La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/07/2021 | FRANCE | N°21NC00199

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 20 juillet 2021, 21NC00199


Vu les procédures suivantes :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 29 octobre 2020 par lequel le préfet du Haut-Rhin lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée d'un an.

Par un jugement n° 2006773 du 3 décembre 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

:

Par une requête enregistrée le 19 janvier 2021, M. A..., représenté par Me B..., demande...

Vu les procédures suivantes :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 29 octobre 2020 par lequel le préfet du Haut-Rhin lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée d'un an.

Par un jugement n° 2006773 du 3 décembre 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 janvier 2021, M. A..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 3 décembre 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Haut-Rhin du 29 octobre 2020 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de procéder au réexamen de sa demande, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

s'agissant de la décision de refus de titre de séjour :

- elle est entachée d'incompétence ;

- le préfet devait lui délivrer un titre de séjour en application de l'article 6-2 de l'accord franco-algérien et ne pouvait pas lui opposer les dispositions de l'article L. 313-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- son comportement ne constitue pas une menace pour l'ordre public dès lors qu'il s'est réinséré ;

- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

s'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision attaquée n'est pas motivée ;

s'agissant du refus de délai de départ volontaire :

- les motifs justifiant la décision manquent en fait ;

- aucun risque de fuite au sens de l'article L. 511-1 II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'est établi ;

s'agissant de l'interdiction de retour sur le territoire français :

- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision attaquée n'est pas motivée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 juin 2021, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 avril 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme C..., première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Une note en délibéré, présentée par M. A..., a été enregistrée le 29 juin 2021.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant algérien né le 2 avril 1988, est entré régulièrement en France, selon ses déclarations, le 20 septembre 2014. Le 14 septembre 2017, il a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prononcée par le préfet de police de Paris, à laquelle il n'a pas déféré. Le 11 juin 2020, M. A... a sollicité son admission au séjour en se prévalant de son mariage avec une ressortissante française. Par un arrêté du 29 octobre 2020, le préfet du Haut-Rhin a refusé de faire droit à sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée d'un an. M. A... fait appel du jugement du 3 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Les dispositions du présent article ainsi que celles des deux articles suivants, fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent, sous réserve que leur situation matrimoniale soit conforme à la législation française. Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) / 2) au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; (...) ".

3. Les stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ne privent pas l'autorité compétente du pouvoir qui lui appartient de refuser à un ressortissant algérien la délivrance du certificat de résidence d'un an lorsque sa présence en France constitue une menace pour l'ordre public.

4. Pour refuser la délivrance du certificat de résidence sollicité, le préfet du Haut-Rhin s'est fondé sur le fait que la présence en France de M. A... constitue une menace pour l'ordre public. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a été condamné le 29 août 2016 par le tribunal correctionnel de Paris à une peine de 6 mois d'emprisonnement, assortie d'un sursis total pour des faits, commis le 26 août 2016, d'agression sexuelle et le 28 mars 2018 à une peine de 6 mois d'emprisonnement, assortie d'un sursis total, d'une mise à l'épreuve pendant trois ans et d'une interdiction de détenir ou porter une arme soumise à autorisation pendant 5 ans, pour des faits commis le 9 juillet 2016 d'exhibition sexuelle. Eu égard au caractère isolé et ancien des faits reprochés, antérieurs de plus de quatre ans à la date de la décision en litige, le préfet du Haut-Rhin a commis une erreur d'appréciation en estimant que le comportement de M. A... constituait, au jour de la décision attaquée, une menace pour l'ordre public. M. A... est ainsi fondé à demander l'annulation de la décision de refus de séjour pour ce motif.

5. Les décisions portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de renvoi et lui interdisant le retour sur le territoire français pendant une durée d'un an doivent, par voie de conséquence, être annulées.

6. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg rejeté sa demande d'annulation des décisions de refus de titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination et lui interdisant le retour sur le territoire français pendant une durée d'un an.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

7. Eu égard au motif d'annulation de l'arrêté litigieux, l'exécution du présent arrêt implique, nécessairement, en l'absence de changement de circonstances de droit ou de fait y faisant obstacle et ressortant des pièces du dossier, la délivrance à l'intéressé d'un certificat de résidence algérien portant la mention " vie privée et familiale ". Il y a lieu d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de délivrer à M. A... un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour.

Sur les frais liés à l'instance :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2006773 du 3 décembre 2020 du tribunal administratif de Strasbourg et l'arrêté du 29 octobre 2020 du préfet du Haut-Rhin sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Haut-Rhin de délivrer à M. A... un certificat de résidence algérien portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, et dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour.

Article 3 : L'Etat versera à M. A... une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.

2

N° 21NC00199


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC00199
Date de la décision : 20/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: Mme Sandrine ANTONIAZZI
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : BENTAYEB

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-07-20;21nc00199 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award