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27/03/2006 | FRANCE | N°01PA00944

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3eme chambre - formation b, 27 mars 2006, 01PA00944


Vu la requête, enregistrée le 12 mars 2001, présentée par la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE L'INDRE dont le siège est 8 rue Jacques Sadron à Châteauroux (36026) ; la Caisse demande à la Cour :

1°) d'admettre son intervention devant la Cour pour le jugement n° 9713251/6 du Tribunal administratif de Paris en date du 19 décembre 2000 qui a déclaré l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris responsable de la contamination de M. X par le virus de l'hépatite C ;

2°) que l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris soit condamnée à lui verser une somme de 10 499,45 F

(1 600,63 euros ) en remboursement de sa créance ainsi qu'une somme de 3 499,8...

Vu la requête, enregistrée le 12 mars 2001, présentée par la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE L'INDRE dont le siège est 8 rue Jacques Sadron à Châteauroux (36026) ; la Caisse demande à la Cour :

1°) d'admettre son intervention devant la Cour pour le jugement n° 9713251/6 du Tribunal administratif de Paris en date du 19 décembre 2000 qui a déclaré l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris responsable de la contamination de M. X par le virus de l'hépatite C ;

2°) que l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris soit condamnée à lui verser une somme de 10 499,45 F (1 600,63 euros ) en remboursement de sa créance ainsi qu'une somme de 3 499,81 F (533,81 euros) en application de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ;

……………………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 98 -535 du 1er juillet 1998 ;

Vu la convention du 29 décembre 1999 ;

Vu le code de la sécurité sociale et notamment son article L. 376-1 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mars 2006 :

- le rapport de M. Didierjean, rapporteur,

- les observations de Me Guiheux pour la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE L'INDRE, celles de Me Tordjman pour M. Alain X, celles de Me Tsoudéros pour l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris, ainsi que celles de Me Perinetti pour l'Etablissement français du sang,

- et les conclusions de Mme Helmlinger, commissaire du gouvernement ;

Sur les fins de non recevoir opposées à la requête de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE L'INDRE et aux conclusions incidentes de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris :

Considérant en premier lieu que par ordonnance en date du 3 avril 2001 le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la Cour le jugement de la requête présentée le 12 mars 2001 au tribunal administratif par la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE L'INDRE qui fait appel du jugement n° 9713251/6 du 19 décembre 2000 du Tribunal administratif de Paris ; que cette requête d'appel de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE, qui a été présentée au greffe du tribunal administratif avant l'expiration des délais d'appel, comportait l'exposé de conclusions et de moyens ; qu'en même temps que la requête enregistrée au greffe de la Cour le 12 mars 2001, elle a été régularisée par la constitution d'un avocat ;

Considérant en second lieu qu'il résulte de l'instruction que la caisse requérante apporte la preuve suffisante, en produisant notamment le bordereau postal de relevé des plis recommandés reçus par le tribunal administratif le 15 février 1999, de la réception par le greffe du tribunal administratif de son mémoire en date du 10 février 1999 qui comportait une évaluation chiffrée de la créance dont elle revendique le paiement ; que si ce mémoire a été reçu moins de trois jours francs avant l'audience du 16 février 1999, alors que l'instruction était close, le jugement en date du 2 mars 1999 du tribunal administratif ordonnant une expertise médicale a eu pour effet, en application de l'article R. 613-4 2ème alinéa du code de justice administrative, de réouvrir l'instruction, en incorporant dans le dossier les conclusions dudit mémoire, qui étaient dès lors recevables ; qu'aucune exception d'irrecevabilité ne peut à ce titre être opposée à l'appel de la Caisse requérante fondé sur les dispositions de l'article L. 376-1 du code de sécurité sociale ;

Considérant en troisième lieu qu'aux termes de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale : « Lorsque, sans entrer dans les cas régis par les dispositions législatives applicables aux accidents du travail, la lésion dont l'assuré social ou son ayant droit est atteint est imputable à un tiers, l'assuré ou ses ayants droit conserve contre l'auteur de l'accident le droit de demander la réparation du préjudice causé conformément aux règles du droit commun, dans la mesure où ce préjudice n'est pas réparé par application du présent livre. / (...) Si la responsabilité du tiers est entière ou si elle est partagée avec la victime, la caisse est admise à poursuivre le remboursement des prestations mises à sa charge à due concurrence de la part d'indemnité mise à la charge du tiers qui répare l'atteinte à l'intégrité physique de la victime, à l'exclusion de la part d'indemnité, de caractère personnel, correspondant aux souffrances physiques ou morales par elle endurées et au préjudice esthétique et d'agrément.... » ;

Considérant que la requête par laquelle la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE L'INDRE, si elle invoque à cet effet des causes juridiques distinctes, présente des conclusions uniques tendant au remboursement des prestations qu'elle a servies du fait de la contamination de M. X par le virus de l'hépatite C et n'est, en conséquence, pas divisible ; que la requête étant recevable en tant qu'elle demande le remboursement de ses prestations sur le fondement de l'article L. 376-1 du code de sécurité sociale, l'exception tirée par l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris de l'irrecevabilité, pour défaut de demande préalable, des conclusions tendant à la réparation du préjudice de la caisse en conséquence de la faute retenue par le tribunal administratif doit être par suite écartée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'aucune fin de non recevoir n'est valablement opposée aux conclusions de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE L'INDRE ; qu'il en résulte que les conclusions incidentes présentées par l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris sont également recevables ;

Sur la responsabilité :

Considérant qu'il résulte des pièces du dossier et notamment du rapport d'expertise en date du 22 novembre 1999 que M. X, à la suite d'une fracture du tibia, a été hospitalisé dans le service de réanimation du groupe hospitalier Bichat-Claude Bernard entre le 31 janvier et le 17 février 1980 où il a subi le 31 janvier 1980 une transfusion de produits sanguins ; que si la possibilité d'une contamination nosocomiale ne peut être écartée, la cause la plus vraisemblable de sa contamination par le virus de l'hépatite C est l'administration d'un flacon de P.P.S.B. le 31 janvier 1980 ; que par suite le lien de causalité entre l'administration de ces produits et la maladie dont est atteint M. X doit être regardé comme établi ;

Considérant qu'en vertu de la loi du 21 janvier 1952, modifiée par la loi du 2 août 1961, les centres de transfusion sanguine ont le monopole des opérations de contrôle médical des prélèvements sanguins, du traitement, du conditionnement et de la fourniture aux utilisateurs des produits sanguins ; qu'eu égard tant à la mission qui leur est ainsi confiée par la loi qu'aux risques que présente la fourniture de produits sanguins, les centres de transfusion sont responsables, même en l'absence de faute, des conséquences dommageables de la mauvaise qualité des produits fournis ; que le préjudice résultant pour un malade de sa contamination par des produits sanguins transfusés est imputable à la personne morale publique ou privée dont relève le centre de transfusion sanguine qui a élaboré les produits utilisés ; que toutefois, lorsque, pour quelque motif que ce soit, il n'est pas possible d'identifier le centre de transfusion sanguine qui a élaboré un produit à l'origine d'une contamination virale, la responsabilité de la personne morale dont relève le centre de transfusion sanguine qui a fourni ce produit est engagée, en l'absence même de faute, envers la victime de la contamination ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que du fait de l'incapacité dans laquelle s'est trouvée l'administration hospitalière de produire les documents retraçant l'activité du poste de transfusions de l'hôpital Claude-Bernard, avant sa fermeture survenue en 1988, l'identification du centre ayant préparé les produits sanguins administrés à la victime est devenue impossible ; que s'il résulte des dispositions de l'article 1er du décret du 15 novembre 1972 susvisé fixant la liste des produits sanguins d'origine humaine à usage thérapeutique et de l'article 4 de l'arrêté susvisé du 2 octobre 1973 qu'aucun centre de transfusion relevant de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris ne figurait sur la liste des centres autorisés à préparer des fractions P.P.S.B et que le centre de transfusions de l'hôpital Paul Bernard n'a pu ni préparer le lot de P.P.S.B administré à la victime, ni vérifier son innocuité, mais s'est borné à prescrire la transfusion de ce produit sanguin, il résulte néanmoins de ce qui a été dit ci-dessus qu'en raison même de l'impossibilité d'identifier le centre ayant préparé le produit défectueux, la responsabilité de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris, personne morale dont le centre de transfusion sanguine ayant fourni le produit dépendait, était engagée ; que par suite l'Etablissement français du sang, à qui les droits et obligations liés aux activités de transfusion sanguine de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris ont été transférés en application des dispositions combinées de l'article 18 de la loi du 1er juillet 1998 susvisée et de la convention conclue entre ces deux établissements publics à cette fin le 29 décembre 1999, doit être tenu pour responsable des conséquences dommageables de la contamination de M. X par le virus de l'hépatite C ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le tribunal administratif a commis une erreur de droit en rejetant les conclusions tendant à ce que la responsabilité sans faute de l'Etablissement français du sang soit engagée ; que le jugement attaqué doit en conséquence être annulé ;

Mais considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les conclusions présentées par M. X devant le tribunal administratif et devant la Cour ;

Sur le préjudice :

En ce qui concerne les conclusions présentées par M. X :

Considérant que M. X ne conteste pas le montant de l'indemnité allouée par le tribunal administratif en réparation de l'ensemble de ses préjudices, dont il ne résulte pas de l'instruction que le tribunal a fait une évaluation exagérée en fixant son montant à 15 244,90 euros ; qu'il y a lieu de condamner l'Etablissement français du sang à lui verser cette somme avec intérêts de droit à compter du 11 février 1997, date de réception de la demande préalable d'indemnisation de la victime ;

En ce qui concerne les conclusions présentées par la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE L'INDRE :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale : « Lorsque, sans entrer dans les cas régis par les dispositions législatives applicables aux accidents du travail, la lésion dont l'assuré social ou son ayant droit est atteint est imputable à un tiers, l'assuré ou ses ayants droit conserve contre l'auteur de l'accident le droit de demander la réparation du préjudice causé conformément aux règles du droit commun, dans la mesure où ce préjudice n'est pas réparé par application du présent livre. / (...) Si la responsabilité du tiers est entière ou si elle est partagée avec la victime, la caisse est admise à poursuivre le remboursement des prestations mises à sa charge à due concurrence de la part d'indemnité mise à la charge du tiers qui répare l'atteinte à l'intégrité physique de la victime, à l'exclusion de la part d'indemnité, de caractère personnel, correspondant aux souffrances physiques ou morales par elle endurées et au préjudice esthétique et d'agrément » ;

Considérant que la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE L'INDRE justifie de débours directement liés à la contamination litigieuse pour un montant de 1 600, 64 euros ; qu'elle est fondée à demander en outre le versement de l'indemnité forfaitaire de 533,54 euros prévue par l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ; qu'il y a lieu en conséquence de condamner l'Etablissement français du sang à lui verser une somme de 2 134,18 euros ; que par contre la caisse n'ayant pas demandé le versement d'intérêts n'est pas fondée à en demander la capitalisation ; que ses conclusions sur ce point doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à verser à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE L'INDRE la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que de même, la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE L'INDRE n'étant pas dans la présente instance la partie perdante, ne peut être condamnée à verser respectivement à l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris, l'Etablissement français du sang, et M. X les sommes qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1 : Le jugement du Tribunal administratif de Paris en date du 19 décembre 2000 est annulé.

Article 2 : L'Etablissement français du sang est condamné à verser à M. X la somme de 15 244,90 euros avec intérêts de droit à compter du 11 février 1997.

Article 3 : L'Etablissement français du sang est condamné à verser à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE L'INDRE la somme de 2 134,18 euros.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE L'INDRE, de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris et de M. X, ainsi que les conclusions de l'Etablissement français du sang sont rejetés.

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N° 01PA00944


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3eme chambre - formation b
Numéro d'arrêt : 01PA00944
Date de la décision : 27/03/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. FOURNIER DE LAURIERE
Rapporteur ?: M. Philippe DIDIERJEAN
Rapporteur public ?: Mme HELMLINGER
Avocat(s) : SCP GATINEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2006-03-27;01pa00944 ?
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