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07/04/2008 | FRANCE | N°04PA01022

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8éme chambre, 07 avril 2008, 04PA01022


Vu la requête, enregistrée le 19 mars 2004, présentée pour Mme Christiane X agissant en son nom personnel, et en qualité de curatrice de son fils M. Laurent X, demeurant ..., par Me Nicolella ; Mme X demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 0010337/6 du Tribunal administratif de Paris en date du 20 janvier 2004 en tant qu'il a limité les réparations que l'Assistance publique - hôpitaux de Paris a été condamnée à lui verser au titre du décès de son époux aux sommes de 151 000 euros à titre personnel et 10 000 euros en sa qualité de tuteur de son fil

s Laurent ;

2°) de condamner l'Assistance publique - hôpitaux de ...

Vu la requête, enregistrée le 19 mars 2004, présentée pour Mme Christiane X agissant en son nom personnel, et en qualité de curatrice de son fils M. Laurent X, demeurant ..., par Me Nicolella ; Mme X demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 0010337/6 du Tribunal administratif de Paris en date du 20 janvier 2004 en tant qu'il a limité les réparations que l'Assistance publique - hôpitaux de Paris a été condamnée à lui verser au titre du décès de son époux aux sommes de 151 000 euros à titre personnel et 10 000 euros en sa qualité de tuteur de son fils Laurent ;

2°) de condamner l'Assistance publique - hôpitaux de Paris à lui verser les sommes de 204 000 euros en réparation de son préjudice matériel, 22 800 euros en réparation de son préjudice moral, 38 100 euros en réparation du préjudice moral de son fils Laurent, avec intérêts de droit à compter du dépôt de sa demande préalable ;

3°) de condamner l'Assistance publique - hôpitaux de Paris à lui verser la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mars 2008 :

- le rapport de M. Didierjean, rapporteur,

- les observations de Me Nicolella pour Mme X et celles de Me Tsouderos pour l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris,

- les conclusions de Mme Desticourt, commissaire du gouvernement ;
et connaissance prise de la note en délibéré, présentée le 11 mars 2008 pour
Mme X par M°Nicolella qui souligne, de nouveau, que la jurisprudence de Section « centre hospitalier de Vienne » ne peut être appliquée au préjudice issu de la perte de revenus ou au préjudice moral ;

Considérant que par le jugement litigieux, non contesté sur ce point, le tribunal administratif a déclaré l'Assistance publique - hôpitaux de Paris responsable des conséquences dommageables résultant pour Mme X et son fils Laurent, majeur handicapé, du décès survenu à l'Hôpital Lariboisière de leur époux et père le 30 octobre1995 ; que Mme X demande à la cour de majorer les indemnités qui lui ont été allouées par le tribunal administratif au titre des préjudices subis par elle même et son fils dont elle est tutrice ;

Sur la perte de chance et la fraction indemnisable des préjudices invoqués :

Considérant en premier lieu, que dans le cas où la faute commise lors de la prise en charge ou le traitement d'un patient dans un établissement public hospitalier a compromis des chances d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à son aggravation, les préjudices résultant directement de la faute commise et qui doivent être intégralement réparés ne sont pas les dommages de toute nature constatés, mais la perte de chance d'éviter que ces dommages soient advenus ; que dans cette hypothèse la réparation qui incombe à l'hôpital doit être évaluée à une fraction des divers préjudices allégués résultant des dommages causés par la faute invoquée, déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue ; qu'en l'espèce le tribunal administratif ne s'étant prononcé ni sur cette perte de chance, ni, en conséquence sur la fraction des préjudices invoqués par Mme X susceptibles de faire l'objet d'un indemnisation, il y a lieu pour la cour de procéder à cette détermination ;

Considérant en second lieu qu'il résulte des pièces du dossier et notamment du rapport d'expertise que compte tenu d'un état de défaillance multiviscérale secondaire à une insuffisance cardiaque associée, l'opération de double pontage coronarien que devait subir M. X comportait un risque de décès très important, évalué par l'expert entre 30 et 50% ; que si le décès de M. X est survenu à la suite d'un état septicémique dû à une infection nosocomiale, il a résulté également et de façon indissociable des risques que présentait en elle-même l'intervention eu égard à l'état de santé du patient ; que dans ces circonstances la part des préjudices invoqués résultant de la faute dans l'organisation et le fonctionnement du service révélée par l'infection nosocomiale doit être fixée à 60% ;


Sur le préjudice matériel de Mme X :

Considérant que Mme X soutient que la fraction de son revenu consacrée par son époux à sa famille, compte tenu notamment du handicap de son fils, aurait dû être fixée par les premiers juges, non à 35 % pour elle même et 15% pour son fils, mais à au moins 75 % au total, compte tenu des charges financières spéciales qui ont, du vivant de son époux, pesé sur le foyer du fait du handicap de l'enfant ; qu'il résulte de l'instruction que le tribunal administratif a fait, dans les circonstances de l'espèce, une évaluation insuffisante du préjudice matériel en retenant comme base de calcul un fraction de 50% de son revenu consacrée par le défunt à l'entretien de sa famille qu'il y a lieu de porter cette fraction de revenu à 35 % pour la mère et 30 % pour l'enfant handicapé , soit au total 65% ; que sur cette base, la fraction de revenus consacrée à sa famille par M. X s'élevait à 18 356, 69 euros, dont il y a lieu de déduire, à compter de juin 2000, la pension de réversion annuelle versée à Mme X ; qu'ainsi, compte tenu de la valeur du franc de rente, le préjudice économique subi par Mme X et son fils s'élève à 178 000 euros ; que par suite ,eu égard à la fraction indemnisable du préjudice de 60%, l'Assistance publique - hôpitaux de Paris doit être condamnée à verser à
Mme X au titre du préjudice matériel subi par elle même et son fils, la somme de 106 800 euros ;

Sur le préjudice moral de Mme X :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le tribunal administratif a fait une évaluation insuffisante du préjudice moral subi par Mme X en le fixant, à 15 000 euros ; qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, de le fixer à 22 800 euros ; que par suite ,compte tenu de la fraction indemnisable du préjudice de 60%, l'Assistance publique - hôpitaux de Paris doit être condamnée à lui verser au titre de, son préjudice moral, la somme de 13 680 euros ;

Sur le préjudice moral de M. Laurent X :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le tribunal administratif, a fait une évaluation insuffisante du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existences subis par Laurent X du fait de la privation de la présence et du soutien de son père en évaluant leur montant à 10 000 euros ;qu'il y a lieu dans les circonstances tout à fait particulières de l'espèce, de fixer ce préjudice à 30 000 euros ; que par suite compte tenu de la fraction indemnisable du préjudice de 60%, l'Assistance publique - hôpitaux de Paris doit être condamnée à lui verser à ce titre, la somme de 18 000 euros ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les sommes que le tribunal administratif a condamné l'Assistance publique - hôpitaux de Paris à verser à Mme X doivent être fixées à 120 480 euros à titre personnel et 18 000 euros en sa qualité de tuteur de son fils Laurent, soit au total 138 480 euros ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de Mme X la somme que l'Assistance publique - hôpitaux de Paris demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Assistance publique - hôpitaux de Paris qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, supporte la somme que Mme X demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Les sommes que le tribunal administratif a condamné l'Assistance publique - hôpitaux de Paris à verser à Mme X sont modifiées et fixées à 120 480 euros à titre personnel et 18 000 euros en sa qualité de tuteur de son fils Laurent, soit au total 138 480 euros.

Article 2 : Le jugement attaqué du Tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X et des conclusions de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris est rejeté.

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N° 04PA01022


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8éme chambre
Numéro d'arrêt : 04PA01022
Date de la décision : 07/04/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. ROTH
Rapporteur ?: M. Philippe DIDIERJEAN
Rapporteur public ?: Mme DESTICOURT
Avocat(s) : NICOLLELA

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2008-04-07;04pa01022 ?
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