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16/02/2021 | FRANCE | N°20NC00139-19NC00140

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 16 février 2021, 20NC00139-19NC00140


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... C... et Mme H... E..., épouse C... ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les arrêtés du 23 septembre 2019 par lesquels le préfet du Bas-Rhin a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils seront éloignés.

Par un jugement nos 1908029, 1908088 du 17 décembre 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.

Procédu

res devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée sous le n° 20NC00139 le 17 janvier 2020...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... C... et Mme H... E..., épouse C... ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les arrêtés du 23 septembre 2019 par lesquels le préfet du Bas-Rhin a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils seront éloignés.

Par un jugement nos 1908029, 1908088 du 17 décembre 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.

Procédures devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée sous le n° 20NC00139 le 17 janvier 2020, M. C..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler, en ce qui le concerne, le jugement du 17 décembre 2019 du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 23 septembre 2019 pris à son encontre par le préfet du Bas-Rhin ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de statuer à nouveau sur sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2 500 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'administration n'a pas procédé à un examen réel et sérieux de sa situation, dès lors que l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ne repose sur aucun élément objectif, en l'absence d'élément permettant de remettre en cause le certificat médical établi par son médecin traitant qui a été transmis à l'OFII ;

- compte tenu de son état de santé, il ne peut pas voyager vers son pays d'origine si bien que la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 janvier 2021, le préfet du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

II. Par une requête, enregistrée sous le n° 20NC00140 le 17 janvier 2020, Mme C..., représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler, en ce qui la concerne, le jugement du 17 décembre 2019 du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 23 septembre 2019 pris à son encontre par le préfet du Bas-Rhin ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de statuer à nouveau sur sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2 500 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que dès lors que les membres de sa famille devraient se voir délivrer un titre de séjour, la décision litigieuse est entachée d'une erreur d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 janvier 2021, le préfet du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.

M. et Mme C... ont présenté des mémoires, enregistrés le 25 janvier 2021, après la clôture de l'instruction. Ces mémoires n'ont pas été communiqués.

M. et Mme C... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par des décisions du 9 juin 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Antoniazzi, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant arménien, est entré irrégulièrement en France le 16 juin 2014 en vue de solliciter la reconnaissance du statut de réfugié. Il a été rejoint, le 22 juillet 2017, par son épouse, Mme C... et sa fille, Mme F... C..., également de nationalité arménienne. Les demandes d'asile des époux C... ont été rejetées par des décisions devenues définitives de la Cour nationale du droit d'asile en date, pour M. C..., du 2 novembre 2018, et pour Mme C..., du 4 mars 2019. Le 19 janvier 2019, M. C... a sollicité son admission au séjour en se prévalant de son état de santé. Le 26 juin 2019, il a également demandé une admission exceptionnelle au séjour au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le 26 juin 2019, Mme C... a sollicité son admission au séjour sur le fondement du même article en faisant valoir la présence en France de sa fille et de son époux, ainsi que sa volonté d'intégration. Par deux arrêtés du 23 septembre 2019, le préfet du Bas-Rhin a refusé de faire droit à ces demandes, a obligé les époux C... à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination. Par deux requêtes qu'il y a lieu de joindre pour statuer par un seul arrêt, M. et Mme C... relèvent appel du jugement du 17 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande tendant à l'annulation de ces arrêtés.

Sur l'arrêté contesté en ce qu'il concerne M. C... :

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. ".

3. En premier lieu, la seule circonstance que le médecin généraliste de M. C..., qui a rédigé le rapport médical adressé à l'Office français de l'immigration et de l'intégration destiné à l'examen de sa demande de titre de séjour, a mentionné, sans plus de précision, qu'il ne pouvait pas être soigné dans son pays d'origine ne révèle pas que le préfet n'a pas procédé à un examen réel et sérieux de sa demande, en estimant, ainsi d'ailleurs que l'a retenu le collège composé de trois médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration dans son avis du 9 mai 2019, qu'il pouvait bénéficier de soins appropriés à son état de santé dans son pays d'origine.

4. En second lieu, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte-tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié.

5. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

6. Par un avis rendu le 9 mai 2019, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que l'état de santé de M. C... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut est susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé mais qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Il ajoute que l'intéressé peut voyager sans risque vers son pays d'origine.

7. Il ressort des pièces du dossier que M. C... souffre de nombreuses pathologies parmi lesquelles des séquelles d'un infarctus du myocarde, une cardiopathie ischémique, une hypertension artérielle pulmonaire, une maladie pulmonaire bronchique, une maladie rénale chronique, un kyste rénal droit et une hernie ombilicale. Les certificats médicaux qu'il produit, qui décrivent ses pathologies et la nécessité d'un suivi médical et énoncent sans plus de précision qu'il ne peut pas être soigné en Arménie, ne suffisent pas à remettre en cause l'appréciation du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration sur la possibilité pour l'intéressé de bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Si son médecin généraliste a indiqué le 9 janvier 2019 que l'intéressé n'était pas apte à voyager, cette contre-indication n'a pas été reprise dans les certificats plus récents émis par ce même médecin. Enfin, la nécessité de subir une nouvelle intervention chirurgicale, mentionnée dans le certificat médical du 12 décembre 2019, est postérieure à la décision attaquée. Dans ces conditions, le préfet du Bas-Rhin n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées du 11° de L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant de délivrer un titre de séjour à M. C....

Sur l'arrêté contesté en ce qu'il concerne Mme C... :

8. Il ressort des pièces du dossier que Mme C..., âgée de quarante-cinq ans, résidait depuis moins de trois ans en France à la date de l'arrêté litigieux. En outre, son époux fait également l'objet d'une mesure d'éloignement. Dans ces conditions, le préfet du Bas-Rhin n'a pas commis d'erreur d'appréciation en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, alors même que l'arrêté portant refus de délivrer un titre de séjour en qualité d'étudiante à sa fille, qui est majeure, a été annulé au motif que le préfet a commis une erreur de droit en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et que cette dernière est en attente d'un réexamen de sa situation.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes de M. et Mme C... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... C..., à Mme H... E..., épouse C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.

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N° 20NC00139 - 20NC00140


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC00139-19NC00140
Date de la décision : 16/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme GRENIER
Rapporteur ?: Mme Sandrine ANTONIAZZI
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : GALLAND YANNICK et KIEFFER EMMANUEL

Origine de la décision
Date de l'import : 26/02/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-02-16;20nc00139.19nc00140 ?
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