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07/01/2010 | FRANCE | N°08NC01400

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 07 janvier 2010, 08NC01400


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 9 septembre 2008, présentée pour la SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANCAIS, dont le siège est 34 rue du Commandant Mouchotte à Paris (75014), par Me Robinet ;

La SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANCAIS (SNCF) demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0501748 du 10 juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne l'a condamnée, solidairement avec l'Etat et la commune de Hierges, à verser à Mme , d'une part, une somme de 13 012,49 euros, augmentée des intérêts au taux l

gal à compter du 18 août 2005, lesdits intérêts devant être capitalisés à c...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 9 septembre 2008, présentée pour la SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANCAIS, dont le siège est 34 rue du Commandant Mouchotte à Paris (75014), par Me Robinet ;

La SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANCAIS (SNCF) demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0501748 du 10 juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne l'a condamnée, solidairement avec l'Etat et la commune de Hierges, à verser à Mme , d'une part, une somme de 13 012,49 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 18 août 2005, lesdits intérêts devant être capitalisés à compter du 18 août 2006, d'autre part, une somme de 3 320,07 euros représentant les frais d'expertise, en réparation du préjudice subi par celle-ci du fait des inondations de sa maison survenues les 28 août et 11 novembre 2002 et 1er et 2 janvier 2003 ;

2°) de rejeter la demande de Mme en tant qu'elle est dirigée contre elle et de faire droit à la demande de celle-ci en tant qu'elle est dirigée contre l'Etat et la commune de Hierges ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner l'Etat et la commune de Hierges à la garantir de toutes condamnations prononcées au profit de Mme ;

4°) de condamner solidairement l'Etat et la commune de Hierges à lui verser une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- elle ne saurait voir sa responsabilité engagée : elle n'est pas partie à la convention tripartite du 25 janvier 1999 envisageant les travaux connexes à la suppression du passage à niveau 114 ; les travaux de voirie à l'origine du dommage ont été réalisés par la DDE des Ardennes, sous la maîtrise d'ouvrage de la commune de Hierges ; Réseau Ferré de France a donné à la SNCF un mandat de maîtrise d'ouvrage pour procéder à la dépose du platelage équipant la traversée à niveau, de la signalisation routière de position et de la signalisation ferroviaire encadrant la traversée et au rétablissement de la continuité des clôtures de chemin de fer, mais ces travaux ferroviaires ne sont pas à l'origine des inondations en cause ; elle a émis de nombreuses réserves et mises en garde concernant le fonctionnement hydraulique du site ; elle a subi des inondations ayant interrompu le trafic ferroviaire ;

- sa responsabilité sans faute, du fait de dommages permanents imputables à la voie ferrée et ses dépendances, ne peut pas davantage être retenue à l'égard des tiers, dès lors qu'il n'y a pas eu défaut d'entretien de ces ouvrages ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 15 janvier 2009, présenté pour Mme par le cabinet d'avocats Devarenne associés ;

Mme conclut au rejet de la requête de la SNCF et à la condamnation solidaire de celle-ci, de l'Etat et de la commune de Hierges à lui verser une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir que :

- la SNCF admet que Réseau Ferré de France lui avait donné un mandat de maîtrise d'ouvrage pour les travaux ferroviaires ; la SNCF était également impliquée au titre de sa consultation sur le projet de suppression du passage à niveau, de sa participation au contrat de maîtrise d'oeuvre, et elle a manqué à son obligation d'entretien du réseau d'assainissement en autorisant la Direction Départementale de l'Equipement à se brancher provisoirement sur un regard d'emprise SNCF ; en première instance, la SNCF avait précisé, dans un mémoire du 21 août 2004, que la procédure devait être dirigée contre elle ;

- le maire de Hierges avait notamment l'obligation de prendre, dans le cadre de ses pouvoirs de police, des mesures destinées à prévenir les inondations ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 3 mars 2009, présenté pour la SNCF, qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;

Elle soutient en outre que :

- elle n'est intervenue qu'en sa qualité de gestionnaire d'infrastructures délégué pour le compte de Réseau Ferré de France ;

- la Direction Départementale de l'Equipement des Ardennes et la commune de Hierges, qui n'ont pas étudié de solution alternative à la solution provisoire mise en oeuvre, sont co-responsables des inondations en cause ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 avril 2009, présenté pour la commune de Hierges par Me Antony ;

La commune de Hierges demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête de la SNCF ;

2°) par voie d'appel provoqué, de réformer le jugement attaqué en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à ses conclusions en garantie dirigées contre l'Etat et de condamner l'Etat à la garantir intégralement de toutes condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre ;

3°) de condamner la SNCF à lui verser une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir que :

- la SNCF a participé à l'élaboration du projet qui a fait l'objet de la convention tripartite, et a notamment autorisé un busage provisoire à l'emplacement du fossé terre le long de la voie ; elle était également responsable de l'entretien de la voie ferrée ;

- elle est fondée à appeler l'Etat à la garantir de toutes condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre, dès lors que la Direction Départementale de l'Equipement des Ardennes était le maître d'oeuvre pour la réalisation des travaux de voirie, que c'est elle qui aurait dû procéder à une étude hydraulique permettant la prise en compte de l'écoulement des eaux fluviales, et qu'elle était tenue par une obligation de conseil et d'assistance technique ;

- c'est à tort que le tribunal a estimé qu'elle n'avait pas assuré un entretien suffisant du fossé dont elle avait la charge, car c'est le défaut d'entretien de la voie ferrée qui a été mis en cause par l'expert ;

- les inondations dont a été victime la requérante ont été causées par l'obstruction des dalots existants ;

Vu le mémoire complémentaire en défense, enregistré le 15 juin 2009, présenté pour Mme , qui conclut dans le sens de ses précédentes écritures ;

Elle fait valoir en outre que, contrairement à ce que soutient la commune de Hierges, elle a été victime d'autres inondations depuis 2004 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 juin 2009, présenté par le ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, qui conclut au rejet de la requête de la SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANCAIS et des conclusions de la commune de Hierges en tant qu'elles sont dirigées contre l'Etat ;

Il fait valoir que :

- la SNCF engage sa responsabilité, dès lors que Réseau Ferré de France lui a confié un mandat de maîtrise d'ouvrage pour les travaux ferroviaires ;

- les conclusions de la SNCF tendant à obtenir la condamnation solidaire de l'Etat et de la commune à indemniser intégralement la victime sont nouvelles en appel, et donc irrecevables ;

- la responsabilité de l'Etat ne peut pas être retenue ;

- l'entretien du fossé incombant à la commune a été insuffisant ;

- l'appel en garantie formé par la SNCF contre l'Etat est irrecevable comme présenté pour la première fois en appel ;

- les conclusions de la commune dirigées contre l'Etat doivent être rejetées, en tant qu'elles sont formées entre intimés et ne constituent pas un appel provoqué ;

Vu l'ordonnance du 2 octobre 2009 du président de la troisième chambre de la Cour fixant la clôture de l'instruction de la présente instance au 23 octobre 2009 à 16 heures ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après qu'aient été entendus au cours de l'audience publique du 3 décembre 2009 ;

- le rapport de M. Favret, premier conseiller,

- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,

- et les observations de Me Robinet, avocat de la SNCF, et de Me Devarenne-Lamour, avocat de Mme ;

Considérant que Mme loue depuis 1958 une ancienne maison de garde-barrière située au passage à niveau 114 à Hierges (Ardennes) ; qu'en 1999, le passage à niveau a été supprimé et le chemin ainsi que le fossé attenants à l'immeuble ont été modifiés à cette occasion ; que Mme a demandé au Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de condamner solidairement la SNCF, l'Etat et la commune de Hierges à l'indemniser du préjudice qu'elle a subi après les inondations de sa maison survenues en août et novembre 2002 et janvier 2003, qu'elle impute aux travaux de voirie réalisés en novembre 1999, sous la maîtrise d'oeuvre de la direction départementale de l'équipement, pour le compte de la commune de Hierges ; que, par jugement du 10 juillet 2008, le tribunal a, entre autres dispositions, condamné solidairement la SNCF, l'Etat et la commune de Hierges à réparer le préjudice subi par Mme en sa qualité de tiers par rapport aux travaux en cause et à supporter les frais d'expertise ; que la SNCF relève appel dudit jugement en concluant, à titre principal, à sa mise hors de cause et, à titre subsidiaire, à être garantie par l'Etat et la commune de Hierges des condamnations prononcées à son encontre, cependant que, par voie d'appel provoqué, la commune de Hierges conclut à la réformation dudit jugement en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à ses conclusions en garantie dirigées contre l'Etat ;

Sur les conclusions principales de la SNCF :

Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert désigné par le tribunal, que les inondations dont Mme a été victime ont pour origine les travaux de voirie entrepris, après la suppression du passage à niveau n° 114, pour modifier le chemin et le fossé attenants audit passage à niveau, travaux ayant conduit la Direction Départementale de l'Equipement des Ardennes à se brancher provisoirement, pour le déversement des eaux pluviales, sur un collecteur de la SNCF qui n'avait pas été conçu à cette fin ; qu'il est constant que la SNCF a, par lettre en date du 4 janvier 2001 adressée au maire de Hierges, autorisé un busage provisoire à l'emplacement du fossé terre le long de la voie ; que c'est ainsi à bon droit que les premiers juges ont estimé que la SNCF avait participé à la réalisation des travaux de voirie à l'origine du dommage et voyait ainsi sa responsabilité engagée vis-à-vis de Mme , sans que puissent y faire obstacle les circonstances qu'elle n'était pas partie à la convention conclue le 25 janvier 1999 entre Réseau Ferré de France, qui lui avait par ailleurs donné mandat pour les travaux ferroviaires, la commune de Hierges et le département des Ardennes concernant les travaux connexes à la suppression du passage à niveau 114, qu'elle ait subi elle-même des inondations ayant interrompu le trafic ferroviaire, et aurait été contrainte, pour éviter l'inondation des voies ferrées, d'autoriser provisoirement le déversement des eaux pluviales dans le collecteur en cause ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SNCF n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne l'a condamnée, solidairement avec la commune de Hierges et l'Etat, à réparer le préjudice subi par Mme ;

Sur les conclusions subsidiaires de la SNCF :

Considérant que les conclusions subsidiaires de la SNCF tendant à condamner l'Etat et la commune de Hierges à la garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre sont nouvelles en appel, et, par suite, irrecevables ;

Sur l'appel provoqué de la commune de Hierges :

Considérant que la situation de la commune de Hierges n'est pas aggravée par l'exercice de l'appel principal de la SNCF ; que, par suite, ses conclusions d'appel provoqué tendant à la reformation du jugement attaqué en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à ses conclusions en garantie dirigées contre l'Etat, enregistrées après expiration du délai d'appel, ne sont pas recevables ;

Sur les conclusions au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge solidaire de l'Etat et de la commune de Hierges, qui ne sont pas, parties perdantes vis-à-vis de la SNCF, la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la SNCF à verser à la commune de Hierges une somme de 1 500 euros au titre des mêmes dispositions ;

Considérant, d'autre part, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SNCF une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, la commune de Hierges et l'Etat, qui ne dirigent aucune conclusion contre elle, n'étant pas parties perdantes vis-à-vis de Mme , les conclusions de celle-ci tendant à ce que l'Etat et la commune de Hierges soient condamnés à son profit sur le fondement des mêmes dispositions doivent être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANÇAIS est rejetée.

Article 2 : La SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANÇAIS versera respectivement à Mme et à la commune de Hierges une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : L'appel provoqué de la commune de Hierges est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de Mme tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées en tant qu'elles sont dirigées contre l'Etat et la commune de Hierges.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANÇAIS, à Mme Ginette , à la commune de Hierges et au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.

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08NC01400


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08NC01400
Date de la décision : 07/01/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. VINCENT
Rapporteur ?: M. Jean-Marc FAVRET
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : ROBINET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2010-01-07;08nc01400 ?
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