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09/08/2006 | FRANCE | N°06PA00468

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, Juge des reconduites a la frontiere, 09 août 2006, 06PA00468


Vu la requête, enregistrée le 7 février 2006, présentée par le PRÉFET DE POLICE ; le PRÉFET DE POLICE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0413098 du 7 décembre 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 27 mai 2005 décidant la reconduite à la frontière de M. Haider X ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Paris ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié ;

Vu l'arrêté du 8 ...

Vu la requête, enregistrée le 7 février 2006, présentée par le PRÉFET DE POLICE ; le PRÉFET DE POLICE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0413098 du 7 décembre 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 27 mai 2005 décidant la reconduite à la frontière de M. Haider X ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Paris ;

……………………………………………………………………………………………………..

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié ;

Vu l'arrêté du 8 juillet 1999 relatif aux conditions d'établissement des avis médicaux concernant les étrangers malades ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du 2 janvier 2006 par laquelle le président de la cour a délégué les pouvoirs qui lui sont attribués par les articles L. 776-1 et R.222-3 du code de justice administrative à M. Beaufaÿs ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 juillet 2006 :

- le rapport de M. Beaufaÿs, magistrat délégué,

- les observations de Me Le Goff, pour M. X,

- et les conclusions de M. Adrot, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité bangladaise, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 14 avril 2004, de la décision du PRÉFET DE POLICE du même jour lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que des autorisations provisoires de séjour, après avis du médecin-chef justifiant le séjour une première fois pour trois mois en date du 15 juillet 2002, une deuxième fois pour douze mois en date du 20 novembre 2002, puis une troisième fois pour trois mois en date du 20 octobre 2003, ont été accordées à M. X sur le fondement de l'article 12 bis 11° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ; que ces autorisations provisoires de séjour étaient fondées sur des avis du médecin-chef des services de la préfecture indiquant que l'état de santé de M. X nécessitait une prise en charge médicale, que le défaut de prise en charge pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il ne pouvait avoir accès à un traitement approprié dans son pays d'origine ; que sur la base d'un nouvel avis du médecin-chef du service de la préfecture en date du 24 janvier 2004 mentionnant la possibilité pour l'intéressé de bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, le PRÉFET DE POLICE a refusé le renouvellement du titre de séjour de M. X ;

Considérant que, pour prononcer l'annulation de l'arrêté en date du 27 mai 2004 par lequel le PRÉFET DE POLICE a ordonné la reconduite à la frontière de M. X, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a jugé que la décision refusant à celui-ci un titre de séjour était intervenue au terme d'une procédure irrégulière, dès lors que l'avis du médecin-chef ne comportait pas d'indication sur la possibilité pour M. X de voyager sans risque, alors qu'il ressortait de l'avis médical que l'état de santé de l'intéressé pouvait susciter des interrogations sur sa capacité à supporter un voyage ;

Considérant que si M. X soutient que l'avis du médecin-chef des services de la préfecture ne comportait pas d'indication sur la possibilité pour lui de voyager sans risque vers son pays d'origine, il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment des différents certificats médicaux produits par M. X, que son état de santé pouvait susciter des interrogations sur sa capacité à voyager ; que, dès lors, le PRÉFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour annuler son arrêté ordonnant la reconduite de M. X, le magistrat délégué par le président de Tribunal administratif de Paris s'est fondé sur ce que cet avis serait irrégulier faute de comporter une telle mention ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le Tribunal administratif de Paris et devant la cour ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'indépendamment de l'énumération donnée par l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une mesure de reconduite à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que, lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse être l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée sus-visée alors en vigueur : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivré de plein droit : (…) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire. » ; et qu'aux termes de l'article 7-5 introduit dans le décret du 30 juin 1946 par le décret du 5 mai 1999 : « Pour l'application du 11° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 précitée, le préfet délivre la carte de séjour temporaire, au vu de l'avis émis par le médecin inspecteur de santé publique de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé. A Paris, l'avis est émis par le médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Cet avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'intégration, du ministre chargé de la santé et du ministre de l'intérieur (...) » ; que l'arrêté du 8 juillet 1999 pris pour l'application de ces dispositions impose au médecin inspecteur de santé publique de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales d'émettre un avis précisant si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale, si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement médical approprié dans son pays ; qu'il appartient ainsi au médecin inspecteur, tout en respectant le secret médical, de donner au préfet les éléments relatifs à la gravité de la pathologie présentée par l'étranger intéressé et à la nature des traitements qu'il doit suivre, nécessaires pour éclairer sa décision ;

Considérant que l'avis du médecin inspecteur en date du 24 janvier 2004 sur lequel s'est fondé le PRÉFET DE POLICE pour refuser à M. X un renouvellement de son titre de séjour indique que son état de santé nécessite une prise en charge médicale ; que le défaut de prise en charge peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais que l'intéressé pourrait bénéficier d'une prise en charge médicale dans son pays d'origine ; que cet avis, alors qu'il confirme le précédent avis sur les conséquences d'une exceptionnelle gravité d'un défaut de prise en charge, indique, sans plus de précision, et contrairement aux avis précédents, que l'intéressé pourrait bénéficier d'une prise en charge médicale dans son pays d'origine ; qu'un tel avis, qui n'explique pas ses divergences partielles avec les avis précédents, ne peut être regardé comme donnant les éléments nécessaires au PRÉFET DE POLICE pour éclairer sa décision ; qu'au surplus les certificats médicaux produits par M. X, qui est très régulièrement suivi depuis 1999 au centre de soins « associations pour les victimes de la répression en exil », notamment celui en date du 17 mai 2004 indiquant que les traitements appropriés ne peuvent être distribués dans son pays d'origine, ainsi que les certificats postérieurs révélant des circonstances de fait existant à la date de la décision de refus de séjour du 14 avril 2004 attestent, pour celui en date du 13 avril 2004, de dorso-lombalgies chroniques traitées par médicaments antalgiques et kinésithérapie, d'un syndrome anxio-dépressif majeur traité par médicaments psychotropes et psychothérapie de soutien et d'une pathologie gastrite fundique, qui s'est aggravée depuis avril 2004 comme l'attestent les certificats en date du 21 avril 2004 et du 9 novembre 2005, que le certificat en date du 16 novembre 2005 délivré à la demande des services préfectoraux atteste de la nécessité de prolonger son séjour pour raison médicale en ce que, entre autre, les traitements et la surveillance ne peuvent être assurés dans son pays d'origine ; qu'en se fondant sur l'avis précité du 24 janvier 2004, la décision de refus de séjour et par voie de conséquences l'arrêté de reconduite à la frontière ont été pris suivant une procédure irrégulière et sont par suite entachés d'illégalité ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PRÉFET DE POLICE n'est pas fondé à se plaindre de ce que par le jugement du 7 décembre 2005, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 7 décembre 2005 décidant la reconduite à la frontière de M. X ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction présentées par M. X :

Considérant que l'article 2 du jugement attaqué enjoint au PRÉFET DE POLICE de réexaminer la situation de M. X dans le délai d'un mois ; qu'ainsi, les conclusions de M. X, présentées par la voie de l'appel incident, tendant à ce qu'une telle injonction soit prononcée sont dépourvues d'objet et, par suite, irrecevables ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. X et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête du PRÉFET DE POLICE est rejetée.

Article 2 : Les conclusions aux fins d'injonction présentées par M. X devant le cour sont rejetées.

Article 3 : L'Etat versera à M. X la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative.

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N° 06PA00468


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : Juge des reconduites a la frontiere
Numéro d'arrêt : 06PA00468
Date de la décision : 09/08/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Frédéric BEAUFAYS
Rapporteur public ?: M. ADROT
Avocat(s) : TAELMAN

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2006-08-09;06pa00468 ?
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