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16/05/2012 | FRANCE | N°11NC01334

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 16 mai 2012, 11NC01334


Vu le recours, enregistré le 18 octobre 2007 sous le n° 07NC01409, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ; le ministre demande à la Cour :

1°) d'annuler les articles 1 et 2 du jugement n° 0400540 en date du 31 mai 2007 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a accordé à Mme la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1998, 1999 et 2000 ;

2°) de rétablir ces impositions, en droits et pénali

tés, à la charge de Mme aux rôles de l'impôt sur le revenu et aux contributions...

Vu le recours, enregistré le 18 octobre 2007 sous le n° 07NC01409, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ; le ministre demande à la Cour :

1°) d'annuler les articles 1 et 2 du jugement n° 0400540 en date du 31 mai 2007 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a accordé à Mme la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1998, 1999 et 2000 ;

2°) de rétablir ces impositions, en droits et pénalités, à la charge de Mme aux rôles de l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales au titre des années 1998, 1999 et 2000 ;

Il soutient que :

- c'est à tort que la décharge a été accordée aux associés communs de la SARL Class'hôtel et de la SCI Sudhotel aux motifs que la motivation de la notification de redressement de la société était insuffisante et que la réponse aux observations du contribuable aurait dû offrir un nouveau délai de 30 jours au contribuable pour lui permettre de formuler ses observations ;

- la SARL Class'hôtel, dont les associés étaient aussi les maîtres de la SCI Sudotel, n'avait pas d'intérêt d'exploitation à accepter des augmentations de loyer excessives ;

- la partie excessive des loyers en cause constitue un revenu distribué au sens de l'article 109 -1-1° du code général des impôts ;

- à titre subsidiaire, il est fondé à demander que l'imposition de ce revenu distribué par une société de capitaux à une SCI soit, en tant que de besoin, fondée sur le 2° de l'article 109-1 du code général des impôts ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 19 septembre 2008, présenté pour Mme Béatrice , demeurant ..., par la société d'avocats Fidal ; elle conclut :

- d'une part, au rejet du recours du MINISTRE ;

- d'autre part, à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 1 000 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- en calculant le montant du loyer déductible retenu en définitive par application d'un taux de rendement de 6%, l'administration n'établit aucune comparaison et ne peut être regardée comme ayant utilisé une méthode autonome sur laquelle pouvait se fonder la notification de redressement ; l'administration devait préciser le taux de rentabilité des immeubles qu'elle a pris pour termes de comparaison ;

- les deux éléments de comparaison supplémentaires indiqués dans la réponse aux observations du contribuable auraient dû figurer dans la notification initiale ou une notification complémentaire ;

- la notification de redressement du 20 décembre 2001 est insuffisamment motivée ;

- les loyers pratiqués ne peuvent être considérés comme excessifs ;

- les comparaisons fournies par l'administration pour établir le caractère excessif du loyer ne sont pas pertinentes ;

Vu l'arrêt n° 07NC01409 de la Cour en date du 5 février 2009 ;

Vu la décision n° 326754 du 3 août 2011 par laquelle le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt susvisé de la Cour ;

Vu le mémoire complémentaire, enregistré le 5 janvier 2012, par lequel le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT conclut aux mêmes fins que son recours et fait en outre valoir le moyen tiré de l'indépendance des procédures menées à l'encontre d'une société, d'une part, et de ses associés, d'autre part ;

Vu le mémoire complémentaire en défense, enregistré le 20 février 2012, présenté pour Mme , qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient en outre que :

- la notification de redressement du 16 mai 2002 adressée à chaque associé est irrégulière en tant qu'elle présente les mêmes insuffisances de motivation que la notification adressée à la société et relevées dans ses précédentes écritures ;

- les sommes versées à la société Sudhotel n'ont pas été mises à sa disposition dès lors qu'elle n'y exerce aucune fonction dirigeante et que la SCI était déficitaire ;

Vu l'ordonnance du président de la 1ère chambre de la Cour fixant la clôture de l'instruction au 21 février 2012 à 16 heures ;

Vu l'ordonnance du 30 mars 2012 du président de la 1ère chambre de la Cour procédant à la réouverture de l'instruction ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu du cours de l'audience publique du 26 avril 2012 :

- le rapport de M. Vincent, président de chambre,

- et les conclusions de Mme Ghisu-Deparis, rapporteur public ;

Sur le bien-fondé du motif retenu par le Tribunal administratif :

Considérant que, pour accorder la décharge de leurs impositions personnelles aux associés communs de la SARL Class'hôtel et de la SCI Sudotel, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne s'est fondé sur l'insuffisance de motivation de la notification de redressement adressée à ladite SARL le 20 décembre 2001 et sur la circonstance que, dans sa réponse en date du 30 juillet 2002, l'administration n'avait pas offert un nouveau délai de 30 jours à cette société pour lui permettre de formuler des observations ; que, cependant, en raison du principe de l'indépendance des procédures de redressement menées à l'encontre de la SARL Class'hôtel, d'une part, et des associés de la SCI Sudotel, d'autre part, les irrégularités de la procédure de redressement de la SARL Class'hôtel, à les supposer même établies, étaient sans incidence sur les impositions personnelles de Mme ; que, par suite, le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour prononcer la décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels Mme a été assujettie au titre des années 1998, 1999 et 2000, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne s'est fondé sur un moyen qui était ainsi inopérant ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme , tant devant le Tribunal administratif que devant la Cour ;

Sur la régularité de l'imposition :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société civile immobilière Sudotel, dont Mme est associée, est locataire en crédit bail immobilier d'un hôtel de 74 chambres qu'elle donne en sous-location à la SARL Class'hôtel, qui l'exploite sous l'enseigne " première classe " à Buchères (Aube) ; que, lors d'une vérification de comptabilité de cette SARL, l'administration a constaté que celle-ci avait versé à la société civile immobilière des loyers de 888 000 F en 1998, 936 000 F en 1999 et 996 000 F en 2000 ; que l'administration a estimé qu'en acceptant de verser un loyer de ce montant, la SARL avait accompli un acte anormal de gestion et, conformément à l'avis émis sur ce point par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, a réintégré dans ses résultats imposables à l'impôt sur les sociétés la fraction de ce loyer annuel jugée excessive, qu'elle a regardée comme constituant des bénéfices distribués par la SARL aux associés de la société civile, appréhendés par eux et devant être inclus dans leurs bases d'imposition à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, en proportion de leurs droits dans le capital de la société civile ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors en vigueur : " L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ... " ;

Considérant que, par notification du 16 mai 2002, l'administration a informé Mme des redressements auxquels elle envisageait de procéder à son encontre en tant qu'associée de la SCI Sudotel ; qu'à cet effet, elle a tout d'abord comparé le loyer acquitté par la société Class'hôtel à celui payé par cinq établissements hôteliers situés comme celle-ci à Troyes ou dans des communes de l'agglomération de Troyes, en précisant pour chacun leur adresse, leur superficie, le loyer annuel moyen, le nombre de chambres et les prix du loyer au mètre carré, cet échantillon faisant ressortir un prix moyen au mètre carré de 299 francs, alors que le prix au mètre carré ressortant de la location en cause s'établissait à 940 francs pour l'année 1999 et 1 000 francs pour l'année 2000 ; que, toutefois, après avoir noté que, compte tenu de la valeur de l'hôtel retenue dans le contrat de crédit-bail, le rendement de l'immeuble en cause était compris entre 13 et 15 % au titre des années vérifiées alors que le taux de rendement pour des immeubles commerciaux s'élevait selon elle à 6 %, ce qui correspondait à un loyer de 400 francs, soit un montant de loyer de 403 200 francs arrondi à 400 000 francs, l'administration s'est exclusivement fondée sur cette seconde méthode, qu'elle a estimée plus favorable au contribuable, pour procéder au redressement litigieux ; qu'après saisine de la commission départementale des impôts, le taux de 6 % a au demeurant été porté à 8 % ; que s'il résulte de ce qui précède que les moyens tirés par Mme de ce que les termes de comparaison ci-dessus rappelés concernant des établissements hôteliers jugés similaires ne comportaient pas mention de la date du contrat de bail et de ce qu'elle n'aurait pas été mise à même de présenter ses observations sur les nouveaux éléments de comparaison avancés par l'administration dans sa réponse aux observations du contribuable du 30 juillet 2002 ne peuvent en tout état de cause être accueillis dès lors qu'ils se réfèrent à une méthode que l'administration n'a en définitive pas retenue, l'intéressée est en revanche fondée à faire valoir l'insuffisance de motivation de la notification litigieuse en tant que la seconde méthode, qui fait usage d'un nouveau critère tiré du rendement locatif calculé par rapport à la valeur de l'hôtel indiquée dans le contrat de crédit-bail, distinct de celui pris en compte par la première méthode, tiré du prix moyen du loyer au mètre carré, ne comporte, au regard de ce nouveau critère, aucun élément de comparaison par rapport aux établissements constituant l'échantillon retenu au titre de la première méthode ou à d'autres établissements jugés similaires ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens énoncés par Mme , que celle-ci est fondée à faire valoir l'irrégularité de la procédure d'imposition la concernant ;

Considérant qu'il s'ensuit que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a déchargé Mme des impositions supplémentaires et pénalités mises à sa charge au titre des années 1998, 1999 et 2000 ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le paiement à Mme d'une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le recours du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à Mme une somme de 1 000 € (mille euros) au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT et à Mme Béatrice .

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