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20/10/2006 | FRANCE | N°06NC00494

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4eme chambre, 20 octobre 2006, 06NC00494


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 5 avril 2006, présentée pour M. Abdulkadir X élisant domicile ..., par Me Bilendo, avocat ;

M.X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0600379 en date du 1er mars 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du Préfet de l'Aube en date du 22 novembre 2005 ordonnant sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre le Préfet de l'Aub

e de lui délivrer un titre de séjour ;

Il soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'ir...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 5 avril 2006, présentée pour M. Abdulkadir X élisant domicile ..., par Me Bilendo, avocat ;

M.X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0600379 en date du 1er mars 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du Préfet de l'Aube en date du 22 novembre 2005 ordonnant sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre le Préfet de l'Aube de lui délivrer un titre de séjour ;

Il soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'irrégularité tenant à l'absence de convocation, à la mention erronée relative au dépôt d'un mémoire que le préfet aurait déposé et ne lui aurait pas été transmis ;

- le Tribunal devait tenir l'administration comme ayant acquiescé aux faits qu'il relatait ;

- le jugement attaqué a écarté à tort ses moyens tirés de la circulaire du 31 octobre 2005 du ministre de l'intérieur et de l'erreur manifeste d'appréciation eu égard à sa situation familiale, personnelle et scolaire ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu enregistré le 12 juin 2006, le mémoire en défense présenté par le Préfet de l'Aube tendant au rejet de la requête ;

Le préfet soutient que :

- aucune irrégularité n'a été commise tant dans la procédure de convocation que dans la présentation des mémoires, et ce dernier argument inopérant, manque en fait ;

- en tout état de cause, l'intéressé ne peut se prévaloir de la circulaire dès lors qu'il ne remplit pas la condition tenant à l'entrée régulière sur le territoire national et la poursuite d'études supérieures ;

- le moyen tenant à la séparation de la famille est infondé dès lors que la mesure touche l'ensemble de cette dernière en situation irrégulière ;

- les conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées dès lors que M. X ne peut prétendre à la délivrance d'un titre de séjour ;

Vu enregistré le 2 octobre 2006, les observations présentées par le préfet de l'Aube ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 octobre 2006 :

- le rapport de M. Job, président,

- et les conclusions de M. Tréand, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens :

Considérant qu'en se fondant sur des énonciations contenues dans les visas du jugement relatives à l'ensemble des mémoires et des autres pièces du dossier M.X doit être regardé comme soutenant que le Tribunal a méconnu le principe contradictoire en omettant de lui communiquer à l'audience le mémoire produit par le Préfet de l'Aube ; qu' il ne ressort pas des pièces du dossier que ce mémoire, transmis par télécopie et enregistré au greffe du Tribunal le jour de l'audience, ait été porté à la connaissance de l'intéressé durant celle-ci ; qu'ainsi, le moyen tenant au défaut de régularité du jugement devant être accueilli, le jugement du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne doit être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M.X devant le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le Préfet de l'Aube à la demande :

Considérant que le requérant établit que l'arrêté litigieux ne lui a pas été effectivement notifié le 12 décembre 2005 comme le mentionne l'accusé de réception postal, le pli recommandé qui le contenait ayant été remis à un personnel du Secours Populaire Français de Troyes où était reçu le courrier de la famille, lequel en a, sans y être autorisé, signé l'accusé de réception ; que la remise d'un pli recommandé à une personne tierce, qui ne résidait pas avec le destinataire et qui n'avait pas reçu procuration de celui-ci, ne constitue pas une notification régulière de nature à faire courir le délai de recours contentieux ; qu'ainsi le Préfet de l'Aube n'est pas fondé à soutenir qu'à la date du 25 février 2006 à laquelle il a introduit sa demande d'annulation de l'arrêté préfectoral, celle ci était tardive ; que la fin de non-recevoir opposée ne peut être accueillie ;

Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant qu'aux termes de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (…) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé, ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ; (…). ;

Considérant que le requérant, de nationalité turque, ne conteste pas s'être maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 5 octobre 2005, de la décision du Préfet de l'Aube du 28 septembre 2005 lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'ainsi, il entrait dans le champ d'application des dispositions susmentionnées ;

Sur le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le requérant de nationalité turque, est entré en France avec toute sa famille en 2001, à l'âge de quinze ans ; qu'après avoir intégré le lycée professionnel Gabriel Voisin à Troyes, il a obtenu au bout de deux ans le CAP peinture avec d'excellents résultats se classant 1er de sa promotion ; qu'il est inscrit pour les années 2005-2007 au Bac-Professionnel Carrosserie qu'il devrait présenter en juin 2007 ; qu'eu égard aux excellentes appréciations portées sur son travail, ses efforts, sa motivation ainsi qu'à ses résultats supérieurs à la moyenne, il a des chances sérieuses de réussir cet examen ; qu'au surplus, et dans l'hypothèse où parents et fratrie regagneraient prochainement la Turquie à l'issue de la procédure engagée à l'encontre des parents par le Préfet de l'Aube, il établit que son entretien serait totalement assuré par des tiers qui s'y sont engagés ; que, dans ces circonstances très particulières, en prenant le 22 novembre 2005 une mesure d'éloignement à son encontre, ledit préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle de M. X ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 22 novembre 2005 du Préfet de l'Aube ordonnant sa reconduite à la frontière ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que la présente décision implique seulement que le Préfet de l'Aube réexamine la situation de l'intéressé et lui délivre immédiatement une autorisation provisoire de séjour dans l'attente de sa nouvelle décision conformément aux dispositions de l'article L.512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite les conclusions de M. YLMAZ tendant à la délivrance d'un titre de séjour doivent être rejetées ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du 1er mars 2006 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ensemble l'arrêté du 22 novembre 2005 du Préfet de l'Aube sont annulés.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Abdulkadir X et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

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06NC00494


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4eme chambre
Numéro d'arrêt : 06NC00494
Date de la décision : 20/10/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Pascal JOB
Rapporteur public ?: M. TREAND
Avocat(s) : BILENDO

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2006-10-20;06nc00494 ?
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