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23/05/2023 | FRANCE | N°22NT03156

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 23 mai 2023, 22NT03156


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes, tout d'abord, d'annuler les arrêtés du 28 août 2022 du préfet de Maine-et-Loire décidant son transfert aux autorités allemandes et l'assignant à résidence pour une durée de quarante-cinq jours, ensuite, d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire, de lui délivrer un récépissé en qualité de demandeur d'asile dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou,

défaut, de prendre une nouvelle décision sur sa demande d'admission au séjour, s...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes, tout d'abord, d'annuler les arrêtés du 28 août 2022 du préfet de Maine-et-Loire décidant son transfert aux autorités allemandes et l'assignant à résidence pour une durée de quarante-cinq jours, ensuite, d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire, de lui délivrer un récépissé en qualité de demandeur d'asile dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de prendre une nouvelle décision sur sa demande d'admission au séjour, selon les mêmes modalités, enfin de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 800 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve pour ledit conseil de renoncer à la part contributive de l'Etat versée au titre de l'aide juridictionnelle.

Par un jugement n° 2211355 du 6 septembre 2022, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistré le 29 septembre 2022, M. C..., représenté par Me Kaddouri, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 6 septembre 2022 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler les arrêtés du 28 août 2022 du préfet de Maine-et-Loire décidant son transfert aux autorités allemandes et l'assignant à résidence pour une durée de quarante-cinq jours ;

3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire, de lui délivrer un récépissé en qualité de demandeur d'asile dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de prendre une nouvelle décision sur sa demande d'admission au séjour, selon les mêmes modalités ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1800 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

S'agissant de l'arrêté de transfert :

- l'arrêté de transfert est entaché d'une insuffisance de motivation ;

- l'arrêté de transfert est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article 17 du règlement n° 604/2013 compte tenu de sa situation de particulière vulnérabilité du fait de son état de santé ; il souffre d'un asthme sévère pour lequel il bénéficie d'un suivi médical en France ; il est également suivi en chirurgie digestive ; il dispose, par ailleurs, d'attaches familiales en France ;

S'agissant de l'arrêté d'assignation à résidence :

- cet arrêté est insuffisamment motivé ;

- cet arrêté est illégal du fait de l'illégalité de l'arrêté de transfert ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 janvier 2023, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 décembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant éthiopien, né le 7 décembre 1963 à Ataye (Ethiopie) est entré régulièrement en France le 24 mai 2022, sous couvert d'un visa de court séjour de 8 jours de type C délivré le 12 avril 2022 par le poste consulaire d'Allemagne à Addis-Abeba. Sa demande d'asile a été enregistrée le 21 juin 2022 par les services de la préfecture de Maine-et-Loire. La consultation du système Visabio a révélé que l'intéressé était en possession d'un visa périmé depuis moins de six mois délivré par les autorités allemandes. Consécutivement à leur saisine le 1er juillet 2022, ces autorités ont, le 5 juillet 2022, expressément accepté de reprendre en charge l'intéressé sur le fondement de l'article 12, paragraphe 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013. Par deux arrêtés du 27 juillet 2022, le préfet de Maine-et-Loire a ordonné le transfert de M. C... aux autorités allemandes et l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. M. C... a sollicité auprès du tribunal administratif de Nantes l'annulation de ces deux arrêtés. Il relève appel du jugement du 6 septembre 2022 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur l'arrêté de transfert :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 17 du même règlement : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...)". La faculté laissée aux autorités françaises, par les dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le règlement précité, est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile. Ces dispositions doivent être appliquées dans le respect des droits garantis par la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

3. M. C... invoque le bénéfice de ces dispositions au regard de son état de santé et soutient qu'il souffre d'un asthme sévère pour lequel il bénéficie d'une prise en charge médicale en France et ajoute qu'il y est également suivi en chirurgie digestive pour des troubles gastriques. Toutefois, les éléments d'ordre médical versés aux débats ne permettent pas davantage en appel qu'en première instance de démontrer à eux seuls que son état de santé le placerait dans une situation de vulnérabilité imposant d'instruire sa demande d'asile en France alors que les structures sanitaires en Allemagne permettent d'apporter la prise en charge médicale et médicamenteuse que son état de santé requiert. Par ailleurs la circonstance que son frère et sa sœur résident régulièrement en France sous couvert de cartes de résident ne révèlent pas non plus l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance par l'arrêté de transfert contesté des dispositions de l'article 17 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté.

4. Pour le surplus, M. C... se borne à reprendre devant le juge d'appel le même moyen que celui invoqué en première instance sans plus de précisions ou de justifications et sans l'assortir d'éléments nouveaux. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par le premier juge et tirés de ce que l'arrêté du 27 juillet 2022 décidant son transfert aux autorités allemandes n'est pas entaché d'une insuffisance de motivation.

Sur l'arrêté d'assignation à résidence :

5. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 4 que M. C... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision de transfert aux autorités allemandes contre l'arrêté l'assignant à résidence.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : (...) 1° bis Fait l'objet d'une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 ou d'une requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ; (...) ".

7. La décision portant assignation à résidence de M. C... vise l'article L.561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il est fait application, ainsi que l'arrêté du 27 juillet 2022 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé son transfert aux autorités allemandes et expose les conditions actuelles de sa présence sur le territoire français. Il fait notamment état de la nécessité de s'assurer de sa disponibilité pour la mise en œuvre du transfert vers l'Etat membre requis dont il fait l'objet et indique que la perspective raisonnable d'éloignement résulte de l'accord de l'Allemagne du 5 juillet 2022 et que la durée maximale de quarante-cinq jours est nécessaire pour organiser le transfert compte tenu des exigences en la matière. La décision contestée est ainsi suffisamment motivée en droit comme en fait.

8. En troisième lieu, et pour le surplus, M. C... se borne à reprendre devant le juge d'appel le même moyen que celui invoqué en première instance sans plus de précisions ou de justifications et sans l'assortir d'éléments nouveaux. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par le premier juge et tirés de ce que l'arrêté du 27 juillet 2022 décidant son assignation à résidence n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

9. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté ses conclusions dirigées contre les arrêtés du 27 juillet 2022 du préfet de Maine-et-Loire décidant de le transférer aux autorités espagnoles et l'assignant à résidence.

Sur les frais d'instance :

10. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que doivent être rejetées les conclusions du requérant aux fins d'injonction et celles tendant au bénéfice des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur et des Outre-mer.

Une copie en sera adressée, pour information, au préfet de Maine-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 5 mai 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- Mme Gélard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mai 2023.

Le rapporteur,

O. A...Le président,

O. GASPON

La greffière,

I. PETTON

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des Outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT03156
Date de la décision : 23/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: M. Olivier COIFFET
Rapporteur public ?: Mme MALINGUE
Avocat(s) : KADDOURI

Origine de la décision
Date de l'import : 28/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-05-23;22nt03156 ?
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