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03/10/2013 | FRANCE | N°11NT01594

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 03 octobre 2013, 11NT01594


Vu, la requête, enregistrée le 6 juin 2011 et régularisée le 29 août 2011, présentée pour la SAS Fléchard, dont le siège social est Laiterie du Pont-Morin, ZA, à La Chapelle d'Andaine (61140), par Me Jacquot, avocat au barreau de Paris ; la SAS Fléchard demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 09-432 du 8 avril 2011 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de 26 titres de recettes émis à son encontre par l'office national interprofessionnel de l'élevage et de ses productions pour l'appréhension de garanties liée

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Vu, la requête, enregistrée le 6 juin 2011 et régularisée le 29 août 2011, présentée pour la SAS Fléchard, dont le siège social est Laiterie du Pont-Morin, ZA, à La Chapelle d'Andaine (61140), par Me Jacquot, avocat au barreau de Paris ; la SAS Fléchard demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 09-432 du 8 avril 2011 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de 26 titres de recettes émis à son encontre par l'office national interprofessionnel de l'élevage et de ses productions pour l'appréhension de garanties liées à des aides à l'utilisation de beurre, de beurre concentré et de crème dans la fabrication de produits de pâtisserie, de glaces alimentaires et autres produits alimentaires et de 5 décomptes de règlement établis les 9, 10, 12, 17 décembre 2008 et 23 janvier 2009, par lesquels l'office a procédé à des réfactions et compensations sur les sommes qui lui étaient dues ;

2°) d'annuler les titres de recette litigieux ou, à titre subsidiaire, de ramener les sommes réclamées à une pénalité représentant 15 % de leur montant ;

3°) de mettre à la charge de l'établissement national des produits de l'agriculture et de la mer, FranceAgrimer, venant aux droits de l'ONILAIT et de l'office national interprofessionnel de l'élevage et de ses productions, la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- que les premiers juges ont omis de statuer sur le moyen tiré de l'application du principe de proportionnalité ;

- qu'aux termes du règlement (CE) n° 2988/95 du 18 décembre 1995, le délai de prescription des poursuites commençait à courir à compter de la réalisation de l'irrégularité et non à partir de l'émission des titres de recette ; qu'en l'espèce, même en prenant comme point de départ la date à laquelle les irrégularités auraient pu être constatées, les délais étaient prescrits lorsque les ordres de reversement et les titres de recettes lui ont été notifiés ;

- qu'elle vendait uniquement des produits tracés à des clients artisans ;

- qu'il ne résulte pas du règlement communautaire (CE) n° 2571/97 du 15 décembre 1997 que l'aide doive être reversée par l'adjudicataire lorsque les utilisateurs finaux n'ont pas produit la déclaration justifiant l'incorporation du beurre tracé aidé dans les produits finaux ; que ce règlement ne prescrit pas davantage que les utilisateurs sondables doivent obligatoirement produire chaque trimestre une déclaration justifiant l'incorporation du beurre ou que l'adjudicataire doive s'assurer que ces mêmes utilisateurs ont fourni à l'office la preuve de cette incorporation ; que le principe de sécurité juridique exige qu'un règlement imposant des charges soit clair et précis ; que les titres de recettes contestés sont ainsi dépourvus de base légale ;

- que, les fabricants étant soumis à des obligations très strictes au stade de la fabrication et de la vente du produit, ils ne peuvent être tenus pour responsables des manquements des utilisateurs à leurs propres obligations ; qu'enfin, l'administration se devait de procéder à des contrôles ;

- que la réglementation européenne se suffisait à elle-même et ne nécessitait pas de transposition nationale ;

- qu'il ressort des annexes au règlement que les relevés à fournir par les utilisateurs n'avaient qu'un but statistique et ne pouvaient servir de fondement à un contrôle sur pièces par les autorités nationales ;

- qu'elle ne s'oppose pas à ce qu'une question préjudicielle soit le cas échéant posée à la Cour de justice de l'Union européenne ;

- qu'en tout état de cause, elle demande à bénéficier du principe de proportionnalité eu égard aux circonstances particulières de ce contentieux et aux dysfonctionnements de l'ONILAIT, puis de l'office national interprofessionnel de l'élevage et de ses productions ; que, dans le cadre d'une négociation avec l'administration, la non présentation du relevé trimestriel avait été regardée comme une exigence subordonnée et qu'une pénalité de 15 % avait été admise conformément aux stipulations de l'article 24 du règlement (CE) n° 2220/85 du 22 juillet 1985 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 janvier 2012, présenté pour l'établissement national des produits de l'agriculture et de la mer, FranceAgrimer, venant aux droits de l'office national interprofessionnel de l'élevage et de ses productions et de l'ONILAIT, représenté par son directeur général en exercice, par Me Alibert, avocat au barreau de Paris, qui conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la SAS Fléchard au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il fait valoir :

- que la demande de première instance était irrecevable en ce qui concerne les décomptes de règlement qui ne constituent pas des décisions faisant grief dès lors qu'ils se bornent à synthétiser l'exécution par l'agent comptable de décisions qui n'ont fait l'objet d'aucun recours de la part de la société et dont les sommes visées ont été mises en recouvrement par compensation sur le fondement des articles 1289 et 1290 du code civil ;

- que la prescription quadriennale prévue par le règlement communautaire (CE) n° 2988/95 présente un caractère subsidiaire et n'a vocation à s'appliquer qu'en l'absence de dispositions sectorielles ou nationales ; qu'en France la prescription était de trente ans en vertu de l'article 2262 du code civil jusqu'à l'intervention de la loi du 17 juin 2008 qui l'a ramené à 5 ans ; qu'en application de cette loi, le délai de prescription court à compter de son entrée en vigueur et non comme le soutient la société requérante à compter de la réalisation des irrégularités ou du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que, les décisions litigieuses étant intervenues en 2009, la créance n'était pas prescrite ;

- que le règlement n° 2571/97 est particulièrement clair ; que, pour que l'Office, puis les instances de l'Union Européenne puissent vérifier que les conditions posées pour bénéficier de l'aide au beurre pâtissier ont été respectées, l'article 18, 3° du règlement prévoit que les preuves nécessaires pour obtenir la libération de la garantie de transformation doivent être présentées dans un délai de 12 mois à partir de l'expiration du délai d'incorporation, soit 16 mois à compter de l'expiration du délai de présentation des offres ; que ces textes ne prévoient aucune exception selon le type d'utilisateur final ; qu'en outre, les utilisateurs finaux n'ont jamais pris l'engagement écrit d'acheter moins de 9 tonnes d'équivalent beurre par an, engagement nécessaire pour l'application des dispositions de l'article 23 § 6 du règlement n° 2571/97, pas plus qu'ils n'ont déclaré avoir incorporé le beurre aidé dans les produits finaux ;

- qu'une fois ce délai écoulé, si les preuves sont fournies dans un délai de 18 mois, la garantie ne reste acquise qu'à hauteur de 15 %, les 85 % restant étant remboursés à l'adjudicataire en application du paragraphe 3 de l'article 22 du règlement n° 2220/85 de la Commission du 22 juillet 1985, auquel renvoie l'article 27 du règlement n° 2571/97 ;

- qu'après l'expiration de ce délai la garantie de transformation reste acquise en totalité pour la quantité de matière première pour laquelle la preuve de l'incorporation imposée par le règlement n'a pas été produite dans le délai imparti ;

- que les preuves de l'incorporation des produits aidés définies à l'annexe XII du règlement n° 2571/97, consistent en une déclaration effectuée périodiquement par les utilisateurs finaux des produits aidés ; que ces données permettent de connaître les quantités de beurre utilisées par les utilisateurs finaux et de s'assurer que l'intégralité de la matière grasse aidée a bien été incorporée par ces utilisateurs dans les produits éligibles ;

- que, si les adjudicataires ou les utilisateurs finaux restent libres de ne pas utiliser les modèles annexés à la note aux opérateurs du 25 juin 1998, il ne leur en incombe pas moins de communiquer à l'Office les données requises par le règlement communautaire ; que la circonstance que cette obligation n'ait pas été méconnue par l'adjudicataire lui-même mais par son cocontractant est sans influence sur l'obligation de reversement de l'aide ou l'appréhension de la garantie dès lors que c'est l'adjudicataire qui perçoit l'aide communautaire et qu'il est le seul avec lequel l'Office est juridiquement lié ;

- qu'il n'a pas lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle ;

- que l'appréhension de la garantie ou de la demande de reversement d'une aide communautaire ne constitue pas une sanction ;

- qu'aucun règlement ne fait peser sur l'administration la charge d'avertir l'adjudicataire de l'absence de transmission des données trimestrielles ; que ne constatant pas de libération de la garantie à l'expiration du délai prévu, la SAS Fléchard aurait dû se rapprocher de son cocontractant ou à tout le moins de l'Office afin de connaître les motifs de rétention de cette garantie ;

- que la preuve de l'incorporation de la matière grasse aidée dans les produits finaux constitue une exigence principale et non, comme le soutient la société requérante une exigence subordonnée ; que la totalité des garanties devait donc être appréhendée et que c'est à juste titre que le tribunal administratif a estimé que le principe de proportionnalité n'avait pas été méconnu ;

Vu le mémoire, enregistré le 2 mars 2012, présenté pour la SAS Fléchard, qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;

Elle soutient en outre :

- que c'est le document intitulé "déclaration de vente", que les fabricants de beurre pâtissier devaient adresser chaque mois à l'Office qui permettait à cet organisme d'organiser ses contrôles jusqu'à l'utilisateur final, d'apporter la preuve que le remboursement des aides beurre pâtissier était fondé et de faire valoir auprès des contrôleurs du FEOGA que ce beurre avait bien été incorporé ; que ce sont ces formalités et contrôles qui constituent la seule preuve que le beurre a bien été incorporé dans les pâtisseries, les viennoiseries et les glaces produites par les artisans ;

- que le non respect d'une exigence secondaire entraîne une pénalité de 15 % et non le remboursement de l'aide ou de la subvention octroyée ;

- qu'elle ne pouvait contraindre les utilisateurs finaux qu'elle ne connaissait pas à fournir les données statistiques à l'Office ;

- que contrairement à ce que soutient FranceAgrimer, cet établissement connaissait au printemps 2001 les lots falsifiés et les lots qui ne l'étaient pas ; que cette affaire n'a donc rien à voir avec le retard qu'il a pris pour envoyer les titres de recettes ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 août 2013, présenté pour FranceAgrimer, qui maintient ses précédentes écritures ;

Il fait valoir en outre :

- que le bénéfice des aides communautaires est subordonné à la transmission dans les délais prescrits, des données relatives au beurre aidé à défaut de quoi il se trouve en situation de compétence liée pour réclamer le reversement des aides ; que seules ces données permettent d'établir que le beurre aidé a été utilisé pour la fabrication de produits alimentaires mais surtout qu'il a bien été incorporé dans l'un des produits éligibles désignés par le règlement et cela dans le délai prescrit ; que l'usage de traceurs ne dispense pas de fournir ces données ;

- qu'en vertu de l'article 26 de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 les dispositions de cette loi qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de son entrée en vigueur ; que les titres de recettes en litige ayant été émis avant l'expiration du délai de trente ans à compter des irrégularités qui les fondent et avant l'expiration du délai de 5 ans à compter de l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, les créances n'étaient pas prescrites ; qu'écarter le prescription trentenaire au profit du délai quadriennal prévu au règlement (CE) n° 2988/95 reviendrait à amnistier les opérateurs fraudeurs et à priver ainsi les autorités nationales de la possibilité de poursuivre les irrégularités dissimulées ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le règlement (CE) n° 2220/85 de la Commission du 22 juillet 1985 modifié fixant les modalités communes d'application du régime des garanties pour les produits agricoles ;

Vu le règlement (CE, Euratom) n° 2988/95 du Conseil, du 18 décembre 1995, relatif à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes ;

Vu le règlement (CE) n° 2571/97 de la Commission du 15 décembre 1997 modifié relatif à la vente à prix réduit de beurre et à l'octroi d'une aide à la crème, au beurre et au beurre concentré destinés à la fabrication de produits de pâtisserie, de glaces alimentaires et autres produits alimentaires ;

Vu le code civil ;

Vu la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 septembre 2013 :

- le rapport de Mme Gélard, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Degommier, rapporteur public ;

- les observations de Me Jacquot, avocat de la SAS Fléchard ;

- et les observations de Me Alibert, avocat de FranceAgrimer ;

1. Considérant qu'au cours des années 1970 la Communauté Economique Européenne a mis en place un système, qui a été abandonné en 2007, d'aide par adjudication destiné aux fabricants de beurre et de crème de lait afin qu'ils puissent écouler leurs excédents auprès des utilisateurs professionnels, qu'il s'agisse d'industriels de la biscuiterie, de la chocolaterie et des glaces, de grossistes, de revendeurs ou d'artisans pâtissiers ; qu'afin de bénéficier de ces aides, versées en France par l'ONILAIT, puis l'office national interprofessionnel de l'élevage et de ses productions à compter du 1er janvier 2006, l'adjudicataire, fabricant de ces produits, devait déposer une garantie bancaire dont le montant était quasiment identique à celui de l'aide octroyée ; que cette garantie était libérée lorsque la preuve était apportée que le beurre pâtissier avait été effectivement utilisé dans la fabrication de produits finaux éligibles ; que le règlement (CE) n° 2571/97 du 15 décembre 1997 a fait l'objet de deux notes de l'ONILAIT aux opérateurs les 13 février et 25 juin 1998 ; que, sur le fondement de ces règlement et notes, l'ONILAIT, puis l'office national interprofessionnel de l'élevage et de ses productions et FranceAgrimer aujourd'hui, ont conservé une partie des garanties constituées par la SAS Fléchard, fabricant de beurre pâtissier ; qu'à cette fin des titres de recettes ont été émis à l'encontre de cette société, qui en a demandé l'annulation ; que, par un jugement du 8 avril 2011, le tribunal administratif de Caen a rejeté ces demandes ; que la SAS Fléchard fait appel de ce jugement ;

Sur l'irrecevabilité des conclusions dirigées contre les décomptes de règlement :

2. Considérant que si la société Fléchard a sollicité en première instance l'annulation de cinq décomptes de règlement, FranceAgrimer soutient sans être contredite que ces actes se bornent à synthétiser l'exécution par l'agent comptable de décisions qui n'ont fait l'objet d'aucun recours de la part de cette société et dont les sommes ont été mises en recouvrement par compensation sur le fondement des articles 1289 et 1290 du code civil ; que ces décisions ne constituent pas des actes faisant grief susceptibles de recours ; que par suite, à supposer que la société requérante ait entendu maintenir ses conclusions dirigées contre ces actes, ces conclusions ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur la prescription :

3. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 11 du règlement (CE) n° 2571/97 de la Commission du 15 décembre 1997 alors en vigueur : "Les produits visés à l'article 1er sont utilisés et incorporés dans les produits finaux dans la Communauté, dans un délai de quatre mois suivant le mois de l'expiration du délai pour la présentation des offres relatives à l'adjudication particulière fixé à l'article 14 paragraphe 2." ; que l'article 12 du même règlement dispose que : "1. L'adjudicataire doit : (...) prévoir dans chaque contrat de vente : (...) vii) l'obligation pour le contractant de fournir à l'organisme compétent les données, pour ce qui le concerne, visées aux annexes IX à XIII, selon les modalités à déterminer par l'État membre (...)." ; qu'aux termes de l'article 18 du même texte : "(...) La garantie de transformation est destinée à assurer l'exécution des exigences principales concernant: (...) ii) l'incorporation du beurre ou du beurre concentré additionnés ou non des traceurs dans les produits finaux (...) 3. Les preuves nécessaires pour obtenir la libération des garanties de transformation visées au paragraphe 2 doivent être présentées à l'autorité compétente désignée par l'État membre où la garantie est constituée, dans un délai de douze mois à partir de l'expiration du délai prévu à l'article 11. En cas de dépassement du délai, fixé à l'article 11, de moins de soixante jours au total, la garantie de transformation reste acquise à concurrence de 6 écus par tonne et par jour. (...) " ;

4. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 3 du règlement (CE) n° 2988/95 du Conseil du 18 décembre 1995 : "1. Le délai de prescription des poursuites est de quatre ans à partir de la réalisation de l'irrégularité visée à l'article 1er paragraphe 1. (...) 3. Les États membres conservent la possibilité d'appliquer un délai plus long que celui prévu respectivement au paragraphe 1 et au paragraphe 2." ; que, ainsi que l'a jugé la Cour de justice de l'Union européenne dans son arrêt du 5 mai 2011 Ze Fu Fleischhandel GmbH et Vion Trading GmbH contre Hauptzollamt Hamburg-Jonas (affaires jointes C-201/10 et C-202/10) en matière de restitutions à l'exportation, si les Etats membres ont la possibilité, en application du 3 de l'article 3 du règlement n° 2988/95 précité, de fixer un délai de prescription plus long que le délai communautaire de quatre ans, le principe de proportionnalité s'oppose à une prescription d'une durée de trente ans s'agissant des procédures relatives aux remboursements de fonds indûment perçus ; que, dans le même arrêt, la Cour a dit pour droit que le principe de sécurité juridique s'oppose à ce qu'un délai de prescription " plus long " au sens du 3 de l'article 3 du règlement n° 2988/95 puisse résulter d'un délai de prescription de droit commun trentenaire réduit par la voie jurisprudentielle pour que ce dernier satisfasse dans son application au principe de proportionnalité ; que, dans ces conditions, à défaut d'une réglementation nationale spécifique légalement applicable aux faits de la cause et prévoyant un délai de prescription plus long, le 1 de l'article 3 du règlement 2988/95, qui prévoit un délai de prescription de quatre ans et demeure directement applicable dans les Etats membres, a vocation à s'appliquer aux actions des organismes d'intervention agricole lorsqu'ils appréhendent une garantie en cas de non-respect de ses obligations par un opérateur économique ;

5. Considérant qu'il résulte de ces stipulations que le délai de prescription des poursuites a commencé à courir à compter de l'expiration du délai limite de présentation des preuves d'incorporation du beurre pâtissier dans le produit final, soit 16 mois (4 mois + 12 mois) suivant le mois de l'expiration du délai pour la présentation des offres relatives à l'adjudication ; qu'en l'espèce, il est constant que les titres de recettes émis par l'office national interprofessionnel de l'élevage et de ses productions à la fin de l'année 2008 et notifiés à la société Fléchard entre le 4 et le 12 décembre 2008 portent sur des adjudications et ventes réalisées au cours de l'année 2000 ; que le délai de quatre ans de prescription des poursuites visé à l'article 3 du règlement précité était ainsi expiré lorsque l'office national interprofessionnel de l'élevage et de ses productions a émis, à la fin de l'année 2008, les titres de recettes contestés portant les numéros 456727, 463344, 463345, 463346, 463678, 456733, 456734, 456732, 456764, 456766, 456768, 456769, 456778, 463780, 463781, 463782, 463783, 456730, 457007, 457006, 457001, 457003, 456998, 456864, 456865 et 456997, lesquels doivent, par suite, être annulés ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué, que la SAS Fléchard est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande en tant qu'elle sollicitait l'annulation des 26 titres de recettes litigieux ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de laisser à la charge de chacune des parties la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 09-432 du tribunal administratif de Caen en date du 8 avril 2011 en tant qu'il a rejeté les conclusions de la société Fléchard tendant à l'annulation des 26 titres de recette susvisés émis par l'office national interprofessionnel de l'élevage et de ses productions et notifiés entre le 4 et le 12 décembre 2008, ainsi que ces 26 titres de recettes, sont annulés.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la SAS Fléchard est rejeté.

Article 3 : Les conclusions de FranceAgrimer présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Fléchard et à FranceAgrimer.

Délibéré après l'audience du 12 septembre 2013, où siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- et Mme Gélard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 3 octobre 2013.

Le rapporteur,

V. GÉLARD Le président,

I. PERROT

Le greffier,

C. GUÉZO

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 11NT01594


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 11NT01594
Date de la décision : 03/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: Mme Valérie GELARD
Rapporteur public ?: M. DEGOMMIER
Avocat(s) : JACQUOT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2013-10-03;11nt01594 ?
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