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21/12/2018 | FRANCE | N°17NT02706

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 21 décembre 2018, 17NT02706


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...M...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 6 octobre 2015 par lequel le président de la communauté d'agglomération Rennes Métropole a décidé d'exercer, au nom de Rennes Métropole, le droit de préemption urbain sur les parcelles cadastrées section AP n° 0051, 0580, 053 et 0520 et situées aux 4 et 6 chemin des Marais à Vern-sur-Seiche, appartenant aux consortsI....

Par un jugement n° 1504853 du 7 juillet 2017, le tribunal administratif de Rennes a fait droit

à sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistré...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...M...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 6 octobre 2015 par lequel le président de la communauté d'agglomération Rennes Métropole a décidé d'exercer, au nom de Rennes Métropole, le droit de préemption urbain sur les parcelles cadastrées section AP n° 0051, 0580, 053 et 0520 et situées aux 4 et 6 chemin des Marais à Vern-sur-Seiche, appartenant aux consortsI....

Par un jugement n° 1504853 du 7 juillet 2017, le tribunal administratif de Rennes a fait droit à sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 5 septembre 2017 et le 24 mai 2018, la communauté d'agglomération de Rennes Métropole, représentée par le cabinet Coudray conseil et contentieux, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 7 juillet 2017 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. M...devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de M. M...une somme de 3500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La communauté d'agglomération de Rennes Métropole soutient que :

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, la nature du projet poursuivi est mentionnée dans la décision de préemption et la réalité du projet poursuivi est établie à la date de la décision de préemption ; la collectivité n'avait pas, au stade de la décision de préemption, à faire état d'un projet précisément défini, notamment dans ses modalités de réalisation ; il appartenait au tribunal de prendre en compte l'ensemble des éléments versés dans le cadre de l'instance, y compris ceux qui ne sont pas expressément mentionnés dans la décision de préemption ; la réalité du projet d'aménagement sur l'îlot des marais est établie par les orientations d'aménagement du PLU de la commune de Vern-sur-Seiche, les prescriptions du PADD du PLU de la commune, les travaux de la commission d'urbanisme en date du 17 juillet 2014 relatifs au renouvellement urbain de l'îlot des Marais, la délibération du conseil municipal de Vern-sur-Seiche sollicitant la mise en oeuvre d'études sur le programme de travaux à réaliser et l'acquisition par la communauté d'agglomération d'autres parcelles situées dans le même îlot ;

- le signataire de la décision de préemption, M.C..., bénéficiait d'une délégation régulière pour intervenir en matière d'aménagement ;

- la délibération du 2 juillet 2012 instituant le périmètre du droit de préemption urbain sur le territoire communal a fait l'objet des formalités de publicité prescrites par l'article R. 211-2 du code de l'urbanisme et était exécutoire.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 28 mars 2018 et le 28 septembre 2018, M. D...M..., représenté par MeN..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Rennes métropole une somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par Rennes métropole ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Degommier,

- les conclusions de M. Sacher, rapporteur public,

- et les observations de MeH..., représentant la communauté d'agglomération Rennes Métropole, et de Me E...substituant MeN..., représentant M.M....

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 6 octobre 2015, le président de la communauté d'agglomération Rennes Métropole a décidé d'exercer, au nom de Rennes Métropole, le droit de préemption urbain sur les parcelles cadastrées section AP n° 0051, 0580, 053 et 0520, situées aux 4 et 6 chemin des Marais à Vern-sur-Seiche, appartenant aux consortsI.... La communauté d'agglomération de Rennes Métropole interjette appel du jugement du 7 juillet 2017 par lequel le tribunal administratif de Rennes a annulé cet arrêté.

Sur la légalité de l'arrêté du 6 octobre 2015 :

2. Aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors applicable : " Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1, à l'exception de ceux visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. (...) Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé. (...) Lorsque la commune a délibéré pour définir le cadre des actions qu'elle entend mettre en oeuvre pour mener à bien un programme local de l'habitat ou, en l'absence de programme local de l'habitat, lorsque la commune a délibéré pour définir le cadre des actions qu'elle entend mettre en oeuvre pour mener à bien un programme de construction de logements locatifs sociaux, la décision de préemption peut, sauf lorsqu'il s'agit d'un bien mentionné à l'article L. 211-4, se référer aux dispositions de cette délibération. Il en est de même lorsque la commune a délibéré pour délimiter des périmètres déterminés dans lesquels elle décide d'intervenir pour les aménager et améliorer leur qualité urbaine.". Et aux termes de l'article L. 300-1 du même code, dans sa rédaction alors applicable : "Les actions ou opérations d'aménagement ont pour objets de mettre en oeuvre un projet urbain, une politique locale de l'habitat, d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs ou des locaux de recherche ou d'enseignement supérieur, de lutter contre l'insalubrité et l'habitat indigne ou dangereux, de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels. L'aménagement, au sens du présent livre, désigne l'ensemble des actes des collectivités locales ou des établissements publics de coopération intercommunale qui visent, dans le cadre de leurs compétences, d'une part, à conduire ou à autoriser des actions ou des opérations définies dans l'alinéa précédent et, d'autre part, à assurer l'harmonisation de ces actions ou de ces opérations.". Il résulte de ces dispositions que les collectivités titulaires du droit de préemption urbain peuvent légalement exercer ce droit, d'une part, si elles justifient, à la date à laquelle elles l'exercent, de la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement répondant aux objets mentionnés à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, alors même que les caractéristiques précises de ce projet n'auraient pas été définies à cette date et, d'autre part, si elles font apparaître la nature de ce projet dans la décision de préemption.

3. Le président de Rennes Métropole a décidé d'exercer le droit de préemption urbain sur les parcelles faisant l'objet de la déclaration d'intention d'aliéner au motif, selon l'arrêté contesté, que " ce bien doit être acquis afin de permettre la réalisation d'une réserve foncière pour la mise en oeuvre du projet de renouvellement urbain sur l'îlot " des Marais " situé entre le chemin des Marais, la rue Henri Queffelec et l'impasse de l'Eglise en vue de développer un programme de logements et d'activités en veillant à mettre en valeur le patrimoine bâti situé 2 chemin des Marais. Cette acquisition participera au programme de renouvellement urbain du centre-ville inscrit dans les orientations d'aménagements du Plan Local d'Urbanisme ". Il ressort toutefois des pièces du dossier que si les orientations d'aménagement du plan local d'urbanisme et les documents graphiques les accompagnant, portent notamment sur le renouvellement urbain des îlots bâtis du centre-ville, dans le but notamment de diversifier les typologies de logements et de maintenir et développer le commerce, l'îlot des Marais, au sein duquel se situent les biens préemptés, ne figure pas au nombre des secteurs identifiés par les auteurs du plan local d'urbanisme. Le projet d'aménagement et de développement durable du PLU de Vern-sur-Seiche s'il énonce en particulier la nécessité d'opérations d'aménagement en renouvellement urbain afin de créer des logements, des activités et équipements, en confortant le rôle du centre, ne comporte aucune orientation propre à l'îlot des Marais. La communauté d'agglomération Rennes métropole produit également une étude urbaine et foncière portant sur l'îlot des Marais, présentée en commission d'urbanisme en juin 2014. Toutefois cette étude se borne à analyser la consistance de l'îlot, à étudier les opportunités d'acquisition et à recenser les bâtiments d'intérêt local, et ne fait état d'aucun projet d'action ou d'opération d'aménagement sur cet îlot, et en particulier sur les parcelles en litige. Rennes métropole se prévaut en outre des termes de la délibération du 14 septembre 2015, adoptée quatre semaines après la réception par la commune de la déclaration d'intention d'aliéner et trois semaines avant l'intervention de l'arrêté contesté, par laquelle le conseil municipal de Vern-sur-Seiche, après avoir constaté que " cet îlot occupe une position stratégique et sensible en coeur de ville et offre un potentiel foncier intéressant pour la création de logements et d'activités " et que " sa requalification serait par ailleurs l'occasion de repenser l'organisation des espaces publics, voiries, liaisons douces et stationnements en périphérie et notamment au droit de la place des Droits de l'Homme ", s'est borné à " s'interroger sur le devenir de cet îlot, d'autant que la vente de plusieurs biens est annoncée ", et à " engager une réflexion globale et concertée sur cet îlot stratégique du centre-ville " ainsi qu' " une étude urbaine afin de définir les conditions urbanistiques et économiques de ce renouvellement urbain en vue de la dynamisation du centre-ville ". Cette délibération, qui se borne à engager une réflexion sur l'aménagement de ce secteur ne permet pas davantage d'établir la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement sur les parcelles en litige. Il en va de même des négociations engagées par Rennes métropole pour l'acquisition d'une autre parcelle de l'îlot des Marais, située 4 rue Queffelec, finalement acquise le 12 juillet 2016. Par ailleurs, si Rennes métropole soutient que la commune de Vern-sur-Seiche a conclu, le 10 juillet 2017, un bail précaire portant sur la parcelle AP n°52, dans l'attente du démarrage des travaux sur l'îlot des Marais et qu'elle a proposé, par courrier du 30 mars 2017, au mandataire en charge de la liquidation de l'Hôtel des Marais, l'acquisition des parcelles AP n°45, n°46 et n°615, ces circonstances, de même que l'approbation, par délibération du 22 janvier 2018, de la convention de portage foncier de cette propriété, sont postérieures à l'arrêté contesté. Dans ces conditions, Rennes Métropole ne peut être regardée comme justifiant, à la date de l'arrêté contesté, de la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement.

4. Il résulte de ce qui précède que la communauté d'agglomération de Rennes Métropole n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes l'arrêté du 6 octobre 2015 par lequel son président a exercé le droit de préemption urbain sur les parcelles situées aux 4 et 6, chemin des Marais à Vern-sur-Seiche.

Sur les frais liés au litige :

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M.M..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Rennes métropole demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de Rennes métropole une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. M...et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la communauté d'agglomération de Rennes Métropole est rejetée.

Article 2 : la communauté d'agglomération de Rennes Métropole versera à M. M...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté d'agglomération de Rennes Métropole, à M. D... M..., à Mme F...L..., tutrice, à Mme J...I..., à M. A... I..., à Mme B... I...Épouse K...et à M. G... I....

Délibéré après l'audience du 7 décembre 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Dussuet, président de chambre,

- M. Degommier, président assesseur,

- M. Mony, premier conseiller.

Lu en audience publique le 21 décembre 2018.

Le rapporteur,

S. DEGOMMIER

Le président,

J-P. DUSSUET Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice

à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées,

de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17NT02706


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 17NT02706
Date de la décision : 21/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DUSSUET
Rapporteur ?: M. Sébastien DEGOMMIER
Rapporteur public ?: M. SACHER
Avocat(s) : MEILLARD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-12-21;17nt02706 ?
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