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08/03/2022 | FRANCE | N°21NT02230

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 08 mars 2022, 21NT02230


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... G... C... épouse MOSENGO et M. D... MOSENGO J... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 12 novembre 2020 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté leur recours formé contre la décision du 10 mars 2020 des autorités consulaires françaises à Kinshasa refusant de délivrer un visa de long séjour à S... MOSENGO en qualité d'enfant étranger de ressortissant français.

par un jugement n° 2010748

du 18 juin 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Procédur...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... G... C... épouse MOSENGO et M. D... MOSENGO J... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 12 novembre 2020 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté leur recours formé contre la décision du 10 mars 2020 des autorités consulaires françaises à Kinshasa refusant de délivrer un visa de long séjour à S... MOSENGO en qualité d'enfant étranger de ressortissant français.

par un jugement n° 2010748 du 18 juin 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

par une requête et un mémoire enregistrés les 3 août 2021 et 16 février 2022 (ce dernier non communiqué), Mme B... G... C... épouse MOSENGO et M. D... MOSENGO J..., représentés par Me Touglo, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 18 juin 2021 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de délivrer le visa sollicité dans un délai de vingt jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le lien de filiation est établi par les actes d'état civil produits qui sont authentiques et par la possession d'état ;

- la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

par un mémoire en défense enregistré le 9 février 2022, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Buffet,

- et les observations de Me Bertaux, substituant Me Touglo, pour Mme G... C... épouse MOSENGO et M. MOSENGO J....

Considérant ce qui suit :

1. par un jugement du 18 juin 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de Mme B... G... C... épouse MOSENGO et de M. D... MOSENGO J... tendant à l'annulation de la décision du 12 novembre 2020 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision du 10 mars 2020 des autorités consulaires françaises à Kinshasa refusant de délivrer un visa de long séjour à S... MOSENGO en qualité d'enfant étranger de ressortissant français. Mme G... C... épouse MOSENGO et M. MOSENGO J... relèvent appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 111-6, alors en vigueur, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil (...) ". Aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties.

3. Pour refuser de délivrer le visa de long séjour à S... MOSENGO, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est fondée sur le motif tiré de ce que l'identité de l'intéressé et, partant, son lien de filiation allégué avec M. MOSENGO J... n'étaient pas établis ni par l'acte d'état civil produit, ni par des éléments de la possession d'état.

4. Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties.

5. Il n'appartient pas aux autorités administratives françaises de mettre en doute le bien-fondé d'une décision rendue par une autorité juridictionnelle étrangère, hormis le cas où le jugement produit aurait un caractère frauduleux.

6. Pour justifier du lien de filiation, les requérants ont produit la copie intégrale, établie par le service d'état civil de la commune de Bandalungwa, de l'acte de naissance d'S... MOSENGO, acte aux termes duquel Mme G... L... a déclaré, le 24 juin 2013, la naissance, le 5 juin précédent, de cet enfant et le nom de son père M. MOSENGO J..., alors ressortissant congolais résidant 6, rue du Conseil National de la Résistance à Fleury-Merogis.

7. Si le ministre soutient que l'enfant est né de l'union libre de Mme G... L... et de M. MOSENGO J... et qu'en l'absence de déclaration de reconnaissance de paternité, M. MOSENGO J... ne peut être regardé, en application du code de la famille congolais, comme le père, les intéressés ont produit un jugement supplétif du 21 septembre 2016 du tribunal pour enfants de Kinshasa établissant la filiation d'S... MOSENGO et précisant que M. MOSENGO J... est son père. Ce jugement supplétif n'a été contesté ni devant le tribunal administratif ni devant la cour. En outre, il ressort des pièces du dossier que M. MOSENGO J... a déclaré reconnaitre cet enfant auprès de la mairie de Fleury-Merogis le 5 janvier 2015, soit un an avant de présenter une demande de visa pour son fils. par suite, et alors même que qu'il n'a, le 1er octobre 2013, dans sa demande d'acquisition de la nationalité française, mentionné que les enfants nés de son mariage avec l'épouse dont il n'était pas alors séparé, le lien de filiation avec S... MOSENGO doit être tenu pour établi par ce jugement supplétif. par suite, en confirmant le refus de visa opposé aux requérants au motif que le lien de filiation allégué à l'appui de la demande n'était pas établi, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a fait une inexacte application des dispositions précitées.

8. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme C... épouse MOSENGO et M. MOSENGO J... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

9. L'exécution du présent arrêt implique nécessairement qu'un visa de long séjour soit délivré à S... MOSENGO. Il y a lieu d'enjoindre au ministre de l'intérieur de délivrer un tel visa dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme G... C... épouse MOSENGO et à M. MOSENGO J... d'une somme globale de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 18 juin 2021 du tribunal administratif de Nantes est annulé.

Article 2 : La décision du 12 novembre 2020 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté la demande de visa d'entrée et de long séjour en France présentée pour à l'enfant S... MOSENGO est annulée.

Article 3 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer à l'enfant S... MOSENGO un visa d'entrée et de long séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à Mme G... C... épouse MOSENGO et à M. MOSENGO J... une somme globale de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... G... C... épouse MOSENGO, à M. D... MOSENGO J... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 21 février 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Buffet, présidente de la formation de jugement,

- M. Frank, premier conseiller,

- Mme Ody, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 mars 2022.

La présidente rapporteure,

C. BUFFETL'assesseur le plus ancien,

A. FRANK

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21NT02230


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT02230
Date de la décision : 08/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BUFFET
Rapporteur ?: Mme Catherine BUFFET
Rapporteur public ?: M. MAS
Avocat(s) : SELARL AEQUAE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-03-08;21nt02230 ?
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