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13/11/2007 | FRANCE | N°07NT00076

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 13 novembre 2007, 07NT00076


Vu la requête enregistrée le 9 janvier 2007, présentée pour l'ASSOCIATION MANCHE-NATURE, représentée par son président en exercice, dont le siège est 5, rue Paul Le Tarouilly à Coutances (50200), par Me Busson, avocat au barreau de Paris ; l'ASSOCIATION MANCHE-NATURE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 05-1964 et 06-734 du 9 novembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er août 2005 du maire de Créances (Manche) autorisant la société à responsabilité limitée (SARL) Campin

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Vu la requête enregistrée le 9 janvier 2007, présentée pour l'ASSOCIATION MANCHE-NATURE, représentée par son président en exercice, dont le siège est 5, rue Paul Le Tarouilly à Coutances (50200), par Me Busson, avocat au barreau de Paris ; l'ASSOCIATION MANCHE-NATURE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 05-1964 et 06-734 du 9 novembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er août 2005 du maire de Créances (Manche) autorisant la société à responsabilité limitée (SARL) Camping “Les dunes de Créances” à aménager 59 emplacements pour mobil-homes sur un terrain sis “boulevard de la Mer” au lieudit “La plage” où il est cadastré à la section AC sous le n° 183 et de l'arrêté municipal du 3 février 2006 modifiant l'arrêté du 1er août 2005 et réduisant à 56 le nombre d'emplacements pour mobil-homes autorisés ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, lesdits arrêtés ;

3°) de condamner la commune de Créances à lui verser une somme de 2 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………..

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 octobre 2007 :

- le rapport de Mme Buffet, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Artus, commissaire du gouvernement ;



Considérant que par jugement du 9 novembre 2006, le Tribunal administratif de Caen a rejeté les demandes de l'ASSOCIATION MANCHE-NATURE tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er août 2005 du maire de Créances (Manche) autorisant la société à responsabilité limitée (SARL) Camping “Les dunes de Créances” à aménager une aire de camping comportant 59 emplacements pour mobil-homes sur un terrain sis boulevard de la Mer au lieudit “La plage” où il est cadastré à la section AC sous le n° 183 et de l'arrêté municipal du 3 février 2006 modifiant l'arrêté du 1er août 2005 et réduisant à 56 le nombre d'emplacements pour mobil-homes autorisés ; que l'ASSOCIATION MANCHE-NATURE interjette appel de ce jugement ;

Sur la légalité des arrêtés des 1er août 2005 et 3 février 2006 du maire de Créances :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 146-6 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction en vigueur : “Les documents et décisions relatifs à la vocation des zones ou à l'occupation et à l'utilisation des sols préservent les espaces terrestres et marins, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral, et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques. Un décret fixe la liste des espaces et milieux à préserver, comportant notamment, en fonction de l'intérêt écologique qu'ils présentent, les dunes et les landes côtières, les plages et lidos, les forêts et zones boisées côtières, les îlots inhabités, les parties naturelles des estuaires, des rias ou abers et des caps, les marais, les vasières, les zones humides et milieux temporairement immergés ainsi que les zones de repos, de nidification et de gagnage de l'avifaune désignée par la directive européenne n° 79-409 du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages et, dans les départements d'outre-mer, les récifs coralliens, les lagons et les mangroves. Toutefois, des aménagements légers peuvent y être implantés lorsqu'ils sont nécessaires à leur gestion, à leur mise en valeur notamment économique ou, le cas échéant, à leur ouverture au public. Un décret définit la nature et les modalités de réalisation de ces aménagements (…).” ; qu'aux termes de l'article R. 146-1 dudit code : “En application du premier alinéa de l'article L. 146-6, sont préservés, dès lors qu'ils constituent un site ou un paysage remarquable ou caractéristique du patrimoine naturel et culturel du littoral, sont nécessaires au maintien des équilibres biologiques ou présentent un intérêt écologique : a) Les dunes, les landes côtières, les plages et les lidos, les estrans, les falaises et les abords de celles-ci (…)” ; qu'aux termes de l'article R. 146-2 du code de l'urbanisme : “En application du deuxième alinéa de l'article L. 146-6, peuvent être implantés dans les espaces et milieux mentionnés à cet article, après enquête publique dans les cas prévus par les articles R. 123-1 à R. 123-33 du code de l'environnement, les aménagements légers suivants, à condition que leur localisation et leur aspect ne dénaturent pas le caractère des sites, ne compromettent pas leur qualité architecturale et paysagère et ne portent pas atteinte à la préservation des milieux ; (…) c) La réfection des bâtiments existants et l'extension limitée des bâtiments et installations nécessaires à l'exercice d'activités économiques (…)” ; qu'aux termes de l'article R. 443-7 de ce code, dans sa rédaction alors en vigueur : “Toute personne physique ou morale qui reçoit de façon habituelle, sur un terrain lui appartenant ou dont elle a la jouissance, soit plus de vingt campeurs sous tentes, soit plus de six tentes ou caravanes à la fois, doit au préalable avoir obtenu l'autorisation d'aménager le terrain et un arrêté de classement déterminant le mode d'exploitation autorisé.” ;

Considérant que par délibération du 19 février 2004, la commune de Créances a décidé la cession à la société Camping “Les dunes de Créances”, d'un terrain d'une surface totale de 7 hectares 36 ares 94 centiares comprenant, dans sa partie ouest, une aire de camping d'une surface de 3 hectares précédemment exploitée par ladite commune ; que la société Camping “Les dunes de Créances” a demandé, le 6 mai 2005, sur le fondement des dispositions de l'article R. 443-7 précité, l'autorisation d'aménager, sur une surface de 1 hectare 50 ares, dans la partie est de ce terrain, une aire de camping supplémentaire comprenant 59 emplacements pour mobil-homes ; que par arrêté du 1er août 2005, le maire de Créances a accordé à cette société, l'autorisation sollicitée ; que ladite société a présenté, le 23 novembre 2005, une demande modificative portant, notamment, sur l'aménagement d'une aire de camping d'une capacité réduite à 56 emplacements pour mobil-homes ; que le maire de Créances lui a délivré l'autorisation sollicitée par arrêté modificatif du 3 février 2006 ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que ledit terrain est situé à 200 mètres de la mer, dans un vaste espace dunaire demeuré pour l'essentiel, à l'état naturel ; que ce terrain, fortement boisé en pins d'essences variées, est compris dans sa totalité, dans le site du “Havre de Saint-Germain” inscrit à l'inventaire des zones naturelles d'intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF) de type II, en partie, dans la ZNIEFF des “Dunes de Créances” de type I, ainsi que, dans son extrémité nord, dans le site du “Havre de Saint-Germain et des landes de Lessay” reconnu d'intérêt communautaire en application de la directive du 21 mai 1992 susvisée concernant la conservation des habitats naturels, de la faune et de la flore sauvage dite “Natura 2000”, et jouxte le site classé du “Havre de Saint-Germain sur Ay” ; qu'ainsi, ledit terrain doit être regardé comme présentant le caractère d'un espace remarquable caractéristique du patrimoine naturel littoral à protéger au titre de l'article L. 146-6 précité du code de l'urbanisme ;

Considérant qu'il ressort également des pièces du dossier, notamment, des documents joints à chacune des demandes d'autorisation présentées par la société Camping “Les dunes de Créances”, que le projet autorisé porte sur l'extension du camping préexistant par la création d'une aire de camping supplémentaire comportant 56 emplacements pour mobil-homes, d'une surface de 150 m² chacun, pour une surface totale de 1,5 hectares ; que ces mobil-homes, qui peuvent être complétés d'un abri de jardin et d'une terrasse en bois, ont vocation à demeurer en permanence sur l'aire de camping ainsi autorisée ; que les travaux nécessaires à l'aménagement de ces 56 emplacements consistent, notamment, en la construction “de voies nouvelles de 3 mètres de large avec un mètre d'accotements engazonnés de part et d'autre” sur toute l'emprise, “d'aires de retournement (…) pour permettre le retournement des voitures et véhicules de secours”, du réseau d'eau potable, du réseau d'assainissement, ainsi que du réseau d'alimentation en électricité, par voie souterraine, des 56 mobil-homes ; que “le relief nécessitera (…) un remaniement des courbes de niveau (…). Le terrain d'assise sera creusé de 50 centimètres (…), les plate-formes seront modelées au cas par cas pour permettre l'implantation des mobil-homes” ; que les plans joints aux dossiers de demandes font, également, apparaître plusieurs “zones à déboiser”, ainsi que la pose d'une clôture métallique d'une hauteur de 1,5 mètres “encerclant l'extension” ; que de tels travaux qui ne constituent pas, eu égard à leur nature et à leur ampleur, une extension limitée des installations du camping préexistant, ne peuvent être regardés comme des aménagements légers au sens des dispositions précitées du c) de l'article R. 146-2 du code de l'urbanisme et portent atteinte au site naturel où ils sont envisagés et dont le caractère exceptionnel vient d'être souligné ; que, dans ces conditions, et alors même que les mesures figurant dans le chapitre intitulé “mesures compensatoires” de la notice d'impact jointe aux dossiers de demandes d'autorisation présentées par la société Camping “Les dunes de Créances”, prévoient, notamment, “la préservation d'une zone d'exclos permettant le libre développement des espèces faunistiques et floristiques endémiques du site, et la préservation d'espèces rares et protégées” et “un suivi des travaux particulièrement vigilant afin d'éviter toute destruction malheureuse par les engins de terrassement”, l'autorisation délivrée par les arrêtés contestés des 1er août 2005 et 3 février 2006 du maire de Créances, à la société Camping “Les dunes de Créances” en vue de la création de cette aire de camping comportant 56 emplacements pour mobil-homes, méconnaît les dispositions précitées de l'article L. 146-6 du code de l'urbanisme ; que, par suite, lesdits arrêtés municipaux des 1er août 2005 et 3 février 2006 sont entachés d'illégalité et encourent l'annulation ;

Considérant pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, qu'en l'état du dossier, aucun autre moyen ne paraît susceptible de fonder l'annulation prononcée par le présent arrêt ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que de l'ASSOCIATION MANCHE-NATURE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Caen a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er août 2005 du maire de Créances autorisant la société Camping “Les dunes de Créances” à aménager une aire de camping comportant 59 emplacements pour mobil-homes sur un terrain sis “boulevard de la Mer” au lieudit “La plage” et de l'arrêté du 3 février 2006 de ce maire modifiant l'arrêté du 1er août 2005 et réduisant à 56 le nombre d'emplacements pour mobil-homes autorisés ;

Sur les conclusions tendant à la suppression de passages injurieux :

Considérant que les dispositions de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881, reproduites à l'article L. 741-2 du code de justice administrative, permettent aux juridictions, dans les causes dont elles sont saisies, de prononcer la suppression des écrits injurieux, outrageants ou diffamatoires ; que le mémoire enregistré le 13 février 2007 au greffe de la Cour présenté par la commune de Créances, ne comporte pas de passages présentant ces caractères ; que les conclusions présentées, à ce titre, par l' ASSOCIATION MANCHE-NATURE ne peuvent donc qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner la commune de Créances à verser à l'ASSOCIATION MANCHE-NATURE X une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que ces mêmes dispositions font obstacle à ce que l'ASSOCIATION MANCHE-NATURE, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à la commune de Créances la somme que cette dernière demande au titre des frais de même nature qu'elle a exposés ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 9 novembre 2006 du Tribunal administratif de Caen, ainsi que l'arrêté du 1er août 2005 du maire de Créances et l'arrêté municipal modificatif du 3 février 2006 sont annulés.
Article 2 : Les conclusions présentées par l'ASSOCIATION MANCHE-NATURE tendant à l'application des dispositions de l'article L. 741-2 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La commune de Créances versera à l'ASSOCIATION MANCHE-NATURE une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions de la commune de Créances tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l'ASSOCIATION MANCHE-NATURE, à la commune de Créances (Manche) et à la société à responsabilité limitée Camping “Les dunes de Créances”.
Une copie en sera, en outre, adressée au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables.



N° 07NT00076
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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 07NT00076
Date de la décision : 13/11/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DUPUY
Rapporteur ?: Mme Catherine BUFFET
Rapporteur public ?: M. ARTUS
Avocat(s) : BUSSON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2007-11-13;07nt00076 ?
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