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03/04/2015 | FRANCE | N°14NT01843

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 03 avril 2015, 14NT01843


Vu la requête, enregistrée le 11 juillet 2014, présentée pour Mme B... A... épouseC..., demeurant..., par Me Martoux, avocat au barreau de Paris ; Mme C... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400805 du 10 juin 2014 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 janvier 2014 par lequel le préfet d'Eure-et-Loir lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour

excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet d'Eure-et-Loir de lui d...

Vu la requête, enregistrée le 11 juillet 2014, présentée pour Mme B... A... épouseC..., demeurant..., par Me Martoux, avocat au barreau de Paris ; Mme C... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400805 du 10 juin 2014 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 janvier 2014 par lequel le préfet d'Eure-et-Loir lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet d'Eure-et-Loir de lui délivrer une carte de séjour temporaire, dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 1 000 euros par mois de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- l'arrêté litigieux est insuffisamment motivé, ce, en méconnaissance de l'article 3 de la

loi du 11 juillet 1979 ;

- elle peut se prévaloir de la circulaire du 28 novembre 2012 ;

- l'arrêté contesté est entaché d'erreur de fait ; M. C... a été régularisé en tant que parent d'un enfant scolarisé ; les liens affectifs qu'elle a conservés dans son pays d'origine sont moins forts que ceux qui l'unissent à son époux et à son enfant présents en France ;

- le préfet a méconnu l'article L. 313-11 alinéa 7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle et son conjoint, avec qui elle est mariée depuis dix ans, suivent un traitement contre l'infertilité ; un tel traitement ne peut aboutir que si les deux époux le suivent ensemble ; elle travaille en France en qualité d'agent de propreté ;

- l'arrêté contesté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; le tribunal n'a pas statué sur ce moyen ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 10 octobre 2014, présenté par le préfet d'Eure-et-Loir qui conclut au rejet de la requête ;

il soutient que :

- son arrêté est suffisamment motivé ;

- il n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la lettre du 4 mars 2015 informant les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la décision à intervenir est susceptible d'être fondée sur un moyen soulevé d'office tiré de l'irrecevabilité du moyen de légalité externe relatif à l'insuffisance de motivation de l'arrêté contesté dès lors qu'aucun moyen de légalité externe n'a été soulevé en première instance ;

Vu la décision du 3 novembre 2014 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle a accordé à Mme C... le bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mars 2015 :

- le rapport de M. Millet, président-rapporteur ;

1. Considérant que Mme C..., ressortissante congolaise, relève appel du jugement du 10 juin 2014 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 janvier 2014 par lequel le préfet d'Eure-et-Loir lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, dans sa demande devant le tribunal administratif d'Orléans, Mme C... n'a soulevé aucun moyen de légalité externe ; que, par suite, le moyen soulevé pour la première fois en appel, tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté contesté, n'est pas recevable et ne peut qu'être écarté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; et qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° À l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ;

4. Considérant qu'il appartient à l'autorité administrative, qui envisage de refuser de délivrer un titre de séjour à un étranger ou de procéder à son éloignement, d'apprécier si, eu égard notamment à la durée et aux conditions de son séjour en France, ainsi qu'à la nature et à l'ancienneté de ses liens familiaux sur le territoire français, l'atteinte que cette mesure porterait à sa vie privée et familiale serait disproportionnée au regard des buts en vue desquels cette décision a été prise ; que la circonstance que l'étranger relèverait, à la date de cet examen, des catégories ouvrant droit au regroupement familial ne saurait, par elle-même, intervenir dans l'appréciation portée par l'administration sur la gravité de l'atteinte à la situation de l'intéressé ; que l'autorité compétente peut en revanche tenir compte, le cas échéant, au titre des buts poursuivis, de ce que le ressortissant étranger en cause ne pouvait légalement entrer en France pour y séjourner qu'au seul bénéfice du regroupement familial et qu'il n'a pas respecté cette procédure ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme C... est entrée en France le 8 février 2010, de manière irrégulière, accompagnée de son enfant né, en 2003, de son mariage célébré dans son pays d'origine en 1998 avec un compatriote ; que la requérante a fait l'objet en 2011 d'une première mesure d'éloignement qui n'a pas été exécutée ; que son époux, entré en France en 2004, et titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", a seulement vu sa situation régularisée le 20 novembre 2013, date à laquelle lui a été délivré un récépissé de demande de titre de séjour ; que Mme C... n'allègue pas être dépourvue d'attaches personnelles et familiales dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à l'âge de trente-quatre ans et où résident ses parents et ses deux frères ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la cellule familiale ne pourrait pas se reconstituer en République démocratique du Congo ; que si la requérante fait valoir qu'elle et son époux se sont engagés, en juin 2011, dans un programme de procréation médicalement assisté, il ne ressort pas des pièces du dossier que ce programme se poursuivait encore à la date de l'arrêté contesté ; que, dans ces conditions, l'arrêté en cause ne peut être regardé, eu égard à la possibilité qui est ouverte à son conjoint de solliciter pour elle le bénéfice du regroupement familial, comme ayant porté au droit de Mme C... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs qui lui ont été opposés ; que l'arrêté litigieux n'a, dès lors, pas été pris en méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et n'est pas davantage entaché d'une erreur de fait ou d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure sur la situation personnelle de l'intéressée ;

6. Considérant, en troisième et dernier lieu, que Mme C... ne peut utilement se prévaloir des orientations générales de la circulaire du 28 novembre 2012 adressée par le ministre de l'intérieur aux préfets pour les éclairer dans la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation de la situation d'un étranger en situation irrégulière ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui n'est pas entaché d'omission à statuer, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;

8. Considérant que doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction présentées par la requérante ainsi que celles tendant au paiement des frais non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A...épouse C...et au ministre de l'intérieur.

Une copie sera transmise au préfet d'Eure-et-Loir.

Délibéré après l'audience du 10 mars 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Millet, président,

- M. François, premier conseiller

- M. Pouget, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 3 avril 2015.

L'assesseur le plus ancien

dans l'ordre du tableau,

E. FRANÇOIS

Le président-rapporteur,

JF. MILLET

Le greffier,

S. BOYÈRE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14NT018434


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT01843
Date de la décision : 03/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MILLET
Rapporteur ?: M. Jean-Frédéric MILLET
Rapporteur public ?: M. DELESALLE
Avocat(s) : MARTOUX

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-04-03;14nt01843 ?
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