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20/11/2020 | FRANCE | N°20NT00673,20NT00674

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 20 novembre 2020, 20NT00673,20NT00674


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... G... et Mme E... D... épouse G... ont demandé au tribunal administratif de Rennes de les admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle et d'annuler les arrêtés du 22 juillet 2019 par lesquels le préfet d'Ille-et-Vilaine leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement nos 1903939, 1903940 du 18 septembre 2019, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes.

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rocédure devant la cour :

I ) Par une requête enregistrée sous le n°20NT00673 le 23 fé...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... G... et Mme E... D... épouse G... ont demandé au tribunal administratif de Rennes de les admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle et d'annuler les arrêtés du 22 juillet 2019 par lesquels le préfet d'Ille-et-Vilaine leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement nos 1903939, 1903940 du 18 septembre 2019, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

I ) Par une requête enregistrée sous le n°20NT00673 le 23 février 2020 M. G..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes du 18 septembre 2019 en ce qui le concerne ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet d'Ille-et-Vilaine du 22 juillet 2019 pris à son encontre ;

3°) d'enjoindre au préfet d'Ille-et-Vilaine de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 000 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.

Il soutient que :

- il n'est pas établi que l'arrêté contesté a été pris par une autorité ayant reçu délégation pour le faire, et cet arrêté n'est revêtu que d'un simple paraphe et non d'une signature, en méconnaissance des arrêtés du 17 ventôse An X ;

- les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ne sont pas motivées ;

- le préfet aurait dû saisir la commission du titre de séjour ; il remplit les conditions de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant refus de titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et procèdent d'une erreur manifeste d'appréciation à ce titre ;

- l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français prive de base légale la décision fixant le pays de destination ;

- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée le 6 juillet 2020 au préfet d'Ille-et-Vilaine qui n'a pas produit de mémoire en défense.

M. G... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 27 janvier 2020.

II ) Par une requête enregistrée sous le n°20NT00674 le 23 février 2020 Mme G..., représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes du 18 septembre 2019 en ce qui la concerne ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet d'Ille-et-Vilaine du 22 juillet 2019 pris à son encontre ;

3°) d'enjoindre au préfet d'Ille-et-Vilaine de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 000 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.

Elle invoque les mêmes moyens que ceux soulevés dans l'instance n°20NT00673 visée ci-dessus.

Par un mémoire en défense enregistré le 7 août 2020, le préfet d'Ille-et-Vilaine conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Par une décision du 27 janvier 2020, la demande d'aide juridictionnelle présentée par Mme G... a été rejetée.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme H... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme G..., ressortissants serbes entrés sur le territoire français à une date indéterminée, ont sollicité l'admission au séjour au titre de l'asile auprès de la préfecture d'Ille-et-Vilaine le 11 octobre 2018. Par deux décisions du 24 avril 2019, le directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté les demandes de protection internationale des intéressés. Par deux arrêtés du 22 juillet 2019, le préfet d'Ille-et-Vilaine leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourraient être reconduits d'office. Par deux requêtes enregistrées sous les n°s 20NT00673 et 20NT00674, qu'il y a lieu de joindre, M. et Mme G... relèvent appel du jugement du 18 septembre 2019 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes respectives tendant à l'annulation des arrêtés du préfet d'Ille-et-Vilaine du 22 juillet 2019.

2. En premier lieu, les moyens de légalité externe que soulèvent les requérants, pour la première fois en appel, tirés du défaut de motivation des arrêtés contestés et de l'absence de saisine de la commission du titre de séjour, qui reposent sur une cause juridique distincte de celle dont procèdent leurs moyens de première instance, et qui ne sont pas d'ordre public, présentent le caractère d'une demande nouvelle, irrecevable en appel.

3. En deuxième lieu, l'arrêté contesté du 22 juillet 2019 a été signé par Mme B..., directrice adjointe des étrangers en France de la préfecture d'Ille-et-Vilaine, qui bénéficiait d'une délégation de signature consentie par un arrêté préfectoral publié le 3 juillet 2019 au recueil des actes administratifs de la préfecture, à l'effet, notamment, de signer " les décisions d'éloignement (obligations de quitter le territoire français avec ou sans délai de départ volontaire, les arrêtés de réadmission Schengen, les arrêtés portant interdiction de circulation sur le territoire français pour les ressortissants européens, les décisions distinctes fixant le pays de renvoi (...)) " en cas d'absence ou d'empêchement de M. F..., directeur des étrangers en France de la préfecture d'Ille-et-Vilaine. Par ailleurs, à supposer même que l'arrêté préfectoral en litige puisse être regardé comme revêtu d'un simple paraphe, et non d'une signature, celle-ci, apposée au-dessus de l'indication des nom et qualité de son auteur, permettait ainsi d'identifier sans difficulté ce dernier. Le moyen tiré de ce que les arrêtés contestés où apparaissent les différentes décisions litigieuses auraient été signés par une autorité incompétente doit par suite être écarté.

4. En troisième lieu, les requérants ne sauraient utilement se prévaloir de dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers qui régissent la délivrance des titres de séjour et ne sont pas applicables à des décisions portant obligation de quitter le territoire français.

5. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

6. M. et Mme G..., dont le séjour en France était récent à la date des décisions contestées, se bornent à soutenir, sans verser aucune pièce à l'appui de leurs allégations, qu'ils " ne disposent d'aucune famille dans leur pays d'origine ". Par suite, et en dépit de ce que Mme G... produit par ailleurs, sans formuler le moindre argumentaire à ce titre, quelques documents de nature médicale qui révèlent qu'elle souffre d'asthme, les arrêtés contestés ne méconnaissent pas les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit des requérants au respect de leur vie privée et familiale.

7. En cinquième lieu, l'illégalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas établie, les requérants ne sont pas fondés à s'en prévaloir, par la voie de l'exception, à l'encontre des décisions fixant le pays de destination.

8. En sixième et dernier lieu, si M. et Mme G... soutiennent qu'ils craignent les traitements auxquels les exposerait un retour en Serbie, ils n'apportent aucun élément probant à l'appui de leurs allégations. Par suite, le moyen tiré de ce que les décisions fixant le pays de destination auraient été prises en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.

9. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme G... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

D E C I D E

Article 1 : Les requêtes n°s 20NT00673 et 20NT00674 de M. G... et de Mme G... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... G..., à Mme E... D... épouse G... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet d'Ille-et-Vilaine.

Délibéré après l'audience du 5 novembre 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président,

- Mme Brisson, président-assesseur,

- Mme H..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 novembre 2020.

Le rapporteur

M. H...

Le président

I. Perrot

Le greffier

R. Mageau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Nos 20NT00673, 20NT006742


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT00673,20NT00674
Date de la décision : 20/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: Mme Muriel LE BARBIER
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : ATTALI

Origine de la décision
Date de l'import : 04/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-11-20;20nt00673.20nt00674 ?
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