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17/10/2011 | FRANCE | N°10PA05118

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 17 octobre 2011, 10PA05118


Vu la requête, enregistrée le 22 octobre 2010, présentée pour M. Fodé A, élisant domicile chez B, ..., par Me Delanoe-Daoud ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001388/3-1 du 14 septembre 2010, par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 7 septembre 2009 refusant son admission au séjour au titre de l'asile, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois, et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'ar

rêté du 7 septembre 2009 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivr...

Vu la requête, enregistrée le 22 octobre 2010, présentée pour M. Fodé A, élisant domicile chez B, ..., par Me Delanoe-Daoud ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001388/3-1 du 14 septembre 2010, par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 7 septembre 2009 refusant son admission au séjour au titre de l'asile, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois, et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 7 septembre 2009 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention salarié dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer dans l'intervalle une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du Code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 septembre 2011 :

- le rapport de Mme Larsonnier, rapporteur,

- les conclusions de M. Dewailly, rapporteur public,

- et les observations de Me Delanoe-Daoud, représentant M. A ;

Considérant que M. A, né en 1961, de nationalité mauritanienne, est entré en France selon ses déclarations le 1er mai 2003 ; que sa demande de reconnaissance de la qualité de réfugié a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, par décision du 26 avril 2004, rejet confirmé par la Cour nationale du droit d'asile le 8 juillet 2008 ; que sa demande de réexamen de sa situation au titre de l'asile a également fait l'objet d'un rejet de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 21 novembre 2008, confirmé par la Cour nationale du droit d'asile le 28 mai 2009 ; que, par arrêté en date du

7 septembre 2009, le préfet de police a refusé son admission au séjour au titre de l'asile, l'a obligé à quitter le territoire et a fixé le pays de destination ; que l'intéressé fait appel du jugement en date du 14 septembre 2010, par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation dudit arrêté ;

Sur le jugement attaqué :

Considérant que M. A soutient que le Tribunal administratif de Paris n'a pas répondu au moyen soulevé dans la requête introductive d'instance tiré de l'absence de motivation de la décision fixant le pays de renvoi ; qu'il ressort toutefois de la lecture du jugement attaqué que le tribunal a estimé que la décision attaquée précise que M. A n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ou dans son pays de résidence habituelle où il est effectivement admissible et que, par suite, M. A, n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de renvoi est insuffisamment motivée ; qu'il a ainsi été répondu au moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision fixant le pays de destination : qu'il y a lieu, en conséquence, d'écarter le moyen tiré d'une omission à statuer ;

Considérant que M. A soutient que les premiers juges ont commis une erreur de droit en considérant que le préfet de police avait refusé de lui délivrer un titre de séjour alors qu'il a refusé son admission au séjour et que ces deux décisions de nature distincte, avec des conséquences juridiques différentes, régies par des dispositions différentes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne peuvent être confondues ; que, toutefois, un refus d'admission au séjour implique nécessairement et implicitement un refus de titre de séjour au titre du droit d'asile ; que, par suite, ce moyen sera écarté ;

Sur la légalité de l'arrêté du préfet de police :

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 742-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre, doit quitter le territoire français, sous peine de faire l'objet d'une mesure d'éloignement prévue au titre Ier du livre V et, le cas échéant, des pénalités prévues au chapitre Ier du titre II du livre VI. ; qu'aux termes de l'article L. 511-1du même code dans sa rédaction alors en vigueur : I.-L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa. L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation. ;

Considérant que si M. A soutient que la décision de refus d'admission au séjour n'étant pas une décision de refus de titre de séjour, elle ne peut servir de fondement légal à une décision portant obligation de quitter le territoire français, il résulte toutefois des dispositions précitées qu'un refus d'admission au séjour peut servir de base légale à une obligation de quitter le territoire ; que, par suite, le préfet de police n'a commis aucune erreur de droit en assortissant sa décision de refus d'admission au séjour au titre de l'asile d'une obligation de quitter le territoire français ;

Considérant que M. A fait valoir que la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée dès lors que l'arrêté ne comporte pas de décision explicite de refus ou de non-renouvellement du titre de séjour elle-même motivée ; que, d'une part, la décision de refus d'admission au séjour au titre de l'asile prise par le préfet de police le

7 septembre 2009, qui peut comme il a été dit servir de fondement légal à une obligation de quitter le territoire français, comporte l'indication des motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement, et est, par suite, suffisamment motivée ; que, d'autre part, il résulte des dispositions précitées de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi du 20 novembre 2007, applicable en l'espèce, que l'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation ; que, par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui.

Considérant que M. A soutient qu'il vit et travaille en France depuis 2003, qu'il est bien intégré socialement et professionnellement, qu'il est dépourvu d'attaches familiales en Mauritanie, pays qu'il a quitté il y a vingt ans, que sa mère et l'un de ses enfants vivent au Sénégal, que son épouse et deux de leurs trois enfants sont décédés mais qu'il ne peut obtenir les actes de décès ou autres pièces justificatives en raison de la situation très complexe en Mauritanie ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. A est célibataire, sans charge de famille sur le territoire français, où il serait entré selon déclarations en 2003, à l'âge de 42 ans ; qu'il n'établit pas être dépourvu de toutes attaches familiales dans son pays d'origine ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, eu égard à la durée et aux conditions de séjour en France de M. A, la décision attaquée n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, le préfet de police n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le préfet de police a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle et familiale de M. A, même si celui-ci occupe un emploi et est bien intégré à la société française ;

Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

Considérant que si M. A fait valoir que la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée en ce qu'elle ne fait aucune référence aux risques qu'il encourrait en cas de retour dans son pays d'origine, il ressort des pièces du dossier que la décision énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde; qu'elle indique que l'intéressé n'établit pas être exposé à des peines ou des traitements contraire à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ; que par suite, la décision fixant le pays de renvoi est suffisamment motivée ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et des termes de la décision attaquée que le préfet de police a procédé à l'examen de la situation de M. A au regard des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ;

Considérant que M. A soutient qu'un retour dans son pays d'origine, où il est persécuté, l'exposerait à des traitements inhumains et dégradants ; qu'en particulier, en raison de son appartenance à l'ethnie des Peuls, il a dû fuir la Mauritanie pour se réfugier dans un premier temps au Sénégal, que la situation de crise est ininterrompue en Mauritanie et que les associations humanitaires dénoncent la précarité des droits de l'homme et l'aggravation, depuis le coup d'Etat du 6 août 2008, du sort des négro-mauritaniens ; que, toutefois, il ne produit aucune justification de nature à établir qu'il se trouverait, en cas de retour dans son pays d'origine, exposé à un risque réel, direct et sérieux pour sa vie ou sa liberté et qu'il ne pourrait bénéficier d'aucune protection de la part des autorités mauritaniennes, alors que sa demande d'asile a été rejetée à deux reprises par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et par la cour nationale du droit d'asile ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

Considérant que, pour les mêmes motifs, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant que M. A ne peut utilement invoquer, à l'appui des conclusions dirigées contre la décision fixant le pays à destination vers lequel il pourrait être éloigné, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que la présente décision, qui rejette les conclusions présentées par

M. A tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 septembre 2009 refusant son admission au séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions ci-dessus analysées doivent être rejetées ;

Sur les conclusions de M. A tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

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N° 10PA05118


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 10PA05118
Date de la décision : 17/10/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FOURNIER DE LAURIERE
Rapporteur ?: Mme Virginie LARSONNIER
Rapporteur public ?: M. DEWAILLY
Avocat(s) : DELANOE-DAOUD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2011-10-17;10pa05118 ?
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