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27/01/2022 | FRANCE | N°21NC00661

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 27 janvier 2022, 21NC00661


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

A... C... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 28 novembre 2019 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait renvoyée.

Par un jugement n° 2006052 du 17 novembre 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistr

ée le 4 mars 2021, A... B..., représentée par Me Olszakowski, demande à la cour :

1°) d'annuler c...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

A... C... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 28 novembre 2019 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait renvoyée.

Par un jugement n° 2006052 du 17 novembre 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 mars 2021, A... B..., représentée par Me Olszakowski, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 17 novembre 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 28 novembre 2019 pris à son encontre par le préfet de la Moselle ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

Sur la décision de refus de titre de séjour :

- le préfet de la Moselle a apprécié sa situation de façon inexacte en estimant que la résidence en France de son fils français n'était pas établie ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- la décision encourt l'annulation par exception d'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- la décision méconnaît le 6° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a apprécié de façon manifestement inexacte les conséquences de sa décision sur sa situation personnelle et familiale.

Par un mémoire en défense enregistré le 27 octobre 2021, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.

Il s'en remet à ses écritures de première instance

A... B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 février 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de A... Picque a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. A... B..., née le 3 mars 1982, de nationalité ghanéenne, est entrée en France régulièrement le 19 juillet 2017, selon ses déclarations. Le 16 janvier 2018, elle a sollicité la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en qualité de parent d'enfant français. Elle fait appel du jugement n° 2006052 du 17 novembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 28 novembre 2019 du préfet de la Moselle refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le Ghana comme pays de destination.

Sur la décision de refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. / (...) ".

3. Il résulte des termes mêmes de ces dispositions que le législateur, pour le cas où la carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " est demandée par un étranger au motif qu'il est parent d'un enfant français, a subordonné la délivrance de plein droit de ce titre à la condition, notamment, que l'enfant réside en France. Ce faisant, le législateur n'a pas requis la simple présence de l'enfant sur le territoire français, mais a exigé que l'enfant réside en France, c'est-à-dire qu'il y demeure effectivement de façon stable et durable. Il appartient dès lors, pour l'application de ces dispositions, à l'autorité administrative d'apprécier dans chaque cas, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, au vu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et des justifications produites, où se situe la résidence de l'enfant, entendue comme le lieu où il demeure effectivement de façon stable et durable à la date à laquelle le titre est demandé.

4. Il est constant que le fils de A... B..., alors âgé de 5 ans, est entré avec elle sur le territoire français le 19 juillet 2017. Ainsi, alors même qu'il a été rapidement scolarisé après son arrivée en France, il ne pouvait être regardé, à la date à laquelle le titre de séjour a été demandé, le 16 janvier 2018, comme demeurant de façon stable et durable en France. Dans ces conditions, c'est par une exacte application dispositions énoncées au point 2 que le préfet de la Moselle a refusé de délivrer à A... B... le titre de séjour qu'elle avait sollicité.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

5. Aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 6° L'étranger ne vivant pas en état de polygamie qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans (...) ".

6. A la date de la mesure d'éloignement, à laquelle doit nécessairement s'apprécier la condition de résidence de l'enfant pour l'application des dispositions citées au point précédent, le fils français D... A... B... était âgé de 7 ans et résidait habituellement en France avec elle depuis deux ans et quatre mois. A... B... établit contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, qui est scolarisé. Par suite, en obligeant la requérante à quitter le territoire français, le préfet a méconnu les dispositions du 6° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

7. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête dirigés contre l'obligation de quitter le territoire français, que A... B... est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :

8. L'annulation de la décision du 28 novembre 2019 du préfet de la Moselle obligeant A... B... à quitter le territoire français n'implique pas, comme la requérante le demandait dans ses conclusions devant les premiers juges et dont la cour est ressaisie au titre de l'effet dévolutif de l'appel, la délivrance d'un titre de séjour mais uniquement qu'il soit enjoint au préfet de la Moselle de réexaminer sa situation, en tenant compte du motif exposé au point 6, dans un délai de deux mois. Dans cette attente, le préfet délivrera, dans un délai de quinze jours, à A... B... une autorisation provisoire de séjour sur le fondement de l'article L. 614-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ces deux délais courent à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais de l'instance :

9. A... B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Olszakowski, avocat de A... B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Olszakowski de la somme de 1 500 euros.

D E C I D E :

Article 1er : La décision du 28 novembre 2019 du préfet de la Moselle obligeant A... B... à quitter le territoire français est annulée.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Moselle de réexaminer la situation de A... B..., en tenant compte du motif exposé au point 6, dans un délai de deux mois et de lui délivrer dans un délai de quinze jours une autorisation provisoire de séjour sur le fondement de l'article L. 614-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ces deux délais courant à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le jugement n° 2006052 du tribunal administratif de Strasbourg du 17 novembre 2020 est réformé en ce qu'il est contraire au présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à Me Olszakowski, avocat de A... B..., la somme de 1 500 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Olszakowski renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de A... B... est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à A... C... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.

2

N° 21NC00661


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC00661
Date de la décision : 27/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. SAMSON-DYE
Rapporteur ?: Mme Anne-Sophie PICQUE
Rapporteur public ?: M. BARTEAUX
Avocat(s) : OLSZAKOWSKI

Origine de la décision
Date de l'import : 01/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-01-27;21nc00661 ?
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