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22/09/2015 | FRANCE | N°15NT00135

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 22 septembre 2015, 15NT00135


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 29 février 2012 par lequel le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a déclaré irrecevable sa demande de réintégration dans la nationalité française ;

Par un jugement n°1204948 du 18 novembre 2014, le tribunal administratif de Nantes a fait droit à cette demande.

Procédure devant la cour :

Par un recours enregistré le 19 janvier 2015 et des mémoires

complémentaires enregistrés le 12 mai et le 22 juin 2015, le ministre de l'intérieur demande à ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 29 février 2012 par lequel le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a déclaré irrecevable sa demande de réintégration dans la nationalité française ;

Par un jugement n°1204948 du 18 novembre 2014, le tribunal administratif de Nantes a fait droit à cette demande.

Procédure devant la cour :

Par un recours enregistré le 19 janvier 2015 et des mémoires complémentaires enregistrés le 12 mai et le 22 juin 2015, le ministre de l'intérieur demande à la cour d'annuler ce jugement.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier en tant qu'il a omis de répondre au moyen de défense tiré de ce que M. D...se déclarait marié avec quatre enfants mineurs à charge auprès de l'administration fiscale ;

- l'intimé, qui n'a pas poursuivi sa procédure en divorce, est toujours marié avec son épouse qui réside à l'étranger ; il exerce son autorité parentale sur son enfant mineur vivant avec celle-ci ; il déclare cet enfant et son épouse à sa charge dans ses déclarations de revenus ; il ne justifie pas de circonstance particulières qui justifieraient qu'il remplit la condition de résidence prévue par l'article 21-16 du code civil ;

Par des mémoires en défense, enregistrés les 5 mai et 19 juin 2015, M. D..., représenté par Me Deutsch, conclut au rejet du recours, à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'intérieur d'instruire à nouveau sa demande de réintégration dans la nationalité française dans un délai de trente jours à compte de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard .

Il soutient que les moyens du ministre ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 18 mai 2015 la clôture de l'instruction a été fixée au 30 juin 2015 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

- le code civil.

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique du 1er septembre 2015 :

- le rapport de M. François, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Delesalle, rapporteur public ;

- et les observations de Me Deutsch, avocat de M.D....

Une note en délibéré présentée par M. D...a été enregistrée le 15 septembre 2015.

1. Considérant que le ministre de l'intérieur relève appel du jugement du 18 novembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de M. D..., ressortissant ivoirien, la décision du 29 février 2012 par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a déclaré irrecevable la demande de réintégration dans la nationalité française de l'intéressé ;

Sur la légalité de la décision litigieuse :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 24-1 du code civil : "La réintégration par décret peut être obtenue à tout âge et sans condition de stage. Elle est soumise, pour le surplus, aux conditions et aux règles de la naturalisation" ; qu'aux termes de l'article 21-16 du même code : " Nul ne peut être naturalisé s'il n'a en France sa résidence au moment de la signature du décret de naturalisation" ; qu'il résulte de ces dispositions que la demande de naturalisation n'est pas recevable lorsque l'intéressé n'a pas fixé en France, de manière stable, le centre de ses intérêts matériels et familiaux ; que, pour apprécier si cette dernière condition est remplie, l'administration peut notamment se fonder, sous le contrôle du juge, sur la durée de la présence du demandeur sur le territoire français, sur sa situation familiale et sur le caractère suffisant et durable de ses ressources ;

3. Considérant que pour déclarer irrecevable la demande de réintégration dans la nationalité française de M.D..., le ministre a estimé que le postulant n'avait pas fixé en France de manière stable le centre de ses intérêts matériels et de ses attaches familiales, dès lors que son épouse et leur enfant né en 2002 résidaient ensemble à l'étranger ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.D..., entré en France en 1983 afin de poursuivre ses études d'expertise comptable, a exercé ses activités professionnelles en Côte d'Ivoire de 1988 à 1989, puis de 1991 à 1999 et de 2005 à 2010 ; que s'il est séparé de fait de son épouse depuis juillet 2009, il est constant qu'à la date de la décision contestée, celle-ci résidait en Côte d'Ivoire avec un des enfants mineurs du couple et que l'intéressé faisait état de ce mariage dans ses déclarations de revenus et déclarait à charge cet enfant mineur ; que, dans ces conditions, alors même que le postulant bénéficie depuis 2010 d'un contrat de travail à durée indéterminée en France où il est propriétaire d'un bien immobilier et que ses quatre autres enfants plus âgés poursuivent leurs études sur le territoire national, le ministre a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation, déclarer irrecevable la demande de réintégration dans la nationalité française de M. D...sur le fondement des dispositions précitées de l'article 21-16 du code civil ; que l'intimé ne peut utilement se prévaloir de l'introduction d'une requête en divorce postérieure à la décision contestée, ni de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales à l'encontre de cette décision, laquelle n'est par nature pas susceptible de porter atteinte au droit au respect de sa vie privée et familiale ; que par suite c'est à tort que le tribunal administratif de Nantes a annulé pour ce motif la décision litigieuse ;

5. Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. D...devant le tribunal administratif de Nantes ;

6. Considérant, d'une part, que par une décision du 9 août 2011 régulièrement publiée au Journal officiel de la République française du 11 août 2011, MmeC..., signataire de la décision contestée, a reçu délégation de M. A...directeur de l'accueil, de l'intégration et de la citoyenneté, à l'effet de signer tous actes relevant de ses attributions, au nombre desquels figurent les décisions constatant l'irrecevabilité des demandes de naturalisation ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte manque en fait ;

7. Considérant, d'autre part, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le ministre se serait abstenu d'examiner l'ensemble des éléments relatifs à la situation personnelle du requérant ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a prononcé l'annulation de sa décision du 29 février 2012 déclarant irrecevable la demande de réintégration dans la nationalité française de M. D...; que doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction présentées par ce dernier ainsi que ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 18 novembre 2014 du tribunal administratif de Nantes est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. D...devant le tribunal administratif de Nantes et ses conclusions présentées en appel à fin d'injonction et au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B... D....

Délibéré après l'audience du 1er septembre 2015, où siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- M. Millet, président-assesseur,

- M. François, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 septembre 2015.

Le rapporteur,

E. FRANÇOISLe président,

A. PEREZ

Le greffier,

S. BOYERE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15NT00135


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT00135
Date de la décision : 22/09/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Eric FRANCOIS
Rapporteur public ?: M. DELESALLE
Avocat(s) : DEUTSCH

Origine de la décision
Date de l'import : 02/10/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-09-22;15nt00135 ?
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