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14/04/2014 | FRANCE | N°13NC00825

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 14 avril 2014, 13NC00825


Vu la requête, enregistrée le 3 mai 2013, présentée pour M. A...B...et M. C... B..., demeurant..., par la société d'avocat MetR ;

Messieurs B...demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201849 du 13 mars 2013 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 22 février 2012 du préfet de la Moselle déclarant d'utilité publique le projet de création d'une station d'épuration par lagunage sur la commune de Nebing et a déclaré cessibles les parcelles nécessaires à sa réalisation ;<

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2°) d'annuler l'arrêté du 22 février 2012 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat u...

Vu la requête, enregistrée le 3 mai 2013, présentée pour M. A...B...et M. C... B..., demeurant..., par la société d'avocat MetR ;

Messieurs B...demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201849 du 13 mars 2013 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 22 février 2012 du préfet de la Moselle déclarant d'utilité publique le projet de création d'une station d'épuration par lagunage sur la commune de Nebing et a déclaré cessibles les parcelles nécessaires à sa réalisation ;

2°) d'annuler l'arrêté du 22 février 2012 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que :

- le commissaire enquêteur a insuffisamment motivé ses conclusions et l'avis émis n'est pas personnel et motivé, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 11-10 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, tant en ce qui concerne l'utilité publique du projet que la cessibilité des parcelles ;

- l'utilité publique du projet n'est pas établie : le projet aura des conséquences importantes pour leur exploitation ; la solution retenue n'est pas justifiée par rapport aux trois autres solutions ;

- l'étude d'impact est insuffisante car l'existence d'une canalisation de transport de gaz haute pression de diamètre 300 n'a pas été prise en compte ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 janvier 2014, présenté pour le ministre de l'intérieur ;

Il conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- les conclusions du commissaire enquêteur sont suffisantes, tant en ce qui concerne la déclaration d'utilité publique que la cessibilité des terrains ;

- l'utilité publique du projet est établie ;

Vu l'ordonnance du 2 décembre 2013 portant clôture de l'instruction au 19 décembre 2013 ;

Vu l'ordonnance du 13 janvier 2014 portant réouverture de l'instruction ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 mars 2014 :

- le rapport de Mme Steinmetz-Schies, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Wiernasz, rapporteur public ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

Sur l'irrégularité de l'étude d'impact :

1. Considérant qu'aux termes de l'article R. 122-3 du code de l'environnement : " I. - Le contenu de l'étude d'impact doit être en relation avec l'importance des travaux et aménagements projetés et avec leurs incidences prévisibles sur l'environnement. II. - L'étude d'impact présente successivement : 1° Une analyse de l'état initial du site et de son environnement, portant notamment sur les richesses naturelles et les espaces naturels agricoles, forestiers, maritimes ou de loisirs, affectés par les aménagements ou ouvrages ; 2° Une analyse des effets directs et indirects, temporaires et permanents du projet sur l'environnement, et en particulier sur la faune et la flore, les sites et paysages, le sol, l'eau, l'air, le climat, les milieux naturels et les équilibres biologiques, sur la protection des biens et du patrimoine culturel et, le cas échéant, sur la commodité du voisinage (bruits, vibrations, odeurs, émissions lumineuses) ou sur l'hygiène, la santé, la sécurité et la salubrité publique ; 3° Les raisons pour lesquelles, notamment du point de vue des préoccupations d'environnement, parmi les partis envisagés qui font l'objet d'une description, le projet présenté a été retenu ; 4° Les mesures envisagées par le maître de l'ouvrage ou le pétitionnaire pour supprimer, réduire et, si possible, compenser les conséquences dommageables du projet sur l'environnement et la santé, ainsi que l'estimation des dépenses correspondantes ; 5° Une analyse des méthodes utilisées pour évaluer les effets du projet sur l'environnement mentionnant les difficultés éventuelles de nature technique ou scientifique rencontrées pour établir cette évaluation ; 6° Pour les infrastructures de transport, l'étude d'impact comprend en outre une analyse des coûts collectifs des pollutions et nuisances et des avantages induits pour la collectivité ainsi qu'une évaluation des consommations énergétiques résultant de l'exploitation du projet, notamment du fait des déplacements qu'elle entraîne ou permet d'éviter. III. - Afin de faciliter la prise de connaissance par le public des informations contenues dans l'étude, celle-ci fait l'objet d'un résumé non technique. IV. - Lorsque la totalité des travaux prévus au programme est réalisée de manière simultanée, l'étude d'impact doit porter sur l'ensemble du programme. Lorsque la réalisation est échelonnée dans le temps, l'étude d'impact de chacune des phases de l'opération doit comporter une appréciation des impacts de l'ensemble du programme. " ; que les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative ;

2. Considérant que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, la notice d'impact, réalisée pour le projet de création d'une station d'épuration par lagunage sur la commune de Nebing, précise, d'une part, page 49, sous la mention " servitudes et réseaux " qu'une canalisation haute pression est située à proximité, d'autre part, page 50 que " la zone du projet est traversée par une canalisation de gaz haute pression, qui implique une servitude d'au moins 6 m, et qui devra être précisément piquetée avant tout travaux " , et enfin, page 83, sous " impact sur les réseaux et servitudes ", que l'emprise du projet " est traversée par la canalisation de gaz haute-pression DN 300mm Sarreguemines-Einville. Avant d'effectuer des travaux à proximité de la canalisation, l'entreprise chargée des travaux a obligation de se renseigner sur l'existence des canalisations de transport en mairie, adresser une demande de renseignements (DR) puis une déclaration d'intention de commencement de travaux (DICT) à GRT gaz. Quant GRT gaz aura répondu à la DICT, l'entreprise devra impérativement demander à l'exploitant une autorisation d'intervention, et ceci, sans intermédiaire, avant tout commencement de travaux " ; que, par suite, contrairement à ce que soutiennent les requérants, le dossier prend en compte le passage sur le site du projet d'une canalisation de transport de gaz haute pression de diamètre 3000, et a étudié l'impact réel que le projet aura sur la canalisation, en précisant qu'une servitude de 6 m devra être prévue ; que par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact doit être écarté ;

Sur le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis du commissaire enquêteur :

3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 11-10 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : " Le commissaire enquêteur ou la commission examine les observations consignées ou annexées aux registres et entend toutes personnes qu'il paraît utile de consulter ainsi que l'expropriant s'il le demande. / Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête rédige des conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables ou non à l'opération (...) " ; que la règle de motivation prévue à l'article R. 11-10 précité du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique oblige le commissaire enquêteur à apprécier les avantages et inconvénients de l'opération et à indiquer, au moins sommairement, en donnant son avis personnel, les raisons qui déterminent le sens de cet avis ;

4. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, les conclusions du commissaire enquêteur sont suffisamment motivées en ce qu'il a justifié l'avis favorable donné au projet, en exposant les raisons de son choix, en examinant les observations des personnes qui avaient émis des remarques, et étudié les avantages et les inconvénients du projet ; qu'il a notamment indiqué " qu'une étude d'impact avait été mise à disposition du public ", qu'il a pris en compte les observations du public, dont celles de Messieurs Houppert, et y a apporté son commentaire avec celui du maître d'ouvrage ; qu'en ce qui concerne les enquêtes conjointes, le commissaire enquêteur, qui ne s'est pas borné à exposer des généralités et n'a pas tenu pour acquises les solutions alternatives examinées, contrairement à ce que soutiennent les requérants, a noté que " le choix du site s'est porté à juste titre sur l'emplacement qu'occupe la station obsolète et que ce site comporte de nombreux avantages par rapport à deux autres solutions qui ne comportent que des inconvénients. Les avantages (réutilisation de l'emprise de l'ancien collecteur, coût d'acquisition foncière modéré une partie des terrains appartenant à la commune, proximité du ruisseau la Rose) l'emportent sur l'inconvénient du terrain agricole situé à proximité, (...) que l'étanchéité des bassins et la protection des eaux souterraines seront garanties par l'adoption d'une géomembrane posée en fond de chaque bassin (...) " ;

5. Considérant, d'autre part, que contrairement à ce que soutiennent les requérants, le commissaire enquêteur a émis un avis motivé concernant l'enquête parcellaire en notant qu'il donne " un avis favorable à l'acquisition des terrains nécessaires à la commune en complément des siens propres ", et que " le choix du site de la future lagune a été choisi en fonction de la proximité de la zone à assainir et de la possibilité de rejeter les effluents épurés vers le milieu propice (ruisseau de la Rose) " ; que la circonstance que, dans ses conclusions, le commissaire enquêteur se soit approprié certains éléments de la notice explicative du projet et certaines des observations de la commune n'est pas de nature à entacher son avis d'irrégularité, alors qu'il a formulé un avis personnel et circonstancié au sens de l'article R. 11-10 précité ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 11-10 précité doit être écarté ;

Sur le moyen tiré de l'absence d'utilité publique du projet :

7. Considérant qu'il appartient au juge, lorsqu'il doit se prononcer sur le caractère d'utilité publique d'une opération nécessitant l'expropriation d'immeubles ou de droits réels immobiliers, de contrôler successivement qu'elle répond à une finalité d'intérêt général, que l'expropriant n'était pas en mesure de réaliser l'opération dans des conditions équivalentes sans recourir à l'expropriation, notamment en utilisant des biens se trouvant dans son patrimoine et, enfin, que les atteintes à la propriété privée, le coût financier et, le cas échéant, les inconvénients d'ordre social ou économique que comporte l'opération ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente ;

8. Considérant que la mise en conformité du réseau d'assainissement de la commune de Nebing, par l'élimination des eaux claires parasites, l'amélioration du taux de collecte, la réduction de la pollution par temps de pluie, le traitement de la pollution par la réalisation d'une lagune dimensionnée pour 400 équivalents habitants, répond à une finalité d'intérêt général ; que l'expropriant n'était pas en mesure de réaliser l'opération en cause dans des conditions équivalentes sans recourir à l'expropriation ; que si les requérants font valoir que le projet aura des conséquences importantes sur le fonctionnement de leur exploitation, il ressort des pièces du dossier que la commune de Nebing, face à leurs interrogations, a, par courrier, portant " réponses aux observations émises lors de l'enquête publique et consignées dans le procès verbal du commissaire enquêteur " précisé, d'une part, qu'en ce qui concerne la présence d'une source destinée à l'abreuvement du bétail à 100 m en aval du lieu d'implantation, l'étude d'impact mentionne que les bassins seront étanchéifiés, et qu'aucune dégradation des eaux de cette source n'est à craindre, et, d'autre part, qu'en ce qui concerne le franchissement du ruisseau, la commune proposait de réaliser un nouvel ouvrage sur le ruisseau, en amont du projet, et de réaliser un franchissement supplémentaire du fossé pour le passage du bétail ; que, par suite, les inconvénients relevés pour l'exploitation ont été levés ; qu'il ressort par ailleurs de la notice d'impact jointe au dossier que trois variantes ont été examinées, et que la variante Nord présentait l'avantage de réutiliser l'emprise de l'ancien collecteur, un coût d'acquisition foncière modéré, et pour seul inconvénient le terrain agricole situé à proximité ; que, dès lors, les avantages attachés au projet sont supérieurs aux inconvénients que subissent les requérants ; que, par suite le moyen tiré de l'absence d'utilité publique du projet doit être écarté ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Messieurs B...ne sont pas fondés à soutenir que, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

11. Considérant que les dispositions susvisées font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à verser à Messieurs B...la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Messieurs B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B..., à M. C...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle et à la commune de Nebing.

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13NC00825


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13NC00825
Date de la décision : 14/04/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

34-01 Expropriation pour cause d'utilité publique. Notions générales.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre STEINMETZ-SCHIES
Rapporteur public ?: M. WIERNASZ
Avocat(s) : MARCHESSOU VIGUIER MARTINEZ-WHITE SCHMITT (M et R) SELAS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2014-04-14;13nc00825 ?
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