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17/10/2013 | FRANCE | N°12NT03223

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 17 octobre 2013, 12NT03223


Vu la requête, enregistrée le 14 décembre 2012, présentée pour M. A... E..., demeurant..., par Me Akagunduz, avocat au barreau de Hauts-de-Seine ; M. E... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 12-2845 du 13 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 juillet 2012 du préfet d'Eure-et-Loir refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de 30 jours, fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'ex

piration de ce délai, et lui interdisant le retour sur le territoire frança...

Vu la requête, enregistrée le 14 décembre 2012, présentée pour M. A... E..., demeurant..., par Me Akagunduz, avocat au barreau de Hauts-de-Seine ; M. E... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 12-2845 du 13 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 juillet 2012 du préfet d'Eure-et-Loir refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de 30 jours, fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai, et lui interdisant le retour sur le territoire français pendant une durée de six mois avec inscription dans le Système d'Information Schengen ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet d'Eure-et-Loir de lui délivrer un titre de séjour dès la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient :

- que l'arrêté contesté a été pris par une autorité ne bénéficiant pas d'une délégation de signature régulière ; qu'en effet, cet arrêté ne mentionne pas que le secrétaire général de la préfecture aurait été absent ou empêché ; que le tribunal a omis de statuer sur ce moyen qu'il avait soulevé en première instance ;

- que l'arrêté contesté, qui ne mentionne pas les articles L. 314-11 et L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'est pas suffisamment motivé ;

- qu'il méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et porte une atteinte disproportionnée à son droit à mener une vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que son père et sa soeur vivent en France et qu'il réside chez son père ;

- que la décision fixant la Turquie comme pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales puisqu'il encourt des risques de mauvais traitement en cas de retour en Turquie, pays dans lequel il est toujours activement recherché pour ses liens supposés avec des partis politiques kurdes, et pour s'être soustrait à ses obligations militaires à raison des mauvais traitements dont les kurdes font l'objet au cours de leur service national ;

- que la décision lui interdisant le retour en France pour une durée de six mois doit être annulée en conséquence de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ; que le préfet, en ne se prononçant pas sur chacun des critères énoncés au III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a commis une erreur de droit ; que le tribunal administratif a omis de statuer sur ce moyen qu'il avait soulevé ; que cette décision porte également une atteinte disproportionnée à son droit à mener une vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et méconnait les stipulations de l'article 5 de la directive " retour " ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 mars 2013, présenté par le préfet d'Eure-et-Loir, qui conclut au rejet de la requête ;

il fait valoir :

- que le signataire de l'arrêté contesté dispose d'une délégation de signature régulièrement publiée au Journal officiel de la République française ;

- que M. E... ne démontre pas l'intensité du lien dont il se prévaut en France en la personne de son seul père qui aurait pu engager la procédure de regroupement familial à son bénéfice ; qu'il a vécu en Turquie, où résident les autres membres de sa famille, jusqu'à l'âge de 20 ans ; que son entrée sur le territoire le 17 octobre 2011 est récente et irrégulière ; que le requérant, qui est toujours hébergé par son père, ne fait état d'aucune insertion professionnelle ; que, dans ces conditions, l'arrêté contesté ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de M. E... au respect de sa vie privée et familiale au regard de ces motifs qui visent à mettre fin à une situation de séjour irrégulier ; que, pour les mêmes motifs, son arrêté n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

- que M. E... n'établit pas plus que devant les instances compétentes en matière d'asile l'existence des menaces personnelles invoquées en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'ainsi son arrêté n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- que l'obligation de quitter le territoire est suffisamment motivée au regard des

stipulations de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;

- que la décision portant interdiction de retour sur le territoire français comporte les éléments de fait et de droit qui en constituent le fondement et qu'elle est suffisamment motivée ; que son terme de six mois est justifié par la courte durée de la présence en France de l'intéressé depuis le 14 octobre 2011, et par la nature des liens familiaux en France dont il se prévaut ;

- que la décision fixant le pays de destination n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation :

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive n° 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 septembre 2013 :

- le rapport de M. Lemoine, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Degommier, rapporteur public ;

1. Considérant que M. E..., de nationalité turque, est entré irrégulièrement en France, selon ses déclarations, le 14 octobre 2011, pour y solliciter la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire ; que sa demande d'asile a fait l'objet d'une décision de refus du directeur de l'Office français pour la protection des réfugiés et apatrides le 20 janvier 2012, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 4 juin 2012 ; que, par un arrêté du 17 juillet 2012, le préfet d'Eure-et-Loir a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a enjoint de quitter le territoire dans le délai de 30 jours, a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai, lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée de six mois, et l'a informé d'un signalement aux fins de non-admission dans le Système d'Information Schengen pour la durée de l'interdiction de retour ; que M. E... relève appel du jugement du 13 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 613-1 du code de justice administrative :

" Le président de la formation de jugement peut, par une ordonnance, fixer la date à partir de laquelle l'instruction sera close. Cette ordonnance n'est pas motivée et ne peut faire l'objet d'aucun recours. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 613-3 du même code : " Les mémoires produits après la clôture de l'instruction ne donnent pas lieu à communication et ne sont pas examinés par la juridiction. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 613-4 du même code : " Le président de la formation de jugement peut rouvrir l'instruction par une décision qui n'est pas motivée et ne peut faire l'objet d'aucun recours. (...) " ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que lorsque, après la clôture de l'instruction, le juge est saisi d'un mémoire émanant d'une des parties, il lui appartient d'en prendre connaissance ainsi que de le viser dans sa décision ; que, s'il a toujours la faculté d'en tenir compte après l'avoir analysé et avoir rouvert l'instruction, il n'est tenu de le faire, à peine d'irrégularité de sa décision, que si ce mémoire contient l'exposé soit d'une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, soit d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office au vu du dossier tel qu'il existait à la date de clôture de l'instruction ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, dans un mémoire en réplique produit le 16 octobre 2012, soit après la clôture de l'instruction intervenue le 14 septembre 2012, M. E... soutenait que l'auteur de l'arrêté contesté ne disposait pas d'une délégation de signature lui donnant compétence pour signer l'arrêté contesté et que le préfet avait commis une erreur de droit en ne se prononçant pas sur chacun des critères énoncés au III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour motiver la décision lui interdisant le retour en France pour une durée de six mois ; que, toutefois, le tribunal administratif d'Orléans n'était pas tenu de prendre en compte ces moyens pour y répondre, dès lors qu'ils auraient pu être invoqués avant la clôture de l'instruction ; que, par suite, M. E... n'est pas fondé à soutenir qu'en s'abstenant de répondre aux deux moyens précités, présentés après la clôture de l'instruction, le tribunal administratif d'Orléans aurait entaché son jugement d'une irrégularité ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

4. Considérant, en premier lieu que, par un arrêté du 11 mai 2012, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture d'Eure-et-Loir, M. B... D..., préfet d'Eure-et-Loir, a donné délégation à M. F... C..., sous-préfet de l'arrondissement de Dreux, à l'effet de signer, notamment, tous arrêtés, décisions pris en application du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pendant les permanences qu'il est amené à assurer ; que si M. E... allègue que le préfet d'Eure-et-Loir n'apporte pas la preuve de son empêchement, ou de celui de son secrétaire général, il appartient à la partie contestant la qualité du délégataire pour signer l'arrêté litigieux d'établir que le préfet ou son secrétaire général n'étaient ni absents ni empêchés ; que M. E... n'apporte aucun élément à l'appui de ses allégations ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté ne peut qu'être écarté ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté contesté précise que M. E..., de nationalité turque, déclare être entré irrégulièrement en France le 19 octobre 2011 pour y solliciter l'asile et que sa demande a fait l'objet d'une décision de refus par le directeur de l'Office français pour la protection des réfugiés et apatrides le 20 janvier 2012, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 4 juin 2012 et qu'il ne relevait pas des dispositions des articles L. 711-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives à la reconnaissance de la qualité de réfugié et au bénéfice de la protection subsidiaire ; qu'il mentionne également l'ensemble des éléments relatifs à la situation personnelle et familiale de l'intéressé et cite les dispositions applicables ; qu'ainsi l'arrêté contesté comporte les considérations de droit et de faits sur lesquelles il se fonde et est suffisamment motivé ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1 - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2 - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; qu'aux termes de l'article 5 de la directive n° 2008/115/CE : " Non-refoulement, intérêt supérieur de l'enfant, vie familiale et état de santé : Lorsqu'ils mettent en oeuvre la présente directive, les États membres tiennent dûment compte: a) de l'intérêt supérieur de l'enfant, b) de la vie familiale, c) de l'état de santé du ressortissant concerné d'un pays tiers, et respectent le principe de non-refoulement. " ;

7. Considérant que si M. E..., qui est entré irrégulièrement en France en octobre 2011, soutient que son père et sa soeur vivent en France, il ne l'établit pas en ce qui concerne sa soeur ; qu'eu égard au caractère récent de son séjour et aux conditions d'entrée irrégulière en France de l'intéressé, qui n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales en Turquie où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt ans et où résident notamment sa mère et deux de ses soeurs, et compte tenu de l'absence d'insertion sociale ou professionnelle attestant de l'intensité de ses liens en France, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit de l'intéressé de mener une vie privée et familiale une atteinte excessive aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, en refusant de délivrer un titre de séjour à M. E... et en assortissant cette décision d'une obligation de quitter le territoire français le préfet d'Eure-et-Loir n'a méconnu ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, il n'a pas davantage commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de ses décisions sur la situation personnelle de l'intéressé ; qu'enfin, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 5 de la directive n° 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008, n'est pas assorti des précisions permettant à la cour d'en apprécier le bien-fondé ;

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

8. Considérant qu'aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. (...) / Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger obligé de quitter le territoire français, l'autorité administrative peut prononcer l'interdiction de retour pour une durée maximale de trois ans à compter de sa notification. / (...) L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français " ; qu'il ressort des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux ;

9. Considérant que si, pour faire interdiction à M. E... de revenir sur le territoire français pendant une durée de six mois le préfet d'Eure-et-Loir s'est fondé sur la circonstance que l'intéressé est célibataire et sans enfant, qu'il n'apporte pas la preuve de l'absence de liens familiaux dans son pays d'origine où résident sa mère et ses deux soeurs, qu'il est entré irrégulièrement en France le 14 octobre 2011 et que sa demande d'asile a été rejetée par les autorités compétentes, il n'a en revanche fait aucune référence à la menace que pouvait représenter la présence de M. E... pour l'ordre public ; qu'il a ainsi insuffisamment motivé la décision d'interdiction de retour qui ne peut, par suite, qu'être annulée ;

En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le pays de destination :

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 513 2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui est obligé de quitter le territoire français (...) est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " ; et qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. " ;

11. Considérant que M. E... soutient qu'il est activement recherché par les autorités turques pour ses liens supposés avec le MLKP, parti communiste marxiste léniniste, et pour s'être soustrait à ses obligations militaires en raison de son origine kurde ; qu'il ne produit toutefois aucun document pour établir qu'il court personnellement des risques, dont l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile n'ont d'ailleurs pas reconnu la réalité ; que les éléments généraux relatifs aux tensions entre le PKK et l'armée turque, ou entre la Syrie et la Turquie sont insuffisants pour établir que le requérant court personnellement les risques qu'il invoque ; qu'ainsi, M. E... n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait, en fixant le pays de destination, méconnu les dispositions précitées de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. E... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de la décision prononçant une interdiction de retour sur le territoire ;

Sur les conclusions à fin d'injonction, sous astreinte :

13. Considérant que le présent arrêt, qui annule la seule décision d'interdiction de retour sur le territoire, n'implique pas nécessairement qu'il soit enjoint au préfet d'Eure-et-Loir de délivrer un titre de séjour à M. E... ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction sous astreinte de l'intéressé doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme que M. E... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 12-2845 du 13 novembre 2012 du tribunal administratif d'Orléans, en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande de M. E... tendant à l'annulation de la décision du 17 juillet 2012 du préfet d'Eure-et-Loir lui interdisant le retour sur le territoire français pendant une durée de six mois, ainsi que cette décision, sont annulés.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. E... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... E...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet d'Eure-et-Loir.

Délibéré après l'audience du 26 septembre 2013 à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre,

- Mme Gélard, premier conseiller,

- M. Lemoine, premier conseiller.

Lu en audience publique le 17 octobre 2013.

Le rapporteur,

F. LEMOINE

Le président,

I. PERROT

Le greffier,

A. MAUGENDRE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 12NT03223


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 12NT03223
Date de la décision : 17/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. François LEMOINE
Rapporteur public ?: M. DEGOMMIER
Avocat(s) : AKAGUNDUZ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2013-10-17;12nt03223 ?
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