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07/03/2006 | FRANCE | N°05PA04286

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, Juge des reconduites a la frontiere, 07 mars 2006, 05PA04286


Vu la requête, enregistrée le 4 novembre 2005, présentée pour M. Ali X, élisant domicile ..., par Me Gassoch ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0513993/8 en date du 6 octobre 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 18 août 2005 décidant sa reconduite à la frontière, à l'injonction au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement sous astreinte d

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Vu la requête, enregistrée le 4 novembre 2005, présentée pour M. Ali X, élisant domicile ..., par Me Gassoch ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0513993/8 en date du 6 octobre 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 18 août 2005 décidant sa reconduite à la frontière, à l'injonction au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement sous astreinte de 100 euros par jour de retard et à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 1500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour vie privée et familiale sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3.000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et aux dépens ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale sur les droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du 2 janvier 2006 par laquelle le président de la Cour a délégué les pouvoirs qui lui sont attribués par l'article R. 222-33 du code de justice administrative à Mme Vettraino ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience :

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 février 2006 :

- le rapport de Mme Vettraino, magistrat délégué,

- les conclusions de Mme Giraudon, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « l'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité tunisienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 4 mai 2005, de la décision du préfet de police du même jour lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

Sur la légalité externe de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant que si M. X soutient que l'arrêté de reconduite à la frontière pris à son encontre par le préfet de police était entaché d'illégalité en ce qu'il ne visait pas l'accord franco tunisien du 17 mars 1988 modifié qui lui est applicable et en ce qu'il n'est pas sérieusement motivé , il ressort des pièces du dossier que ces moyens procèdent d'une cause juridique nouvelle invoquée pour la première fois en appel et qu'il sont par suite irrecevables ;

Sur la légalité interne de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant en premier lieu qu'aux termes de l'article 7 ter d de l'accord franco-tunisien susvisé : « Reçoivent de plein droit un titre de séjour renouvelable valable un an et donnant droit à l'exercice d'une activité professionnelle dans les conditions fixées à l'article 7 : les ressortissants tunisiens qui justifient par tous moyens résider habituellement en France depuis plus de dix ans , le séjour en qualité d'étudiant n'étant pas pris en compte dans la limite de cinq ans ; (…) » ;

Considérant que si M. X soutient qu'il ne pouvait faire l'objet d'une mesure de reconduite en ce qu'il doit bénéficier de plein droit d'un titre de séjour eu égard à l'ancienneté de sa résidence en France, il ressort toutefois des pièces du dossier que la mesure de reconduite à la frontière a été prise à son encontre le 18 août 2005 et qu'il a déclaré être entré en France le 18 décembre 1995 ; que, par suite, il ne pouvait bénéficier de plein droit d'un titre de séjour à cette date faute de justifier de dix années de résidence sur le territoire ; que, dès lors, le préfet de police n'a ni commis d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ni méconnu les stipulations de l'article 7 ter d précité ;

Considérant en deuxième lieu que l'article L.313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien susvisé disposent que le titre de séjour « vie privée et familiale » est délivré de plein droit à l'étranger dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, et qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » ;

Considérant que si M. X fait valoir qu'il réside en France depuis près de dix ans, qu'il est marié et père de trois enfants, que l'ensemble de sa famille réside sur le territoire français, que deux de ses enfants sont nés en France et deux y sont scolarisés et qu'il bénéficie d'une promesse d'embauche, il ressort toutefois des pièces du dossier que son épouse est une compatriote qui est elle-même en situation irrégulière et que lui-même ne fait état d'aucun élément de nature à faire obstacle à un retour de sa famille dans son pays d'origine ; que, de plus, M. X est entré en France à l'âge de trente ans et n'est pas dépourvu d'attaches familiales en Tunisie où résident ses parents et l'ensemble de sa fratrie ; qu'il suit de là que le préfet de police en prenant à son encontre l'arrêté de reconduite à la frontière attaqué n'a méconnu ni les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite le moyen tiré de l'atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale doit être écarté ;

Considérant en troisième lieu qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990, publiée par décret du 8 octobre 1990 : « Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale » ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

Considérant que la circonstance que deux des enfants de M. X sont scolarisés en France et que deux d'entre eux y sont nés ne suffit pas à établir que l'intérêt supérieur des enfants n'ait pas été pris en compte dans la décision du 18 août 2005 ordonnant la reconduite à la frontière de l'intéressé ; qu'il suit de là que le moyen tiré de la violation de l'article 3-1 de la convention des droits de l'enfant sus-visée doit être écarté ;

Considérant enfin que M. X ne peut en tout état de cause se prévaloir des dispositions de la circulaire du ministre de l'intérieur du 31 novembre 2005, qui est dépourvue de valeur réglementaire ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 août 1995 par lequel le préfet de police a décidé sa reconduite à la frontière ;

Sur les conclusions à fin de régularisation de la situation administrative de l'intéressée :

Considérant que la présente décision qui rejette la requête de M. X n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de délivrer à M. X un titre de séjour doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. X demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

N° 05PA04286 5


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : Juge des reconduites a la frontiere
Numéro d'arrêt : 05PA04286
Date de la décision : 07/03/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Marion VETTRAINO
Rapporteur public ?: Mme GIRAUDON
Avocat(s) : GASSOCH

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2006-03-07;05pa04286 ?
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