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10/11/2015 | FRANCE | N°15NT00041

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 10 novembre 2015, 15NT00041


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 13 juin 2012 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande d'acquisition de la nationalité française.

Par un jugement n° 1208476 du 7 novembre 2014, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 janvier 2015, et un mémoire en réplique, enregistré le 22 juillet 2015, M.A..., représenté par MeC..., demande à la cou

r :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 7 novembre 2014 ;

2°) d'an...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 13 juin 2012 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande d'acquisition de la nationalité française.

Par un jugement n° 1208476 du 7 novembre 2014, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 janvier 2015, et un mémoire en réplique, enregistré le 22 juillet 2015, M.A..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 7 novembre 2014 ;

2°) d'annuler la décision du 13 juin 2012 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande d'acquisition de la nationalité française ;

3°) d'enjoindre au ministre de publier son décret de naturalisation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- le jugement est entaché d'erreur de fait, puisque le tribunal a cru statuer sur le bien fondé d'une mesure d'ajournement à deux ans, alors que c'est une décision de rejet pure et simple qui était contestée ;

- en outre, le tribunal n'a pas examiné son moyen tiré de la méconnaissance de l'article 21-27 du code civil alors que ce moyen était pourtant soulevé ;

- la décision du 13 juin 2012 méconnaît les dispositions de l'article 21-27 du code civil ;

- il a bénéficié d'une réhabilitation de plein droit en application de l'article L. 133-13 du code pénal ;

- les faits de violences physiques qui lui sont reprochés sont anciens, isolés et doivent être relativisés en raison de leur réciprocité ;

- la décision est donc entachée d'erreur manifeste d'appréciation, d'autant qu'il réside de longue date en France, que ses enfants sont nés en France et de nationalité française, qu'il a toujours travaillé jusqu'à l'âge de la retraite et est propriétaire de son logement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er avril 2015, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- l'erreur observée dans le jugement rendu est sans incidence sur sa régularité, puisque les décisions de rejet ou d'ajournement sont prises en opportunité et sont de même nature ;

- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 27 du code civil est inopérant, dès lors que la décision contestée a été prise, non sur le fondement de ces dispositions, mais sur le fondement de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 ;

- le caractère réciproque des violences n'est pas davantage opérant, dès lors que le requérant a été l'auteur de violences, qui justifiaient la mesure prise, laquelle n'a pas le caractère d'une sanction disproportionnée, mais d'une décision refusant l'octroi d'une faveur ;

- le caractère ancien des faits reprochés n'est pas établi ;

- les circonstances tirées de la durée de résidence en France du requérant, de la nationalité française de ses enfants, de ce qu'il serait propriétaire de son logement et intégré professionnellement, sont sans incidence sur la légalité de la décision contestée, eu égard à son motif.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 relatif à la manifestation de volonté, aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Millet a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. A..., de nationalité marocaine, relève appel du jugement du 7 novembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 13 juin 2012 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande d'acquisition de la nationalité française ;

Sur la régularité du jugement attaqué ;

2. Considérant que, dans son jugement, qui vise la décision du 13 juin 2012 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté la demande d'acquisition de la nationalité française présentée par M.A..., le tribunal administratif de Nantes a examiné la légalité de cette décision au regard des dispositions du décret susvisé du 30 décembre 1993 permettant, en opportunité, au ministre de prendre indistinctement une mesure de refus ou d'ajournement en cas de renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant ; que, par suite, si le tribunal administratif fait état, non d'une mesure de rejet, mais d'une mesure " d'ajournement ", dans les points 5 et 6 de son jugement, cette simple erreur matérielle, sans incidence sur le fond du litige, n'affecte pas la régularité de ce jugement, qui, en tout état de cause, n'est entaché d'aucune omission à statuer ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil :

" L'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger. " ; qu'en outre, selon l'article 48 du décret susvisé du 30 décembre 1993 : " (...) Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions. Ce délai une fois expiré ou ces conditions réalisées, il appartient à l'intéressé, s'il le juge opportun, de déposer une nouvelle demande. " ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au ministre de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la naturalisation à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et n'est pas contesté que M. A...a été l'auteur le 16 février 2006 de violences ayant entraîné chez un collègue de travail une incapacité supérieure à huit jours, faits pour lesquels il a été pénalement sanctionné d'une mesure d'emprisonnement avec sursis ; que si M. A...soutient qu'il bénéficie de la réhabilitation de plein droit prévue par l'article 133-13 du code pénal, cette circonstance ne fait pas obstacle à ce que le ministre prenne en considération les faits à l'origine de cette condamnation ; qu'ainsi, alors même qu'ils se seraient produits sur le lieu de travail, seraient restés isolés et se seraient, d'ailleurs, traduits par des violences réciproques, eu égard à la nature et à la gravité de ces faits, qui ne pouvaient être regardés comme anciens à la date de la décision contestée, le ministre chargé des naturalisations n'a, dans l'exercice du large pouvoir dont il dispose pour apprécier l'opportunité d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite, entaché sa décision de rejet ni d'erreur de droit ni d'erreur manifeste ; que M. A...ne peut, eu égard au motif de la décision litigieuse, utilement invoquer la durée de son séjour en France, la nationalité française de ses enfants ou la réussite de son insertion professionnelle ;

5. Considérant, en second lieu, que M. A...ne saurait utilement se prévaloir d'une méconnaissance des dispositions de l'article 21-27 du code civil, dès lors que la décision contestée a été prise, non sur le fondement de ces dispositions, mais sur celles de l'article 48 du décret susvisé du 30 décembre 1993 ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

7. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de M. A... n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction de l'intéressé ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que demande M. A...au titre des frais exposés et non compris dans le dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 13 octobre 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- M. Millet, président-assesseur,

- Mme Buffet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 10 novembre 2015.

Le rapporteur,

J-F. MILLET

Le président,

A. PÉREZLe greffier,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15NT00041

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT00041
Date de la décision : 10/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Jean-Frédéric MILLET
Rapporteur public ?: M. DELESALLE
Avocat(s) : ANDREZ

Origine de la décision
Date de l'import : 20/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-11-10;15nt00041 ?
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