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03/06/2010 | FRANCE | N°09NC00634

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 03 juin 2010, 09NC00634


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 29 avril 2009, présentée pour M. Emmanuel A, demeurant ..., par Me Sultan, avocat ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900439 en date du 31 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 30 décembre 2008 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de renouveler son titre de séjour, a prononcé une obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi, ainsi que ses conclu

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 29 avril 2009, présentée pour M. Emmanuel A, demeurant ..., par Me Sultan, avocat ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900439 en date du 31 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 30 décembre 2008 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de renouveler son titre de séjour, a prononcé une obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi, ainsi que ses conclusions relatives à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre à l'administration de réexaminer sa situation à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de condamner l'Etat à verser à son avocat, en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et sous réserve qu'il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat, une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative en ce qui concerne les frais exposés en première instance et une somme de 1 200 euros au titre des frais exposés en appel ;

Il soutient :

- que le tribunal administratif a renversé la charge de la preuve et qu'il appartient à l'administration de prouver que l'intéressé pourra être soigné dans son pays d'origine ;

- que le dernier avis du médecin inspecteur de la santé est en contradiction avec les avis émis précédemment en ce qui concerne la possibilité de bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;

- que son retour dans son pays d'origine sera préjudiciable à sa santé et que le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- qu'il n'a pas été convoqué à la préfecture pour indiquer s'il pouvait prétendre à un titre de séjour pour un autre motif que sa santé ;

- que le préfet n'a pas pris en compte l'ensemble des autres considérations de droit et de fait, telles que son intégration, le fait qu'il exerce un emploi et justifiant l'attribution d'un titre de séjour, a ainsi commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- que l'obligation de quitter le territoire est illégale en conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- que l'obligation de quitter le territoire est entachée d'erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il n'est pas justifié de la modification de sa situation médicale au regard des avis des médecins inspecteurs de la santé ;

- que le rejet de son recours par la commission des recours des réfugiés, devant laquelle il n'a pas bénéficié d'un procès équitable tel que prévu par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ne pouvait suffire à motiver la décision fixant le pays de renvoi ;

- que la décision fixant le pays de renvoi est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'il encourt un risque pour sa vie et sa sécurité ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 juin 2009, présenté par le préfet du Bas-Rhin ;

Le préfet conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle en date du 13 novembre 2009 accordant l'aide juridictionnelle à 100% à M. A ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 avril 2010 :

- le rapport de Mme Stefanski, président,

- et les conclusions de Mme Fischer-Hirtz, rapporteur public ;

Sur le refus de titre de séjour :

Considérant qu'aucun texte ne prévoit la convocation à la préfecture d'un étranger sollicitant le renouvellement de son titre de séjour pour raisons de santé ;

Considérant qu'il ressort des termes de la décision contestée, qui rappelle les articles applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et fait mention de l'état de santé de M. A, de sa situation familiale, de l'absence d'éléments permettant de l'admettre au séjour à titre exceptionnel ou à un autre titre et de l'absence de preuve des risques encourus en cas de retour dans son pays d'origine, que le préfet du Bas-Rhin s'est fondé sur l'ensemble des éléments de droit et de fait de nature à exercer une influence sur sa décision, compte tenu des motifs de la demande de renouvellement de titre de séjour de M. A ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : ...7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ;... 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin inspecteur de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin inspecteur ou le médecin chef peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat. ;

Considérant, d'une part, qu'il ressort de l'avis du médecin-inspecteur de la santé publique, que si l'état de santé de M. A, ressortissant du Rwanda, nécessite une prise en charge médicale et que si le défaut de cette prise en charge pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressé pourra toutefois bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que le certificat médical d'un psychiatre, indiquant seulement que la prise en charge du requérant doit être poursuivie et le rapport médical, établi après la décision contestée, par un médecin du pays d'origine de M. A, mentionnant sans autres précisions que le système sanitaire actuel du Rwanda ne peut garantir au requérant des soins conduisant à une guérison totale, ne sont pas de nature à remettre en cause les conclusions du médecin inspecteur de la santé ;

Considérant d'autre part, que si M. A soutient qu'il est depuis l'année 2004 en France, qu'il y est parfaitement intégré, appartient à des associations permettant le rapprochement des cultures rwandaises et françaises et oeuvrant pour la santé, qu'il est salarié depuis le 2 juillet 2008 dans une même entreprise où il donne entièrement satisfaction, qu'il a un logement, n'a plus aucun contact avec sa famille au Rwanda dont il ignore si ses membres y vivent encore, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé, célibataire et sans enfants est entré sur le territoire national à l'âge de 31 ans après avoir quitté son pays dix ans auparavant et qu'il n'établit pas avoir des attaches familiales en France et ne plus en avoir dans son pays d'origine ; qu'ainsi, il n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait, par la décision contestée, porté à son droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette mesure a été prise et aurait ainsi commis une erreur manifeste d'appréciation et méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que les dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur l'obligation de quitter le territoire :

Considérant, d'une part, qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que M. A n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

Considérant, d'autre part, que, pour les mêmes raisons que celles qui ont été exposées ci-dessus, le moyen tiré par M. A de ce que la décision l'obligeant à quitter le territoire serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation, ne peut qu'être écarté ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

Considérant que si M. A, dont la demande d'admission au statut de réfugié a été rejetée par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 10 février 2004, confirmée par la Commission des recours des réfugiés le 7 juin 2005, et qui ne peut utilement soutenir qu'il n'a pas bénéficié devant cette commission d'un procès équitable au sens de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, fait valoir qu'il craint des poursuites et traitements dégradants en cas de retour dans son pays d'origine en raison de son appartenance à la communauté hutu et de ce qu'il a quitté le Rwanda depuis quinze ans, il n'assortit pas ses allégations de précisions ou justifications de nature à établir la réalité des risques auxquels il se trouverait personnellement exposé ; que, par suite, par l'arrêté attaqué, le préfet du Bas-Rhin, qui ne s'est pas cru lié par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Commission des recours des réfugiés, n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg, qui n'a pas renversé la charge de la preuve, a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions de M. A, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de l'intéressé tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de réexaminer sa situation à compter de l'arrêt à intervenir, ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à l'avocat de M. A la somme que celui-ci demande sur le fondement des dispositions susmentionnées ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Emmanuel A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

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09NC00634


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09NC00634
Date de la décision : 03/06/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. COMMENVILLE
Rapporteur ?: Mme Colette STEFANSKI
Rapporteur public ?: Mme FISCHER-HIRTZ
Avocat(s) : SCP SULTAN PEREZ BENSMIHAN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2010-06-03;09nc00634 ?
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