à la Cour :

1°) - d'annuler le jugement n° 0504470 en date du 21 octobre 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 10 octobre 2005 du préfet du Bas-Rhin ordonnant sa reconduite à la frontière ;

2°) - d'annuler pour excès de pouvoir ladite décision ;

3°) - d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour ;

4°) - de condamner l'Etat à lui verser la somme de 700 € en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Mme X soutient que la décision de reconduite à la frontière méconnaît les dispositions des articles L.3133-11-7° et 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 8 février 2006, présenté par le préfet du Bas-Rhin qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient :

- qu'en l'absence de communauté de vie, l'intéressée ne peut pas obtenir le renouvellement de sa carte de séjour temporaire ;

- que les violences conjugales alléguées ne sont pas établies par les pièces du dossier ;

- qu'il n'y a pas d'obstacle à ce que Mme X emmène sa fille avec elle au Sénégal où réside le père de l'enfant ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision en date du 17 février 2006 du bureau d'aide juridictionnelle accordant l'aide juridictionnelle totale à Mme X ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 septembre 2006 :

- le rapport de Mme Stalhlberger, présidente déléguée,

- les observations de Me Dissler , avocat de Mme X,

- et les conclusions de M. Adrien, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : «L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (…) 3°) Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé, ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme Fatou Y épouse X, de nationalité sénégalaise, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 29 septembre 2004, de la décision du préfet du Bas-Rhin du 28 septembre 2004 lui refusant le renouvellement de sa carte de séjour temporaire en qualité de conjointe de ressortissant de nationalité française et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle était ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur l'exception d'illégalité de la décision du 28 septembre 2004 :

Considérant qu'aux termes de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention «vie privée et familiale» est délivrée de plein droit : (…) 4°/ A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationale française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que la communauté de vie n'ait pas cessé, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (…) » ; qu'aux termes de l'article 313-12 du même code : « Le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° ci-dessus est subordonné au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé. Toutefois, lorsque la communauté de vie a été rompue à l'initiative de l'étranger à raison des violences conjugales qu'il a subies de la part de son conjoint, l'autorité administrative peut accorder le renouvellement du titre » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date à laquelle le préfet du Bas-Rhin a pris l'arrêté décidant sa reconduite à la frontière, Mme X ne remplissait pas la condition de communauté de vie entre époux lui ouvrant droit au renouvellement de sa carte de séjour en qualité de conjoint de ressortissant français ; que, si l'intéressée soutient que la communauté de vie a été rompue à son initiative en raison des violences qu'elle a subies de la part de son mari, cette circonstance n'est pas, compte tenu des termes de l'article L.313-12 précité, de nature à la faire bénéficier de plein droit du renouvellement de son titre de séjour ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le préfet du Bas-Rhin ne pouvait légalement lui refuser la délivrance d'un titre de séjour sans méconnaître les dispositions précitées doit être écarté ; qu'en l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier, compte-tenu notamment de ce que l'intéressée, en France depuis deux ans à la date du refus opposé par le préfet, était en instance de divorce et alors que les violences conjugales qu'elle allègue avoir subies ne sont pas établies, que le préfet aurait inexactement apprécié la situation de l'intéressée en opposant un tel refus ;

Considérant que si Mme X fait valoir qu'elle vit avec sa mère et que sa fille est scolarisée en France, il ressort des pièces du dossier qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales au Sénégal où vit notamment le père de son enfant né au Sénégal ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment de la durée du séjour en France de l'intéressée, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté en date du 10 octobre 2004 n'a pas porté au droit de celle-ci au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que le préfet n'a ainsi ni méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée ;

Considérant, enfin, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'arrêté du 10 octobre 2004 soit intervenu en méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant aux termes desquelles « Dans toutes les instances qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale » ; qu'en l'absence de circonstances empêchant Mme X d'emmener avec elle sa fille qui réside en France depuis trois ans où elle est arrivée à l'âge de 10 ans, l'arrêté attaqué du

10 octobre 2004, qui ne fait pas obstacle à ce que cette enfant soit élevée par sa mère et poursuive sa scolarité au Sénégal ne méconnaît, en tout état de cause, par les stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 octobre 2004 ordonnant sa reconduite à la frontière ;

Considérant que la présente décision, qui rejette la requête de Mme X, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de réexaminer la situation de Mme X doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à Mme X la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Fatou Y épouse X et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

Copie en sera en outre adressée au préfet de la région Alsace, préfet du Bas-Rhin.

2

N° 05NC01472


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 05NC01472
Date de la décision : 19/10/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Evelyne STAHLBERGER
Rapporteur public ?: M. ADRIEN
Avocat(s) : MARX

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2006-10-19;05nc01472 ?
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