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10/12/2015 | FRANCE | N°15NC00362

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 10 décembre 2015, 15NC00362


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 15 mai 2014 par lequel le préfet des Vosges a retiré son agrément de gardien de police municipale.

Par un jugement n° 1401390 du 30 décembre 2014, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 février 2015, M. B...A..., représenté par Me Cuny, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1401390 du tribunal administratif de

Nancy du 30 décembre 2014 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 15 mai 2014 portant retrai...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 15 mai 2014 par lequel le préfet des Vosges a retiré son agrément de gardien de police municipale.

Par un jugement n° 1401390 du 30 décembre 2014, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 février 2015, M. B...A..., représenté par Me Cuny, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1401390 du tribunal administratif de Nancy du 30 décembre 2014 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 15 mai 2014 portant retrait d'agrément de gardien de police municipale ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- le jugement attaqué a omis de répondre aux moyens tirés de ce qu'il n'avait pas été en mesure de consulter son dossier et de ce que le préfet s'est prononcé dans un délai déraisonnable ;

- le jugement attaqué n'est pas suffisamment motivé en ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance du délai de retrait des décisions individuelles créatrices de droits ;

- l'arrêté litigieux est intervenu à l'issue d'une procédure méconnaissant l'obligation de consultation du maire en exercice prévue par les dispositions de l'article L. 511-2 du code de la sécurité intérieure ;

- le préfet a méconnu l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne obligeant le préfet à l'entendre préalablement à l'édiction de la mesure litigieuse ;

- l'arrêté attaqué est intervenu à l'issue d'une procédure méconnaissant l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, faute pour le préfet de l'avoir mis en mesure de consulter son dossier ;

- en prononçant l'arrêté attaqué dans un délai déraisonnable, le préfet a entaché sa décision d'une erreur de droit ;

- le préfet a commis une erreur de droit en retirant l'agrément de policier municipal de M. A...le 15 mai 2014 plus de vingt-deux mois après lui avoir restitué par arrêté créateur de droit du 30 mars 2012 ;

- le préfet a méconnu l'autorité de la chose jugée par la cour administrative d'appel de Nancy dans son arrêt n° 12NC01673 du 2 mai 2013 ayant force de chose jugée ;

- en retirant l'agrément de police municipal, le préfet a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 17 avril 2015, le préfet des Vosges conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- les dispositions de l'article L. 511-2 du code de la sécurité intérieure n'ont pas été méconnues, aucune disposition n'imposant au préfet de solliciter l'avis du nouveau maire en cas de changement de municipalité ;

- le requérant a été mis en mesure de consulter son dossier dans un délai raisonnable préalablement à l'arrêté attaqué ;

- ni les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, ni aucune autre disposition n'imposent à l'administration d'informer la personne de son droit de se faire assister par un conseil ;

- il était en droit de prendre la décision attaquée sans méconnaître le délai de prescription ;

- en prenant l'arrêté attaqué, alors que M. A...avait affecté le crédit et la fiabilité dont il pouvait se prévaloir, le préfet n'a entaché sa décision ni d'une erreur de droit, ni d'une erreur d'appréciation.

- il n'a pas méconnu l'autorité de la chose jugée dès lors que la légalité de l'arrêté attaqué est sans lien avec l'objet de l'arrêté ayant donné lieu à l'arrêt de la cour relatif à la légalité de l'avis du conseil de discipline de recours de la région Lorraine.

Vu :

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

- le code de la sécurité intérieure ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique du 19 novembre 2015 :

- le rapport de M. Di Candia, premier conseiller,

- les conclusions de M. Goujon-Fischer, rapporteur public,

- et les observations de Me Cuny, avocat de M.A... ;

1. Considérant qu'après l'annulation par le tribunal administratif de Nancy d'un précédent arrêté du 30 mars 2012 portant retrait d'agrément d'agent de police municipale de M. A..., le préfet des Vosges a, par arrêté du 15 mai 2014, repris un arrêté ayant le même objet ; que M. A... interjette régulièrement appel du jugement du 30 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce dernier arrêté ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'il résulte des motifs mêmes du jugement attaqué que le tribunal administratif de Nancy a expressément répondu à l'ensemble des moyens invoqués par le requérant ; qu'en particulier, le tribunal administratif, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, n'a pas omis de répondre aux moyens de M. A...tirés de ce qu'il n'a pas été mis en mesure de consulter son dossier, de ce que l'arrêté attaqué n'est pas intervenu dans un délai raisonnable et de ce que l'arrêté aurait procédé illégalement au retrait d'une décision créatrice de droits ; que, par suite, M. A...n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait entaché d'une omission à statuer ou d'une insuffisance de motivation ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la légalité externe :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-2 du code de la sécurité intérieure : " (...) L'agrément peut être retiré ou suspendu par le représentant de l'Etat ou le procureur de la République après consultation du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale. Toutefois, en cas d'urgence, l'agrément peut être suspendu par le procureur de la République sans qu'il soit procédé à cette consultation. " ; qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet des Vosges a effectivement consulté le maire de Saint-Dié-des-Vosges, lequel a rendu un avis sur le retrait d'agrément par courrier du 22 novembre 2013 ; que la circonstance que l'identité du maire de Saint-Dié-des-Vosges a changé, après les élections municipales de mars 2014, ne peut être regardée comme un changement de situation de nature à rendre nécessaire le renouvellement de cette procédure de consultation ; que, par suite, M. A...n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué est intervenu à l'issue d'une procédure contraire aux dispositions de l'article L. 511-2 du code de la sécurité intérieure ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix (...) " ; que ces dispositions impliquent que l'intéressé ait été averti de la mesure que l'administration envisage de prendre, des motifs sur lesquels elle se fonde, et qu'il bénéficie d'un délai suffisant pour présenter ses observations ; que l'agrément prévu par les dispositions précitées de l'article L. 511-2 du code de la sécurité intérieure a pour objet de vérifier que l'intéressé présente les garanties d'honorabilité requises pour occuper l'emploi d'agent de la police municipale ; que lorsque le préfet retire son agrément à un agent de la police municipale en estimant, au regard du comportement de l'intéressé, qu'il ne présente plus les garanties requises pour occuper un emploi d'agent de police municipal, la décision de retrait de l'agrément, prise nécessairement en considération de la personne, ne peut légalement intervenir sans que l'intéressé ait été informé des éléments sur lesquels le préfet entend se fonder pour envisager le retrait de son agrément ;

5. Considérant, d'une part, qu'après avoir été informé, le 6 décembre 2013, de la volonté du préfet des Vosges d'engager à son encontre la procédure de retrait d'agrément d'agent de police municipale, M. A...a demandé, le 11 décembre 2013, à consulter le dossier le concernant ; qu'à la suite de cette demande, le préfet des Vosges a, par courrier du 4 avril 2014, invité l'intéressé à se rendre en préfecture, du lundi au vendredi entre 9h et 11h30, afin de procéder à cette consultation ; que si M. A... fait valoir qu'il a sollicité, le 12 avril 2014, un délai supplémentaire auprès du préfet des Vosges pour pouvoir procéder à cette consultation en raison d'un arrêt maladie l'empêchant de se déplacer, il ressort des pièces du dossier qu'il disposait d'un délai suffisant pour procéder à cette consultation entre le 26 avril 2014, date à laquelle son arrêt maladie a pris fin, et le 15 mai 2014 ; que, par suite, nonobstant la distance séparant son lieu de résidence des locaux de la préfecture des Vosges, M. A..., qui ne se prévaut d'aucune circonstance particulière faisant obstacle à un tel déplacement après le 26 avril 2014, n'est pas fondé à soutenir qu'il n'a pas pu prendre connaissance des éléments sur lesquels le préfet entendait se fonder avant l'adoption de la mesure litigieuse ; que, d'autre part, les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 n'imposent pas à l'administration d'informer l'intéressé de sa faculté de se faire assister par un avocat ; que si le préfet des Vosges, qui n'y était pas tenu, n'a pas informé M. A...de sa faculté de se faire assister par un avocat, son courrier du 6 décembre 2013 invitait toutefois expressément M. A... à présenter des observations écrites ou orales sur la mesure de retrait d'agrément d'agent de police municipale envisagée ; que M. A...n'a ainsi pas été privé de la possibilité de formuler ses observations ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 doit être écarté ;

6. Considérant, en troisième lieu, que l'arrêté attaqué du 15 mai 2014, qui n'a ni pour objet ni pour effet de mettre en oeuvre le droit de l'Union au sens du paragraphe 1 de l'article 51 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, n'est pas soumis aux exigences du paragraphe 2 de l'article 41 de cette même Charte ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance du point 2 de l'article 41 de la Charte doit être écarté comme inopérant ;

En ce qui concerne la légalité interne :

7. Considérant, en premier lieu, qu'aucun texte ni aucun principe général du droit n'enferme dans un délai déterminé la possibilité pour le préfet de vérifier qu'un agent de la police municipale présente les garanties d'honorabilité requises pour occuper un tel emploi ; qu'ainsi, le moyen soulevé par M. A...tiré de ce qu'en lui retirant l'agrément d'agent de police municipale dans un délai qu'il qualifie de déraisonnable, le préfet des Vosges aurait entaché sa décision d'une erreur de droit doit être écarté comme inopérant ;

8. Considérant, en deuxième lieu, que les agents de police municipale sont, en vertu des dispositions de l'article L. 511-2 du code de la sécurité intérieure, agréés par le représentant de l'Etat dans le département et le procureur de la République, puis assermentés ; que l'agrément accordé à un agent de police municipale sur le fondement de ces dispositions peut ainsi légalement être retiré à tout moment lorsque l'agent ne présente plus les garanties d'honorabilité auxquelles est subordonnée la délivrance de l'agrément ; qu'ainsi, ces dispositions font obstacle à ce que l'administration soit empêchée de retirer une décision individuelle créatrice de droits illégale, hors le cas où il est satisfait à une demande du bénéficiaire, à l'issue du délai de quatre mois suivant la prise de cette décision ;

9. Considérant, en troisième lieu, que l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy n° 12NC01673 du 2 mai 2013 a été annulé par une décision du Conseil d'Etat n° 369831 du 16 février 2015 ; que, par suite, M. A... n'est pas fondé à se prévaloir de l'autorité de la chose jugée par la cour ;

10. Considérant, enfin, qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...a été interpellé, le 13 octobre 2010 à Saint-Dié-des-Vosges, commune où il exerçait les fonctions de chef de la police municipale, pour avoir conduit à une vitesse excessive, de près de 100 kilomètres/heure en agglomération, à contresens d'une voie à sens unique et en état d'ivresse, le véhicule de service banalisé mis à disposition par la commune de Saint-Dié-des-Vosges ; que dans les circonstances de l'espèce, ces faits étaient de nature à justifier le retrait de l'agrément de M. A... décidé par le préfet des Vosges le 15 mai 2014, nonobstant la situation personnelle difficile dans laquelle se trouvait l'intéressé à l'époque des faits litigieux ; que, par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet des Vosges a entaché l'arrêté attaqué d'une erreur sur la qualification juridique des faits ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. A...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au préfet des Vosges.

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N° 15NC00362


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC00362
Date de la décision : 10/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Police - Personnels de police.

Procédure - Voies de recours - Cassation - Contrôle du juge de cassation - Bien-fondé - Qualification juridique des faits.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: M. Olivier DI CANDIA
Rapporteur public ?: M. GOUJON-FISCHER
Avocat(s) : CUNY

Origine de la décision
Date de l'import : 20/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2015-12-10;15nc00362 ?
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