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09/12/2014 | FRANCE | N°13NC02166

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 09 décembre 2014, 13NC02166


Vu la requête, enregistrée le 17 décembre 2013, présentée pour M. B... C..., demeurant au..., par Me A...;

M. C... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201189 du 28 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision 48 SI du 21 juin 2012 par laquelle le ministre de l'intérieur a constaté l'invalidation de son permis de conduire et lui a enjoint de le restituer ;

2°) d'annuler la décision 48 SI du 21 juin 2012 ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur

de lui restituer l'intégralité de son capital de points retirés illégalement, dans un dé...

Vu la requête, enregistrée le 17 décembre 2013, présentée pour M. B... C..., demeurant au..., par Me A...;

M. C... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201189 du 28 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision 48 SI du 21 juin 2012 par laquelle le ministre de l'intérieur a constaté l'invalidation de son permis de conduire et lui a enjoint de le restituer ;

2°) d'annuler la décision 48 SI du 21 juin 2012 ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui restituer l'intégralité de son capital de points retirés illégalement, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- les décisions par lesquelles le ministre de l'intérieur lui a réattribué un point le 15 octobre 2012 et quatre points le 7 janvier 2013 ont créé des droits et ne pouvaient donc plus être retirées ;

- il n'a pas reçu l'information préalable prévue par le code de la route ;

- l'amende forfaitaire relative à l'infraction commise le 20 janvier 2008 a été payée directement entre les mains de l'agent verbalisateur et, dans une telle hypothèse, la seule mention du paiement de l'amende forfaitaire dans le relevé d'information intégral ne suffit pas pour considérer que le contrevenant a reçu l'information préalable prévue par les articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ;

- en ce qui concerne l'infraction constatée le 1er mai 2009, il a refusé de signer l'avis de contravention ce qui était la seule manière qu'il avait de justifier qu'il n'avait pas reçu la carte de paiement et l'avis de contravention ;

- le procès-verbal produit pour justifier de la délivrance de l'information préalable à l'infraction du 2 juin 2008 est daté du 3 juin 2008 ;

- l'information globale de l'intégralité des retraits de point, dans la décision 48 SI, ne peut pas se substituer à l'information préalable prévue par les articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 26 mai 2014, présenté par le ministre de l'intérieur qui conclut au rejet de la requête ;

Il indique s'en rapporter à ses écritures de première instance ;

Vu le mémoire, enregistré le 16 juin 2014, présenté pour M. C... qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la route ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 novembre 2014 :

- le rapport de Mme Kohler, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Laubriat, rapporteur public ;

1. Considérant que M. C...a commis huit infractions ayant entraîné le retrait de seize points de son permis de conduire ; que, par décision du 21 juin 2012, le ministre de l'intérieur a prononcé l'invalidation de son titre de conduite et lui a enjoint de le restituer ; que M. C...demande l'annulation du jugement du 28 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

2. Considérant que la circonstance, à la supposer établie, que M. C...aurait bénéficié de réattributions de points en octobre 2012 et en janvier 2013, soit postérieurement à la décision en litige du 21 juin 2012, est sans incidence sur la légalité de cette dernière et n'est pas de nature à priver d'objet le présent litige ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne l'exception d'illégalité des décisions de retrait de points :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 223-3 : " Lorsque l'intéressé est avisé qu'une des infractions entraînant retrait de points a été relevée à son encontre, il est informé des dispositions de l'article L. 223-2, de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès conformément aux articles L. 225-1 à L. 225-9. / Lorsqu'il est fait application de la procédure de l'amende forfaitaire ou de la procédure de composition pénale, l'auteur de l'infraction est informé que le paiement de l'amende ou l'exécution de la composition pénale entraîne le retrait du nombre de points correspondant à l'infraction reprochée, dont la qualification est dûment portée à sa connaissance ; il est également informé de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 223-3 du même code : " I.-Lors de la constatation d'une infraction entraînant retrait de points, l'auteur de celle-ci est informé qu'il encourt un retrait de points si la réalité de l'infraction est établie dans les conditions définies à l'article L. 223-1./ II.-Il est informé également de l'existence d'un traitement automatisé des retraits et reconstitutions de points et de la possibilité pour lui d'accéder aux informations le concernant. Ces mentions figurent sur le document qui lui est remis ou adressé par le service verbalisateur. Le droit d'accès aux informations ci-dessus mentionnées s'exerce dans les conditions fixées par les articles L. 225-1 à L. 225-9 " ;

4. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que l'administration ne peut légalement prendre une décision retirant des points affectés à un permis de conduire à la suite d'une infraction dont la réalité a été établie que si l'auteur de l'infraction s'est vu préalablement délivrer par elle un document contenant les informations prévues aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route, qui constituent une garantie essentielle lui permettant de contester la réalité de l'infraction et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis ;

S'agissant de l'infraction constatée le 20 janvier 2008 :

5. Considérant que M. C...soutient avoir payé l'amende forfaitaire relative à l'infraction du 20 janvier 2008 le jour même, entre les mains de l'agent verbalisateur ; que si, comme le fait valoir le ministre, la seule circonstance que le relevé d'information intégral mentionne la même date pour la constatation de l'infraction et le paiement de l'amende ne suffit pas à établir que le contrevenant a payé l'amende immédiatement, il appartient en tout état de cause, au ministre de l'intérieur d'apporter la preuve, par tout moyen, en produisant par exemple le procès-verbal établi lors de la constatation de l'infraction ou la souche de la quittance prévue à l'article R. 49-2 du code de procédure pénale dépourvue de réserve sur la délivrance de l'information requise, qu'il a délivré l'information prévue par les articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ; que le ministre de l'intérieur n'a produit, ni en première instance, ni en appel, aucun élément de nature à établir qu'il aurait satisfait à cette obligation d'information ; que, dans ces circonstances, M. C...est fondé à soutenir que le retrait de trois points consécutif à l'infraction constatée le 20 janvier 2008 est intervenu à l'issue d'une procédure irrégulière ;

S'agissant de l'infraction constatée le 2 juin 2008 :

6. Considérant que pour apporter la preuve que l'information préalable prévue par les articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route avait été donné à M. C...lors de la constatation de l'infraction constatée le 2 juin 2008, le ministre de l'intérieur a produit, en première instance, un procès-verbal dont M. C...conteste la valeur probante ; qu'il ressort toutefois des mentions manuscrites portées sur ce procès-verbal qu'il a été établi le 2 juin 2008 et non le 3 comme le fait valoir le requérant ; que ce dernier, qui n'allègue d'ailleurs pas qu'il n'aurait pas signé ce procès-verbal ne peut, par ailleurs, en contester la valeur probante au motif que la signature qu'il y a lui-même apposée serait différente de celle qu'il a apposée sur un procès-verbal relatif à une infraction constatée antérieurement ; que, dans ces conditions, M. C...n'est pas fondé à soutenir que le retrait de trois points consécutif à l'infraction constatée le 2 juin 2008 est intervenu à l'issue d'une procédure irrégulière ;

S'agissant de l'infraction constatée le 1er mai 2009 :

7. Considérant qu'il résulte des dispositions portant application des articles R. 49-1 et R. 49-10 du code de procédure pénale, notamment celles de ses articles A. 37 à A. 37-4, que lorsqu'une contravention soumise à la procédure de l'amende forfaitaire est relevée avec interception du véhicule mais sans que l'amende soit payée immédiatement entre les mains de l'agent verbalisateur, ce dernier utilise un formulaire réunissant, en une même liasse autocopiante, le procès-verbal conservé par le service verbalisateur, une carte de paiement matériellement indispensable pour procéder au règlement de l'amende et l'avis de contravention, également remis au contrevenant pour servir de justificatif du paiement ultérieur, qui comporte une information suffisante au regard des exigences résultant des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ;

8. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, sur le procès-verbal relatif à l'infraction constatée le 1er mai 2009, conforme aux dispositions des articles A. 37 à A. 37 4 du code de procédure pénale, il est expressément indiqué que M. C...a refusé de contresigner la mention : " Le contrevenant reconnaît avoir reçu la carte de paiement et l'avis de contravention ", sans qu'il y ait fait figurer de réserve sur les modalités de délivrance de l'information, comme il lui était loisible de le faire contrairement à ce qu'il soutient ; que, dans ces conditions, il doit être regardé comme établi que M. C...a pris connaissance, sans élever d'objection, du contenu de l'avis de contravention et que cet avis, comportant les informations requises, lui a été remis ; qu'il n'est ainsi pas fondé à soutenir que le retrait de trois points consécutif à l'infraction constatée le 1er mai 2009 est intervenu à l'issue d'une procédure irrégulière ;

En ce qui concerne la décision 48 SI invalidant le titre de conduite :

9. Considérant qu'en vertu de l'article L. 223-1 du code de la route, le permis de conduire ne perd sa validité qu'en cas de solde de points nul ; que la décision référencée 48 SI a prononcé le retrait d'un total de seize points du capital de points affecté au permis de conduire de M. C... ; que compte tenu de l'illégalité de la décision portant retrait de trois points à la suite de l'infraction constatée le 20 janvier 2008 et de la réattribution de 4 points le 18 février 2009, M. C... disposait encore, le 21 juin 2012, date de la décision 48 SI, de trois points sur le capital affecté à son permis de conduire ; qu'ainsi, M. C...est fondé à soutenir que le ministre de l'intérieur ne pouvait prononcer l'invalidation de son permis de conduire ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

11. Considérant que l'exécution de la présente décision implique nécessairement que l'administration restitue à M. C...trois points correspondant à l'infraction constatée le 20 janvier 2008, à la date de la décision qui avait procédé à son retrait, dans le traitement automatisé mentionné à l'article L. 225-1 du code de la route ; qu'il y a lieu d'enjoindre au ministre de l'intérieur, dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision, de procéder à cette restitution, de déterminer en conséquence le nombre de points attaché au permis de conduire de M. C..., compte tenu d'éventuelles infractions ultérieures, et de restituer le permis si le solde n'est pas nul ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par M. C...tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1201189 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en date du 28 novembre 2013 et la décision du ministre de l'intérieur en date du 21 juin 2012 constatant la perte de validité du permis de conduire de M. C...sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de restituer, dans le traitement automatisé mentionné à l'article L. 225-1 du code de la route, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, le bénéfice de trois points au permis de conduire de M. C...à la date de la décision de retrait de points correspondant à l'infraction constatée le 20 janvier 2008, et de reconstituer en conséquence le capital de points attachés au permis de conduire de M.C....

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C...est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M.B... C...et au ministre de l'intérieur.

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N° 13NC02166


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13NC02166
Date de la décision : 09/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-04-01-04 Police. Police générale. Circulation et stationnement. Permis de conduire.


Composition du Tribunal
Président : M. COUVERT-CASTERA
Rapporteur ?: Mme Julie KOHLER
Rapporteur public ?: M. LAUBRIAT
Avocat(s) : ACAFFI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2014-12-09;13nc02166 ?
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