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18/10/2007 | FRANCE | N°06PA02094

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 18 octobre 2007, 06PA02094


Vu la requête, enregistrée le 9 juin 2006, présentée pour la VILLE DE PARIS, représentée par son maire en exercice, par Me Foussard ; la VILLE DE PARIS demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0504247 en date du 30 mars 2006 par lequel le Tribunal administratif de Paris a, à la demande de la SNC de la Tombe Issoire, annulé la décision du 10 février 2005 par laquelle le maire de Paris a exercé le droit de préemption sur l'ensemble immobilier sis 26-30 rue de la Tombe Issoire et 15-17 villa Saint-Jacques ;

2°) de rejeter la demande de la SNC de la Tombe Iss

oire au tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de la SNC de l...

Vu la requête, enregistrée le 9 juin 2006, présentée pour la VILLE DE PARIS, représentée par son maire en exercice, par Me Foussard ; la VILLE DE PARIS demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0504247 en date du 30 mars 2006 par lequel le Tribunal administratif de Paris a, à la demande de la SNC de la Tombe Issoire, annulé la décision du 10 février 2005 par laquelle le maire de Paris a exercé le droit de préemption sur l'ensemble immobilier sis 26-30 rue de la Tombe Issoire et 15-17 villa Saint-Jacques ;

2°) de rejeter la demande de la SNC de la Tombe Issoire au tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de la SNC de la Tombe Issoire la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 octobre 2007 :

- le rapport de M. Pommier, rapporteur,

- les observations de Me Martel pour la VILLE DE PARIS et de Me Tirard pour la SNC de la Tombe Issoire,

- et les conclusions de M. Bachini, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par lettre du 10 février 2005 le maire de Paris a fait connaître à la SNC de la Tombe Issoire sa décision de préempter les parcelles sises 26-28 et 30 rue de la Tombe Issoire et 15-17 villa Saint-Jacques, dans le quatorzième arrondissement, en vue de réaliser un programme de dix-sept logements sociaux et un équipement public de proximité ; que la VILLE DE PARIS relève appel du jugement du 30 mars 2006 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé cette décision ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que, contrairement à ce que soutient la VILLE DE PARIS, les premiers juges, en relevant que la décision attaquée ne précisait pas la nature de l'équipement public de proximité envisagé et qu'il ressortait des pièces du dossier qu'aucun projet précis d'équipement local de proximité n'existait pour la partie des bâtiments non rénovée en logements sociaux, ont suffisamment motivé leur décision ;

Sur la légalité de la décision attaquée :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme : « Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1, à l'exception de ceux visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. / Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé. (…)./ Lorsque la commune a délibéré pour définir le cadre des actions qu'elle entend mettre en oeuvre pour mener à bien un programme local de l'habitat, la décision de préemption peut, sauf lorsqu'il s'agit d'un bien mentionné à l'article L. 211-4, se référer aux dispositions de cette délibération. (…) » ; qu'aux termes de l'article L. 300-1 du même code : « Les actions ou opérations d'aménagement ont pour objets de mettre en oeuvre un projet urbain, une politique locale de l'habitat, d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs, de lutter contre l'insalubrité, de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels » ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions, d'une part, que les communes ne peuvent décider d'exercer le droit de préemption que si elles justifient de l'existence à la date à laquelle elles exercent ce droit, d'un projet d'action ou d‘opération d'aménagement suffisamment précis et certain et d'autre part, qu'elles doivent définir ce projet de manière précise dans la décision de préemption ;

Considérant, d'une part, que si le maire de Paris pouvait légalement, sur le fondement du troisième alinéa de l'article L. 210-1 précité du code de l'urbanisme, motiver sa décision de préempter les terrains en vue de la construction de logements sociaux, en se référant à la délibération du Conseil de Paris en date des 20 et 21 octobre 2003 arrêtant le programme local d'habitat, lequel prévoit expressément l'exercice du droit de préemption pour la construction de logements sociaux dans le quatorzième arrondissement, cette seule référence ne saurait tenir lieu de motivation de ladite décision en tant qu'elle était relative à un équipement de proximité, dont il ne ressort d'aucune des pièces du dossier qu'il se rattacherait à une opération de logement social ; qu'ainsi cette décision qui ne précise pas la nature du projet d'équipement public en vue duquel est exercé le droit de préemption urbain, ne satisfait pas aux exigences de motivation découlant de l'article L. 210-1 précité du code de l'urbanisme ;

Considérant, d'autre part, que le rapport de la direction du logement et de l'habitat de janvier 2005 se borne à indiquer que les terrains susceptibles d'être préemptés pourraient permettre, outre la construction de dix-sept logements sociaux, la réalisation d'un ou plusieurs équipements de proximité, sans en préciser la consistance et la destination ; qu'ainsi la VILLE DE PARIS, par ce seul document qu'elle produit, ne peut être regardée comme ayant conçu, à la date de la décision de préemption, un projet précis d'équipement public ; que la décision de préemption en date du 10 février 2005 est donc entachée d'illégalité sur ce point ; que compte tenu de la superficie importante affectée à ce projet d'équipement et de ce qu'il ne serait pas implanté sur une parcelle pouvant être dissociée de celles servant d'assiette au projet de logements sociaux, cette illégalité est de nature à entraîner l'annulation de la décision attaquée, qui ne présente pas un caractère divisible ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la VILLE DE PARIS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé la décision du 10 février 2005 de son maire, exerçant le droit de préemption sur les parcelles sises 26-28 et 30 rue de la Tombe Issoire et 15-17 villa Saint-Jacques ;

Sur l'appel incident formé par la SNC de la Tombe-Issoire :

Considérant que l'intérêt à faire appel d'un jugement s'apprécie au regard du seul dispositif et par rapport à ses motifs ; qu'il suit de là que l'appel incident formé par la SNC de la Tombe-Issoire contre le jugement du tribunal administratif du 30 mars 2006 qui a annulé la décision du maire de Paris en date du 10 février 2005 exerçant le droit de préemption sur les terrains dont elle était propriétaire et qui lui a ainsi donné satisfaction n'est pas, quels que soient les motifs de ce jugement, recevable ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions susvisées font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la SNC de la Tombe Issoire, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demande la VILLE DE PARIS au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la VILLE DE PARIS le versement à la SNC de la Tombe Issoire d'une somme de 1 500 euros au même titre ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la VILLE DE PARIS est rejetée.

Article 2 : Les conclusions incidentes présentées par la SNC de la Tombe-Issoire sont rejetées.

Article 3 : La VILLE DE PARIS versera à la SNC de la Tombe Issoire une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 06PA02094


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 06PA02094
Date de la décision : 18/10/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pré SICHLER-GHESTIN
Rapporteur ?: M. Joseph POMMIER
Rapporteur public ?: M. BACHINI
Avocat(s) : TIRARD-ROUXEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2007-10-18;06pa02094 ?
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