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28/12/2006 | FRANCE | N°05NT00620

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 28 décembre 2006, 05NT00620


Vu la requête, enregistrée le 20 avril 2005, présentée pour la société Sotira (société anonyme), dont le siège est Zone Industrielle à Meslay-du-Maine (53170), représentée par son président-directeur général en exercice, par Me X ; La société Sotira demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 04-1140 du 3 mars 2005 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a, à la demande de M. , annulé la décision en date du 16 janvier 2004 par laquelle le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité l'a autorisée à le licencier pour faute ;

2°) de rejeter la demande de M. devant le Tribunal administratif de Nantes ;

3°) de ...

Vu la requête, enregistrée le 20 avril 2005, présentée pour la société Sotira (société anonyme), dont le siège est Zone Industrielle à Meslay-du-Maine (53170), représentée par son président-directeur général en exercice, par Me X ; La société Sotira demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 04-1140 du 3 mars 2005 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a, à la demande de M. , annulé la décision en date du 16 janvier 2004 par laquelle le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité l'a autorisée à le licencier pour faute ;

2°) de rejeter la demande de M. devant le Tribunal administratif de Nantes ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

………………………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 décembre 2006 :

- le rapport de M. Geffray, rapporteur ;

- les observations de Me Tuffet, avocat de M. ;

- et les conclusions de M. Millet, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par jugement du 3 mars 2005, le Tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de M. , salarié de la société Sotira, délégué syndical, délégué titulaire du personnel, membre suppléant du comité d'entreprise et membre du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, la décision du ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité en date du 16 janvier 2004 autorisant son licenciement pour faute ; que la société Sotira relève appel de ce jugement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant, d'une part, que, contrairement à ce que soutient la société Sotira, le Tribunal administratif de Nantes n'a pas omis d'examiner la nature des griefs reprochés à M. , dès lors qu'il a rattaché les faits litigieux à un climat social tendu au sein de l'entreprise et à l'exercice des fonctions de représentation du personnel par l'intéressé ;

Considérant, d'autre part, que le jugement attaqué qui s'est fondé, pour annuler la décision du ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, sur le lien existant entre la demande de licenciement pour faute de M. et les mandats représentatifs détenus par ce dernier, est suffisamment motivé ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Sotira n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier ;

Sur la légalité de la décision contestée :

Considérant qu'en vertu des dispositions des articles L.412-18, L.425-1 et L.436-1 du code du travail, les salariés investis des fonctions de délégué syndical, de délégué du personnel ou de représentant syndical au comité d'entreprise bénéficient, dans l'intérêt des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail, et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;

Considérant que le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, pour accorder l'autorisation de licenciement, s'est fondé sur le comportement violent et dangereux de M. à l'égard du personnel de direction de l'établissement où il travaillait ; qu'il a indiqué toutefois que l'enquête effectuée n'a pas permis de mettre en évidence l'existence d'un lien entre la demande de la société Sotira et l'exercice des mandats de représentation du personnel détenus par M. ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, d'une part, M. a, le 19 juin 2003, proféré des insultes à l'adresse du directeur des ressources humaines de l'établissement dans le cadre de l'entretien préalable d'un salarié contre lequel avait été engagée une procédure disciplinaire ; que, d'autre part, alors qu'il se trouvait à la même date sur l'aire de stationnement des véhicules du personnel de la société Sotira, M. , après avoir refusé de recevoir la notification d'une mise à pied conservatoire, a mis en danger le directeur de l'établissement en faisant volontairement démarrer son véhicule au risque de le renverser ; que ces faits, même s'ils s'inscrivent dans un climat de tension entre une partie du personnel et la direction, apparu à la suite d'un désaccord sur les modalités de la réduction du temps de travail, et se manifestant par un mouvement de grève, puis par une procédure disciplinaire engagée contre huit salariés ayant participé à ce mouvement de grève, se sont produits en présence de témoins, notamment d'un huissier, et à proximité des locaux occupés par le personnel de l'usine ; que compte tenu de leur gravité, ces faits ne peuvent être regardés comme étant en lien avec les mandats exercés par M. ; que, par suite, c'est à tort que, pour annuler la décision ministérielle autorisant le licenciement de M. , le Tribunal administratif de Nantes s'est fondé sur l'existence d'un lien entre l'autorisation de licenciement et les mandats détenus par l'intéressé ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. tant devant le Tribunal administratif de Nantes que devant la Cour ;

Considérant que M. soutient qu'une décision implicite de rejet du recours hiérarchique formé par la société Sotira contre la décision de l'inspecteur du travail en date du 18 juillet 2003 lui refusant l'autorisation de le licencier était intervenue dès le 15 janvier 2004 ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier que le recours hiérarchique a été reçu par les services du ministère de l'emploi le 17 septembre 2003 ; que le délai au terme duquel naissait une décision implicite de rejet expirait le 17 janvier 2004 en application des dispositions de l'article R.436-6 du code du travail, dans sa version issue du décret du 20 juin 2001 ; qu'ainsi, aucune décision implicite de rejet n'avait pu naître antérieurement à la date du 16 janvier 2004 ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, les faits reprochés doivent être regardés comme constituant des fautes suffisamment graves, de nature à justifier le licenciement de M. ; que, dès lors, le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité n'a pas entaché la décision contestée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Sotira est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nantes a annulé la décision ministérielle du 16 janvier 2004 autorisant le licenciement de M. et à demander l'annulation dudit jugement ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la société Sotira, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à payer à M. la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner M. à payer à la société Sotira la somme que celle-ci demande au titre des mêmes frais ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Nantes du 3 mars 2005 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. devant le Tribunal administratif de Nantes et ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions de Friquetla société anonyme Sotira tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société anonyme Sotira, à M. et au ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement.

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N° 05NT00620

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 05NT00620
Date de la décision : 28/12/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CADENAT
Rapporteur ?: M. Jean-Eric GEFFRAY
Rapporteur public ?: M. MILLET
Avocat(s) : TUFFET

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2006-12-28;05nt00620 ?
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