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02/07/2020 | FRANCE | N°18NC01188

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 02 juillet 2020, 18NC01188


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... a demandé au tribunal administratif de Besançon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) mis à sa charge au titre des années 2011 et 2012, ainsi que les pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1501591 du 18 janvier 2018, le tribunal administratif de Besançon a déchargé M. C... de ces impositions et pénalités.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire compléme

ntaire, enregistrés le 12 avril 2018 et le 11 octobre 2019, le ministre de l'action et des comptes p...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... a demandé au tribunal administratif de Besançon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) mis à sa charge au titre des années 2011 et 2012, ainsi que les pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1501591 du 18 janvier 2018, le tribunal administratif de Besançon a déchargé M. C... de ces impositions et pénalités.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 12 avril 2018 et le 11 octobre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 18 janvier 2018 par lequel le tribunal administratif de Besançon a fait droit à la demande de M. C... ;

2°) de prononcer le rétablissement des impositions en litige.

Il soutient que :

- les premiers juges ont statué ultra petita en prenant en compte la rectification du quotient familial qui relève d'une autre procédure ;

- contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales n'ont pas été méconnues ;

- à titre subsidiaire, le défaut de communication n'est susceptible d'entraîner qu'une décharge partielle des impositions en litige.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 septembre 2019, M. C... conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le ministre de l'action et des comptes publics ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Stenger,

- et les conclusions de Mme Peton, rapporteur public,

Considérant ce qui suit :

1. M. C... exerce depuis le 2 avril 2011 les activités de maîtrise d'œuvre et d'" apporteur d'affaires ". Il a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012. Par une proposition de rectification du 7 juillet 2014, l'administration lui a notifié, dans le cadre de la procédure d'évaluation d'office, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et selon la procédure de taxation d'office des rappels de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) au titre des années 2011 et 2012 qui ont été assortis de pénalités pour défaut de dépôt des déclarations de chiffre d'affaires et des bénéfices non commerciaux, après avoir notamment remis en cause le régime de la franchise en base de la TVA et par voie de conséquence les régimes micro bénéfice industriel et commercial (BIC) et micro bénéfice non commercial (BNC) dont il s'était prévalu au titre des années 2011 et 2012. Le ministre de l'action et des comptes publics relève appel du jugement du 18 janvier 2018 par lequel le tribunal administratif de Besançon a prononcé la décharge de ces impositions.

Sur le moyen de décharge retenu par le tribunal :

2. Aux termes de l'article L. 76. B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. ".

3. Il résulte de ces dispositions qu'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en œuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des documents et renseignements obtenus auprès de tiers, qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour mettre à même l'intéressé d'y avoir accès avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent. Lorsque le contribuable lui en fait la demande, l'administration est, en principe, tenue de lui communiquer, alors même qu'il en aurait eu connaissance, les renseignements, documents ou copies de documents obtenus auprès de tiers qui lui sont opposés, afin de lui permettre d'en vérifier l'authenticité ou d'en discuter la teneur ou la portée. Il en va autrement s'agissant des documents et renseignements qui, à la date de la demande de communication, sont directement et effectivement accessibles au contribuable dans les mêmes conditions qu'à l'administration. Dans cette dernière hypothèse, si le contribuable établit qu'il ne peut avoir effectivement accès aux mêmes documents et renseignements que ceux détenus par l'administration, celle-ci est alors tenue de les lui communiquer.

4. Il résulte de l'instruction, notamment de la proposition de rectification du 7 juillet 2014, qu'à la demande de la vérificatrice, M. C... a précisé le 15 avril 2014 que ses recettes professionnelles étaient encaissées aussi bien sur son compte professionnel n° 560 381 52 590 que sur son compte personnel n° 550 186 89 441 ouverts auprès du Crédit Agricole et lui a remis l'ensemble de ses relevés de comptes. La vérificatrice a ensuite constaté que le rapprochement effectué entre ces relevés de compte et les factures clients présentées lors du contrôle ne permettait pas d'identifier toutes les sommes portées au crédit de ces deux comptes et que les remises de chèques joints à ces relevés ne mentionnaient pas l'identité des clients émetteurs. La vérificatrice a alors demandé à M. C..., par courrier du 29 avril 2014, de lui justifier l'origine professionnelle ou privée de toutes les sommes portées au crédit de son compte bancaire personnel. En l'absence de réponse de l'intéressé, l'ensemble des sommes portées au crédit du compte professionnel et du compte privé a été considéré comme des recettes professionnelles tirées des activités de maîtrise d'œuvre et d' " apporteur d'affaires " de M. C..., à l'exception du produit de gains privés relatifs à la vente d'un immeuble privé et de prêts, soit 116 212 euros pour la période 1er octobre 2011 au 31 décembre 2012 en matière de TVA et 149 176 euros en matière de BNC au titre des années 2011 et 2012.

5. La proposition de rectification précitée mentionne que les recettes reconstituées ont été identifiées d'une part, à hauteur de 112 676 euros pour la TVA et 145 640 euros pour les BNC par la totalisation des sommes portées au crédit des comptes bancaires utilisés à titre professionnel, lesquelles sont recensées dans les tableaux figurant en annexes 1 et 2 de ce document et d'autre part, à hauteur de 736 euros par la mention manuscrite apposée par le contribuable sur la facture émise par la Menuiserie Personeni, présentée lors des interventions du service sur place et réglée le 21 décembre 2012, alors même que cette somme ne figurait pas au crédit des deux comptes bancaires du contribuable. Il résulte également de l'instruction que la somme de 4 800 euros relative au chantier de M. B... apparaissait au crédit du compte bancaire professionnel de M. C..., que la somme de 1 400 euros relative au chantier de la SARL Barni a été retenue par la vérificatrice au titre de l'année 2012 au motif qu'elle avait été déclarée par la SARL Barni dans sa déclaration annuelle des salaires au titre de cette même année, ce qui a été suffisamment précisé dans la proposition de rectification en litige et qu'enfin les trois règlements effectués par la société Dehedin pour 306 euros et par la société de Carvahlo pour 1000 et 321 euros apparaissaient également au crédit du compte bancaire de M. C.... En outre, la proposition de rectification en litige précise que seules les deux sommes de 2000 euros et 800 euros, qui n'apparaissaient pas au crédit des deux comptes bancaires de M. C... au titre de 2012, ont été identifiées à l'aide de renseignements obtenus de tiers suite à la suite d'une demande d'information de la vérificatrice auprès des deux clients particuliers. Or, comme le fait valoir le ministre, la teneur et l'origine des renseignements et documents obtenus auprès de ces deux clients sont indiquées de manière suffisamment précise dans la proposition de rectification en litige. Par conséquent, le ministre est fondé à soutenir que la vérificatrice a comparé les recettes déclarées par le contribuable avec les recettes qu'elle a reconstituées à partir des seuls éléments recueillis dans la comptabilité et les documents présentés lors du contrôle, à l'exception de ces deux factures obtenues auprès de clients, ce dont M. C... a été informé par la proposition de rectification, conformément aux exigences posées à l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, ce qui lui laissait la possibilité d'en demander la communication.

6. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen soulevé à titre subsidiaire par le ministre, que c'est à tort que le tribunal administratif de Besançon a considéré que la production d'informations en provenance de tiers avait été utile à la vérificatrice pour procéder aux redressements litigieux et que cette dernière n'avait pas respecté l'obligation d'information à laquelle elle était tenue en application de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, pour prononcer la restitution des impositions supplémentaires auxquelles M. C... a été assujetti, au titre des années en cause. Toutefois, il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C... devant le Tribunal administratif de Besançon et en appel.

Sur les autres moyens soulevés par M. C... devant le tribunal administratif de Besançon et en appel :

7. En premier lieu, doit être écarté comme inopérant le moyen tiré de ce que la proposition de rectification du 7 juillet 2014 serait insuffisamment motivée, au regard de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, applicable dans le cadre de la procédure contradictoire de rectification prévue par l'article L. 55 du même livre, dès lors qu'elle est intervenue dans le cadre d'une procédure d'évaluation et de taxation d'office.

8. En second lieu, aux termes de l'article 93 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice à retenir dans les bases de l'impôt sur le revenu est constitué par l'excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l'exercice de la profession. "

9. M. C..., à qui la charge de la preuve du caractère exagéré des impositions incombe dès lors que ses bénéfices non commerciaux ont été régulièrement évalués d'office, soutient que l'administration aurait dû déduire de son bénéfice non commercial rectifié les frais kilométriques afférents à son véhicule personnel, utilisé pour les besoins de son activité, selon le barème forfaitaire. Il résulte toutefois de l'instruction que l'intéressé utilisait pour son activité professionnelle un véhicule Peugeot 207, immatriculé dans la catégorie " NI " de type camionnette, selon les indications portées sur la carte grise dudit véhicule. Dans ces conditions, il ne saurait demander l'application du barème forfaitaire pour les titulaires de BNC qui n'est applicable qu'aux seules voitures particulières de tourisme et aux deux-roues. Au surplus, il ne résulte pas de l'instruction que M. C... a exercé au 1er janvier de l'année d'imposition l'option permettant l'application d'un tel barème.

10. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la régularité du jugement attaqué ni la fin de non-recevoir opposée en première instance par l'administration, que le ministre de l'action et des comptes publics est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Besançon a prononcé la décharge des impositions en litige.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1501591 du 18 janvier 2018 du tribunal administratif de Besançon est annulé.

Article 2 : La demande de M. C... présentée devant le tribunal administratif de Besançon est rejetée.

Article 3 : Les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et les rappels de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) au titre des années 2011 et 2012, dont le tribunal administratif a prononcé la décharge, sont, ainsi que les pénalités correspondantes, remises à la charge de M. C....

Article 4: Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'action et des comptes publics et à M. A... C....

3

N° 18NC01188


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NC01188
Date de la décision : 02/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée.


Composition du Tribunal
Président : M. AGNEL
Rapporteur ?: Mme Laurence STENGER
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : SCHAUFELBERGER - MONNIN - SIRAT

Origine de la décision
Date de l'import : 19/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-07-02;18nc01188 ?
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