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06/04/2023 | FRANCE | N°22NC01873

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 06 avril 2023, 22NC01873


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 9 février 2022 par lequel le préfet de la Haute-Saône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an.

Par un jugement n° 2200534 du 14 juin 2022, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.>
Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 9 février 2022 par lequel le préfet de la Haute-Saône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an.

Par un jugement n° 2200534 du 14 juin 2022, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement les 13 juillet et 25 novembre 2022, M. D..., représenté par Me Woldanski, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 14 juin 2022 ;

2°) d'annuler cet arrêté du 9 février 2022 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Saône de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 100 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

- la décision attaquée méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale compte tenu de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

Sur la légalité de l'interdiction de retour sur le territoire français :

- elle est entachée d'erreur d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 septembre 2022, et un mémoire enregistré le 13 décembre 2022, se bornant à mentionner que les écritures complémentaires du requérant n'appellent pas d'observations de sa part, le préfet de la Haute-Saône conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Une note en délibéré présentée pour M. D... a été enregistrée au greffe le 20 mars 2023.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., né en 1986 et de nationalité tunisienne, est entré régulièrement sur le territoire français le 22 juillet 2019 sous couvert d'un visa de court séjour et s'est maintenu sur le territoire au-delà de la période de validité de son visa. Le 31 mars 2021, il a sollicité son admission au séjour à titre exceptionnel. Par un arrêté du 9 février 2022, le préfet de la Haute-Saône a refusé de faire droit à sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire pendant une durée d'un an. M. D... relève appel du jugement du 14 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable à la décision attaquée : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ".

3. M. D... ne résidait que depuis deux ans et demi à la date de la décision en litige sur le territoire français, où il s'est maintenu à l'expiration de son visa de court séjour. D'une part, s'il entretient une relation avec une ressortissante française, leur relation était encore récente à la date de la décision en litige et il n'est pas contesté qu'ils ne résident pas ensemble. D'autre part, M. D... justifie avoir suivi une formation de " sauveteur secouriste du travail : SST " en avril 2021 et surtout avoir travaillé, comme ouvrier agricole polyvalent, à temps partiel, en vertu d'un contrat à durée déterminée d'insertion conclu le 1er avril 2021 avec une structure qui envisage de l'embaucher à nouveau une fois sa situation régularisée. Il produit également une promesse d'embauche, au demeurant postérieure à l'arrêté en litige, pour un poste de poseur de sol confirmé, pour lequel il ne justifie pas, contrairement aux mentions du document, qu'il serait qualifié. Ces éléments ne permettent toutefois pas de caractériser des circonstances exceptionnelles. Par suite, M. D... n'est pas fondé à soutenir que la décision en litige méconnaît les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

4. En deuxième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

5. M. D... ne dispose pas d'attaches familiales en France, alors qu'il a deux enfants en Tunisie, avec lesquels il se borne à alléguer qu'il n'aurait plus de contact. Ainsi qu'il a été dit au point 3, sa relation avec une ressortissante française, avec laquelle il ne réside pas, était encore récente à la date de la décision en litige. En dépit d'efforts pour s'insérer professionnellement, il n'est pas établi que le requérant aurait, compte tenu de la faible durée de sa présence sur le territoire, désormais ancré en France l'essentiel de sa vie privée. Ainsi, la décision de refus de séjour ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Par suite, M. D... n'est pas fondé à soutenir que la décision en litige méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

6. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français serait illégale compte tenu de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour.

Sur la légalité de l'interdiction de retour sur le territoire français :

7. Aux termes de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger n'est pas dans une situation mentionnée aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative peut assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code, applicable aux décisions prises sur le fondement de l'article L. 612-8 : " Pour fixer la durée des interdictions de retour (...), l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français ".

8. Compte tenu de sa durée de présence de seulement deux ans et demi en France et du caractère encore récent de sa relation avec une ressortissante française, avec laquelle il ne réside pas, et alors même qu'il ne représente pas une menace pour l'ordre public et qu'il n'avait pas fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement, M. D... n'est pas fondé à soutenir qu'en lui faisant interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an, le préfet de la Haute-Saône aurait fait une inexacte application des dispositions précitées.

9. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Saône en date du 9 février 2022.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D..., à Me Woldanski et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet de la Haute-Saône.

Délibéré après l'audience du 16 mars 2023, à laquelle siégeaient :

M. Agnel, président,

Mme Brodier, première conseillère,

Mme Mosser, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 avril 2023.

La rapporteure,

Signé : H. C...Le président,

Signé : M. A...

La greffière,

Signé : C. Schramm

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Schramm

2

N° 22NC01873


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NC01873
Date de la décision : 06/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. AGNEL
Rapporteur ?: Mme Hélène BRODIER
Rapporteur public ?: Mme STENGER
Avocat(s) : WOLDANSKI

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-04-06;22nc01873 ?
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