La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/06/2006 | FRANCE | N°04NT00733

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3eme chambre, 08 juin 2006, 04NT00733


Vu la requête, enregistrée le 21 juin 2004, présentée pour M. et Mme X, demeurant ..., par Me Breysse ; M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 02-1540 du 27 avril 2004 du Tribunal administratif d'Orléans en tant que, par ce jugement, le Tribunal après avoir constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer, à hauteur de 1 554,24 euros et 1 704,76 euros sur les conclusions de leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1998 et 1999, a rejeté le surplus

de leurs conclusions ;

2°) de prononcer la décharge des impositions su...

Vu la requête, enregistrée le 21 juin 2004, présentée pour M. et Mme X, demeurant ..., par Me Breysse ; M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 02-1540 du 27 avril 2004 du Tribunal administratif d'Orléans en tant que, par ce jugement, le Tribunal après avoir constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer, à hauteur de 1 554,24 euros et 1 704,76 euros sur les conclusions de leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1998 et 1999, a rejeté le surplus de leurs conclusions ;

2°) de prononcer la décharge des impositions supplémentaires restant en litige ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

………………………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mai 2006 :

- le rapport de M. Gualeni, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Millet, commissaire du gouvernement ;

Considérant que l'administration a remis en cause, au titre des années 1998 et 1999, l'imputation sur le revenu global de M. et Mme X des déficits fonciers résultant de travaux entrepris en vue de l'aménagement d'un appartement acquis dans un ensemble immobilier dénommé ..., inscrit partiellement à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques ; qu'ils relèvent appel du jugement par lequel le Tribunal administratif d'Orléans, après avoir décidé qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions de leur demande relatives à l'imputation sur leur revenu global des intérêts d'emprunts contractés pour cette acquisition, a rejeté le surplus de leur demande ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que le jugement attaqué a rejeté les conclusions de M. et Mme X tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les revenus auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1998 et 1999 au motif que les montants de travaux réalisés dans les volumes intérieurs ont eu pour objet et pour effet de transformer une maison de retraite médicalisée et des lits hospitaliers en quarante-deux logements d'habitation équipés aux normes actuelles du confort et que ces travaux, par l'ampleur de la redistribution des volumes, de la nouvelle normalisation qu'ils impliquent, et des agrandissements de surface habitable qui résultent de la comparaison des plans avant et après travaux en particulier sur les surfaces acquises par M. et Mme X, ont excédé des travaux de simple entretien, réparation et amélioration ; que ce jugement mentionne les dispositions applicables du code général des impôts et les éléments retenus par l'administration pour procéder aux redressements contestés ; qu'il a ainsi répondu de façon suffisamment précise et motivée auxdites conclusions ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, que la notification de redressements comme la réponse aux observations de M. et Mme X se réfèrent à l'article 156-II-1° ter du code général des impôts, inapplicable à la situation des intéressés, au lieu du I-3° du même article ; que, toutefois, il résulte de l'instruction que les intéressés ont été mis à même de présenter utilement leurs observations, dès lors que la notification de redressements comme la réponse à leurs observations indiquaient, sans confusion possible, la nature, le montant et les motifs des redressements envisagés ; qu'il ne ressort pas davantage de ces documents que l'administration aurait entendu appliquer aux intéressés les dispositions de l'article 156-II-1° ter du code général des impôts ; que, dans ces conditions, et contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'erreur purement matérielle ainsi commise n'est pas de nature à entacher d'irrégularité la procédure d'imposition mise en oeuvre ;

Considérant, en second lieu, que l'administration est en droit d'invoquer à tout moment de la procédure contentieuse, et sans être tenue d'adresser une nouvelle notification de redressements au contribuable, tout moyen nouveau propre à donner un fondement légal à une imposition contestée devant le juge de l'impôt, sous réserve de ne pas priver le contribuable des garanties de procédure prévues par la loi ; qu'aux termes de l'article L.80 CA du livre des procédures fiscales : La juridiction saisie peut, lorsqu'une erreur non substantielle a été commise dans la procédure d'imposition, prononcer, sur ce seul motif, la décharge des majorations et amendes, à l'exclusion des droits dus en principal et des intérêts de retard. Elle prononce la décharge de l'ensemble lorsque l'erreur a eu pour effet de porter atteinte aux droits de la défense ou lorsqu'elle est de celles pour lesquelles la nullité est expressément prévue par la loi ou par les engagements internationaux conclus par la France ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les redressements initialement mis à la charge de M. et Mme X, étaient fondés sur les dispositions de l'article 156-I-3° du code général des impôts et motivés par l'impossibilité d'imputer sur le revenu global les déficits fonciers engendrés par les travaux réalisés sur les parties privatives de l'ensemble immobilier dénommé ..., dissociables des travaux entrepris sur les parties communes en partie inscrites à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques ; que, devant le Tribunal, l'administration a demandé une substitution de base légale tendant à fonder ces redressements sur les dispositions de l'article 31-I-1° b du code général des impôts en soutenant que les travaux dont s'agit ayant le caractère de travaux d'agrandissement et de reconstruction ne pouvaient s'imputer sur les revenus fonciers et ne pouvaient, dès lors, faire apparaître de déficits dans la catégorie des revenus fonciers ;

Considérant que la circonstance que la substitution de base légale ainsi demandée par l'administration dans la limite des redressements notifiés n'a pas été invoquée à l'occasion de la notification de redressements initialement adressée à M. et Mme X n'est pas de nature à entacher d'irrégularité la procédure d'imposition ; que ces derniers qui ont été imposés dans le cadre d'une procédure contradictoire n'ont pas été privés, du fait de cette substitution de base légale qui porte sur le même impôt, de garanties de procédure prévues par la loi ; qu'ainsi, en l'absence d'erreur commise dans la procédure d'imposition et d'atteinte aux droits de la défense, les requérants ne sont pas fondés à se prévaloir des dispositions précitées de l'article L.80 CA du livre des procédures fiscales ;

Sur le bien-fondé des impositions ;

En ce qui concerne la détermination des revenus fonciers ;

S'agissant de l'application de la loi fiscale :

Considérant qu'aux termes de l'article 31 du code général des impôts : I. Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : / 1° Pour les propriétés urbaines : / a. Les dépenses de réparation et d'entretien… ; / b. Les dépenses d'amélioration afférentes aux locaux d'habitation, à l'exclusion des frais correspondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement… ; qu'il résulte de ces dispositions que les dépenses effectuées par un propriétaire et correspondant à des travaux entrepris dans son immeuble sont déductibles de son revenu, sauf si elles correspondent à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement ; que doivent être regardés comme des travaux de construction ou de reconstruction, au sens des dispositions précitées, les travaux comportant la création de nouveaux locaux d'habitation, notamment dans les locaux auparavant affectés à un autre usage, ainsi que les travaux ayant pour effet d'apporter une modification importante au gros-oeuvre de locaux d'habitation existants ou les travaux d'aménagement interne qui, par leur importance, équivalent à une reconstruction ; que doivent être regardés comme des travaux d'agrandissement, au sens des mêmes dispositions, les travaux ayant pour effet d'accroître le volume ou la surface habitable de locaux existants ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les travaux d'aménagement de l'appartement des requérants s'inscrivent dans un programme de restauration de l'ensemble immobilier susmentionné qui abritait une maison de retraite médicalisée dépendant du centre hospitalier général de Troyes, comprenant cent trente-cinq chambres médicalisées, sur un total de cent quatre-vingt-quinze chambres réparties aux premier et second étages, ainsi que, au rez-de-chaussée, des dortoirs, un réfectoire, une salle de spectacle, une lingerie, une salle de rééducation, des sanitaires, des vestiaires et des réserves ; qu'il résulte également de l'instruction que l'aménagement du second niveau de l'appartement duplex des requérants a eu pour effet de transformer des combles en local à usage d'habitation et a nécessité, notamment, la pose d'un escalier reliant le premier niveau au second ; que ces travaux ont ainsi eu pour effet tant d'augmenter la surface habitable que d'apporter des modifications importantes au gros-oeuvre ; qu'ils doivent donc être regardés comme des travaux d'agrandissement au sens des dispositions précitées de l'article 31 du code général des impôts ; que si les requérants soutiennent, à titre subsidiaire, que les dépenses exposées en vue de l'aménagement du premier niveau de leur appartement, à hauteur de 50 % du total des frais engagés, compte tenu de l'augmentation, dans cette proportion, de la surface habitable résultant de l'aménagement du second niveau, sont déductibles de leurs revenus fonciers, ces travaux ne sont pas dissociables des travaux d'agrandissement susdécrits ; que, par suite, l'administration était fondée à refuser la déduction des revenus fonciers du coût des travaux afférents à l'aménagement de cet appartement ;

S'agissant du bénéfice de l'interprétation de la loi fiscale donnée par l'administration :

Considérant qu'aux termes de l'article L.80 B du livre des procédures fiscales : La garantie prévue au premier alinéa de l'article L.80 A est applicable : 1° Lorsque l'administration a pris formellement position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal… ; que, selon l'article L.80 A : Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente ;

Considérant, en premier lieu, que si M. et Mme X entendent se prévaloir sur le fondement de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales des paragraphes 17 à 19 de la documentation de base 5 D-2225 mise à jour au 15 septembre 1993, ces paragraphes ne comportent pas une interprétation du texte fiscal différente de celle dont il a été fait application ; que, par suite, les requérants ne sont, en tout état de cause, pas fondés à en solliciter le bénéfice ;

Considérant, en second lieu, qu'eu égard aux règles qui régissent l'applicabilité des interprétations ou des appréciations portées par l'administration en vertu des dispositions précitées des articles L.80 A et L.80 B du livre des procédures fiscales, les contribuables ne sont en droit d'invoquer, sur le fondement desdites dispositions, que des interprétations et appréciations antérieures à l'imposition primitive ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés, en tout état de cause, à se prévaloir sur le fondement de ces dispositions des mentions relatives à la distinction faite entre les travaux réalisés sur les parties communes de l'ensemble immobilier et ceux réalisés sur les parties privatives contenues dans la notification de redressement du 17 novembre 2000, acte de procédure conduisant à l'imposition contestée ;

En ce qui concerne la détermination du revenu global ;

S'agissant de l'application de la loi fiscale :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 156 du code général des impôts dans sa rédaction applicable à la présente espèce : L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé eu égard aux propriétés… que possèdent les membres du foyer fiscal... sous déduction : / I. Du déficit constaté pour une année donnée dans une catégorie de revenus…/ Toutefois, n'est pas autorisée l'imputation :…/ 3° Des déficits fonciers, lesquels s'imputent exclusivement sur les revenus fonciers des dix années suivantes… ; cette disposition n'est pas applicable… aux propriétaires de monuments classés monuments historiques, inscrits à l'inventaire supplémentaire ou ayant fait l'objet d'un agrément ministériel… ;

Considérant qu'il ressort de l'arrêté du 24 octobre 1996 par lequel le préfet de la région Champagne-Ardenne a porté inscription de ... à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques que celle-ci concerne les façades, les toitures, les grilles d'entrée avec les piliers et les murets, une chapelle, la galerie de circulation située au rez-de-chaussée, ainsi que la parcelle sur laquelle est implanté l'édifice ; que l'administration, en application des dispositions précitées de l'article 156-I-3° du code général des impôts a admis l'imputation des déficits fonciers afférents aux travaux réalisés sur ces parties de l'immeuble ; qu'en revanche, elle a remis en cause l'imputation sur le revenu global de M. et Mme X des travaux réalisés sur les parties privatives de cet ensemble immobilier ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus, que ces travaux, dès lors qu'ils n'étaient pas déductibles pour la détermination du revenu net foncier, n'ont pu faire apparaître un déficit dans cette catégorie de revenus ; qu'ainsi, les dépenses dont s'agit ne pouvaient être prises en compte pour la détermination du revenu global des requérants ;

S'agissant du bénéfice de l'interprétation de la loi fiscale donnée par l'administration :

Considérant que selon la réponse ministérielle faite le 28 octobre 1996 à Y, dont M. et Mme X se prévalent Lorsqu'un immeuble classé monument historique inscrit à l'inventaire supplémentaire ou agrée par le ministre de l'économie et des finances procure des recettes imposables dans la catégorie des revenus fonciers, son propriétaire détermine son revenu dans les conditions de droit commun, c'est-à-dire en déduisant des recettes retirées de cet immeuble les charges de la propriété énumérées à l'article 31 du code général des impôts. Si, pour cet immeuble, il constate un déficit foncier, ce dernier est imputable sans limitation de montant sur son revenu global, y compris, le cas échéant, pour la partie qui provient des intérêts d'emprunt. Ces règles s'appliquent dans les mêmes conditions lorsque le classement ou l'inscription à l'inventaire supplémentaire ne concerne pas la totalité de l'immeuble, à condition toutefois que ce classement ou cette inscription ne soit pas limité à des éléments isolés ou dissociables de l'ensemble immobilier, tels un escalier, des plafonds ou certaines salles, mais vise la protection de l'ensemble architectural. A défaut, seuls les travaux qui sont exposés sur les éléments classés ou inscrits à l'inventaire supplémentaire ou qui sont destinés à en assurer la conservation peuvent participer, pour leur montant total, à la constitution d'un déficit imputable sur le revenu global sans limitation de montant. ; que selon cette réponse les travaux susceptibles de venir en déduction des revenus fonciers procurés par un immeuble partiellement inscrit à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques et de contribuer à la constatation d'un déficit imputable sur le revenu global sans limite de montant, doivent notamment correspondre aux charges de la propriété énumérées à l'article 31 du code général des impôts ; qu'il est constant que les travaux entrepris par M. et Mme X ne relèvent pas des charges de la propriété énumérées à l'article 31 du code général des impôts ; que, par suite, M. et Mme X ne sont pas fondés à se prévaloir, sur le fondement des dispositions de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, de la réponse ministérielle précitée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté le surplus de leur demande ;

Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à M. et Mme X la somme que ceux-ci réclament au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

1

N° 04NT00733

2

1


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3eme chambre
Numéro d'arrêt : 04NT00733
Date de la décision : 08/06/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. CADENAT
Rapporteur ?: M. Christian GUALENI
Rapporteur public ?: M. MILLET
Avocat(s) : BREYSSE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2006-06-08;04nt00733 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award