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12/12/2014 | FRANCE | N°14NT01423

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 12 décembre 2014, 14NT01423


Vu la requête, enregistrée le 2 juin 2014, présentée pour Mme C... M'A...B..., demeurant..., par Me Paraiso, avocat, qui demande à la cour :

1°) de l'admettre à titre provisoire à l'aide juridictionnelle ;

2°) d'annuler l'ordonnance n° 1208578 du 28 avril 2014 par laquelle le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 30 septembre 2011 par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a rejeté sa demande d'acquisition de l

a nationalité française ;

3°) d'annuler la décision du 30 septembre 2011 ;

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Vu la requête, enregistrée le 2 juin 2014, présentée pour Mme C... M'A...B..., demeurant..., par Me Paraiso, avocat, qui demande à la cour :

1°) de l'admettre à titre provisoire à l'aide juridictionnelle ;

2°) d'annuler l'ordonnance n° 1208578 du 28 avril 2014 par laquelle le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 30 septembre 2011 par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a rejeté sa demande d'acquisition de la nationalité française ;

3°) d'annuler la décision du 30 septembre 2011 ;

elle soutient que :

- l'ordonnance attaquée méconnaît l'article R. 742-2 du code de justice administrative ;

- la requête n'était pas tardive, dès lors qu'il n'est pas établi qu'elle ait régulièrement reçu notification de la décision ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 juillet 2014, présenté par le ministre de l'intérieur, qui conclut au rejet de la requête ;

il fait valoir que :

- la demande de première instance était tardive ;

- il n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation ;

Vu la décision du 25 août 2014 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes a rejeté la demande d'aide juridictionnelle présentée par Mme M'A...B... ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code des postes et des communications électroniques ;

Vu le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;

Vu l'arrêté du 7 février 2007 pris en application de l'article R. 2-1 du code des postes et des communications électroniques et fixant les modalités relatives au dépôt et à la distribution des envois postaux ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 novembre 2014 :

- le rapport de M. Durup de Baleine, premier conseiller ;

1. Considérant que, par une décision du 30 septembre 2011, le ministre chargé des naturalisations a rejeté le recours formé par Mme M'A...B..., ressortissante de la République du Congo, contre la décision du 26 mai 2011 par laquelle le préfet de la Seine-Maritime a rejeté sa demande de naturalisation ; que cette dernière relève appel de l'ordonnance du 28 avril 2014 par laquelle le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision du 26 mai 2011 ; que, dès lors qu'il est justifié du recours hiérarchique exercée par l'intéressée devant le ministre, elle doit être regardée comme demandant l'annulation de la décision du 30 septembre 2011, qui s'est substituée à celle du 26 mai précédent ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du même code : " Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, le vice-président du tribunal administratif de Paris et les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours peuvent, par ordonnance : / (...) / 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens ; / (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 421-1 du même code : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée " ;

3. Considérant qu'il incombe à l'administration, lorsqu'elle oppose une fin de non-recevoir tirée de la tardiveté d'une action introduite devant une juridiction administrative, d'établir la date à laquelle la décision attaquée a été régulièrement notifiée à l'intéressé ; qu'en cas de retour à l'administration, au terme du délai de mise en instance, du pli recommandé contenant la décision, la notification est réputée avoir été régulièrement accomplie à la date à laquelle ce pli a été présenté à l'adresse de l'intéressé, dès lors du moins qu'il résulte soit de mentions précises, claires et concordantes portées sur l'enveloppe, soit, à défaut, d'une attestation du service postal ou d'autres éléments de preuve, que le préposé a, conformément à la réglementation en vigueur, déposé un avis d'instance informant le destinataire que le pli était à sa disposition au bureau de poste ;

4. Considérant qu'en vertu de l'article 5 de l'arrêté du 7 février 2007, pris en application de l'article R. 2-1 du code des postes et des communications électroniques et fixant les modalités relatives au dépôt et à la distribution des envois postaux, en cas d'absence du destinataire à l'adresse indiquée par l'expéditeur lors du passage de l'employé chargé de la distribution, le prestataire de services postaux informe le destinataire que l'envoi postal est mis en instance pendant un délai de quinze jours à compter du lendemain de la présentation de l'envoi postal à son domicile ainsi que du lieu où cet envoi peut être retiré ; qu'il résulte de l'article 7 du même arrêté que le prestataire peut établir un avis de réception à la demande de l'expéditeur, retourné à ce dernier, attestant la distribution de l'envoi ; que cet avis comporte diverses informations circonstanciées, telles que la date de présentation, si l'envoi a fait l'objet d'une mise en instance conformément à l'article 5, la date de distribution et le numéro d'identification de l'envoi ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le pli recommandé contenant la notification de la décision du 30 septembre 2011 a été présentée le 14 octobre 2011 à l'adresse indiquée par Mme M'A... B... et que, faute pour cette dernière d'avoir retiré le pli dans le délai de mise en instance d'une durée de quinze jours mentionné à l'article 5 de l'arrêté du 7 février 2007, il a été retourné à la préfecture de Seine-Maritime, service expéditeur ; que, toutefois, il ne résulte d'aucune mention portée sur l'enveloppe d'expédition, ni du procès-verbal de carence établi par le préfet le 3 novembre 2011, ni d'une attestation du service postal, que le préposé aurait, conformément au même article 5, informé Mme M'A... B... de la mise en instance du pli ; qu'aucun autre élément de preuve ne permet de tenir cette information comme ayant été délivrée, et notamment pas la circonstance que le volet détachable formant avis de passage inclus dans l'imprimé de recommandation ne figure pas sur l'enveloppe d'expédition retournée à l'administration ; que l'omission du respect des dispositions prévues par l'article 5 de l'arrêté du 7 février 2007 revêt, en l'espèce, un caractère substantiel, compte tenu des garanties pratiques que ces dispositions confèrent au destinataire du pli ; que, par suite, faute qu'il puisse être tenu pour établi que Mme M'A... B... a été avisée de la présentation du pli et de sa mise en instance, la décision du 30 septembre 2011 ne peut être regardée comme ayant été régulièrement notifiée à l'intéressé ; que, dans ces conditions, la demande enregistrée le 6 septembre 2012 au greffe du tribunal administratif de Nantes n'était pas tardive ni, par suite, manifestement irrecevable ; qu'en en estimant autrement, le premier juge a entaché l'ordonnance attaquée d'une irrégularité en justifiant l'annulation et ce, sans qu'il soit besoin de statuer sur l'autre moyen de la requête tirée de son irrégularité ;

6. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme M'A... B... devant le tribunal administratif de Rennes ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

7. Considérant qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : " (...) L'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger. " ; qu'aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation (...) sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions (...) " ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au ministre chargé des naturalisations de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant ainsi que son degré d'autonomie économique comme le niveau et l'origine de ses ressources ;

8. Considérant que, pour rejeter la demande de Mme M'A... B..., le ministre chargé des naturalisations a estimé que la postulante a été l'auteur d'une fausse déclaration dans le but de dissimuler la réalité de sa situation familiale et, en outre, qu'elle n'a pas de revenus personnels et ne subvient pour l'essentiel à ses besoins qu'à l'aide de prestations sociales ;

9. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que Mme M'A...B..., qui ne justifie de l'exercice d'aucune activité professionnelle, est dépourvue de ressources propres, ses ressources étant seulement constituées du revenu de solidarité active et de l'aide personnalisée au logement ; qu'il en résulte que le ministre de l'intérieur n'a, dans l'exercice du large pouvoir d'appréciation dont il dispose pour apprécier l'opportunité d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite, pas commis d'erreur manifeste en rejetant la demande de Mme M'A...B... au motif qu'elle est sans revenus personnels et ne subvient pour l'essentiel à ses besoins qu'à l'aide de prestations sociales ;

10. Considérant, en second lieu, que si la requérante soutient qu'elle n'a pas commis de fausse déclaration dans le but de dissimuler la réalité de sa situation familiale, il résulte toutefois de l'instruction que le ministre aurait pris la même décision en se fondant sur le seul motif tiré du défaut de ressources propres ;

11. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme M'A... B... n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision du 30 septembre 2011 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

12. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'implique aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions tendant à ce que soit accordée à la requérante la nationalité française, qui doivent être regardées comme tendant à ce qu'il soit ordonné au ministre de faire droit à sa demande de naturalisation, ne sauraient être accueillies ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'ordonnance du président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Nantes du 28 avril 2014 est annulée.

Article 2 : La demande présentée par Mme M'A... B... devant le tribunal administratif de Nantes est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... M'A... B... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 21 novembre 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- M. Durup de Baleine, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 décembre 2014.

Le rapporteur,

A. DURUP de BALEINE Le président,

H. LENOIR

Le greffier,

C. GOY

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N° 14NT01423 5

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT01423
Date de la décision : 12/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. Antoine DURUP de BALEINE
Rapporteur public ?: Mme GRENIER
Avocat(s) : PARAISO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-12-12;14nt01423 ?
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