La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/10/2021 | FRANCE | N°20NT03563

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 05 octobre 2021, 20NT03563


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... Floc'h a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 19 décembre 2016 de classement de son poste dans le quatrième groupe de fonctions du corps des ingénieurs d'études et de fabrication du ministère de la défense en vue de la mise en œuvre du régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel ainsi que d'annuler la décision implicite par laquelle son recours gracieux a été rejeté.

Par un jugement

n° 1801923 du 17 septembre 2020, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... Floc'h a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 19 décembre 2016 de classement de son poste dans le quatrième groupe de fonctions du corps des ingénieurs d'études et de fabrication du ministère de la défense en vue de la mise en œuvre du régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel ainsi que d'annuler la décision implicite par laquelle son recours gracieux a été rejeté.

Par un jugement n° 1801923 du 17 septembre 2020, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 17 novembre 2020 et 21 juillet 2021, M. A... Floc'h, représenté par Me Quantin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler ces décisions ;

3°) d'enjoindre, sous astreinte de deux cents euros par jour de retard à compter d'un mois suivant la notification du présent arrêt, au ministre des armées de procéder à la régularisation de sa rémunération à compter du 1er décembre 2016 et d'assortir ces sommes des intérêts légaux et de la capitalisation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les premiers juges ont omis de répondre au moyen tiré de l'absence de respect des formalités de publicité de la délégation de signature accordée par le ministre des armées au signataire de l'acte ;

- la décision du 19 décembre 2016 est illégale dès lors que le ministre des armées n'a pas justifié du bon respect des procédures de publicité formelles de la délégation consentie au signataire de l'acte ;

- c'est à tort que le tribunal administratif a jugé que le signataire de l'acte était compétent sur le fondement du point 42 de l'article 1er A de l'arrêté du 14 décembre 2011 dès lors que ce point ne vise que l'établissement des états liquidatifs relatifs aux éléments modulables de rémunération et n'inclut donc pas la décision de classement d'un agent au sein d'un des groupes ouvrant droit ou non au versement de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise ;

- la décision du 19 décembre 2016 est dépourvue de base légale dès lors que la circulaire du 21 novembre 2016, dont les dispositions présentent un caractère impératif, a été édictée par une autorité incompétente ;

- la décision du 19 décembre 2016 le classant dans le quatrième groupe est entachée d'une erreur d'appréciation dès lors qu'il exerçait des fonctions d'encadrement hiérarchique et qu'il relève du groupe n° 3 relatif aux fonctions d'architecte des systèmes d'information et de communication ;

- en l'absence de preuve du respect de l'article L. 312-2 du code des relations entre le public et l'administration, la circulaire du 21 novembre 2016 ne lui est pas applicable ;

- les conclusions au titre des frais irrépétibles ne peuvent qu'être écartées lorsque le mémoire en défense a été rédigé par les agents de l'Etat.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 juin 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête au motif que les moyens soulevés par M. A... Floc'h ne sont pas fondés et demande que soit mise à la charge de M. A... Floc'h une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 2011-1864 du 12 décembre 2011 ;

- le décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 ;

- l'arrêté 14 décembre 2011 relatif à l'application du décret n° 2011-1864 du 12 décembre 2011 autorisant le ministre de la défense à déléguer certains de ses pouvoirs en matière d'administration et de gestion du personnel civil du ministère de la défense modifié ;

- l'arrêté du 14 novembre 2016 pris pour l'application au corps des techniciens supérieurs d'études et de fabrication du ministère de la défense des dispositions du décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 portant création d'un régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel dans la fonction publique de l'Etat ;

- la circulaire n° 3100399/DEF/SGA/DRH-MD du ministre des armées du 21 novembre 2016 relative au classement en quatre groupes de fonctions des ingénieurs d'études et de fabrication du ministère de la défense pour l'application du régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel dans la fonction publique de l'Etat ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Malingue,

- les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public,

- et les observations de Me Gourdain, substituant Me Quantin, représentant M. A... Floc'h.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... Floc'h, ingénieur d'études et de fabrication au sein du ministère des armées affecté à la direction interarmées des réseaux d'infrastructure et des systèmes d'information à Brest, relève appel du jugement du 17 septembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation du courrier du 19 décembre 2016 par lequel il a été informé du classement de son poste dans le quatrième groupe de fonctions du corps des ingénieurs d'études et de fabrication au titre de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise ainsi que l'annulation de la décision rejetant implicitement son recours gracieux.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Les premiers juges ont répondu aux points 2 et 3 du jugement attaqué au moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision du 19 décembre 2016 en indiquant avec une précision suffisante les motifs pour lesquels ils estimaient que ce dernier bénéficiait d'une délégation de pouvoir. Dès lors, ils pouvaient implicitement écarter comme inopérante la branche du moyen, analysée dans les visas, tirée du défaut de publication régulière de la délégation de signature consentie au signataire de l'acte et n'ont pas entaché leur décision d'irrégularité en s'abstenant d'y répondre. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement soulevé par M. Floc'h doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Aux termes de l'article 1er du décret du 12 décembre 2011 autorisant le ministre de la défense et des anciens combattants à déléguer certains de ses pouvoirs en matière d'administration et de gestion du personnel civil du ministère de la défense : " Dans les conditions et les limites fixées par le présent décret, le ministre de la défense peut déléguer, par arrêté, aux autorités mentionnées à l'article 2 tout ou partie de ses pouvoirs en matière d'administration et de gestion du personnel civil relevant de son département ministériel ". Aux termes de l'article 2 de ce décret : " Les autorités pouvant bénéficier des délégations des pouvoirs du ministre de la défense en matière d'administration et de gestion du personnel civil sont les suivantes : (...) 2° Les directeurs des centres ministériels de gestion, pour le personnel civil des services n'appartenant pas à l'administration centrale, selon la répartition des compétences et les périmètres géographiques fixés par l'arrêté d'application du présent décret (...) ". Aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 14 décembre 2011 modifié relatif à l'application du décret n° 2011-1864 du 12 décembre 2011 dans sa rédaction applicable à la décision en cause : " Les directeurs des centres ministériels de gestion (...) reçoivent délégation des pouvoirs du ministre de la défense en matière d'administration et de gestion du personnel civil dans les matières énumérées au présent article. (...) A.-Actes concernant les fonctionnaires de l'Etat / 1. Pour les corps de fonctionnaires cités ci-après : (...) -ingénieurs d'études et de fabrications du ministère de la défense ; (...) 42. Etablissement des états liquidatifs relatifs aux éléments modulables de rémunération (...). ".

4. Par courrier du 19 décembre 2016, M. C... B..., directeur du centre ministériel de gestion de Rennes a informé M. A... Floc'h des modalités de mise en place du régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel (RIFSEEP), du classement de son poste dans le quatrième groupe de fonctions du corps des ingénieurs d'études et de fabrication, du fait que le montant annuel de son IFSE était fixée à 14 722, 64 euros bruts par an et qu'il lui était attribué, sur sa paie du mois de décembre 2016, un complément indemnitaire annuel (CIA) non reconductible de 227, 50 euros brut. Ce courrier notifie donc à M. A... Floc'h la teneur d'une décision individuelle d'attribution d'un avantage financier et ne peut, contrairement à ce que soutient le ministre en défense, être regardé comme une simple information du détail des éléments modulables de rémunération qui seront portés à compter du 1er décembre 2016 à l'état liquidatif relatif aux éléments modulables de rémunération établi mensuellement pour la paye, lequel état liquidatif aurait seulement pour objet de vérifier la réalité d'une créance et d'arrêter le montant de la dépense. Par suite, et contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, la compétence du signataire de l'acte en litige ne peut résulter du point 42 du A de l'article 1er de l'arrêté du 14 décembre 2011 publié au journal officiel de la République Française n° 0293 du 18 décembre 2011. Dès lors, en l'absence de toute autre disposition justifiant de la délégation consentie au signataire au titre de l'attribution des indemnités prévues par le RIFSEEP, M. A... Floc'h est, pour ce seul motif tiré de l'incompétence, fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

5. M. A... Floc'h sollicite qu'il soit enjoint au ministre des armées de procéder à la régularisation de sa rémunération à compter du 1er décembre 2016 et d'assortir ces sommes des intérêts légaux et de la capitalisation.

6. En premier lieu, aux termes de l'article 2 du décret du 20 mai 2014 : " Le montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise est fixé selon le niveau de responsabilité et d'expertise requis dans l'exercice des fonctions. / (...) Le nombre de groupes de fonctions est fixé pour chaque corps ou statut d'emploi par arrêté du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget et, le cas échéant, du ministre intéressé. / Ce même arrêté fixe les montants minimaux par grade et statut d'emplois, les montants maximaux afférents à chaque groupe de fonctions et les montants maximaux applicables aux agents logés par nécessité de service. (...) ". En application de ces dispositions, par un arrêté du 14 novembre 2016, la ministre chargée de la fonction publique, le ministre de la défense et le secrétaire d'Etat chargé du budget ont fixé les montants de référence de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise ainsi que le nombre de groupes de fonctions pour le corps des ingénieurs d'études et de fabrication du ministère de la défense. En application de l'article 2 du décret du 20 mai 2014 cité ci-dessus, cet arrêté se limite à fixer le nombre de groupes de fonctions pour ce corps, sans prévoir quelles fonctions en relèvent. Dès lors, il revenait au ministre, dans l'exercice de ses prérogatives d'organisation des services placés sous son autorité, de répartir, dans le respect des règles générales fixées par les dispositions réglementaires précitées, les fonctions relevant de son administration au sein des groupes de fonctions prévus pour ce corps. Par suite, le ministre était compétent pour fixer de telles règles par la circulaire n° 3100399/DEF/SGA/DRH-MD du 21 novembre 2016, qui a été publiée au bulletin officiel des armées n° 54 du 1er décembre 2016. Dès lors, les moyens tirés de ce que la décision du 19 décembre 2016 est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la circulaire n° 3100399/DEF/SGA/DRH-MD du 21 novembre 2016 en raison de l'incompétence de son auteur ou de son inopposabilité en l'absence de publication doivent être écartés.

7. En second lieu, ni les qualités relationnelles ni les compétences techniques, non contestées, de M. A... Floc'h ne sont de nature à remettre en cause le fait que le poste de chef de projet " mobilité " qu'il occupe au sein de la direction interarmées des réseaux d'infrastructure et des systèmes d'information de Brest, qui ne comporte aucune mission d'encadrement hiérarchique d'agent et ne constitue pas un poste d'expert technique, ne peut être classé en groupe 3 au titre de " chef de projet SIC encadrant " ou " expert technique dans le domaine des SIC ". Par suite, doit être écarté le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise l'autorité administrative en classant son poste dans le groupe 4 qui comporte tous les emplois qui ne sont pas inscrits dans les autres groupes.

8. Il résulte de ce qui a été dit aux points 6 et 7 que, les moyens de légalité interne présentés par M. A... Floc'h étant écartés, ses conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

9. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par les parties sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1801923 du 17 septembre 2020 du tribunal administratif de Rennes et la décision du 19 décembre 2016 du directeur du centre ministériel de gestion de Rennes sont annulés.

Article 2 : Le surplus des conclusions de M. A... Floc'h est rejeté.

Article 3 : Les conclusions présentées par la ministre des armées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... Floc'h et à la ministre des armées.

Délibéré après l'audience du 17 septembre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Coiffet, président assesseur,

- Mme Malingue, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 octobre 2021.

La rapporteure,

F. MALINGUELe président,

O. GASPON

La greffière,

P. CHAVEROUX

La République mande et ordonne à la ministre des armées en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

1

N° 20NT03563 2

1


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT03563
Date de la décision : 05/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: Mme Fanny MALINGUE
Rapporteur public ?: M. LEMOINE
Avocat(s) : QUANTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 12/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-10-05;20nt03563 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award