La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/11/2006 | FRANCE | N°04NC00720

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3eme chambre - formation a 3, 09 novembre 2006, 04NC00720


Vu la requête, enregistrée au greffe le 2 août 2004, complétée par mémoire enregistré le 7 juillet 2006, présentée pour M. Michel X, élisant domicile ..., par Me Delot, avocat ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 4 mai 2004 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 40 354,39 euros en réparation des préjudices subis du fait de la non-validation de sa période de chômage pour l'obtention de droits à la retraite complémentaire liée au refus de l'Etat

de prendre à sa charge les cotisations de sécurité sociale y afférentes ;

2°) ...

Vu la requête, enregistrée au greffe le 2 août 2004, complétée par mémoire enregistré le 7 juillet 2006, présentée pour M. Michel X, élisant domicile ..., par Me Delot, avocat ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 4 mai 2004 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 40 354,39 euros en réparation des préjudices subis du fait de la non-validation de sa période de chômage pour l'obtention de droits à la retraite complémentaire liée au refus de l'Etat de prendre à sa charge les cotisations de sécurité sociale y afférentes ;

2°) de condamner l'Etat, à défaut pour celui-ci de pouvoir faire rétablir ses droits à la retraite pour la période de chômage litigieuse, à lui verser les sommes de 25 106,70 € au titre des pertes personnelles sur ses retraites, de 18 748,20 € au titre des pertes sur les pensions de reversion de sa future épouse et de 4 000 € au titre de son préjudice moral ;

3°) de condamner l'Etat à lui payer une somme de 2 000 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- les motifs du jugement sont soit inopérants soit non-fondés ;

- maître contractuel de l'enseignement privé, le requérant relève des régimes de retraite complémentaire de droit privé ARRCO et AGIRC régis par des conventions collectives nationales et doit ainsi être assimilé à un salarié du secteur privé ; en conséquence, l'Etat qui le rémunère et lui a versé les allocations de perte d'emploi doit lui assurer également la prise en compte de cette période de chômage au titre de ses retraites complémentaires conformément aux accords paritaires nationaux du 14 mars 1947 et du 8 décembre 1961 ;

- l'exigence de parité avec les maîtres de l'enseignement public posée par la loi du 25 novembre 1977 dite « loi Guermeur » en matière de conditions de cessation d'activité et de droits sociaux n'est pas respectée ;

- du fait du refus de l'Etat de prendre en charge les cotisations de retraite complémentaire afférentes aux indemnités de chômage du 1er septembre 1981 au 31 août 1991, le requérant a subi un préjudice financier important, lié à la perte de points gratuits et qui, compte-tenu des intérêts légaux, doit être fixé à une perte totale de 25 106,70 € ;

- la future épouse du requérant subira également un préjudice financier en cas de décès de son époux sur l'ensemble des pensions de réversion ;

- le préjudice moral subi par le requérant est fixé à 4 000 € ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 15 mai 2006, présenté par le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche ;

Le ministre conclut au rejet de la requête de M. X ;

Il soutient que :

- les maîtres contractuels de l'enseignement privé sont des agents de droit public qui sont dans une situation différente des maîtres agréés, salariés de droit privé, soumis à des conventions spécifiques pour la validation des périodes de chômage pour la retraite complémentaire ;

- la non-validation de la période de chômage résulte des conditions posées par les délibérations des gestionnaires de l'AGIRC et de l'ARRCO, prises en application de la convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947, qui subordonne l'inscription des droits à retraite au titre des périodes de chômage à une convention signée avec les organismes auto-assurés en matière d'assurance chômage tels que l'Etat ; en n'ayant pas conclu cette convention qui est seulement facultative, l'Etat n'a pas commis de faute ;

- le principe d'égalité de traitement entre les maîtres de l'enseignement privé et ceux du public tiré de l'article L. 914-1 du code de l'éducation ne s'applique pas au présent litige car les maîtres de l'enseignement public ne bénéficient pas de l'avantage sollicité par le requérant ;

- en tout état de cause, la demande en réparation du préjudice moral est irrecevable car nouvelle en appel ;

- la perte de droits à pension de réversion de la future épouse du requérant n'est pas un préjudice direct et certain puisque M. X est toujours célibataire et que le préjudice de sa future épouse ne se réaliserait que dans l'hypothèse où elle lui survivrait ;

Vu l'ordonnance en date du 4 août 2006 reportant la date de clôture de l'instruction, fixée initialement au 24 mai 2006, au 8 septembre 2006 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le décret n° 60-745 du 28 juillet 1960 et notamment son article 6 ;

Vu le décret n° 60-746 du 28 juillet 1960 ;

Vu le décret n° 80-6 du 2 janvier 1980 ;

Vu le décret n° 95-946 du 23 août 1995 et notamment son article 1er ;

Vu le code de l'éducation et notamment son article L 914-1 ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 octobre 2006 :

; le rapport de M. Martinez, premier conseiller,

- les observations de Me Delot, avocat de M. X,

; et les conclusions de M. Tréand, commissaire du gouvernement ;

Après avoir pris connaissance de la note en délibéré déposée le 20 octobre 2006 pour le requérant ;

Sur la régularité de la procédure juridictionnelle :

Considérant que, contrairement à ce que soutient M. X, la seule circonstance que le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, a, en dépit de la mise en demeure que lui avait adressée la Cour, mis plus d'un an avant de produire ses observations en défense à la requête ne constitue pas une violation de l'article 6-§1 de la convention européenne des droits de l'homme et ne fait pas obstacle à la recevabilité du mémoire en défense du ministre déposé le 15 mai 2006 ;

Au fond :

Considérant que M. X, maître contractuel de l'enseignement privé, a perçu de l'Etat, en application de l'article L. 351-12 du code du travail, des allocations d'assurance chômage du 1er septembre 1988 au 31 août 1991 ; que, lors de son départ à la retraite, les caisses affiliées aux régimes de retraite complémentaire gérés respectivement par l'association des régimes de retraites complémentaires (ARRCO) et par l'association générale des institutions de retraite des cadres (AGIRC) ont refusé de prendre en considération cette période de chômage pour l'attribution de « points de retraite » notamment « gratuits » au titre de la retraite complémentaire au motif que seules peuvent être validées les périodes de chômage reconnues et indemnisées par les ASSEDIC ; que M. X a recherché devant le Tribunal administratif de Nancy la responsabilité pour faute de l'Etat en soutenant que le non-versement par l'Etat à l'UNEDIC de la part de cotisations de sécurité sociale due pour les personnels de l'enseignement privé a entraîné des pertes financières sur ses retraites personnelles et sur les pensions de réversion de sa future épouse ;

Considérant, en premier lieu, que l'attribution de points de retraite complémentaire pour les maîtres de l'enseignement privé indemnisés au titre du chômage résulte d'accords collectifs nationaux qui subordonnent la validation au titre des régimes de retraite complémentaires des périodes de chômage à la condition qu'elles soient indemnisées par les ASSEDIC ; que si M. X invoque la convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947, il ne se prévaut d'aucune stipulation dudit accord d'où il résulterait l'obligation pour l'Etat de garantir la prise en compte des périodes de chômage indemnisées ; que si, dans le cadre de l'application de cette convention collective, les organismes relevant du régime de l'auto-assurance en matière de chômage, au sens de l'article L. 351-12 du code du travail, peuvent conclure avec l'association générale des institutions de retraite des cadres (AGIRC) une convention en vue d'inscription de droits à retraite au titre des périodes de chômage, le fait pour l'Etat de ne pas avoir exercé cette simple faculté ne saurait constituer une faute de nature à engager sa responsabilité ; que si M. X invoque les stipulations du protocole du 10 mai 1967 remplacé par le protocole du 2 janvier 1990, permettant aux maîtres agréés de l'enseignement privé d'acquérir des points de retraite complémentaires lors des périodes de chômage, le requérant, en sa qualité de maître contractuel de l'enseignement privé, n'entre pas dans le champ d'application desdites conventions ; que le requérant ne saurait pas, en tout état de cause, utilement se prévaloir d'une violation du principe d'égalité de traitement dès lors que les maîtres contractuels des établissements d'enseignement privé, agents de droit public, sont dans une situation différente de celle des maîtres agréés, salariés de droit privé ;

Considérant, en deuxième lieu, que, d'une part, le requérant ne se prévaut d'aucune disposition législative ou réglementaire ni d'aucun principe général du droit imposant à l'Etat de garantir aux maîtres contractuels de l'enseignement privé la prise en compte des périodes de chômage pour l'acquisition de droits à retraite complémentaire en prenant lui-même en charge la part des pensions de retraite non validées par les caisses de retraite complémentaires ; que, d'autre part, l'Etat pouvait légalement, en vertu des dispositions de l'article L. 351-12 du code du travail, décider de ne pas confier la gestion de l'indemnisation aux institutions gestionnaires du régime d'assurance mais d'assurer directement la charge et l'indemnisation des allocations visées à l'article L. 351-3 du code du travail et n'avait pas, en conséquence, à procéder au versement aux institutions concernées de la part de cotisation patronale afférente auxdites prestations ; que, par suite, M. X n'est pas davantage fondé à soutenir que l'Etat aurait été tenu légalement de verser à l'UNEDIC la part des cotisations de sécurité sociale afférentes aux allocations d'assurance chômage litigieuses ;

Considérant, en dernier lieu, que la règle d'égalisation des situations posée par les dispositions de l'article L. 914-1 du code de l'éducation fait obstacle à ce que l'Etat consente aux maîtres contractuels ou agréés des établissements d'enseignement privés sous contrat des mesures sociales ayant pour effet de placer ces maîtres dans une situation plus favorable que celle des maîtres titulaires de l'enseignement public ; qu'ainsi, le requérant n'est pas fondé à se prévaloir du principe d'égalité de traitement entre les maîtres de l'enseignement privé et ceux de l'enseignement public tiré de l'article L. 914-1 dès lors que la validation des périodes de chômage au titre de la retraite complémentaire n'est pas au nombre des avantages servis aux maîtres de l'enseignement public ;

Considérant qu'il résulte tout ce qui précède que M. X n'établit pas la faute qu'aurait commise l'Etat dans l'accomplissement de ses obligations envers les maîtres contractuels de l'enseignement privé ; qu'il n'est, par suite, pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande d'indemnité dirigée contre l'Etat ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à M. X la somme qu'il réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête susvisée de M. X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Michel X et au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

3

N° 04NC00720


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 04NC00720
Date de la décision : 09/11/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux des pensions

Composition du Tribunal
Président : M. DESRAME
Rapporteur ?: M. José MARTINEZ
Rapporteur public ?: M. TREAND
Avocat(s) : DELOT

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2006-11-09;04nc00720 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award