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29/12/2015 | FRANCE | N°15NC00774

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 29 décembre 2015, 15NC00774


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...B...et Mme C...B...ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les arrêtés du 13 octobre 2014 par lesquels le préfet de la Moselle a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligées à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elles pourraient être éloignées.

Par un jugement n° 1406196, 1406197 du 26 mars 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

I. Par une r

equête enregistrée le 24 avril 2015 sous le n° 15NC00774, Mme D...B..., représentée par MeA..., de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...B...et Mme C...B...ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les arrêtés du 13 octobre 2014 par lesquels le préfet de la Moselle a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligées à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elles pourraient être éloignées.

Par un jugement n° 1406196, 1406197 du 26 mars 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 24 avril 2015 sous le n° 15NC00774, Mme D...B..., représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 26 mars 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 13 octobre 2014 dont elle fait l'objet ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai et sous la même astreinte, et de lui délivrer, dans l'attente de cet examen, une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision portant refus de séjour est insuffisamment motivée ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté attaqué porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et a des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense enregistré le 27 juillet 2015, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

II. Par une requête enregistrée le 24 avril 2015 sous le n° 15NC00775, Mme C...B..., représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 26 mars 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 13 octobre 2014 dont elle fait l'objet ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai et sous la même astreinte, et de lui délivrer, dans l'attente de cet examen, une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision portant refus de séjour est insuffisamment motivée ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en rejetant sa demande de titre de séjour alors qu'elle justifiait d'une promesse d'embauche ;

- l'arrêté attaqué porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et a des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense enregistré le 27 juillet 2015, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

Par deux décisions du 10 septembre 2015, le président du bureau d'aide juridictionnelle a admis Mmes B...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Guérin-Lebacq a été entendu à l'audience publique.

1. Considérant que Mme D...B..., ressortissante arménienne née le 16 mai 1966, et sa fille Mme C...B..., née le 31 août 1986, de même nationalité, déclarent être entrées irrégulièrement en France le 6 mars 2011 afin d'y solliciter la reconnaissance du statut de réfugié ; que leurs demandes d'asile ont été rejetées par deux décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides des 26 et 27 novembre 2011, confirmées par la Cour nationale du droit d'asile le 30 août 2012 ; que, tirant les conséquences de ces décisions de rejet et saisi de demandes de titre de séjour présentées par Mmes B... à raison de leur état de santé, le préfet de la Moselle a, par deux arrêtés du 3 juin 2013, refusé de leur délivrer un titre de séjour et les a obligées à quitter le territoire français ; que le 4 avril 2014, Mme C... B...a présenté une nouvelle demande de titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et sur celui de l'article L. 313-14 du même code ; que le même jour, sa mère a sollicité son admission au séjour au titre des mêmes dispositions, ainsi que sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 ; que, par deux arrêtés du 13 octobre 2014, le préfet de la Moselle a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligées à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elles pourraient être éloignées ; que Mmes B... relèvent appel, par deux requêtes qu'il y a lieu de joindre pour statuer par un seul arrêt, du jugement du 26 mars 2015 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés du 13 octobre 2014;

2. Considérant, en premier lieu, que Mmes B...reprennent en appel, sans apporter d'élément nouveau, le moyen tiré de l'insuffisante motivation des arrêtés attaqués ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ;

4. Considérant que pour refuser de délivrer un titre de séjour à Mme D...B..., qui déclare souffrir d'un stress post-traumatique, le préfet de la Moselle s'est fondé notamment sur l'avis émis le 16 septembre 2014 par le médecin de l'agence régionale de santé de Lorraine dont il ressort que si l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale de longue durée devant être poursuivie, en l'état actuel, pour une durée indéterminée, le défaut de prise en charge ne devrait pas entraîner, pour elle, des conséquences d'une exceptionnelle gravité, alors en outre qu'il existe un traitement approprié dans son pays d'origine, vers lequel elle peut voyager sans risque ; que, consulté par le préfet, le directeur général de l'agence régionale de santé a précisé qu'aucune circonstance humanitaire exceptionnelle ne justifiait la délivrance d'un titre de séjour ; que les documents médicaux produits par Mme B...se bornent à indiquer qu'elle fait l'objet d'un suivi psychiatrique de longue durée, sans se prononcer ni sur les conséquences d'un éventuel défaut de prise en charge, ni sur l'existence d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; qu'ainsi, ces documents ne sont pas de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le préfet de la Moselle sur la situation médicale de la requérante ; que, dès lors, le préfet a pu légalement refuser de lui délivrer le titre de séjour sollicité sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces des dossiers que MmesB..., qui ne sont entrées en France que le 6 mars 2011, à l'âge de 44 et 24 ans, font toutes deux l'objet d'une mesure d'éloignement ; que si elles font état de leur volonté d'intégration dans la société française, elles ne produisent à l'instance, pour en justifier, qu'une promesse d'embauche et deux attestations de soutien ; qu'il ressort des pièces des dossiers que, par un jugement du tribunal correctionnel de Sarreguemines du 9 novembre 2011, Mme C...B...a été condamnée à une peine d'emprisonnement avec sursis pour avoir commis un vol ; que, dès lors, eu égard à la durée et aux conditions de séjour en France des intéressées, les arrêtés attaqués n'ont pas porté une atteinte disproportionnée au droit de Mmes B...à mener une vie privée et familiale normale au regard des buts en vue desquels ils ont été pris ; qu'ainsi, ces arrêtés n'ont pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, le préfet de la Moselle n'a pas commis une erreur manifeste dans son appréciation des conséquences de ses décisions sur la situation personnelle des intéressées ;

7. Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ; que la promesse d'embauche dont Mme C...B...fait état ne saurait être regardée comme constituant des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels au sens des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'eu égard en outre à ce qui a été dit au point précédent, le préfet de la Moselle n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences des mesures prises sur la situation personnelle de l'intéressée ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mmes B...ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes présentées par Mmes B...sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...B..., à Mme C...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet de la Moselle.

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N° 15NC00774, 15NC00775


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC00774
Date de la décision : 29/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme ROUSSELLE
Rapporteur ?: M. Jean-Marc GUERIN-LEBACQ
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : SCP DELATTRE

Origine de la décision
Date de l'import : 29/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2015-12-29;15nc00774 ?
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