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07/12/2006 | FRANCE | N°06NC01020

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 07 décembre 2006, 06NC01020


Vu la requête, enregistrée le 20 juillet 2006, présentée pour Mlle Hanan X élisant domicile ..., par Me Wurtz, avocat ; Mlle X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 31 mai 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 mai 2006 du préfet du Bas-Rhin décidant sa reconduite à la frontière et fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) de mettre à la charge de l

'Etat le paiement de la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code...

Vu la requête, enregistrée le 20 juillet 2006, présentée pour Mlle Hanan X élisant domicile ..., par Me Wurtz, avocat ; Mlle X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 31 mai 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 mai 2006 du préfet du Bas-Rhin décidant sa reconduite à la frontière et fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- c'est à tort que le juge de la reconduite a estimé qu'elle n'établissait pas que son état de santé répondait aux conditions fixées par l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, justifiant la délivrance de plein droit d'un titre de séjour ;

- l'arrêté est illégal dès lors que son état de santé exige un soutien important et un suivi rapproché comme en atteste le certificat médical établi le 29 mai 2006 ; il s'est en outre encore dégradé puisqu'enceinte, elle présente une grossesse à risque ; elle n'est pas en état de voyager et le suivi dont elle a besoin n'est pas disponible en Somalie ;

- présente en France depuis plus d'un an, elle remplit les conditions pour se voir délivrer de plein droit un titre de séjour portant la mention «vie privée et familiale» ; l'enfant qu'elle porte a été reconnu par son père ; si elle est séparée de ce dernier, elle maintient avec lui des liens étroits ;

- l'exécution de l'arrêté de reconduite porterait une atteinte aux intérêts de son enfant de connaître et de pouvoir être élevé par son père biologique ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 30 novembre 2006, présenté par le préfet de la Région Alsace, préfet du Bas-Rhin ;

Vu la décision du président de la Cour donnant délégation aux magistrats pour rendre les décisions ou statuer par ordonnance par application des dispositions de l'article R. 222-33 du code de justice administrative ;

Vu, en date du 29 septembre 2006, la décision du bureau de l'aide juridictionnelle près du Tribunal de grande instance de Nancy (section administrative) octroyant à Mlle X le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale et désignant Me Wurtz, avocat, pour la représenter ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 décembre 2006 :

- le rapport de Mme Guichaoua, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Wallerich, commissaire du gouvernement ;

Sur la légalité de l'arrêté de reconduite :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : «Ne peuvent faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (…) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi» ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment du certificat médical établi par un praticien hospitalier, produit en première instance, que Mlle X, ressortissante somalienne, entrée en France le 28 mai 2005, souffre d'une dépression réactionnelle grave, consécutive aux évènements qui l'ont conduite à quitter son pays ; que son état y est décrit comme nécessitant un soutien important et un suivi rapproché dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; qu'il y est, en outre, précisé que compte tenu de ses antécédents, Mlle X ne peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, pays vers lequel elle pouvait notamment être reconduite ; qu'au surplus, Mlle X, enceinte de cinq mois à la date de l'arrêté attaqué, présentait une grossesse à risque lui imposant une surveillance intensive et le repos jusqu'à terme ; qu'en décidant, dans ces circonstances, la reconduite à la frontière de Mlle X, le préfet du Bas-Rhin a méconnu les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers, et du droit d'asile ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mlle X est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant au paiement des frais irrépétibles :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à payer à Me Wurtz, avocat de Mlle X, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, sous réserve que cet avocat renonce à la perception de l'indemnité prévue par l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement en date du 31 mai 2006 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Strasbourg et la décision du 19 mai 2006 du préfet du Bas-Rhin ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle X sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera à Me Wurtz la somme de mille euros (1 000 euros) en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat pour l'aide juridictionnelle.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mlle Hanan X et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

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N° 06NC01020


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 06NC01020
Date de la décision : 07/12/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Marie GUICHAOUA
Rapporteur public ?: M. WALLERICH
Avocat(s) : WURTZ

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2006-12-07;06nc01020 ?
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