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10/05/2012 | FRANCE | N°10NC01739

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 10 mai 2012, 10NC01739


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 15 novembre 2010, complétée par un mémoire enregistré le 5 septembre 2011, présentée pour la société à responsabilité limitée (SARL) BURSA, dont le siège est 38 rue Urbain IV à Troyes (10000), par Me Bensaid, avocat ;

La société BURSA demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0701335 en date du 16 septembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande en décharge, d'une part, du complément d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre

des exercices clos en 2001, 2002 et 2003, d'autre part, du complément de taxe sur la val...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 15 novembre 2010, complétée par un mémoire enregistré le 5 septembre 2011, présentée pour la société à responsabilité limitée (SARL) BURSA, dont le siège est 38 rue Urbain IV à Troyes (10000), par Me Bensaid, avocat ;

La société BURSA demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0701335 en date du 16 septembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande en décharge, d'une part, du complément d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2001, 2002 et 2003, d'autre part, du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé pour la période du 1er octobre 2000 au 31 décembre 2003 par avis de mise en recouvrement du 30 juin 2006, ainsi que des pénalités dont ils ont été assortis ;

2°) de prononcer les décharges demandées ;

3°) d'ordonner par jugement avant-dire droit qu'un huissier constate les quantités de levure et de farine qu'elle utilise pour fabriquer ses pains ;

Elle soutient :

- qu'en procédant à une enquête le 21 janvier 2004 au cours de laquelle elle a examiné les factures mentionnées dans les propositions de rectification, l'administration a commencé la vérification de comptabilité avant sa date officielle du 1er octobre 2004 ;

- que la proposition de rectification du 22 décembre 2004 n'était pas interruptive de prescription en ce qui concerne l'exercice clos en 2001, dès lors qu'elle n'était pas suffisamment motivée et que l'administration a repris les mêmes redressements en les motivant davantage dans la proposition de rectification du 11 mai 2005 ;

- que le rejet de sa comptabilité n'est pas fondé sur des éléments probants et que c'est à tort que les premiers juges se sont fondés sur les résultats d'une enquête postérieure aux propositions de rectification, qui n'a d'ailleurs pas révélé d'insuffisances comptables, pour juger que l'administration était en possession d'éléments justifiant le rejet de cette comptabilité ; qu'elle a comptabilisé tous ses achats ;

- qu'elle démontre par la production d'un constat d'huissier et d'une attestation, que l'administration n'a pas tenu compte des quantités réelles de levure qu'elle utilise pour fabriquer ses pains et n'a pas recherché les quantités des autres ingrédients entrant dans cette fabrication ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 mai 2011, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat ;

Le ministre conclut au rejet de la requête ;

Il soutient :

- que la seconde notification de redressement ne porte pas sur l'exercice clos en 2001, contrairement à ce qu'affirme la société ;

- que la vérification de comptabilité n'a pas débuté avec l'exercice du droit d'enquête, qui n'a pas comporté d'examen critique des documents comptables présentés ni de rapprochement avec les déclarations de l'entreprise ;

- que la charge de la preuve incombe à la société dès lors que l'administration a suivi l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ;

- que les recoupements intracommunautaires ont démontré l'absence de comptabilisation d'achats et que, s'ils n'ont pas donné lieu à rappels de taxe sur la valeur ajoutée, ils ont conduit à l'application de l'amende de 5% prévue par l'article 1788 septies du code général des impôts ;

- que le droit de communication a révélé un nombre important de factures d'achats non présentées et non comptabilisées portant sur des produits en rapport avec l'activité de la société ;

- que la reconstitution de recettes est fondée sur des éléments recueillis dans l'entreprise et s'appuie sur la méthode des pains qui avait donné des résultats plus favorables à la contribuable, bien que proches, de la méthode des sauces également utilisée ;

- que le constat d'huissier produit par la société a été effectué en l'absence du vérificateur et contredit les éléments mentionnés par le syndicat départemental de la boulangerie, selon qui les quantités de levure que la société soutient utiliser n'auraient plus pour effet de faire lever le pain et le rendrait immangeable ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 avril 2012 :

- le rapport de Mme Stefanski, président,

- et les conclusions de M. Féral, rapporteur public ;

Considérant que la société à responsabilité limitée (SARL) BURSA, qui exploite un commerce de restauration rapide, a fait l'objet du 21 janvier au 3 février 2004 d'une enquête concernant d'éventuels manquements aux règles de facturation, sur le fondement des dispositions des articles L. 80 F à L. 80 H du livre des procédures fiscales puis, du 1er octobre au 21 décembre 2004, d'une vérification de comptabilité, portant sur les exercices clos en 2001, 2002 et 2003 ; que des redressements lui ont été notifiés les 22 décembre 2004 et 11 mai 2005 en matière d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

En ce qui concerne le début de la vérification de comptabilité :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 F du livre des procédures fiscales dans sa rédaction alors en vigueur : "Pour rechercher les manquements aux règles de facturation auxquelles sont soumis les assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée... les agents des impôts ayant au moins le grade de contrôleur peuvent se faire présenter les factures, la comptabilité matière ainsi que les livres, les registres et les documents professionnels pouvant se rapporter à des opérations ayant donné ou devant donner lieu à facturation et procéder à la constatation matérielle des éléments physiques de l'exploitation... " ; qu'aux termes de l'article L. 80 H du même livre dans sa rédaction alors en vigueur : A l'issue de l'enquête prévue à l'article

L. 80 F, les agents de l'administration établissent un procès-verbal consignant les manquements constatés ou l'absence de tels manquements. /... Les constatations du procès-verbal ne peuvent être opposées à cet assujetti ainsi qu'aux tiers concernés par la facturation que dans le cadre des procédures de contrôle mentionnées à l'article L. 47..." ; qu'aux termes de l'article L. 47 du même livre : " (...) Une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification...." ; que la vérification de comptabilité consiste à contrôler sur place la sincérité des déclarations fiscales souscrites par un contribuable en les comparant avec les écritures comptables ou les pièces justificatives dont le service prend alors connaissance et dont il peut remettre en cause l'exactitude ; qu'une enquête effectuée conformément aux dispositions des articles L. 80 F et suivants du livre des procédures fiscales ne constitue pas le commencement d'une vérification de comptabilité ; que l'administration peut ensuite, conformément aux dispositions du dernier alinéa de l'article L . 80 H du livre des procédures fiscales précité, se fonder sur les éléments recueillis dans le cadre de cette enquête pour procéder à une vérification de comptabilité dans les conditions prévues notamment par l'article L. 47 du même livre ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du procès-verbal d'intervention signé par M. Mazrek, l'un des gérants de la SARL BURSA, qu'au cours de l'enquête effectuée sur place le 21 janvier 2004 en application des articles L. 80 F et suivants du livre des procédures fiscales, l'administration s'est bornée à demander au gérant de lui présenter les factures clients et fournisseurs, ainsi que les grands livres comptables du second semestre de l'année 2002, sans comparer ces documents aux déclarations fiscales de la société ; qu'ainsi, le service n'a pas commencé la vérification de comptabilité avant la date prévue par l'avis de vérification adressé à la société le 6 septembre 2004 ; que les dispositions de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales n'ont, dès lors, pas été méconnues ;

En ce qui concerne la motivation de la proposition de rectification du 22 décembre 2004 relative à l'exercice clos en 2001 :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction alors en vigueur : " L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation..." ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une notification de redressement doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile ; qu'en revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le vérificateur a explicitement indiqué, dans la proposition de rectification du 22 décembre 2004 relative à l'exercice clos en 2001, les motifs qui le conduisaient à écarter la comptabilité produite ; qu'il a précisé les règles de droit applicable, la nature, le montant et les motifs des redressements, ainsi que la méthode utilisée pour reconstituer les recettes de la SARL BURSA et les raisons du choix de cette méthode parmi les trois qu'il avait envisagées ; que, contrairement à ce que soutient la société requérante, la proposition de rectification du 11 mai 2005, qui n'établit de redressements qu'au titre des exercices clos en 2003 et 2004, ne comporte aucun complément de motivation en ce qui concerne les redressements relatifs à l'exercice clos en 2001 ; que, dès lors, la proposition du 22 décembre 2004 est suffisamment motivée et a mis la contribuable à même de présenter de manière entièrement utile ses observations ;

Sur le bien-fondé des impositions en litige :

Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que les recettes de la société BURSA, dont la caisse enregistreuse ne fonctionnait pas, étaient enregistrées globalement en fin de mois, que la comptabilité ne mentionnait que la répartition entre les ventes à consommer sur place et les ventes à emporter sans opérer de distinctions en fonction du mode de règlement ; qu'il résulte du droit de communication exercé par l'administration auprès des fournisseurs de la requérante, que celle-ci n'a pas présenté, ni comptabilisé l'ensemble de ses factures d'achats, notamment de viande ; que la comptabilité comportait des incohérences en ce qui concerne les chiffres des achats, des ventes et des stocks ; qu'ainsi, ladite comptabilité comportait de graves irrégularités ; que l'imposition ayant été établie sur des bases conformes à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, la charge de la preuve de l'exagération des impositions contestées incombe, en application des dispositions de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, à la contribuable ;

Considérant que pour reconstituer les recettes et le chiffre d'affaires de la société BURSA en ce qui concerne les sandwichs et assiettes qu'elle servait, le vérificateur a utilisé, d'une part, une méthode fondée sur le nombre de pains fabriqués par la société à partir des quantités de levure achetées par elle et, d'autre part, une méthode tenant compte des achats de sauces servies avec ces plats ; qu'il a finalement calculé les redressements à partir de la première méthode, plus favorable à la contribuable ; que si la société requérante fait valoir que, contrairement à ce qu'a retenu le vérificateur, elle utilisait plus de 50 grammes de levure par kilogramme de farine, elle se borne à produire à l'appui de ses allégations un constat d'huissier et une attestation de l'une de ses clientes, postérieurs à la vérification de comptabilité ; qu'ainsi, elle n'apporte pas la preuve qui lui incombe que la méthode de l'administration serait excessivement sommaire ou radicalement viciée, ni de l'exagération des redressements litigieux ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société BURSA n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société BURSA est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL BURSA et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, porte-parole du gouvernement.

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N° 10NC01739


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10NC01739
Date de la décision : 10/05/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée.


Composition du Tribunal
Président : M. COMMENVILLE
Rapporteur ?: Mme Colette STEFANSKI
Rapporteur public ?: M. FERAL
Avocat(s) : BENSAID

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2012-05-10;10nc01739 ?
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