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18/07/2023 | FRANCE | N°22NC01922

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 18 juillet 2023, 22NC01922


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 28 février 2022 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être renvoyée.

Par un jugement n° 2202385 du 16 juin 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregist

rée le 19 juillet 2022, Mme C..., représentée par Me Kling, demande à la cour :

1°) d'annuler le jug...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 28 février 2022 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être renvoyée.

Par un jugement n° 2202385 du 16 juin 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 juillet 2022, Mme C..., représentée par Me Kling, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 16 juin 2022 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 28 février 2022 pris à son encontre par la préfète du Bas-Rhin ;

3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Kling, avocat de Mme C..., de la somme de 1 200 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

s'agissant de la décision de refus de titre de séjour :

- en méconnaissance des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision porte une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle ;

- en méconnaissance de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la préfète a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en ne régularisant pas sa situation à titre exceptionnel ;

s'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle ;

s'agissant de la décision fixant le pays de destination :

- la décision est illégale par voie de conséquence.

Une mise en demeure a été adressée le 17 mai 2023 à la préfète du Bas-Rhin.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 novembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Denizot a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante congolaise, née le 31 décembre 1975, est entrée irrégulièrement en France le 14 novembre 2010 en vue de solliciter la reconnaissance du statut de réfugié. Sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 29 septembre 2011, puis par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 3 avril 2012. Dans le dernier état de la procédure, le 11 juin 2020, Mme C... a sollicité son admission au séjour sur le fondement des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 28 février 2022 la préfète du Bas-Rhin a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par un jugement du 16 juin 2022, dont Mme C... relève appel, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la décision de refus de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".

3. Il ressort des pièces du dossier que Mme C... est entrée en France durant l'année 2010, comme en atteste sa demande d'asile, enregistrée le 23 décembre 2010. Les différentes copies des avis d'impôt, des déclarations simplifiées de revenus, des attestations de quotient familial et des cartes d'admission médicale de l'Etat ne permettent pas, à elles seules, d'établir l'ancienneté et le caractère ininterrompu de son séjour en France. Toutefois, il ressort de l'attestation du centre social protestant que Mme C..., qui a été domiciliée au sein de l'association " Le relais " depuis le 8 janvier 2013 sans interruption, participe de façon régulière aux ateliers de cuisine depuis 2013. Par suite, la requérante justifie résider habituellement sur le territoire français depuis l'année 2013. Cependant, Mme C..., célibataire, dont le fils et une partie de sa famille résident en République démocratique du Congo, ne justifie pas de liens personnels ou familiaux, intenses et stables sur le territoire français. A ce titre, si Mme C... se prévaut de la présence de son frère et de sa sœur, titulaires d'une carte de résident jusqu'en 2028, l'intéressée n'établit pas que sa présence serait absolument nécessaire auprès d'eux. Dès lors, compte tenu des conditions de séjour de l'intéressée, la décision de refus de séjour n'a pas porté au droit de Mme C... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Dès lors, le moyen tiré de l'inexacte application des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14. (...) ". Il appartient à l'autorité administrative, en application de ces dispositions, de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention "vie privée et familiale" répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ".

5. Il ressort des pièces du dossier que Mme C... réside habituellement en France depuis l'année 2013 et qu'elle maîtrise la langue française. Toutefois, la requérante est célibataire et ne justifie d'aucune attache privée ou familiale intense et stable sur le territoire français. Dans ces conditions, et malgré l'engagement associatif ou dans des actions de bénévolat de l'intéressée, Mme C... ne peut pas être regardée comme justifiant de circonstances humanitaires ou d'un motif exceptionnel d'admission au séjour au sens des dispositions précitées de l'article L. 435-1. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté.

6. En dernier lieu, pour les mêmes motifs, il ne ressort pas des pièces du dossier que la préfète du Bas-Rhin aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision de refus de séjour sur la situation personnelle de Mme C....

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

7. Pour les mêmes motifs qu'exposés précédemment, il ne ressort pas des pièces du dossier que la préfète du Bas-Rhin aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision d'obligation de quitter le territoire français sur la situation personnelle de Mme C....

Sur la décision fixant le pays de destination :

8. Ainsi qu'il a été dit précédemment, il n'est pas établi que les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français seraient illégales. Par suite, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays à destination duquel elle pourra être renvoyée serait illégale en raison de l'illégalité des décisions de refus de séjour et portant obligation de quitter le territoire français.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions de sa requête aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C..., à Me Kling et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin

Délibéré après l'audience du 20 juin 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Samson-Dye, présidente,

- Mme Roussaux, première conseillère,

- M. Denizot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 juillet 2023.

Le rapporteur,

Signé : A. DenizotLa présidente,

Signé : A. Samson-Dye

La greffière,

Signé : M. A...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

M. A...

2

N° 22NC01922


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NC01922
Date de la décision : 18/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme SAMSON-DYE
Rapporteur ?: M. Arthur DENIZOT
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : KLING

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-07-18;22nc01922 ?
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